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des armes pour quelques bataillons de fédérés qui furent envoyés à l'armée. Parce que ces soldats criaient vive la liberté, la nation, l'Empereur! c'étaient, répétait-on toujours, des terroristes qu'il serait dangereux d'armer et qui jetteraient l'épouvante parmi les honnêtes gens de la capitale.

Des compagnies, des bataillons entiers de la garde nationale envoyaient députation sur députation à leur commandant-général, à la commission de gouvernement, pour demander la permission de sortir et de se joindre à l'armée, on leur répondait : Restez tranquilles, mes amis; quand il en sera temps, on vous avertira; et l'on se moquait d'elles quand elles étaient sorties des Tuileries ou de chez leur général.

De grandes dispositions avaient été faites, d'après les ordres de l'Empereur, pour la défense de Paris; mais les travaux de la circonvallation n'avaient point été terminés sur la rive gauche de la Seine; avec quelques milliers d'ouvriers, on eût pu, dans huit jours, les achever, ou du moins fortifier les points principaux. On n'y employait, pour la forme, que deux à trois cents hommes, qui jetaient leurs outils en disant, avec l'accent de l'indignation, que c'était une dérision amère et une lâche trahison.

La commission nomma Lafayette, d'Argenson, Sébastiani, Pontécoulant et Laforêt, plénipotentiaires pour négocier avec les coalisés; Benjamin Constant leur fut adjoint comme secrétaire. D'après leurs instructions, il y avait deux points essentiels auxquels tout était subordonné: l'indépendance na

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tionale et l'intégralité du territoire. On se basait sur les propres déclarations des coalisés. L'abdication de Napoléon rendait à la nation le droit de se choisir un gouvernement; on s'y prononçait contre le retour des Bourbons et pour Napoléon II. Il importait d'obtenir un armistice. Il fallait stipuler la sûreté et l'inviolabilité de l'Empereur dans la résidence qui lui serait assignée. Les questions étaient bien posées, bien définies; principes, raisonnemens, tout était concluant, incontestable, et dans le sens du véritable intérêt national. Mais la commission devait bien savoir que les coalisés se moqueraient de tous ces argumens, s'ils n'étaient pas appuyés par les armes, et que tout serait décidé sous les murs de Paris, tandis que les plénipotentiaires iraient courir après les diplomates et leurs maîtres.

A la Malmaison, dans cet asile modeste d'une gloire immortelle où le premier Consul eut plus de grandeur et de bonheur véritables que l'Empereur dans ses palais, Napoléon, descendu du trône, était toujours un grand embarras pour ceux qui avaient provoqué son abdication, pour la commission de gouvernement, et surtout pour Fouché. Il n'avait pas été pourvu à son avenir, lui-même n'y avait pas pensé; les évènemens marchaient et vite. Tout le monde était surpris. On se ravisa pourtant, lorsque l'Empereur sortit de Paris. Le peu d'amis qui lui restaient fidèles, les Français qui tenaient à l'honneur national, voulaient le soustraire à la vengeance de l'étranger et des Bourbons; ses ennemis et la

commission tremblaient qu'il se jetât dans l'armée, cé fut sa première pensée, et qu'il reprît le pouvoir. Après l'évasion de l'île d'Elbe et ses conséquences, espérer des puissances qu'elles lui accorderaient un asile honorable et la liberté, que la commission de gouvernement et ses plénipotentiaires en feraient une condition impérieuse dans les négociations, que la nation le protégerait de toute sa puissance, c'était une illusion, une folie. Il était bien plus probable que les puissances voudraient le retenir prisonnnier, que la France, assez préoccupée de sa propre sûreté, ne pourrait rien pour lui, que la commission l'abandonnerait, que, même au besoin, il y aurait des avis pour le livrer. Il n'avait donc à choisir qu'entre deux partis; fuir s'il tenait à la vie; s'il la méprisait, se livrer lui-même à la vengeance de ses ennemis ou s'abandonner au cours des évènemens. Dans le premier cas, dépouiller entièrement la dignité ou l'étiquette impériale, partir de suite, voyager en simple particulier, gagner un port, mettre à la voile et cingler vers le Nouveau-Monde. C'était un effort à faire, impossible pour un roi de naissance, difficile même pour un empereur de fortune, tant le trône inspire d'orgueil et amollit le courage. La première pensée de Napoléon, dupe des idées propagées par les anglomanes sur la générosité du caractère anglais, fut de se retirer en Angleterre et de s'y placer sous la sauve-garde des lois et de l'hospitalité. Dans ce projet, il trouvait de la grandeur, de la dignité; quelques-uns de ses amis l'admiraient,

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