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Il poursuit: Mais, n'êtes vous pas vous-mêmes, chrétiens, orque vous priez Marie la preuve de cette beauté radieuse, et comme l'Evangile vivant faisant écho à 1 Evangile écrit. Regardez les prières que vous aimez à lui adresser : l'Ave Maria stella, le Salve regina, le Tota pulchra es... Réfléchissez sur cette suite d'apostrophes qui accumulent vos litanies préférées. Il faut que Marie soit tout à la fois Vierge des vierges et mère de la divine grâce, Mère aimable et mère admirable, Vierge puissante et vierge clémente, Miroir de justice et trône de sagesse, Rose mystérieuse et tour d'ivoire, Arche d'alliance et étoile du matin, reine enfin de tout ce que la sainteté a produit de plus magnifique, comme si les vertus de tous les saints n'étaient que les joyaux de son diadème.

Que signifient ces prières enthousiastes et ces étonnantes litanies, sinon qu'une incomparable beauté s'est révélée? Tota pulchra es, il est donc vrai. Et pour confesser ce resplendissement il a suffi d'ouvrir l'Evangile et de regarder son reflet dans nos cœurs. Que sera-ce maintenant du foyer ou cette beauté s'alimente?

II. Ce foyer, c'est la grâce de l'Immaculée-Conception. L'orateur en redit l'histoire ; la beauté de l'humanité dans la première intention de Dieu, la grâce d'innocence et de justice originelle, la chute et la préparation du Rédempteur, la beauté hors de pair de l'Homme-Dieu.

Mais à cet Homme-Dieu. il fallait une mère, une mère issue de la race coupable et qu'il s'agit de sauver. Et c'est une loi que la mère imprime sa ressemblance dans son fils. Que fera Dieu? Pour que le fils puisse ressembler à sa mère, il ordonne que la mère ressemble d'avance à son fils.

Faut-il pour cela sortir du plan de la rédemption? Non pas! La croix du Rédempteur est assez riche en grâces pour créer ce prodige. Pour nous, avant d'accomplir son effet de transfiguration, la grâce doit d'abord purifier gratia sanans. Pour Marie, co-rédemptrice de Jésus, la grâce allant jusqu'au bout de sa puissance produira un effet de préservation. Cette grâce sera plénière, comme l'amour qué lui porte son Fils. Elle se situe entre la grâce de tête de l'humanité, concédée à Adam et la grâce capitale du Rédempteur, plus proche de celle-ci que de celle-là. Seulement Jésus possède la plénitude de grâce par nature, comme un rejaillissement physique de sa grâce d'union; Marie la possède par concession, en vue de son rôle de Mère de l'Homme-Dieu et par la vertu de sa Croix.

Nous saisissons maintenant la splendeur d'âme que révélait tout à l'heure l'Evangile et que saluait la piété chrétienne. Aussi bien les litanies se terminent-elles par cette acclamation qui dénonce le foyer de tant de perfections: Regina sine labe originali concepta, ora pro nobis.

III. Il est maintenant facile de comprendre l'incomparable efficacité de l'Immaculée Conception pour nous aider à vivre en beauté.

Marie a reçu à l'état de plénitude débordante la grâce conquise par le sacrifice de l'Homme-Dieu dont elle est la mère. Ne convenait-il pas que celle qui a donné au monde l'auteur de la grâce, ne cessat pas de le lui donner, et qu'elle fût la dispenstrice de ses bienfaits, la « mère de la divine grâce »? Si l'humanité de Jésus est le sacrement de sa divinité, Marie sacrée par la grâce de l'Immaculée-Conception, est comme le sacrement de l'humanité de Jésus.

Et dès lors, ce n'est plus seulement par l'attrait ravissant de sa spirituelle beauté qu'elle agit sur nous. Ou plutôt, à chacun de ces attraits est conjuguée une grâce rédemptrice. La grace efficace descend ici en nous par le chemin de l'attrait. Telles ces représentations de la Vierge immaculée miraculeusement apparue, où la suavité divine de l'attitude et de la physionomic s'achèvent en ces rayons de flammes qui semblent lui couler des doigts pour enflammer nos cœurs.

L'orateur, interprétant la suprême invocation des litanies de la Sainte Vierge

montre dans le Saint-Rosaire une dévotion où tout ce qu'il vient d'enseigner se trouve réalisé et comme incarné, et par suite, un moyen pratique et efficace de vivre en beauté, sous l'action du type idéal de la Très Sainte Vierge Marie.

Au sermon du soir, le P. Gardeil a parlé des prières nationales. Il a rappelé le rôle de la prière comme instrument du gouvernement divin. Il a dit l'efficacité de la prière collective, l'appuyant sur les paroles de Notre Seigneur. Il a montré que l'on pouvait tout attendre d'une nation qui par la prière se met à la disposition du Dieu qui aime les Francs.

Si, comme l'a dit Jules César, la Gaule formant une seule nation, animée d'un même esprit, unie sous un seul chef peut défier l'univers, que sera-ce sice chefest Dieu lui-même ? Après le sermon, eut lieu la procession au chant des litanies de la Sainte Vierge; puis Mgr le Recteur lut la consécration de la France à Marie, ordonnée par S. E. le Cardinal-Archevêque, et donna le salut du T. S. Sacrement, pendant lequel le séminaire exécuta avec une exquise perfection plusieurs morceaux de chant grégorien.

Séminaire Saint-Thomas d'Aquin. M. l'abbé Peillaube, supérieur du Séminaire Saint-Thomas d'Aquin, a reçu en juillet dernier la lettre suivante de S. Em, le Cardinal Merry del Val.

SEGRETERIA DI STATO

DI SUA SANTITA

Monsieur l'Abbé,

Dal Vaticano, le 16 juillet 1914.

Dès que le Règlement du Séminaire Saint-Thomas d'Aquin m'a été remis par Mgr Pacelli, je me suis empressé de le déposer entre les Augustes Mains du Saint-Père. Je suis heureux, aujourd'hui, de vous annoncer que le Souverain Pontife a eu pour très agréable un tel hommage lui parvenant, par une heureuse coïncidence, immédiatement après la publication du Motu proprio Doctoris Angelici.

Sa Sainteté a donc éprouvé une profonde satisfaction en constatant combien est vif. dans la Faculté de philosophie de l'Institut catholique de Paris, laquelle a dernièrement admis parmi ses membres le savant adversaire de la philosophie bergsonienne, M. Maritain, et dans le Séminaire si dignement dirigé par vous, le culte de l'Ange de l'Ecole, dont le Souverain Pontife a de nouveau glorifié l'incomparable doctrine. Et comme la piété et la pratique de la vertu ai dent puissamment l'intelligence humaine dans l'acquisition de la vraie science, la sentence d'or du même Docteur, dans la Somme théologique (II II, q. xv, a. 3 in corp.) Virtutes... maxime disponunt hominem ad perfectionem intellectualis operationis, s'adaptant parfaite ment à notre sujet, Sa Sainteté a daigné encore se montrer très satisfaite en voyant avec quelle sollicitude et quel soin le Règlement offre, et prescrit même aux élèves les moyens les plus appropriés pour accroître en eux l'esprit de prière, et avancer dans les voies de la perfection.

Avec l'expression de mes remerciements personnels pour l'exemplaire du mème Règlement que vous avez eu la bonté de me destiner, et les vœux les plus ardents pour la prospérité de cet Institut dont la Sainte Eglise se promet, en France, un si grand bien et des fruits si abondants, je vous offre, Monsieur l'abbé, l'assurance de mes sentiments dévoués en Notre-Seigneur.

A Monsieur l'abbé Emile Peillaube, Supérieur du Séminaire Saint-Thomas d Aquin,

Paris.

R. Cardinal MERRY DEL VAL

NECROLOGIE

M. CHARLES HUIT

ou

Nous avons perdu le 24 novembre, à Saint-Vaast-la-Hougue, M. Charles Huit. Né le 5 septembre 1845 à Lausanne, de parents français, il avait été professeur de littérature grecque dans notre faculté des lettres de 1875 à 1880. Ses études avaient eu une remarquable unité. Il les concentra sur la philosophie grecque et spécialement sur Platon, dès le temps de ses thèses de doctorat : De l'authenticité du « Parménide », et De priorum Pythagoreorum doctrina et scriptis (1873). Voici ses principaux travaux Platon à l'Académie (1882). une édition du Criton (1882), Etudes sur le « Philèbe » (1885), Aristote et Platon (dans l'Annuaire des études grecques, 1887), Etude sur le « Politique » attribué à Platon (Académie des sciences morales, 1888), Etudes sur le « Banquet » (1889), Examen de la date du « Phèdre » (1890). La vie et l'œuvre de Platon (2 vol., 1893). La philosophie de la nature chez les anciens (1900). Il préparait une histoire générale du platonisme jusqu'aux temps modernes et il en avait donné çà et là aux revues plusieurs morceaux. En dehors de ces vrages, dont les derniers résument toute l'activité de M. Huit, il avait publié : La Vie et les œuvres de Frédéric Ozanam et un volume sur Ballanche. L'Académie des sciences morales avait couronné le livre sur la philosophie de la nature. M, Huit n'était pas philologue, et ses travaux en ont souffert. Cela était la faute de l'époque où il s'était formé; alors on croyait pouvoir aborder les textes anciens sans la méthode qui prépare et guide cette étude. Mais il était admirablement consciencieux, lisant tout, rendant justice à la moindre dissertation allemande, s'effaçant au point de laisser souvent le lecteur dans l'ignorance de ce qu'il apportait de personne et de nouveau. Sa conscience l'empêchait aussi de se décider; on a, de divers côtés trouvé que ses conclusions sur Platon étaient trop sceptiques et que sa critique était restée dans l'incertitude. Philosophe encore plus qu'historien, spiritualiste avant tout, il exprimait volontiers ses convictions intimes; quand il rencontrait Epicure sur sa route, il n'était pas très éloigné de s'écrier comme Pétrarque: Incipit delirare Epicurus. Le jour où la maladie vint le frapper sans remède, il travaillait à un livre sur l'Absolu. Platon était son maitre, un maître chéri, qu'il aurait voulu venger de l'ingratitude d'Aristote. Il y avait encore en M. Huit un lettré disert. Dans son livre sur la philosophie de la nature chez les anciens, il cède à la tentation de donner un ou deux chapitres aux poètes, non pas pour analyser leurs systèmes cosmologiques, mais pour décrire leurs sentiments. Chaignet, à propos de ce livre, lui faisait cet aimable reproche: « Le goût manifeste de l'auteur pour les choses littéraires exerce sur son imagination d'artiste un charme auquel il ne sait pas résister. Son style a des grâces et comme des caresses qui sont, je ne dis pas la recherche, mais une certaine complaisance pour les effets de la poésie et de l'éloquence, et s'écarte de la simplicité sereine et grave de la langue philosophique (1). » La personne de M. Huit révélait cette ame délicate, sensible à la beauté, discrète et scrupuleuse. Nous laissons à d'autres, qui l'ont approché davantage, le soin de dire la générosité et la droiture de sa foi religieuse. Tous ceux qui l'ont aperçu dans nos réunions n'oublieront pas cette figure émaciée et méditative, que semblait affiner encore une haute taille, courtoise

(1) Revue critique, 1901, t. I, p. 85.

ment penchée vers l'interlocuteur. M. Huit avait épousé la nièce d'Antonin Rondelet. un autre de nos professeurs de la Faculté des lettres à ses débuts. Il était l'oncle de notre ancien élève, M. l'abbé Claudius Lavergne, qui a été le premier ecclésiastique tué à l'ennemi en 1914.

Paul LEJAY.

Bibliographie.

SAINT ALBERT DE LOUVAIN, PATRON DU roi des Belges, évêque de Liége et martyr, réfugié en France et martyrisé par Henri VI le Cruel, empereur d'Allemagne. Discours prononcé par M. le chanoine GAUDEAU, le 15 novembre 1914. Brochure in-8°. Aux bureaux de la Foi Catholique, 25, rue Vaneau, et chez Poisson, 37, rue de Lille. 1 franc. Se vend au profit des réfugiés belges.

Un saint qui fut chevalier et croisé avant d'être évêque et martyr; issu des dues de Brabant, souverains du pays qui est la Belgique actuelle; persécuté en haine du droit, de l'honneur et de la liberté de l'Eglise par un empereur d'Allemagne qui avait vendu l'évêché de Liége à un intrus simoniaque; réfugié à Reims et assassiné traîtreusement par des espions allemands aux gages de l'empereur ne dirait-on pas qu'un tel patron a été inventé tout exprès pour le roi Albert Ier? On devine le parti que l'éloquence de M. le chanoine Gaudeau a tiré de cette heureuse découverte et de ce thème merveilleux, qui est cependant de l'histoire, car ce saint est réellement le patron du roi Albert. Ces pages, érudites autant qu'émouvantes, sont complétées par d'intéressants appendices.

Le Gérant: CH. BAULES.

Paris. - Im Levi, rue Cassette, 17. S.

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