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doivent être non-seulement plus petites, mais aussi d'une autre forme, à laquelle on ne peut pas toujours donner la même régularité qu'à celle des peuplements de pins. Ces figures doivent être plus petites pour que l'abatage du peuplement entier de la figure ne nécessite pas un travail d'une longue durée. La prolongation du travail de la coupe a d'autant plus d'inconvénient, que la forêt d'épicéas contient sur la même superficie beaucoup plus de bois que la forêt de pins; cette dernière est toujours plus claire et contient plus souvent des vides que l'autre. Il faut donc, en dirigeant les coupes dans les forêts d'épicéas, avoir grand soin de former beaucoup de figures avec lisières protectrices, d'une superficie très-restreinte, et leur donner de préférence à la forme carrée celle de bandes longues et étroites.

1o Parce que ces bandes forment des murs qui protégent contre le soleil les semis dans les coupes pleines, et favorisent les semis naturels ;

2o Parce que les coupes carrées présentent un front trop large aux vents qui s'y engouffrent facilement, et forment des voies ou des files d'arbres renversés;

3o Parce que ces bandes s'adaptent plus à la configuration naturelle des montagnes, et aux mouvements du terrain, tandis que les carrés ne conviennent ordinairement que dans les plaines.

La division régulière d'une forêt en carrés ou en triages, telle qu'on la pratique avec avantage pour les forêts de pins situées en plaine, est en outre inapplicable à des forêts d'épicéas situées dans les montagnes, parce que dans celles-ci la direction des coupes dépend tout à fait de la direction des vents dominants, direction nécessairement très-variable. Souvent dans chaque vallée la direction des vents régnants est différente; chaque montagne isolée, chaque pente exposée différemment, demande une division à part, d'après des considérations particulières. Tous ces motifs. empêchent de former des carrés réguliers, lesquels auraient d'ailleurs l'inconvénient de présenter aux vents des fronts trop étendus.

Ces divisions ne doivent donc pas être tracées sur un modèle uniforme mais s'approprier à la configuration du terrain, et aux différentes circonstances de son exposition et de sa situation.

On peut citer comme modèle de ce genre la division des forêts saxonnes, faite par le célèbre Cotta, et il serait très-instructif de la comparer avec celle usitée dans les forêts prussiennes et dans les forêts françaises.

Le meilleur moyen pour empêcher les chablis dans les forêts de pins, c'est de raccourcir un peu la durée des révolutions, et de faire abattre, aussitôt qu'on en découvre, les sujets faibles, maladifs, détériorés, qui sont les seuls sur lesquels les vents aient prise.

Nous finirons ces observations en ajoutant que si les éclaircies n'ont aucun inconvénient dans les forêts de pins, il n'en n'est pas de même pour

les forêts d'épicéas. Dans ces forêts, elles ne doivent pas être trop fréquentes, et il faut les pratiquer avec de grands ménagements, de crainte d'ébranler les racines, qui s'entrelacent dans les épicéas comme les branches elles-mêmes. B...

MECANIQUE APPLIQUEE, ACCIDENTS DES CHEMINS DE FER. Substitution des longuerines en bois aux billes traversières sur les chemins de fer.

L'auteur, dans ce mémoire, s'attache principalement à faire res sortir les inconvénients résultant de la position transversale des supports en bois sous lesquels sont fixés les coussinets des rails; suivant lui, en disposant ces supports dans le sens de la voie, comme on le fait depuis long-temps aux États-Unis, on éviterait en grande partie les galops, et, ce qui est beaucoup plus important encore, on rendrait infiniment moins désastreuses les suites des déraillements. En effet, du moment où le déraillement a eu lieu, les roues qui marchent entre les rails trouvent un sol autrement résistant que celles en dehors; d'où il résulte rail que la vitesse n'étant pas la même des deux côtés, chaque véhicule tend à exécuter un mouvement de révolution qui doit l'écarter rapidement de la direction normale. Dans le cas, au contraire, où, par suite de la direction longitudinale des supports en bois, la résistance du sol est la même entre les rails et en dehors, la voiture déraillée, en continuant sa course, ne s'écartera que faiblement de cette direction, et pourra être arrêtée en temps utile. Il est même à remarquer qu'avec cette disposition des supports en bois, la voiture déraillée ne pourra pas, pour ainsi dire, quitter entièrement la voie; car les roues qui marchent sur le sol compris entre les deux rails s'y enfonçant profondément, rencontreront dans les supports longitudinaux, lorsqu'elles seront venues à les atteindre, un obstacle qu'elles ne franchiront pas, mais le long duquel elles seront forcées de se mouvoir, jusqu'à ce que la vitesse du train soit anéantie.

LAIGNEL.

REVUE JUDICIAIRE.

Usagers dans les bois et forêts: Impôts, frais de garde et de conservation, nouvelle jurisprudence de la Chambre des requêtes.—Animaux nuisibles, lapins, transport en temps prohibé; discussion d'un jugement du tribunal correctionnel de la Seine.

On sait combien, aujourd'hui encore, les Cours royales sont divisées sur la question de savoir si les usagers d'une forêt doivent supporter les contributions et subvenir aux frais de garde et de conservation de la forêt grevée dans la proportion des produits qu'ils absorbent.

La première, la Cour royale de Nancy a admis l'affirmative et elle l'a soutenue avec une louable persévérance par dix arrêts intervenus dans un intervalle de vingt-huit années.

Les considérations invoquées à l'appui de cette jurisprudence peuvent se résumer ainsi :

L'impôt foncier est, d'après les lois qui le régissent, une charge des fruits et non une charge de la propriété.

Il en est de même des frais de garde d'une forêt lesquels sont imposés, non pour la conservation du sol, qui ne peut périr, mais pour la conservation de la superficie.

Les frais de garde d'une forêt doivent donc, comme la contribution foncière, être prélevés sur les produits du sol, et supportés conséquemment par ceux qui sont appelés à jouir de ses produits conformément à la règle du droit romain: Fructus eos esse constat qui deducta impensa supererunt. (L. 7. Soluto matrimonio. Lib. 24, tit. 3).

Le Code civil dans son article 635 a fait application de cette règle à l'usage, servitude personnelle; à plus forte raison faut-il l'appliquer à l'usage forestier qui assure à perpétuité les produits des fonds servants : car il n'est pas possible d'admettre que le propriétaire soit tenu de supporter les frais qui ont pour objet les produits absorbés par l'usager.

Pour qu'il en fût ainsi, il faudrait que les lois particulières concernant l'usage dans les bois et forêts eussent dérogé à tous les principes de justice et de raison, ce qui n'est pas assurément.

Il n'est pas nécessaire du reste que l'obligation des communes ait été exprimée dans le titre qui leur a concédé les produits de la forêt : cette obligation est de droit : elle résulte de la nature même des choses.

Cette doctrine, qui est conforme aux principes de législation antérieure à 1789, sous l'empire de laquelle les usagers payaient l'impôt et participaient aux frais de garde au prorata de leur émolument, fut combattue par la plupart des Cours royales et par la chambre des requêtes de la

Cour de cassation (arrêt du 30 juillet 1838), d'après ces considérations que les droits d'usage dans les forêts ne constituant au profit des usagers qu'une servitude discontinue, on ne saurait appliquer à ceux-ci les dispositions de l'art. 635 du Code civil, lequel n'est relatif qu'au droit d'usage personnel; qu'il y a d'autant plus lieu de décider ainsi, qu'aux termes de l'art. 636 du même code, les usages dans les bois et forêts sont régis par des lois particulières. Toutefois, un nouvel arrêt, en date du 13 août 1839, a fait cette concession que l'usager doit être soumis au paiement de l'impôt et des frais de garde, lorsque la totalité des fruits lui appartient, ou lorsque le titre duquel dérive son droit lui impose ces charges en tout ou en partie.

On a, à juste raison adressé à la doctrine de cet arrêt le reproche d'arbitraire. En effet, s'il est vrai, comme la chambre des requêtes l'a déclaré dans son arrêt du 30 juillet 1838, que l'usager doive être dispensé de toute charge, par cela seul que les droits d'usage dans les forêts sont des servitudes discontinues auxquelles l'art. 635 du Code civil est inapplicable, peu importe qu'il perçoive tout ou partie des fruits : le principe est le même et il y a même raison de décider dans les deux cas. Ainsi qu'il est facile de s'en convaincre en l'envisageant dans ses résultats, la doctrine consacrée par cet arrêt, a le grave inconvénient d'établir entre les usagers de choquantes inégalités que rien ne justifie.

Tel était l'état de la jurisprudence en cette matière, lorsque, pour la première fois, la question fut soumise à la chambre civile de la Cour de cassation à l'occasion de deux arrêts par lesquels la Cour royale de Nancy, fidèle à sa jurisprudence, avait condamné les communes de Vaxoncourt 1, et de Saint-André, usagères dans des forêts appartenant à des particuliers, à supporter les frais de garde et à payer les contributions.

D'accord avec ses précédents la chambre des requêtes avait admis le pourvoi mais la chambre civile, par deux arrêts de rejet, en date du 25 février 1845, adhéra entièrement à la doctrine de la Cour royale de Nancy.

Malgré l'importance et l'autorité de ces arrêts il y avait lieu de se préoccuper de l'attitude que prendrait la chambre des requêtes. Cette chambre, si elle persévérait dans sa jurisprudence, pouvait en effet écarter et soustraire à la censure de la chambre civile, tous les arrêts des Cours royales qui se montreraient favorables aux prétentions des usagers. L'occasion s'est présentée pour elle de se prononcer de nouveau à l'occasion d'un pourvoi, dirigé au nom de l'Etat, contre un arrêt de la Cour royale de Pau, du 23 juillet 1846, qui avait décidé que les commu

'C'est entre la commune de Vaxoncourt et les héritiers Le Bègue, et non entre la commune de Zincourt et l'Etat, comme on l'a dit par erreur, que s'est élevé le débat sur lequel a statué l'arrêt de cassation, rapporté au bulletin, art. 333, 3 espèce, page 369 in fine.

nes de Sarrancolin et d'Ilhet, usagères dans les forêts domaniales dépendantes de l'ancien prieuré de Sarrancolin, ne devaient pas être tenues de contribuer aux frais de garde et de conservation, par le motif « que les » droits d'usage ne constituent qu'une servitude imposée sur le fonds: » que dans l'espèce, le titre constitutif des droits d'usage n'imposant aux » usagers aucune obligation quant aux frais de garde et de conservation, » on ne saurait, sans ajouter au prix de la concession et sans modifier la » convention primitive des parties, assujettir ces usagers à d'autres charges qu'à celles consignées dans leurs titres. »

D

Sans s'arrêter à ces considérations, puisées en partie dans un arrêt du 30 juillet 1838, la chambre des requêtes, revenant sur son ancienne jurisprudence et adoptant sans réserve la doctrine de la chambre civile, accueillit le pourvoi, par arrêt du 10 août dernier.

La question d'impôt, il est vrai, n'avait pas été soulevée dans l'espèce, mais il est hors de doute qu'elle eût été tranchée dans le même sens que celles sur lesquelles la Cour était appelée à se prononcer. Le principe ubi onus ibi emolumentum pouvant être invoqué dans l'un comme dans l'autre

cas.

On peut dès lors considérer aujourd'hui la jurisprudence comme définitivement fixée dans ce sens.

Les lecteurs qui désireront s'édifier plus amplement sur la question, pourront se reporter avec fruit aux observations formulées par M. Loiseau, à la suite des arrêts de la chambre civile du 25 février 1845 (Bulletin, t. II, page 370), et à l'article publié par M. Meaume (Annales, t. IV, page 212), sur les conséquences pratiques de la jurisprudence consacrée par ces arrêts. Une des questions les plus importantes auxquelles ait donné lieu la loi du 3 mai 1844, cette loi qui, à peine promulguée, a déjà soulevé tant de difficultés, se présentait récemment devant une des chambres du tribunal correctionnel de la Seine.

Il s'agissait de savoir si le lapin, lorsqu'il est classé parmi les animaux nuisibles dont la destruction est permise en tout temps, peut être licitement transporté pendant que la chasse est close, alors qu'il a été détruit à l'aide d'un procédé non autorisé par l'autorité préfectorale.

La question se présentait dans les circonstances suivantes :

Une ordonnance de M. le préfet de police, du 10 mars 1845, autorise, en temps prohibé, la destruction des lapins et autres animaux nuisibles, mais seulement à l'aide de bourses et de furets.

Or, dans le courant du mois de juillet, et par conséquent avant l'ouverture de la chasse, M. F. D., avocat, fut surpris porteur de lapins qu'il déclara avoir tués au fusil dans un parc clos et attenant à une habitation.

Le ministère public ayant cru reconnaître, dans le fait constaté, le délit de transport de gibier en temps prohibé, fit citer M. F. D. en police correctionnelle, et développa à l'appui de la prévention le système suivant : Les lapins ayant été tués dans un parc clos et attenant à une habita

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