tions en forme d'Epîtres & de Difcours, où le faux talent fe flattoit de prendre l'allure du génie. Un goût plus fain paroît les éclairer fur ces figures forcées que la médiocrité prit long-temps pour de la chaleur fur les expreflions bourfoufflées qu'elle prenoit pour de l'énergie. L'art des vers ne fe borne plus, dans les compofitions dos jeunes Poëtes, à ces formes communes qui favorifent la pareffe & l'impuiflance. On cherche les fecrets du ftyle, les effets d'une harmonie plus favante, & les hardielles de l'expreffion qui rajeuniffent la pensée fans encourir les reproches du goût. Il faut le dire, deux Poëtes, dans ces derniers temps, M. de St-Lambert & M. l'Abbé de Lille, ont contribué beaucoup à renouveler ces études févères dont l'art des vers a plus befoin que jamais. M. de Fontanes explique dans un AvantPropos fes principes fur les Jardins. Il y montre, comme dans fon Poëme, » fon » peu de goût pour les Parcs Anglois, avec d'autant plus de liberté, que ceux qu'il » a vus en Angleterre même lui ont peutêtre donné le droit d'avoir un avis fur » cette matière «. Il ajoute » Au refte, quelque parti qu'on prenne entre les » Parcs Anglois & les Parcs François, en» tre Kent & le Nôtre, le Verger fubfiftera » toujours; c'eft le Jardin néceffaire, utile » & vraiment agréable, quoiqu'il foit le plus commun. On a fort bien observé رو دو » dans un Ouvrage (1) plein d'imagina» tion & de charme, que les plus douces jouiffances font toujours celles que la » Nature a mifes à la portée de tous les hommes. C'eft donc le Verger qu'a voulu peindre M. de Fontanes, & dans fon fujet il a eu pour but de tracer, comme il le dit lui-même, Le Jardin du Berger, du Poëte & du Sage. On va voir que fon but eft rempli. L'Auteur, dans un morceau fur le choix des fites, caractérise les environs de Paris & il ajoute une réflexion qui est à la fois un fentiment & un confeil. Que ces lieux me plairoient! mais des Grands les habitent. Le Sage, avec refpect, doit s'écarter loin d'eux; Voilà pour le Sage. La Neuftrie, l'Occitanie, les bords de la Loire font les lieux où il appelle les amis de la Nature. Enfin (1) Cet Ouvrage dont parle M. de Fontanes eft de M. Bernardin de Saint-Pierre, comme on l'apprend par une Note de cet Avant-Propos, où l'Auteur rend un noble tribut d'admiration aux Etudes de la Nature. il n'oublie point ce qui plaît au Poëte, les champs où d'antiques monumens retracent des fouvenirs; & le Poitou, fa patrie, lui en offre des exemples. Même dans ma patrie il eft quelque beauté ; Mais il eft un féjour qu'aucun des plus beaux lites ne peur remplacer. Voyez par quel fentiment aimable le Poëte veut vous fixer. y C'eft le féjour témoin des jeux du premier âge, Ce dernier vers eft un de ceux qu'on n'o ble pint; & comme il est heure x de donner a des préceptes ces accelloires touchans d nt le genre didactique femble moins feeprible que tour autre ! Le grand arr dont Virgile eft le Maître, cet art de rompre l'uniformité des leçons par de riches dé ai's qui ne leur foient p int étrangers, va le manifefter i avec un échar peu common 1. de Fontanes recommande la régularité des plants, & leur partage. L'ordre convient toujours à nos foibles travaux. Tout à coup le plus bel élan de la verve poétique produit un mgnifique contrafe. Il s'agit d'oppofer aux vains efforts de l'Art imitateur les impofantes créations de la Nature. Trop vaine ambition! ah! peut-être comme eux Rejaillit & retombe, & inenare à jamais Ceux qui tentent l'abord de ces âpres fommets. Plus haut 'agle a fon nid, l'éclair lake, les vents grondent, Les tonnerres lointains fourdement le répondent. L'orgueil de ces grands ments, leurs immenfes contours, Cent fiècles qu'ils ont vu paffer comme des jours, Quand de l'heureux Léman je découvris les flots, Oui, je crus, qu'échappé des débris du chaos, L'Univers tout à coup naissant à la lumière, M'étaloit fa jeuneffe & fa beauté première. O véritable Poéfie! quelle compofition fagement hardie! Sans doute l'effet de ces beautés eft généralement fenti; cependant qu'il me foit permis de m'arrêter un inftant à les détailler. Et d'abord remarquez cette perfection du goût dans un jeune Poëte, qui, dans tout le cours d'un morceau où l'imagination ayant à peindre les formes variées de la Nature, paroît devoir prendre la mesure de cet immenfe coloffe, ne fe permet pas une feule image gigantefque, un feul fentiment exagéré, & qui femblable à fon modèle, laiffe entrevoir un ordre fecret dans cette irrégularité de fes peintures. Enfin, s'il s'agit de la verfification, quel connoiffeur n'admirera point ces formes de la phrase poétique, ces fufpenfions adroites de la mefure, ces doubles effets des mouvemens & des fons qui produisent une harmonie parfaitement imitative, & cet enchaînement périodique des vers, qui fait de la diction comme un tissu auquel on ne peut rien ôter, rien ajouter ? On n'attend point de moi que je falle dans cet article l'extrait fuivi & néceffairement fatigant de tout ce Poëme, qu'il faut lire en entier mais avant de citer |