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âge. S'il a agi avec discernement, la justice commande qu'il ne soit condamné, même pour crime, qu'à la peine de l'emprisonnement; de même que les mineurs de seize ans, avec lesquels les sourds-muets ont la plus grande ressemblance quant aux facultés intellectuelles et morales.

VII. Nous ferons remarquer que les art. 70, 71, 72 du projet adoucissent la peine des travaux forcés en faveur des personnes agées de 70 ans, sans considérer cependant la vieillesse comme une cause d'excuse. Les mots: maison de force, qui se trouvent dans l'art. 72, doivent être remplacés par maison de réclusion, conformément aux art. 15 et 19 du projet.

VIII. Enfin, nous proposons d'ajouter à ces articles une nouvelle disposition, en vertu de laquelle la peine de mort serait remplacée par celle des travaux forcés à perpétuité à l'égard des individus âgés de moins de vingt ans au moment du crime. Nous n'avons pas besoin sans doute de justifier par de longs raisonnements cette innovation réclamée par l'humanité. Si la peine de mort est encore une triste nécessité, du moins elle doit être restreinte à un très-petit nombre de cas. La vivacité des passions qui agitent la jeunesse ; l'absence, à cet âge, d'une perversité endurcie; la certitude de parvenir à l'amendement de l'accusé; tout commande à la société d'user d'indulgence envers de pareils coupables, et de ne pas les envoyer au supplice. La peine de mort, exécutée sur des individus de cet âge, serait un acte affligeant pour l'humanité et qui n'aurait jamais l'assentiment de la conscience publique. Miseratio ætatis ad mitiorem pœnam judicem producere debet. On nous objectera peut-être le système des circonstances atténuantes et l'exercice du droit de grâce. Mais, lorsqu'on doit convenir que, dans aucun cas, la peine de mort ne doit être appliquée à de jeunes criminels au-dessous de l'âge indiqué, pourquoi la loi ne le déclarerait-elle pas formellement? Du reste, la disposition que nous proposons, n'est pas une nou

veauté, elle se trouve déjà consacrée par d'autres législations. En effet, les Codes de Naples et de Parme défendent de prononcer la peine de mort contre des individus qui n'ont pas encore accompli leur dix-huitième année; et le Code criminel des Etats romains exige que le coupable soit âgé de plus de vingt ans, pour que cette peine puisse être appliquée (1). Nous donnons la préférence à cette dernière disposition.

DES CIRCONSTANCES ATTÉNUANTES.

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Le système des circonstances atténuantes se trouve dans un rapport intime avec celui des excuses. Toutefois, une notable différence sépare les unes des autres. Les circonstances atténuantes ne sont pas, comme les excuses spécialement définies par la loi; tous les motifs qui affaiblissent la culpabilité de l'agent ou la criminalité de l'acte en soi, sont des circonstances atténuantes, dont l'appréciation est laissée au jury ou aux tribunaux correctionnels, en vertu des art. 462 et 463 du projet. Les excuses opèrent de plein droit une diminution très-considérable de la peine; il n'en est pas de même des circonstances atténuantes. Les excuses, si l'on excepte la minorité de 16 ans sont restreintes à un très-petit nombre de crimes; les circonstances atténuantes, indéfinissables et illimitées de leur nature, s'appliquent à tous les crimes et délits.

Sur tout fait d'excuse allégué par l'accusé, une question spéciale est posée au jury, à laquelle celui-ci doit répondre catégoriquement. Quant à la déclaration des circonstances atténuantes, cette déclaration ne porte pas sur un fait particulier; elle est générale et résulte de l'impression qui a été produite sur le jury par l'ensemble des débats. Le jury n'est point interrogé sur tel ou tel fait; il est averti par le président, qu'il peut déclarer les circonstances atténuantes; il n'est point tenu de répondre; s'il n'est pas d'avis qu'elles existent, il se taira, et laissera son cours à la justice de droit

(1) Voyez nos observations sur la peine de mort.

commun. Enfin, lorsque le jury a déclaré des circonstances atténuantes, la cour, dans l'application de la peine, est obligée de descendre d'un degré, et elle a la faculté de descendre de deux degrés; tandis qu'en matière correctionnelle, les tribunaux sont seulement autorisés à réduire la peine (1).

La liaison qui existe naturellement entre les excuses et les circonstances atténuantes, et qui est même indiquée par l'art. 65 du projet de révision, exige que les articles 462 et 463 soient placés immédiatement après l'art 69 du projet.

Les observations que nous venons de développer, sont formulées dans les articles suivants, qui formeront un chapitre particulier intitulé :

DES CAUSES DE JUSTIFICATION, DES EXCUSES ET DES CIRCONSTANCES ATTENUANTES.

ART. A. Il n'y a ni crime ni délit, lorsque l'action était ordonnée par la loi et commandée per l'autorité légitime.

Néanmoins, lorsqu'un fonctionnaire ou officier public, un dépositaire ou agent de l'autorité ou de la force publique aura ordonné ou fait quelque acte contraire à la loi, s'il justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs, pour des objets du ressort de ceux-ci et pour lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle sera, dans ce cas, appliquée seulement aux supérieurs qui auront donné l'ordre.

ART. B. (Art. 64 du Code pénal. )

ART. C. (Art. 65 du Code pénal. )

ART. D. (Art. 66 du Code pénal, en substituant le mot prévenu, à celui d'accusé.)

ART. E. (Art. 67 du projet, en modifiant le dernier alinéa comme suit: S'il a encouru la peine de la dégradation civique, il sera condamné à un emprisonnement d'un an à trois ans.) ART. F. (Art. 68 du projet.)

(1) Exposé des motifs de la loi du 28 avril 1832.

ART. G. (Art. 69 du projet, en substituant aux mots : condamné âgé de moins de seize ans, ceux-ci: mineur de seize ans).

ART. H. Aucun individu ne sera traduit en justice pour crime ou pour délit, s'il n'avait, au temps de l'action, accompli sa neuvième année.

ART. I. Lorsqu'un individu sourd-muet, majeur de seize ans, sera accusé de crime, la question indiquée dans l'art. 340 du Code d'instruction criminelle, sera posée au jury.

S'il est décidé qu'il a agi SANS DISCERNEMENT, il sera acquitté. S'il est décidé qu'il a agi AVEC DISCERNEMENT, les peines seront prononcées conformément à l'art. E du présent Code. (Art. 67 du projet) (1).

ART. K. (Art. 462 du projet).

ART. L. (Art. 463 du projet).

ART. M. La peine de mort ne sera prononcée contre aucun individu âgé de moins de vingt ans au moment du crime. Cette peine sera remplacée, à l'égard des individus au-dessous de cet âge, par celle des travaux forcés à perpétuité.

ART. N. La peine des travaux forcés ne sera prononcée contre aucun individu âgé de soixante-dix ans accomplis au moment du jugement.

ART. O. Cette peine sera remplacée, etc. (Art. 71 du Code pénal).

ART. P. (Art. 72 du Code pénal, avec substitution des mots maison de réclusion, à ceux de maison de force.)

ART. 73, 74.

1

Ces articles doivent être placés immédiatement après l'art. 55 du projet.

(1) Qnant aux simples délits, la disposition de l'art. 463 nous paraît suffire pour le cas dont nous parlons,

NOTES.

Page 88, ligne 8, art. C.

Peut-être conviendrait-il de substituer les mots : pour L'EXISTENCE du crime, à ceux-ci: pour la CONSOMMATION du crime. Page 112, après le second alinéa, il faut ajouter ce qui suit : Dans la discussion du projet de loi sur la responsabilité ministérielle (séance du 25 mars 1835), M. Chapuis-Montlaville avait proposé de décréter que la peine de mort ne pourrait jamais être prononcée. Cet amendement, appuyé par MM. Gaétan de la Rochefoucault et de Tracy, a été rejeté.

Page 115, dernière ligne.

Qu'une seule condamnation, lisez, que deux condamnations.

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