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DE L'ARMÉE

ET

DE TOUS LES RÉGIMENTS

DEPUIS LES PREMIERS TEMPS DE LA MONARCHIE FRANÇAISE JUSQU'A NOS JOURS,

PAR M. ADRIEN PASCAL

l'un des auteurs de l'Histoire des régiments, publiée sous la direction

de feu Mgr le duc d'Orléans,

avec des Tableaux synoptiques représentant l'organisation des armées aux diverses
époques et le résumé des campagnes de chaque corps,

PAR M. BRAHAUT

Colonel d'état-major, chef de la section historique au Ministère de la guerres

LE

SAINTE

GENEL

ET DES TABLEAUX CHRONOLOGIQUES DES COMBATS, SIÉGES ET BATAI. J

PAR M. LE CAPITAINE SICARD

Auteur de l'Histoire des Institutions militaires des Français.

Illustrée par MM. Philippoteaux, E. Charpentier, H. Bellangé, de Moraine, Morel-Fatio, Sorieul, etc.

TOME PREMIER.

ممــ

PARIS

A. BARBIER, ÉDITEUR,

13, RUE DE LA MICHODIÈRE.

1847

uns de ces génies des batailles qu'on s'arrête pour considérer avec étonnément, comme ces statues colossales dont parle l'historiographe de Charles XII.

Sortis en masse des forêts de la Franconie et de la Germanie, les Francs, nos pères, sous la conduite d'un chef militaire, se répandent comme un torrent dans les plaines que féconde le cours du Rhin, armés seulement de bâtons ferrés, presque nus, et ils disputent aux Romains et aux Gaulois la possession de ces plaines fertiles. Bientôt même ils anéantissent les derniers vestiges des armées gallo-romaines, et, sous un jeune chef plus audacieux, ils viennent établir leur camp sur les rives de la Seine et de la Loire. Ce camp est le berceau de la monarchie française. L'histoire dit les luttes de ce peuple guerrier et aventureux qui, trop à l'étroit dans ce champ-clos qu'on nomme l'Europe, s'en va chercher dans les pays lointains de l'Orient des périls inconnus à surmonter, et de plus grands combats à livrer. Elle dit la vie de cette jeune fille de Vaucouleurs dont l'écharpe virginale servit de bannière à la France; et vit trembler et fuir devant elle les légions des Anglais.

L'histoire dit aussi qu'à mille ans d'intervalle, deux grands capitaines, Charlemagne et Napoléon, vont remuer le sol de l'antique Italie, et poser sur leur front la couronne des rois lombards (1). Tous deux aussi ils traversent les Pyrénées, et pénètrent dans cette péninsule ibérique qui leur fut fatale à tous deux, car le pâtre de ces vallées répétera longtemps encore les noms de Roncevaux et de Vittoria. Tous deux aussi eurent à combattre les armées du nord coalisées, et livrèrent de ces grandes batailles qui ébranlèrent le sol de l'antique Germanie :

Armorum sonitum toto Germania cœlo
Audiit.

Witikind appelant aux armes les nombreuses populations de la Scandinavie, pour les précipiter sur la France. Ne l'avons-nous pas revu, nous, en

(1) Par une singulière coïncidence, Charlemagne, né en 742, faisait sa première expédition militaire en 769, et Napoléon venait au monde mille ans après, en 1769; Charlemagne fut sacré empereur en 800, et Napoléon en 1804; Charlemagne mourut en 814, et Napoléon abdiqua l'empire en 1814.

Comme conquérant et législateur, la vie de Charlemagne présente des rapprochements plus merveilleux encore avec celle de Napoléon : l'empire de Charlemagne s'étendait du nord-oues au sud-ouest, de l'Elbe en Allemagne à l'Ebre en Espagne; du nord au midi, il allait de la mer du Nord jusqu'à la Calabre; il comprenait dix-neuf provinces soumises et neuf provinces tribu ́taires. L'empire de Napoléon avait les mêmes limites, car, indépendamment de ses cent quarante départements, depuis celui du Zuyderzée sur les rives de la Baltique jusqu'à celui de l'Ombrone, que baignaient les chaudes lames de la mer Icarienne, nos drapeaux flottaient aussi sur l'Elbe et la Vistule et sur les bords de l'Ebre, et cent vingt millions de sujets criaient : Vive Napoléon! en vingt langues différentes.

Charlemagne créa douze pairs, et Napoléon douze maréchaux en montant sur le trône; Napoléon prit à Mouza la vieille couronne de fer des rois lombards que Charlemagne avait posée sur son front en 774. Charlemagne publia ses Capitulaires et fonda l'Université; Napoléon, souverain ct roi, regardait la publication de son Code et l'établissement de l'Université comme deux de ses plus beaux titres de gloire.

fants de ce siècle, dont les yeux, selon l'expression de Béranger, se sont ouverts au bruit de lugubres fanfares? N'avons-nous pas vu aussi notre Charlemagne, au déclin de sa puissance, dire à ses grands du royaume, en versant des larmes : « Savez-vous pourquoi je pleure? Je ne crains pas pour moi les hommes du Nord; mais je m'afflige que, moi vivant, ils aient osé insulter ce rivage. » Voilà de ces rapprochements merveilleux, de ces tableaux imposants et solennels qui abondent dans notre histoire.

La première organisation des milices en France, disent les historiens, remonte à Charles VII. Auparavant il n'existait point d'armées permanentes. Cependant, sous Clotaire, le quatrième fils de Clovis, on voit paraître un germe d'organisation dans la levée des milices. Au commencement de la guerre, les ducs et les comtes se mettaient à la tête de tous ceux de leur province qui devaient marcher en l'ost. Chaque province devait nourrir et entretenir sa milice pendant la durée de la guerre, qui était ordinairement de trois mois. Les Capitulaires de Charlemagne et les Règlements de Charles-le-Chauve ne renferment sous ce rapport aucun changement essentiel ou remarquable aux dispositions des premiers règnes. Mais un fait à noter, c'est qu'en tout temps la bravoure fut le mobile de ces armées, et que la lâcheté y était regardée comme le comble de l'ignominie, et frappée de punitions sévères. « Quiconque se retirait de « l'armée sans l'autorisation du chef était puni de mort. »

L'esprit guerrier de la nation, un moment assoupi sous les règnes des successeurs de Charlemagne, se réveille plus fort et plus terrible que jamais sous Pepin-le-Bref, un des premiers législateurs militaires de la France, et jette de vives et éclatantes lueurs sur les pages obscures de l'histoire du moyen âge. Charles VII introduisit de grands changements dans l'armée par la création de quinze compagnies d'ordonnance de six cents hommes chacune, et par l'institution des francs archers, ce qui porta le chiffre de la cavalerie à neuf mille hommes (1), et celui de l'infanterie à seize mille. Louis XI remplaça cette infanterie par six mille Suisses et par une levée de dix mille hommes qu'il prit à sa solde.

Charles VIII conserva cette organisation, mais il y ajouta un corps nombreux de fantassins allemands, nommés lansquenets.

Louis XII francisa l'armée en l'épurant de tous les soldats étrangers. L'on vit alors Bayard quitter la cavalerie pour se mettre à la tête de la jeune infanterie française.

François Ier créa la légion. Cette légion se composait de six bandes de mille hommes. Il entrait dans la composition de chaque légion la même proportion de piqueurs, de hallebardiers et d'arquebusiers. Il y avait pour commander chaque bande un capitaine, deux lieutenants, deux enseignes et dix centeniers, six sergents et plusieurs autres bas officiers. La bande entière marchait

(1) Les compagnies étaient de cent lances. Une lance fournie, comme on disait à cette époque, se composait de l'homme d'armes ou gentilhomme, armé de toutes pièces, et de sa suite, savoir : trois archers, un coutillier ou coustillier, et un page ou varlet.

et se ralliait au son de quatre tambours et de deux fifres. La légion était commandée par l'un des six capitaines, qui prenait alors le titre de colonel. Lorsque l'armée française passa les Alpes pour aller remporter la victoire de Marignau, elle était forte de quarante mille hommes.

Henri II, son successeur, donna le nom de régiment aux corps de l'armée. Louis XIII organisa, en 1635, l'infanterie en bataillons et la cavalerie en escadrons. Son armée s'éleva à cent mille hommes.

Enfin Louis XIV, réunissant les matériaux épars des différentes institutions militaires, en créa de nouvelles, et mit l'armée sur un pied formidable. — De 1701 à 1713, il n'y eut jamais moins de quatre cent mille hommes sous les

armes.

Nous avons étudié avec soin ce qui se rattache à la première partie de nos annales militaires, et sur laquelle la plupart des historiens ne donnent que des détails fort obscurs et incomplets. Ceux que nous avons recueillis sur cette époque ne seront pas sans intérêt, car les événements qui se sont accomplis alors sont de la plus haute importance, et méritent de fixer l'attention. Ainsi, l'établissement des Francs dans les Gaules, les cinquante-trois expéditions de Charlemagne, l'invasion des Normands, les croisades, les premières guerres de la France contre l'Angleterre, sont des points historiques culminants au moyen desquels nous rattacherons le règne de Clovis à celui de Charlemagne et à celui de Charles VII. Nous suivrons la même marche pour constater la renaissance et les progrès de l'art militaire, les différentes organisations de l'armée et des divers corps, les mœurs des gens de guerre, paladins, chevaliers, francs archers, soudoyers, malandriers, routiers, Suisses, lansquenets, etc., bandes de Louis XII, légionnaires de François Ier, soldats de Henri IV et de Louis XIV, de Charles VII à Louis XI, de Charles IX à Henri II, de Louis XIV à la révolution. Cette étude formera la première partie de notre histoire, et ce ne sera pas la moins importante, car c'est entre la victoire de Clovis à Soissons, où il écrase les débris de l'empire romain, et le cri de d'Assas au champ de Clostercamp: A moi, Auvergne, c'est l'ennemi! dernier reflet de gloire des vieux régiments français, que se trouve placée toute l'histoire militaire de la vieille monarchie, c'est-à-dire de quatorze siècles (1).

Quelques historiens ont essayé d'établir une ligne de démarcation entre nos armées modernes et les armées de la vieille monarchie, à cause du mode de recrutement de ces dernières. Nous disons, nous, qu'il y a un lien moral entre toutes les armées françaises, quelle que soit l'époque où elles aient existé, quel que soit le drapeau qu'elles aient suivi. Oui, elle fut brave, notre armée monarchique, malgré son mode de recrutement et son organisation; elle fut brave et dévouée, cette armée qui vainquit à Aignadel, où, un moment acca

(1) Pour ne pas interrompre la marche de notre récit par des détails d'organisation, pour ne pas le surcharger de noms et de dates, nous présenterons pour chaque siècle un tableau synoptique des modifications apportées dans nos institutions militaires, et des combats, siéges et batailles qui n'auraient pu trouver place dans le texte

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