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bois, pâtures et pâturages, et qu'il y avait lieu de la modifier, si son maintien était jugé utile, tout en la renvoyant dans une autre partie des conclusions, où elle serait mieux à sa place, » L'opinion contraire a répondu à ces objections en faisant remarquer : « Qu'on donnait une signification trop restreinte, un sens trop absolu aux mots déboisement et reboisement; que la grande mesure du reboisement des montagnes ne devait pas comprendre seulement le boisement proprement dit des parties autrefo ́s boisées, mais le gazonnement des surfaces qu'il est possible de réserver au pâturage des troupeaux ; qu'ainsi l'expression générale : Reboisement des montagnes, devait s'entendre principalement des surfaces dénudées, sur lesquelles il fallait reconstituer en quelque sorte le sol et une croûte végétale, tantôt par le boise:nent, tantôt par le regazonnement, s'il est permis de s'exprimer ainsi, selon les expositions, les pentes, les points élévés de la montagne et le degré de protection qu'il était nécessaire d'assurer aux terrains inférieurs; que c'était d'ailleurs sous ce point de vue que la question du reboisement avait été envisagée de tous temps, et qu'il était logique, autant que rationnel, lorsqu'on s'occupait des causes qui avaient contribué au déboisement et à la dénudation d'une partie du sol des montagnes, de comprendre, avant tout, dans les mesures propres à arrêter le déboisement et la dénudation, celles qui assuraient la conservation des terrains gazonnés, comme de ceux boisés; que la soumission au régime forestier des terrains en nature de pâturage n'avait pas un autre but et ne pouvait avoir une autre portée; qu'en attribuant la surveillance de la jouissance exercée sur ces terrains aux agents forestiers, l'État y trouverait cet avantage de placer immédiatement tous les terrains boisés et gazonnés, dont la conservation est d'un intérêt égal dans les montagnes, sous la protection d'une administration déjà existante, fortement organisée, et qui pourrait surveiller et réprimer facilement et utilement, puisque les terrains gazonnés et boisés sont entremêlés dans les montagnes, et qu'en surveillant ceux-ci on surveille nécessairement ceux-là; qu'il y avait donc lieu de maintenir la proposition de la Commission. >>

M. le rapporteur, en résumant ces deux opinions contradictoires, a été d'avis de les concilier toutes deux d'accorder à l'une le principe de la soumission au régime forestier, comme moyen nécessaire et économi que de conservation, et de concéder à l'autre la modification qui consiste➡ rait à rendre moins générale l'application de cette mesure. Il a, en conséquence, proposé de rédiger en ces termes la première proposition de la Commission:

« 1° Soumission au régime forestier des terrains dénudés ou en naturė » de prés-bois, pâtures et pâturages occupant les pentes ou les plateaux >> élevés des montagnes, et qui seront déterminés par les commissions » locales de reboisement dont il est parlé ci-après. »

En retranchant de la rédaction primitive les mots sans exception, et en réservant à des commissions spéciales la désignation des terrains qui seront soumis au régime forestier, on acquiert la garantie que les restrictions de jouissauce, inhérentes à ce régime, ne s'étendront qu'aux parties du sol dont la conservation est d'utilité publique.

Cette rédaction nouvelle ayant été adoptée par l'assemblée, et l'heure étant avancée, M. le président a renvoyé la continuation de la discussion à la séance suivante qui a été fixée au dimanche 26 avril.

CHRONIQUE FORESTIÈRE.

SOMMAIRE. Revue administrative. Discussion sur les approvisionnements de la marine. Commission pour l'examen de la question du martelage. Travaux des chambres et des commissions relatifs aux questions forestières. - Tablean de l'état du personel de l'administration forestière.

Revue industrielle, Hausse de prix des bois de service. — Étendue des approvisionnements en bois nécessaires à la marine et aux chemins de fer, et influence de ces be soins sur les prix des bois. Fournitures des traverses sur la ligne de Paris à Lyon. Cousidérations sur le mode d'approvisionnement et les clauses des cahiers des charges. Ligne de Paris à Strasbourg.

Revue scientifique. Rapport de M. Ch. Dupin.

Correspondance et faits divers. Reboisements opérés dans le Puy-de-Dôme. de la cour de Caen.

Revue administrative,

- Arrêt

Discussion sur les approvisionnements de la marine. La Chambre des députés a commencé, le 13 avril, la discussion du projet de loi portant ouverture de crédits extraordinaires pour constructions navales et approvisionnements de la marine.

Comme ce projet soulève plusieurs questions qui touchent à des points souvent controversés entre la marine et l'administration forestière, relativement aux difficultés de l'approvisionnement, dont quelques administrateurs de la marine prétendent rejeter la faute sur le régime forestier actue nous suivrons ces débats pour tenir nos lecteurs au courant de la partie qui sera relative aux approvisionnements en bois et aux causes auxquelles il faut en attribuer la diminution.

Commission pour l'examen de la question du martelage. Déjà depuis quelque temps, sur la demande du ministre de la marine, une commission mixte a été nommée pour examiner la question du martelage. Cette commission se compose de MM. d'Argout, président; Laplagne-Barris, pair de France; Vuitry, député; Legrand, directeur général de l'administration des forêts; de Foucauld, conservateur des forêts; Tupinier, pair de France; Bonnard, inspecteur général des finances; d'Argout fils, secrétaire.

Comme on le voit, d'après les noms qui précèdent, l'administration de la marine se trouve ici en présence de l'administration forestière. Il est à désirer que, dans cette espèce de champ clos entre les représentants des deux administrations, cette question du martelage se trouve enfin définitivement vidée, et qu'une discussion sérieuse fasse ressortir et mette en évidence ce qu'il y a de fondé ou de faux dans les opinions soutenues par M. Tupinier, sur les inconvénients du régime actuel, et dans le système favori de M. Bonnard, système qui consiste à réclamer 80,000 hectares de forêts, qui seraient livrés à l'administration de la marine pour le besoin de ses approvisionnements, sauf à elle de les administrer à sa guise. Déjà, à plusieurs reprises, les Annales ont publié des articles où nous croyons que le plan de M. Bonnard et le système de M. Tupinier ont été appréciés à leur juste valeur; nous y renvoyons ceux de nos lecteurs qui

voudront prendre une connaissance plus approfondie de cette question, et nous chercherons à les tenir au courant des principaux résultats auxquels les travaux de la commission viendront aboutir.

Travaux des chambres et des commissions relatifs aux questions forestières. On n'entend plus parler du projet de loi sur le défrichement pendant à la chambre des pairs. Tout ce qu'on sait, c'est qu'il a été profondément modifié par la commission nommée pour l'examiner, et que s'il arrive enfin au grand jour de la discussion, il s'y présentera trés-différent de ce qu'il était à son origine.

On ne sait pas davantage à quoi ont abouti les travaux de la commissiom mixte du reboisement. La session est certainement trop avancée aujourd'hui, pour qu'on doive espérer que la chambre se trouve investie cette année d'un projet de loi dont la formation de cette commission devait faire supposer la présentation assez prochaine.

Cette session passera donc encore sans donner solution à aucune des questions forestières portées devant les chambres. Tout sera ajourné de nouveau, à l'exception cependant de la loi de défrichement. Encore pourra-t-on concilier ici l'amour du statu quo, et la nécessité d'une loi qui remplace celle qui périme cette année, en demandant purement et simplement la prorogation temporaire de cet article.

Tableau du personnel de l'administration forestière. Nous publions enfin l'état du personnel de l'administration forestière, tel qu'il s'est trouvé constitué au 1er avril 1846. Le retard qu'a éprouvé cette publication sera du moins compensé par l'exactitude complète de ce document, qui emprunte un nouveau degré d'intérêt aux mouvements fréquents qui ont eu lieu dans le cours de la dernière année. Nous aurions désiré y joindre la date de la nomination de chaque agent, dans les différents grades par lesquels il a passé; mais les documents que nous avons recueillis jusqu'à ce jour ne sont point assez complets pour que nous ne nous fussions pas exposés à des erreurs et à des inexactitudes qui eussent soulevé de nombreuses réclamations, et qui auraient enlevé toute autorité et tout intérêt à ce tableau. Nous nous sommes donc trouvés dans la nécessité d'ajourner ce complément d'indications, jusqu'à ce que nous soyons en mesure de lui donner tout le degré d'exactitude qu'il comporte.

Revue industrielle.

·Hausse de prix des bois de service. On lit aujourd'hui dans le Journal des Travaux publics :

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L'adjudication de travaux de maçonnerie, évaluée à 330,000 francs, pour l'achèvement des bâtiments de la nouvelle bibliothèque de SainteGeneviève, n'a pu avoir lieu aujourd'hui. Les principaux entrepreneurs ont déclaré que, loin de faire aucun rabais, ils ne pourraient même pas prendre les travaux aux prix des devis : ils ont appuyé leur déclaration sur les renchérissements des matériaux.

Déjà un fait analogue s'était passé le lundi 16 mars; il concernait les bois de charpente; les travaux de charpente à exécuter à l'hôtel de la chambre des députés n'avaient pu être adjugés; les entrepreneurs avaient allégué le renchérissement des bois.

>> Il serait à désirer que dorénavant l'administration, en arrêtant ses devis, tînt compte des causes de renchérissement que les entrepreneurs sont forcés de subir.

← Etendue des approvisionnements en bois nécessaires à la marine et aux chemins de fer, et influence de ces besoins sur les prix des bois. Ainsi les prévisions que nous avions émises sur l'augmentation progressive du prix des bois de service se réalisent chaque jour. L'énorme quantité de constructions nouvelles que l'on entreprend de tous côtés, et que fait naître la révolution industrielle et commerciale, amenée par l'établissement des chemins de fer; l'immense consommation de bois à laquelle donne lieu la constructoin et l'entretien de ces chemins, la nécessité prochaine de combler les vides déplorables des approvisionnements de la marine, toutes ces circonstances tendent à entretenir cette hausse, qui durera assez longtemps sans doute pour tourner au profit d : la propriété forestière, et la dédommager des charges qui pèsent sur elle.

Les chiffres suivants donneront à nos lecteurs un aperçu des besoins prochains auxquels nos forêts auront à pourvoir.

M. le ministre de la marine demande un approvisionnement de 180,000 stères. M. Thiers, qui trouve cet approvisionnement dérisoire, propose de l'élever au moins à 300,000, et la chambre paraît disposée à cette aug

mentation.

Quelque élevé que soit ce chiffre, il paraît minime en comparaison de celui qui résulte des besoins des chemins de fer.

Les lignes classées jusqu'à ce jour comprennent une étendue de six mille kilomètres. Chaque kilomètre nécessite l'emploi de 3,000 traverses environ. Il faut donc, pour la construction du réseau classé (sans compter les nombreuses lignes en projet) 18,000,000 de traverses, représentant en moyenne au moins 1,800,000 stères de bois.

C'est donc, en outre de la consommation ordinaire, une valeur en argent de 150 à 180 millions que les forêts auront à fournir dans l'espace de quatre ou cinq ans.

En regard de cette immense consommation, et de l'énormité du capital engagé, quand on considère les causes si nombreuses qui influent sur la prompte détérioration des traverses, on est tenté de s'inquiéter si les forêts pourront suffire à de telles exigences, et si les mesures convenables ont été prises par les constructeurs pour obtenir toutes les garanties désirables de durée, de solidité et d'économie, et ménager à la fois les ressources de nos forêts, et l'argent du trésor et des compagnies.

Comme ces questions intéressent au plus haut degré l'industrie, les compagnies, la sécurité publique et la propriété forestière, nous avons dù les étudier avec soin. Les documents que nous avons réunis nous mettent en mesure de les traiter dès notre plus prochain numéro.

Fournitures des traverses sur la ligne de Paris à Lyon. Déjà les mar chés pour la fourniture des traverses sur le chemin de fer de Paris à Lyon ont été passés, pour toute la ligne de Paris à Tonnerre, au prix de 75 francs le stère. On dit que la puissante maison qui a pris cette fourniture se flatte de réaliser des bénifices avantageux. Nous croyons pour nous que c'est à l'administration du chemin de s'applaudir de ces conditions, et nous doutons que le fournisseur puisse livrer avec avantage, au prix indiqué et d'après les conditions du cahier des charges, si toutefois les directeurs des travaux tiennent strictement la main à l'accomplissement de ces conditions, dans l'intérêt bien entendu de la durée et du bon service des traverses.

Considérations sur le mode d'approvisionnement et les clauses des cahiers des charges. On nous écrit de Dijon que l'adjudication des traverses pour la ligne de Dijon à Châlons a été faite au prix de 86 francs le stère pour les traverses équarries, et de 70 francs pour les traverses demi-rondes.

Ces prix sont, comme on voit, supérieurs à celui des marchés dont nous venons de parler pour la ligne de Paris à Tonnerre. Cependant, si on veut prendre en considération les conditions excessives portées dans les cahiers des charges, si l'on réfléchit que l'adjudication faite ainsi en bloc, pour une portion considérable d'une ligne, écarte la concurrence, et livre les marchés seulement aux gros spéculateurs, on sera moins surpris de l'élévation de ce dernier prix, et l'on reconnaîtra que si, en traitant à la fois pour toute une fourniture, MM. les ingénieurs simplifient leur besogne, et que, si les clauses exorbitantes qu'ils persistent à imposer aux fournisseurs, livrent ces derniers à leur discrétion, en définitive cette persistance dans une voie qui leur est personnellement plus commode aboutit à rendre les adjudications plus difficiles, à élever le taux des dépenses, et à grever l'Etat ou les compagnies de frais qu'on aurait pu diminuer ou éviter.

Nous parlerons successivement des bois nécessaires aux différentes lignes, des ressources que présentent les localités pour suffire à ces approvisionnements, et de l'influence que cette consommation extraordinaire devra exercer sur les prix des bois dans chacune de ces localités. Notre prochaine livraison entamera ces études par la ligne de Paris à Strasbourg.

Revue scientifique,

Rapport de M. Ch. Dupin. La substitution du fer au bois dans la construction des bâtiments de mer, met aujourd'hui en présence trois intérêts également considérables : ceux de la sylviculture, de l'industrie manufacturière et du commerce. Les représentants des intérêts commerciaux, ayant reclamé, pour favoriser cette substitution, l'entrée en franchise des fers et des tôles de l'étranger pour la construction des bâtiments de mer, cette demande a été soumise, dans la dernière réunion du conseil général de l'agriculture, à l'examen d'une commission dont M. le baron Ch. Dupin a été nommé président, et M. le baron Burche, secrétaire. Le résultat de l'examen de cette commission s'est formulé en un rapport très-remarquable, où la question est étudiée sous toutes ses faces les plus importantes, et éclairée par les documents statistiques les plus complets.

Nous nous proposons de reproduire les parties de ce rapport qui touchent plus spécialement aux intérêts forestiers et métallurgiques, dans notre livraison prochaine.

Correspondance et Faits divers.

Reboisement opérés dans le Puy-de-Dôme. Les travaux de reboisement opérés dans le Puy-de-Dôme, ont appelé plusieurs fois déjà notre attention et notre intérêt. Le Bulletin agricole de ce département nous apprend de nouveau qu'il sera semé ou planté, ce printemps, près de 200 hectares de terrains communaux soumis au régime forestier. Nous lisons dans le même bulletin que l'exemple donné par l'administration forestière, est suivi par les particuliers qui ont de

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