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statation du délit d'insoumission en temps de paix en cas de rappel de classe par décret, sauf les quelques modifications suivantes :

Art. 266. - Le rappel d'une classe par décret étant une mesure d'exception applicable seulement en certaines circonstances, et la durée de l'appel ne pouvant être déterminée à l'avance, il ne saurait être question de renvoyer à une convocation normale de l'année suivante l'homme qui n'aurait pas obéi à une première convocation.

En conséquence, dès que les corps de troupes auront signalé aux commandants de recrutement (trois jours après l'arrivée des hommes) les hommes qui n'ont pas rejoint, les commandants de recrutement établissent pour eux les bulletins de recherches et leur adressent, en même temps qu'à la gendarmerie, des ordres d'appel individuels. Ces ordres convoquent les retardataires à une date aussi rapprochée que possible de la date fixée par le décret rappelant la classe dont ils font partie.

Si l'homme n'a pas rejoint à cette date, le commandant de recrutement lui adresse un ordre de route dans les conditions prévues cidessus, et si enfin l'homme n'a pas obéi aux prescriptions de cet ordre dans les délais normaux, il est déclaré insoumis et traité comme tel.

Il doit bien être entendu que le retard à la convocation n'entraine dans ce cas, comme dans le précédent, qu'une simple punition disciplinaire.

INSOUMISSION EN TEMPS DE GUERRE.

Art. 267. - Est déclaré insoumis en temps de guerre l'homme de la disponibilité ou de la réserve de l'armée active, de l'armée territoriale ou de la réserve de cette armée qui n'a pas rejoint dans le délai de deux jours après la date fixée, soit par l'ordre de route de son livret, soit par un ordre d'appel pour un service spécial.

Art. 268. Toutefois, les hommes qui ont fait les déclarations prévues dans l'art. 55 de la loi du 15 juillet 18897changements de résidence, voyage, etc.), ont droit, pour rejoindre, à des délais supplémentaires calculés d'après la distance à parcourir. (Art. 56 de la loi.)

Tout homme qui se trouve dans ces conditions doit se présenter à la gare la plus voisine de sa résidence avant neuf heures du matin, le deuxième jour, s'il est disponible ou réserviste; le troisième jour, s'il appartient à l'armée territoriale.

Pour les hommes à l'étranger, aucune règle ne peut être fixée à l'avance; chaque cas particulier devra être examiné séparément, et soumis au général commandant la région de corps d'armée, qui fixe les délais à observer pour la déclaration en insoumission.

Art. 269. En cas de mobilisation, il n'est pas notifié aux hommes d'autre ordre de route que celui qui figure dans leur livret (L. du 19 mars 1875) ou que l'ordre d'appel qui peut leur avoir été notifié pour un service spécial, Le livret ou le récépissé en tenant lieu et, le cas échéant, l'ordre d'appel pour un service spécial sont toujours entre les mains de l'homme; la remise du livret ou de l'ordre d'appel pour un service spécial a été constatée par procès-verbal; on peut donc dire que l'ordre de route ou l'ordre d'appel, en cas de mobilisation, est par cela même notifié à l'homme; il ne peut arguer d'aucune excuse s'il ne rejoint pas dans les délais. Art. 270. Les corps de troupes adressent

immédiatement aux commandants de recrutement la liste des hommes qui n'ont pas rejoint dans les délais légaux, c'est-à-dire deux jours après la date fixée par leur ordre de route.

Ces listes seront donc envoyées le troisième jour au soir pour les hommes convoqués le premier jour; le quatrième jour pour ceux appelés le deuxième, et ainsi de suite.

Les hommes qui ont fait les déclarations prévues à l'article 55 de la loi du 15 juillet 1889, ne sont déclarés insoumis qu'à l'expiration des délais supplémentaires auxquels ils ont droit.

Art. 271. Les hommes des services auxiliaires, qui ne font partie d'aucun corps, et les hommes qui sont convoqués par ordre d'appel individuel pour un service spécial, qui n'ont pas rejoint deux jours après la date fixée par leur ordre d'appel, sont signalés aux commandants des bureaux de recrutement par les chefs des détachements ou des services auxquels ils sont affectés.

Les hommes ainsi signalés sont déclarés insoumis; ceux qui appartiennent à un corps de troupes sont rayés des contrôles de ce corps. Les uns et les autres sont inscrits au contrôle des insoumis, et recherchés comme tels.

Pour chaque canton, les commandants de recrutement établissent la liste des hommes domiciliés dans le canton déclarés insoumis. Ces listes sont envoyées aux préfets, qui les font afficher dans toutes les communes du canton. (Art. 73 de la loi du 15 juillet 1889.) Art. 272. Un insoumis du temps de paix, qui ne rejoint pas lors de la mobilisation, commet un deuxième délit d'insoumission, qui doit rester distinct du premier.

Le commandant de recrutement qui constate le fait établit, alors que l'homme sera arrêté ou se sera présenté volontairement, une plainte en conseil de guerre, constatant les deux délits, et les mentionnant séparément et d'une façon distincte.

Art. 273. Un insoumis du temps de paix peut, au contraire, se présenter au corps au moment de la mobilisation. Il est probable, dans ce cas, qu'il se présentera au corps désigné sur son livret,

Tout corps de troupes qui constatera l'arrivée d'un homme ne figurant pas sur ses contrôles, le recevra néanmoins et l'incorporera au dépôt. Il signalera aussitôt le fait au commandant du bureau de recrutement auquel l'homme appartient, en lui envoyant en même temps les renseignements permettant de constater l'identité et la situation de l'homme. Dans le cas où l'homme se présenterait à un bureau de recrutement, il sera incorporé au régiment d'infanterie voisin, quelle que soit son arme, et placé au dépôt.

Art. 274. - Les hommes dont il vient d'être question attendront au dépôt la suite (refus d'informer, ordonnance de non-lieu ou ordre d'envoi devant un conseil de guerre) qui sera donnée, par le commandant du corps d'armée, à la plainte en conseil de guerre établie par le commandant de recrutement de leur domicile.

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Art. 275. L'homme qui aura été acquitté ou qui aura été l'objet d'un refus d'informer, devra être dirigé sur les unités de campagne le plus tôt possible.

Dispositions communes au temps de paix
comme au temps de guerre.

Art. 276. On se reportera, en outre, pour toutes les formalités à remplir en cas d'insou

mission (en temps de paix et en temps de guerre), à l'instruction sur la recherche et la poursuite des insoumis.

Les hommes de la disponibilité, de la réserve de l'armée active, de la réserve de l'armée territoriale et de la réserve de cette armée, pouvant n'être pas munis de leur livret au moment de leur arrestation ou de leur présentation volontaire, leurs états de service devront toujours être joints par les commandants de recrutement aux dossiers de la plainte en insoumission.

Art. 277. Le commandant de recrutement est chargé de tenir le contrôle des insoumis. Ce contrôle unique comprend tous les hommes, quelle que soit la catégorie dont ils font partie.

Par exception, dans le gouvernement militaire de Paris, il est tenu trois contrôles des insoumis l'un pour l'armée active, le second pour la disponibilité et la réserve de cette armée, le troisième pour l'armée territoriale.

Les inscriptions à ce contrôle sont faites en suivant l'ordre des dates de l'insoumission. L'indication de la classe de recrutement, et, s'il y a lieu, de la classe de mobilisation, est donnée pour chaque homme.

Le commandant de recrutement établit les dossiers des hommes insoumis.

Art. 95.

Dans le cas de désertion, la plainte est dressée par le chef du corps ou du détachement auquel le déserteur appartient.

Sont annexés à cet acte:

1° Un extrait du registre matricule du corps;

2o Un état indicatif des armes et des objets qui auraient été emportés par l'inculpé;

3o L'exposé des circonstances qui ont accompagné la désertion. 124 Ma.

Il est nécessaire de joindre, aux pièces qui sont spécifiées dans l'article 95, le procès-verbal d'arrestation ou de présentation volontaire, afin de constater exactement le jour où l'absence illégale de l'inculpé a cessé.

A titre de renseignements sur la moralité du militaire en cause, on doit aussi joindre le relevé des punitions qu'il a subies depuis son entrée au service jusqu'au jour de son arrestation.

L'article 95 est impératif; c'est au chef de corps ou de détachement, seul, à dresser la plainte tendant à traduire un déserteur en conseil de guerre. (Voir les modèles n. 7 bis et 17.) Un déserteur dont l'extradition est demandéé et qui rentre en France pour purger une condamnation, ne doit pas être jugé sur le fait de désertion, même de son consentement. On doit le remettre à la disposition de l'autorité civile, qui le fait reconduire à la frontière, et il n'est arrêté de nouveau que s'il rentre en France, après avoir été replacé libre sur le territoire étranger. (Circ. 19 juillet 1862.)

Les militaires maintenus au corps par mesure disciplinaire en vertu de l'article 47 de la loi sur le recrutement, qui se rendent coupables de désertion, doivent être traduits devant un conseil de guerre. (Note min. 18 avril 1891.)

Art. 96. Il n'est pas dérogé par les articles précédents aux lois, décrets

et règlements relatifs aux devoirs imposés à la gendarmerie, aux chefs de poste et autres militaires dans l'exercice de leurs fonctions ou pendant le service. 126 Ma.

C'est ainsi que, lorsque le flagrant délit a cessé sans qu'il y ait eu de mandat décerné contre un inculpé militaire, si ce dernier est présent à son corps, l'officier de police judiciaire appartenant à la gendarmerie doit en donner avis à ses supérieurs, afin qu'ils le mettent en état d'arrestation provisoire; toutes les pièces de l'information sont adressées directement à l'officier supérieur ou général, qui peut donner l'ordre d'informer contre l'inculpé. Si celui-ci est absent de son corps, et même dans une situation régulière, la gendarmerie ne l'arrête pas moins en vertu des articles 274 et 275 du décret du 1er mars 1854 ainsi conçus : « Art. 274. Ils tachent de connaître les noms, signalements, demeures ou lieux de retraite de ceux qui ont commis des crimes ou délits; ils reçoivent les déclarations qui leur sont faites volontairement par les témoins, et les engagent à les signer, sans cependant pouvoir les y contraindre.

«

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Ils se mettent immédiatement à la poursuite de ces malfaiteurs pour les joindre et, s'il y a lieu, pour les arrêter au nom de la loi.

« Art. 275. Après s'être assurés de l'identité de ces individus, par l'examen de leurs papiers et les questions qu'ils leur font sur leurs noms, leur état, leur domicile et les lieux d'où ils viennent, ils se saisissent de ceux qui demeurent prévenus de crimes, délits ou vagabondage, et ils en dressent procès-verbal; mais ils relâchent immédiatement ceux qui, étant désignés comme vagabonds ou gens sans aveu, se justifient par le compte qu'ils rendent de leur conduite, ainsi que par le contenu de leurs certificats et passeports.

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Le procès-verbal d'arrestation doit contenir l'inventaire exact des papiers et effets trouvés sur les prévenus; il est signé par ces individus et, autant que possible, par deux habitants les plus voisins du lieu de la capture; s'ils déclarent ne vouloir ou ne savoir signer, il en est fait mention; les sous-officiers, brigadiers et gendarmes conduisent ensuite les prévenus par devant l'officier de police judiciaire de l'arrondissement, auquel ils font la remise des papiers

et effets.

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Art. 97. Les actes ou procèsverbaux dressés par les officiers de police judiciaire militaire sont transmis sans délai, avec les pièces et documents, au général commandant la circonscription.

Les actes et procès-verbaux émanés des officiers de police ordinaire, sont transmis directement au procureur de la République, qui les adresse, sans délai, au général commandant la circonscription. (Texte conforme à la loi du 18 mai 1875.) 127 Ma.

La série des faits qui ont été tracés dans les articles précédents forme la première phase. C'est la période où la plainte, la dénonciation,

le bruit public ont averti l'autorité de l'existence d'un délit, et ont signalé le coupable; la période où l'officier de police a recueilli les premiers indices, opéré des saisies, dressé des procèsverbaux, recueilli les documents propres à éclairer la justice, et le plus souvent procédé à l'arrestation du prévenu. Mais l'autorité de laquelle tout procède et à qui tout revient aboutir, c'est le général commandant la circonscription. Les actes et les procès-verbaux doivent lui être transmis. C'est à ce moment que va commencer la poursuite; l'ordre d'informer en sera le premier acte. (Rapport.)

Les pieces transmises à l'autorité supérieure doivent être closes et cachetées.

Quant aux frais occasionnés par l'instruction préparatoire, l'article 143 de l'instruction du 18 avril 1890 donne ainsi qu'il suit la marche à suivre pour les liquider:

• Frais. Art. 143. Les officiers de tous grades, les fonctionnaires et employés militaires, les sous-officiers, caporaux et soldats en activité, appelés en témoignage, n'ont droit pour

dans l'exécution des jugements de condamnation. (Lettre ministérielle du 7 mai 1863.)

«Le mandat de payement délivré à chaque témoin doit indiquer son état ou sa profession et son domicile. Dans le cas où le témoin est un sous-officier ou soldat en congé sans solde, ou bien appartenant à la réserve, le mandat en fait également mention.

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Lorsqu'un officier de police judiciaire militaire s'est déplacé pour un acte de son ministère, et que ce déplacement lui occasionne des frais, il doit, pour en obtenir le remboursement, établir un mémoire qu'il joint aux pièces à adresser au général. Le commissaire du gouvernement rapporteur saisi de l'affaire est tenu de rendre ce mémoire exécutoire. (Voy. à l'Appendice le décret du 18 juin 1811, art. 142.)

Les dispositions qui précèdent ont été édictées pour les armées en campagne, mais elles doivent être également suivies en temps de paix.

Art. 98. S'il s'agit d'un individu

leur déplacement à aucune indemnité spéciale justiciable des tribunaux ordinaires, le

sur les fonds de la justice militaire.

Il en est de même :

1° Des officiers de tous grades, des fonctionnaires et employés militaires en disponibilité ou en non-activité, jouissant d'un traitement;

2o Des employés de l'armée, ou attachés à la suite, qui reçoivent de l'Etat un traitement.

Les individus non militaires et les employés de l'armée ou attachés à la suite, auxquels l'Etat ne paye directement aucun traitement d'activité, reçoivent, quand ils sont appelés en témoignage, une indemnité qui est fixée par l'officier de police judiciaire et qui ne peut être moindre de 1 franc, ni supérieure à 2 fr 50 par jour, soit de séjour, soit de voyage.

La journée de marche est décomptée à raison de 24 kilomètres.

Les interprètes sont taxés également par l'officier de police judiciaire à raison de 6 francs par séance entière de jour et de 9 francs par séance entière de nuit; la traduction par écrit, qu'ils peuvent être appelés à faire, de pièces à conviction rédigées en langue étrangère, constitue un travail à part dont le prix fait l'objet d'une évaluation spéciale.

Sont taxés à raison de 6 francs par vacation, les experts écrivains et les officiers de santé ou médecins civils dont le ministère a été requis. (Voy. le § Frais de justice militaire.)

L'officier de police judiciaire militaire qui a instrumenté en vertu d'une commission rogatoire, délivre immédiatement aux témoins, interprètes, experts, médecins, les mandats de payement sur le payeur particulier de la division, ou sur le payeur principal du quartier général dont il fait personnellement partie. Mais il doit préalablement inviter les ayants droit à déclarer s'ils requièrent la taxe. Mention de cette déclaration est faite dans le mandat. (Idem.)

Les mandats de payement des témoins sont inscrits au dos de la cédule qu'ils ont apportée en venant déposer. S'il s'agit d'un médecin ou d'un expert, le mandat de payement est inscrit au dos de la copie du réquisitoire qui lui a été adressé. Le réquisitoire devant faire partie de la procédure, c'est une partie de ce réquisitoire qui sert à allouer la taxe.

Un bordereau des sommes allouées aux témoins, et, s'il y a lieu, aux médecins et aux experts, est joint aux pièces d'information, lors de leur envoi, afin que ces frais puissent figurer

général commandant envoie les pièces au procureur de la République près le tribunal du chef-lieu de la circonscription militaire; et si l'inculpé est arrêté, il le met à la disposition de ce magistrat et en informe le ministre de la guerre. (Texte conforme à la loi du 18 mai 1875.) 128 Ma.

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Il résulte de cet article que l'information ne peut être commencée que sur l'ordre du général commandant la circonscription, qui, suivant son appréciation et l'inspiration de sa conscience, reste libre de le donner ou de le refuser. Ce n'est sans doute que dans des cas fort rares que l'autorité militaire, appelée à exercer ainsi des fonctions judiciaires, use de cette faculté de refuser une information. Ce ne peut jamais être, par exemple, lorsqu'il existe une plainte fondée et bien motivée, dressée par un chef de corps, relativement à un fait dans lequel la justice, la discipline et l'honneur de l'armée seront inté

ressés.

Mais, si une plainte injuste ou futile a été portée, soit par une partie se prétendant lésée, soit par un agent inférieur de la police judiciaire, ou si une plainte, inspirée par la passion ou la vengeance, a été dirigée contre un brave militaire, le devoir du général commandant la circonscription est d'apprécier les faits dans sa haute indépendance et de ne prendre conseil que de sa conviction et de sa conscience. Nul

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n'est mieux placé que lui pour exercer un tel pouvoir.

Cette faculté, d'ailleurs, est conforme au droit commun, et n'est pas plus exorbitante dans l'ordre militaire qu'elle ne l'est dans l'ordre civil, où généralement personne ne peut contraindre l'action du ministère public. En matière correctionnelle, le procureur général, le juge d'instruction lui-même, peuvent ne pas poursuivre s'ils estiment qu'il n'y a pas lieu juridiquement d'en agir ainsi. Il en est de même encore en matière de grand criminel, lorsqu'il résulte des éléments de la plainte que le caractère du délit n'existe pas, ou qu'il y a eu exagération dans les faits incriminés. (Exposé.)

Sans doute, dans le droit commun, la partie lésée peut saisir directement le tribunal, tandis que devant la justice militaire on peut objecter qu'elle est exposée se trouver victime d'un déni de justice. Mais, d'un autre côté, il est facile de répondre qu'un particulier ne va demander au tribunal que la réparation du préjudice qu'il a souffert, et qu'il le demande à ses risques et périls, car il est toujours, en cas d'échec, condamné aux frais, et il peut l'être à des dommages-intérêts. C'est là fe frein des actions téméraires. Or, cette réparation pécuniaire, la partie lésée ne peut l'obtenir du conseil de guerre, incompétent pour prononcer sur l'action civile. Ce n'est donc pas, à proprement parler, pour l'intérêt privé que la partie lésée met la justice militaire en mouvement; elle commanderait, elle dominerait l'action publique, pour l'intérêt général dont elle n'est pas chargée, et cela sans ce frein que la loi a apporté à la poursuite malveillante, car le conseil de guerre serait incompétent pour la condamner aux frais et aux dommages-intérêts.

La loi militaire laisse donc au citoyen lésé par un militaire la voie du recours à la justice civile; voilà sa garantie, s'il trouvait par impossible l'autorité militaire sourde à sa juste plainte. (Rapport.)

Lorsque l'inculpé est colonel, officier général ou maréchal de France, l'ordre d'informer est donné par le ministre de la guerre. La haute position de cet inculpé commande cette dérogation à la règle générale. (Voy. le modèle no 18.) Si, pendant l'information, des faits nouveaux se révèlent à la charge du prévenu, ou amènent la découverte de nouveaux complices, le rapporteur doit demander au général commandant la circonscription un ordre d'informer supplémentaire contre le prévenu déjà poursuivi, ou un ordre d'informer contre les complices. Ce n'est, en effet, qu'en cas de flagrant délit qu'il peut faire arrêter un militaire en activité de service, et, de plus, aucune poursuite ne peut être exercée contre qui que ce soit sans l'ordre du général commandant la circonscription.

A propos de l'article 99, la question s'est posée de savoir si un homme puni au corps de prison et de cellule, c'est-à-dire puni disciplinairement pour un délit qui le rend passible du conseil de guerre, pouvait être traduit devant cette juridiction sans violation de la maxime Non bis in idem. Le conseil de revision d'Alger, dans sa séance du 25 novembre 1886, s'est basé sur les considérants suivants pour résoudre négativement la question:

«Attendu qu'il résulte des termes de l'article 1351 (1) du Code civil que, pour que l'ex

(1) Article 1351 du Code civil: L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la

ception de la chose jugée soit recevable, il faut qu'une décision judiciaire ayant le caractère d'un jugement exécutoire et irrévocable soit intervenue;

«

Qu'une punition infligée n'a point ce caractère et ne peut, dès lors, produire exception;

« Qu'en aucun cas, une punition disciplinaire ne peut faire légalement obstacle à l'exercice ultérieur de l'action publique à raison du même fait;

«Que ce serait dénier au général commandant, seul juge de l'opportunité de la poursuite, les droits que lui a exclusivement conférés l'article 99 du Code militaire, qui l'autorise soit à ordonner des poursuites, soit à statuer par refus d'informer ou ordonnance de non-lieu sur tous crimes, délits et contraventions à lui dénoncés par l'autorité judiciaire.

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Lorsque le général commandant la circonscription refuse d'informer, il le fait connaître par une déclaration modèle n° 19, et il en rend compte au ministre en lui exposant si sa décision est basée par suite du manque de gravité, de précision des faits articulés, ou parce que ces faits ne constituaient ni crime ni délit. Le modèle de ce compte rendu peut être conforme au no 20.

Le général commandant la circonscription peut aussi rendre, sans instruction préalable, une ordonnance de non-lieu (modèle 21), mais d'une façon générale il attendra pour se prononcer d'être en possession du rapport prescrit par l'article 108, c'est-à-dire qu'il donnera d'abord l'ordre d'informer et qu'il ne prendra de décision qu'après avoir été mis en possession de tous les éléments recueillis par l'instruction.

Si, à première vue, l'accusation portée contre un militaire ne lui paraît point fondée, il se servira de la déclaration portant refus d'infor

mer.

Il est à remarquer que cette déclaration et l'ordonnance de non-lieu se servent des mots : en l'état, parce que s'il survenait de nouveaux renseignements de nature à modifier la première opinion du général, il aurait le droit et le devoir de faire reprendre les poursuites.

Art. 100. L'ordre d'informer pour chaque affaire est adressé au commissaire du gouvernement près le conseil de guerre qui doit en connaître, avec les rapports, procès-verbaux, pièces, objets saisis et autres documents à l'appui.

Le commissaire du gouvernement transmet immédiatement toutes les pièces au rapporteur. 130 Ma. 43 I. C.

L'ordre d'informer est adressé au commissaire du gouvernement près le conseil de guerre qui doit connaitre de l'affaire, avec les rapports, procès-verbaux. pièces, objets saisis, et tous les autres documents recueillis par les officiers de police judiciaire.

Le commissaire du gouvernement transmet immédiatement toutes les pièces au rapporteur; alors commence la véritable instruction, celle qui va décider du sort de l'inculpé.

demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.

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S'il y a plusieurs prévenus du même délit, chacun d'eux est interrogé séparément, sauf à les confronter, s'il y a lieu. L'interrogatoire fini, il en est donné lecture au prévenu, afin qu'il déclare si ses réponses ont été fidèlement transcrites, si elles contiennent la vérité et s'il y persiste. L'interrogatoire est signé par le prévenu et clos par la signature du rapporteur et celle du greffier.

Si le prévenu refuse de signer, mention est faite de son refus.

Il est pareillement donné lecture au prévenu des procès-verbaux de l'information. 131 Ma. 40. 93. I. C.

L'interrogatoire du prévenu doit être le premier acte de l'instruction, et il y est procédé comme nous l'avons dit dans la note sous l'article 86, à propos des fonctions d'officier de police judiciaire. Le procès-verbal est conforme au modèle n° 22.

Le rapporteur près le conseil de guerre est un véritable juge d'instruction; ses attributions sont les mêmes que celles de ce magistrat. Comme lui, il peut, quand il y a nécessité et alors qu'il constate les preuves matérielles d'un délit, interroger le prévenu et les personnes présentes sur le lieu où il opère, mais tous ses actes doivent être réguliers, c'est-à-dire constatés par écrit, et c'est pour ces motifs que l'article 101 indique les formalités que le procès-verbal doit contenir.

Le nombre des interrogatoires du prévenu n'est pas limité; on en comprend d'ailleurs la raison, si on considère que, souvent, il aura intérêt à détourner la justice par des mensonges, qui ne peuvent être réfutés qu'après l'audition des témoins.

Aucune règle n'est fixée pour l'interrogatoire du prévenu, quant aux questions à poser; la plupart de ceux qui ont écrit sur le droit militaire en ont cependant tracé, mais nous pensons que la position des questions doit varier avec l'intelligence du prévenu, sa façon d'être, le repentir qu'il semble manifester ou l'arrogance qu'il affiche à première vue, toutes choses qui exigent du tact et de la pratique.

Il est pourtant un point sur lequel tous les écrivains se sont trouvés d'accord: c'est que jamais un magistrat instructeur ne doit user, dans l'interrogatoire du prévenu, d'artifices qui seraient de nature à déconsidérer la majesté de la justice.

Un moyen qui nous a constamment réussi dans l'exercice des fonctions de rapporteur est celui qui consiste à donner d'abord au prévenu connaissance du crime ou du délit pour lequel il est poursuivi et de l'inviter à en faire la narration aussi exacte que possible, puis de le laisser parler jusqu'à ce qu'il ait fini. Après avoir consigné sa déposition, on l'interroge sur les points obscurs ou qui demandent des éclaircissements particuliers.

Si, de prime abord, il répond qu'il n'est pas coupable du fait qu'on lui impute, on l'interroge sur les indices qui ont amené son arrestation. Ainsi, dans une affaire de vol, on lui demandera où il se trouvait à telle heure, ce qu'il faisait, on s'enquerra des dépenses qu'il a faites, des personnes avec lesquelles il a été en relation, etc.

Ce premier interrogatoire terminé, on appellera les témoins et on rapprochera leurs dépositions de celles du prévenu. Au besoin, on les confrontera.

Les pièces à conviction seront souvent d'un grand secours pour la manifestation de la vérité; c'est pourquoi le rapporteur ne devra jamais omettre de les saisir en se conformant à ce que nous avons dit sous l'article 86.

Un commentaire qui a été rédigé pour l'application de l'ordonnance criminelle de 1670 pose des règles dont on pourra souvent s'inspirer au cours des instructions. Voici comment il s'exprime à propos de l'interrogatoire de l'ac

cusé :

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Quant à la manière d'interroger, voici les principales règles que le juge doit suivre la première est de ne jamais interroger l'accusé sur la substance même du délit, si ce n'est que cet accusé avouàt tout de lui-même. Mais hors ce cas, et lorsque l'accusé parait disposé à nier, le juge l'interrogera seulement sur les circonstances du délit, et sur les différents indices qui sont prouvés au procès et qui résultent des charges et informations, en commençant d'abord par les plus généraux et par ceux qui ont un rapport plus éloigné du fait principal, et venant ensuite aux particuliers. Par exemple, il lui demandera où il était tel jour, et avec qui : s'il n'a pas connaissance qu'il ait été commis un tel crime, et par qui; de qui il l'a appris; qui sont ceux qui y étaient présents, et s'il s'en est entretenu avec eux; s'il ne s'est pas trouvé dans l'endroit où le crime à été commis le jour même du crime, etc. Le juge doit aussi avoir attention de ne pas rédiger son interrogatoire suivant l'ordre des événements à l'égard de chaque indice, parce que, dans cette manière d'interroger ainsi de suite et par ordre, l'accusé peut aisément inventer des mensonges suivis et qui ne se contrediront point, et il ne sera pas facile de le prendre par ses propres réponses. C'est pourquoi il est beaucoup plus à propos, dans ce cas, d'intervertir l'ordre des interrogations, de lui faire une ou deux questions touchant un indice, et de passer ensuite à d'autres demandes touchant un second indice totalement différent du premier; après quoi il faudra encore passer à un autre, et revenir ensuite au premier, sur lequel on fera de nouvelles questions différentes des premières, continuant, ainsi de suite, à faire des interrogations sans

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