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à ce point que par un arrêt tout récent (3 mars 1846, Dalloz, 1846, 83), la Cour de cassation a éte jusqu'à décider que tout chemin public, même communal et non classe est imprescriptible, nonobstant les termes de l'art. 10 de la loi du 21 mai 1836.

3o Qu'il existe donc en dehors des routes classées des voies de communication, qui ne rentrent pas nécessairement dans la categorie des chemins privés.

4o Que, si aux termes de l'art. 691 C. civ., le titre est nécessaire à celui qui invoque un simple droit de passage, servitude discontinue, ce titre n'est pas indispensable, lorsqu'au lieu de reclamer une servitude de passage, on se prétend propriétaire par prescription du sol sur lequel le passage a lieu.

5o Que l'expression chemins ordinaires, qui se trouve dans l'art. 146 C. for., est générale ; qu'elle a remplacé celle de routes et grands chemins, employée par l'ord, de 1669 (tit. 27, art. 34), parce que le législateur a voulu tempérer la sévérite de cette disposition, qui excluait les sentiers et les chemins de communication; que ces mots, chemins ordinaires, comme l'enseigne M. Cheaume, doivent s'entendre des chemius qui servent habituellement aux communications des habitants de deux ou de plusieurs communes, sans comprendre toutefois les chemins établis accidentellement, à cause de travaux d'exploitation et autres à faire dans les forêts, par exemple, pour la vidange des bois, la séparation des coupes et le service intérieur de la forêt. (Meaume, 2, 432, . 1002 et la note. Cass. 29 avr. 1830. R. F., t. 4, p. 358; Amiens, 27 févr. 1843. B., art. 110.

Il ne serait donc pas nécessaire que le chemin dont s'agit fût classé pour être réputé une communication publique, un chemin que la commuue puisse revendiquer; néanmoins, sauf la preuve contraire, il existe, on doit le reconnaître, d'apres les faits exposes la plus forte présomption en faveur des prétentions de l'administration qui paraît en possession du chemin en litige pour le service de ses bois.

Mais la véritable question est celle de savoir si un prévenu du délit caractérisé par l'art. 146 du C. for. peut la céper, non pas d'un droit de passage à lui personuel, mais bien d'un droit appartenant à la commune?

La negative n'est pas contestable; en effet, pour qu'un prévenu puisse, en matière forestière, invoquer avec succès une exception préjudicielle, il faut, aux termes de l'art. 182, qu'il s'agisse de faits à lui personnels ; et il est de principe que si des habitants peuvent agir ut singuli pour se faire maintenir dans l'exercice d'un droit reconnu communal, il en est autrement dans le cas où l'on dénie le droit de la commune. Sans doute, le maire peut intervenir pour défendre ce droit, dès qu'il est contesté; sa mise en cause peut être ordonnée; mais, en son absence, le prévenu ne peut invoquer le droit communal, comme moyen de défense, à moms de s'être fait autoriser dans les termes de l'art. 49 de la loi du 18 juillet 1837. (Meaume, tb., p. 813, n. 1294. Cass. 6 févr. 1845. B. 2, 454 (358).

Il est donc evident que le prévenu, dans l'espèce, doit être condamné, parce que l'exception de droit communal ne pourrait être invoquée utilement par lui personnellement et en l'absence du représentant de la commune; cette exception, en la supposant proposée, ne satisferait pas aux conditions de l'art. 182, qui exige avant tout, un droit personnel au pré

venu.

OBSERVATIONS

Sur les mœurs et l'anatomie des scolytes des ormes, et plus spécialement du scolyte

destructor 1.

Bien des particularités de l'histoire et de l'organisation des scolytes sont encore inconnues des naturalistes et ont besoin d'être éclairées par l'observation, et les scolytes, qui font périr les arbres de nos promenades et de nos routes, mériteraient plus que tout autre insecte d'appeler l'attention des zoologistes.

J'ai eu l'occasion de découvrir plusieurs faits importants de leur histoire, et j'expose les principaux résultats de mes observations dans ce mémoire, que j'ai l'honneur de soumettre aujourd'hui au jugement de l'Académie.

Le 22 juillet, m'étant rendu, en compagnie de M. E. Robert, dans le bois de Bellevue, où l'on avait abattu, l'année dernière, quatre ou cinq ormes un peu plus gros que la cuisse, je trouvai ceux-ci couverts de scolytes et d'hylésines qui pullulaient sur leurs troncs couchés à terre, en compagnie de nombreux parasites.

J'observai là que, sur cent galeries de scolytes, au moins soixante étaient occupées par les cocons d'un ichneumonide, le bracon initiator, fab., dont la larve avait dévoré celle des scolytes. Je trouvai sur les arbres des scolytus destructor mâles et femelles ; j'en fis l'anatomie, et j'observai, dans leur appareil de la génération, des particularités singulières, qui me firent penser que l'accouplement devait se faire d'une manière différente de celui de la majorité des coléoptères.

Le 22 juillet, à l'endroit où gisaient ces arbres abattus et couverts de scolytes, planté de beaux ormes jeunes et vigoureux, un peu plus gros que la cuisse, on en remarquait deux tout aussi beaux et aussi vigoureux, ornés d'un feuillage vert foncé comme les autres, mais dont le tronc était couvert de bourdons, guêpes, abeilles, mouches de toutes espèces, occupées à sucer des sucs qui suintaient de petites plaies faites à l'écorce de ces arbres par des scolytes femelles qui préparaient leurs galeries de ponte.

Le 1er août, étant retourné dans cet endroit en compagnie de M. Robert, je vis que sept arbres étaient attaqués par les scolytes, ce que je reconnus du premier coup d'œil, en remarquant qu'ils étaient couverts de bourdons, guêpes, abeilles, etc., comme les deux que j'avais observés dix jours auparavant.

En suivant avec soin les manœuvres des scolytes femelles, en faisant de

1 Extrait d'un mémoire présenté à l'Académie des Sciences par M. Guérin-Mesneville.

nombreuses coupes des galeries commencées par elles, nous constatâmes les faits suivants :

1o Les femelles de scolytes recommencent souvent leur galerie de ponte, quand elles reconnaissent qu'elles se sont trompées et qu'elles ont enfoncé leur trou trop avant dans l'écorce vive. Craignant que leurs larves ne soient noyées et étouffées par l'abondance de sève qui découle alors de ces blessures, elles abandonnent la place, vont recommencer leur travail plus loin, et ont alors soin de tenir leurs galeries dans la partie moyenne de l'écorce, entre celle qui est tout à fait vive et la plus externe frappée de mort, dont une partie déjà languissante, et qui se trouve alors dans les mêmes conditions que toute l'écorce d'un arbre languissant.

2o Contrairement à ce que l'on croyait jusqu'ici, que les scolytes vont s'accoupler sur les feuilles, au sommet des arbres, j'ai constaté, ainsi que M. Robert, témoin de cette observation, que ces insectes ont un tout autre mode de rapprochement. Le 1er août, après avoir resté quatre ou cinq heures au soleil pour suivre les travaux des scolytes, nous vîmes plusieurs individus courant avec rapidité sur les écorces des arbres attaqués; j'en pris quelques-uns que je reconnus pour mâles. Un de ces individus si agiles s'étant introduit dans un trou creusé par une femelle, on le vit bientôt en sortir; la partie postérieure d'une femelle se montra à l'entrée de la galerie, et l'accouplement eut lieu plusieurs fois.

Il résulte de ces observations un fait bien intéressant et qu'il serait bon de constater encore : c'est que des arbres abattus et laissés près de sujets sains peuvent rendre ceux-ci malades, et que les scolytes peuvent attaquer des arbres sains, les couvrir de blessures, qui font épancher leur sève, les rendre malades et être ainsi la cause directe de leur mort.

Comme l'occasion de constater ce fait est unique et des plus favorables, il serait à désirer que la commission qui sera nommée pût se rendre à Bellevue pour examiner ces arbres, constater qu'ils ont tous le même aspect extérieur, vigoureux, d'un beau vert foncé, et que ceux qui ont le scolyte ne diffèrent nullement de ceux qui ne l'ont pas encore. Il est trèsessentiel de faire cet examen, car on sait que M. Dutrochet ne pense pas que les scolytes puissent attaquer des arbres bien portants; et comme les opinions d'un savant aussi éminent ont un grand poids, il faut qu'un fait qui leur est contraire soit constaté par plusieurs naturalistes et avec le plus grand soin.

Ces observations mettent sur la voie des moyens à prendre pour préserver les arbres des premières attaques des femelles qui cherchent à pondre : des enduits, des chaulages qui couvriraient et saliraient les écorces, en repousseraient les femelles. Ces observations prouvent encore que M. Robert avait raison de recommander de ne pas laisser des arbres abattus et couverts de scolytes dans le voisinage des promenades plantées d'ormes. GUERIN-MENEVILLE T. V. 26

AOUT 1846.

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Extrait du rapport sur le concours ouvert par la Société Royale d'Agriculture

POUR LA DÉCOUVERTE ET LA MISE EN PRATIQUE

Des moyens propres à détruire les insectes nuisibles aux forêts.

Si l'étude des animaux qui nuisent aux végétaux cultivés par l'homme n'avait pour but que de nous faire connaître les raisons de certains phénomènes, la cause de certaines altérations, ou même seulement l'industrie admirable de ces animaux, nous devrions la cultiver avec le plus grand intérêt.

Mais l'intérêt qui s'attache à ces études n'est pas limité à cet ordre élevé d'idées; l'histoire naturelle des animaux, et surtout des innombrables insectes qui couvrent notre globe, envisagée sous un point de vue plus restreint, promet encore à l'homme des résultats avantageux. Nous n'exposerons pas ici ceux qu'elle lui a déjà donnés en lui fournissant les animaux domestiques; nous ne citerons qu'en passant le miel, la cire, la soie, la cochenille, les cantharides, etc., qu'il doit aux insectes; mais nous dirons que c'est surtout pour protéger ses récoltes qu'il a dù étudier ces petits ètres dans les plus grands détails.

Organe de la commission, chargé de lui faire connaître les travaux de ce genre qu'elle veut récompenser, et de signaler à la reconnaissance publique les auteurs de ces pénibles et longues recherches, nous allons présenter à la Société le résultat de l'examen que la commission a fait des différentes pièces adressées pour le concours.

Le travail le plus important, celui qui répond peut-être le mieux au programme des concours de l'année 1846, est celui de M. le docteur Eugène Robert, sur les moyens de guérir les arbres de nos promenades et de nos routes, affaiblis par la maladie, et ensuite attaqués par les scolytes, et de les préserver des nouvelles atteintes de ces insectes. Déjà, l'année dernière, nous avons fait connaître les résultats remarquables des grandes expériences auxquelles M. Robert a consacré son temps et ses peines avec un désintéressement, une persévérance et un zèle remarquables, et vous avez bien voulu l'encourager en lui décernant votre médaille d'or. Cette noble récompense a porté ses fruits; M. Robert a redouble de zèle, et il a continué d'appliquer aux ormes malades l'opération des incisions longitudinales, qui a pour but de régénérer l'écorce des arbres, et de lui donner une plus grande vitalité.

L'expérience ayant prouvé à M. Robert que des arbres, et les ormes entre autres, dépouillés des parties mortes de leur écorce, pourraient trèsbien supporter les grands froids et la sécheresse, sans qu'il fût nécessaire de les recouvrir d'un enduit quelconque, il a employé et procédé, dans certaines circonstances et selon l'état maladif ou l'âge des arbres, comme étant plus simple, aussi rapide et même plus économique, réservant les incisions (qu'il avait d'abord pratiquées presque exclusivement) pour des arbres chez lesquels la maladie offre certains caractères, ou pour les jeunes arbres et les grosses branches, sur lesquelles il les prolonge le plus haut possible, jusque vers la source de la sève descendante. Ces opérations,

tout en détruisant les larves et les nymphes de scolytes, ne permettent pas à d'autres générations de s'établir sur les arbres qui les ont subies, parce que leur nouvelle écorce possède un degré de vitalité qui les repousse; elles ont, de plus, la propriété d'augmenter notablement la production du bois, surtout chez les arbres stationnaires dont le developpement était retenu par une écorce morte, très-résistante et très-épaisse, qui ne se fendille que difficilement par la force même de la végétation, quand la maladie et l'épuisement causés par les insectes ne lui ôtent pas cette

force.

L'enlèvement de la portion morte de l'écorce des ormes est donc avantageux à ces arbres : l'homme vient ainsi aider la nature dans son travail; il fait pour les ormes ce qu'elle fait spontanément pour les platanes qui se dépouillent seuls, chaque année, de leur écorce morte, ou pour les animaux qui se débarrassent de l'épiderme de leur peau à mesure de leur accroissement. Du reste, cette décortication partielle a été pratiquée par de Saussure, Duhamel, de Buffon, Malpighi, de Candolle, Thouin, etc., dans des expériences bien connues des botanistes; et ces savants observateurs ont constaté que, loin de nuire aux arbres, elle leur donnait une nouvelle vigueur.

La Commission, qui a suivi avec le plus grand intérêt le traitement que M. Robert fait subir à 1227 arbres attaqués par le scolytes, en a rendu compte à la société, et cette compagnie approuve les principes qui ont guidé ce naturaliste dans son traitement; désirant cependant qu'on ne puisse la taxer d'agir avec précipitation, au sujet d'une operation qui intéresse essentiellement les plantations de nos grandes routes et promenades publiques.

Elle a décidé:

1o Qu'elle prorogerait son concours;

2o Qu'elle engagerait M. Robert à continuer l'application de ses procédés;

30 Qu'elle inviterait au besoin, ainsi qu'elle l'a déjà fait, l'autorité à lui faciliter les moyens de continuer ces diverses opérations.

Voulant, de plus, donner à M. Robert un encouragement digne de l'importance de ses travaux et un témoignage d'approbation pour les progrès qu'il a fait faire à ses procédés depuis l'année dernière, la société a décidé que le mémoire dans lequel ce naturaliste fait connaître avec clarté et détail son traitement des arbres attaqués par les scolytes, sera inséré, avec quatre planches, dans le recueil des mémoires de cette compagnie.

M. Chasseriau, de Rochefort, nous a adressé plusieurs communications sur la destruction des insectes nuisibles, et un mémoire ayant pour titre: Instructions sur l'Echenillage, suivi d'un grand tableau sur lequel sont représentées les principales espèces de chenilles, au nombre de soixantesix, et les divers états de ces insectes, jusqu'à leur parfait développe

ment.

Dans ce travail, M. Chasseriau insiste sur la nécessité de reviser la loi sur l'échenillage, et nous partageons entièrement son opinion. Il a échenillé, aux environs de Rochefort, depuis plusieurs années et à des époques diverses, suivant l'apparition des différentes espèces de chenilles, et M. le maire de Rochefort, se conformant à l'avis de la société d'agriculture de cette ville, qui approuve en tout point les vues de M. Chasseriau,

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