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titude innombrabie. La Princeffe Albertine, Abbeffe de Quedlinbourg, arriva de Berlin encore à temps pour prendre conge du Roi, fon frère. 28 galères mirent à la voile pour la Finlande. Ces navires & des bâtimens marchands que l'on avoit frétés prirent à bord l'élite des troupes Suédoifes; les Trabans, les Gardes du Corps, les Dragons du Corps, le régiment de Cavalerie du Corps, de 1500 hommes, un Corps d'Artillerie, & les régimens d'Uplande, de Weftmanie, de Dalécarlie, de Helsingland, de Nericie, de

Sudermanie & d'Oftrogothie. cie, de

Ces troupes joindront en Finlande celles qui y ont été déja transportées, & celles qui s'y trou vent en garnifon. Dans peu de jours, une feconde divifion, compofée de neuf régimens, s'embarquera fur des bâtimens de transport déja prêts, auxquels fe joindra l'efcadre de Chébecs, armée à Sweaborg. Les dernières lettres du Duc de Sudermanie, Grand-Amiral de la flotte, en mer depuis le 9, font en date du 18: ce jourlà, l'efcadre fe trouvoit près de l'ifle d'Oe. · fel, à l'entrée du golfe de Riga.

Ces grands mouvemens, ces embarquemens précipités, ce départ du Roi luimême, fans avoir été précédés d'aucune déclaration de guerre, ni d'hoftilités anté rieures, font fuppofer, avec raifon, qu'on

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fera, au premier jour, publiquement inftruit des caules & du but de cette expédition. Le congé donné par le Roi au Comte de Rafoumowski, Miniftre de Ruffie, paroît cependant n'être qu'accidentel. On verra, par la note de cet Envoyé, & par la ré-ponte de S. M., que la réfolution du Roi a été motivée, non par une rupture formelle, mais par le vif mécontentement qu'il a reffenti de quelques expreffions, & du deffein affecté du Mémoire remis, le 18, par le Comte de Rafoumowski au Comte d'Oxenfiern, Miniftre des Affaires Etrangères; en voici la teneur:

« A la fuite des objets dont le fouffigné, Envoyé Extraordinaire & Miniftre Plénipotentiaire de la Cour Impériale de Ruffie, vient d'entretenirle Comte d'Oxenfiern, il a l'honneur de lui en préfenter une récapitulation fuccincte dans cette

note, "

c

Quelle qu'ait été la furprife de l'Impératrice ma Souveraine, leriqu'elle fut informée des armemens qui fe faifoient en Suède, S. M. Impériale ne voyant aucun motifs légitimes qui aient pu y donner lieu, avoit réfolu de garder le filence, tant que ces mouvemens euflent été renfermés dans l'intérieur du Royaume; mais apprenant les motifs allégués dans la communication qui a été faite par le Sénateur Comte d'Oxenfliern, au Miniltre de Danemarck, & dont celui-ci, par une fuite de cette intimité qui règne entre les deux Cours, a fait fouffigné, 3. M. Impériale s'eft déterminée à rompre ce filence, & a donné ordre au fouffigné d'entrer dans les explications fuivantes avec le

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Miniftre de S. M. Suédoife. Pendant 26 ans de règne, l'Impératrice n'a ceffé de donner des témoi gnages au Roi & à la Nation Suédoise, de fon défir de cultiver avec elle un bon voisinage & une bonne harmonie, ainsi que la dernière paix d'Abo les avoit établis entre les deux Cours. Si au milieu du repos dont fon Empire jouiffoit du côté de fes autres voifins, S. M. Impériale n'avoit jamais conçu la moindre idée de troubler ou d'altérer le › moins du monde cet ordre de choses, il feroit hors de toute vraisemblance de la lui attribuer au moment où elle fe trouve engagée dans une guerre que lui a fufcitée injuftement un ennemi puiffant, & à laquelle elle ne fauroit donner trop d'attention. Provoquée de cette manière à déployer tous les moyens qu'elle tient de la Providence, pour repouffer l'at taque de fon ennemi, elle a eu foin d'en prévenir amicalement toutes les Puiffances de la Chrétien→ té, & nommément elle a obfervé cette conduite, lorfqu'elle a pris la résolution d'armer une flotte pour l'envoyer dans l'Archipel, & que le fouffigné en a, par ordre de S. M., communiqué l'intention au Ministère de Suède. Toutes ces difpofitions & ces préparatifs fe rapportant visiblement & uniquement à la circonftance dans laquelle fe trouvoit la Ruffie, n'étoient nullement faites pour alarmer fes autres voifins, qui ne nourriroient pas quelques deffeins cachés de multiplier ses embarras & d'en profiter. En admettant pour un inftant, que la Cour de Ruffie ait fuppofé de tels deffeins à celle de Suède, quelques contraires qu'ils foient à la religion des traités qui les lient, la faine raifon, ainfi que l'intérêt, devoient borner, toutes fes mefures au foin d'en prévenir les effets, & non de les provoquer; en effet, celles que la prudence dicta, & qui furent adoptées fur les bruits qui fe répandirent de toutes parts, des armemens qui fe

faifoient en Suède, fe réduifoient à un renfort trèsmodique de troupes Ruffes en Finlande, & à la deftination de l'efcadre ordinaire qui a coutume de croifer tous les ans dans la Baltique, pour 'expérience des Marins, coutume à laquelle la Suède n'a jamais porté attention, & qui ne lui a jamais caufé d'ombrage. Cependant ces armemens avançoient & fe renforçoient journellement, fans que la Cour de Stockholm jugeât à propos de s'en ouvrir formellement vis-à-vis de celle de Pétersbourg; & lorfqu'enfin ils font parvenus à leur maturité, M. le Sénateur Comte d'Oxenfliern, au nom du Roi, n'a pas balancé de déclarer au Miniftre d'une Cour intimement alliée à la nôtre, & fuppoféé par conféquent ne devoir pas nous le cacher, que ces préparatifs étoient dirigés contre la Ruffie, dans la fuppofition que la Suède étoit menacée d'en être attaquée. Dans ces termes, l'Impératrice ne balance pas non plus de fon côté de faire déclarer, par le fouffigné, au Ministre de S. M. Suédoife, ainfi qu'à tous ceux de la Nation qui ont quelque part à l'Administration, que S. M. Impériale ne fauroit leur donner une preuve plus folide de fes difpofitions pacifiques à leur égard, & de l'intérêt qu'elle prend à la confervation de leur tranquillité, qu'en les aflurant fur fa parole Impériale, que toutes les intentions contraires qu'on pourroit lui imputer, font deftituées de tout fondement; mais fi une que affurance auffi formelle, auffi pofitive, jointe aux argumens fimples & convaincans qui fe préfentent dans ce qui eft expofé ci-deffus, n'étoient pas fuffifans pour rétablir le calme & la tranquillité, S. M. Impériale eft réfolue d'attendre l'événement avec cette confiance & certe fécurité que doivent lui infpirer la pureté & l'innocence de fes intentions, ainfi que la fuffifance des moyers que Dieu lui a mis en main, & qu'elle n'a jamais employés que pour

gloire de for Empire & le bonheur de les Sujets,

Stockholm, le 18 juin 1788,

Signé, le Comte de RASOUMOWSKI.

En réponse à cette Note, le Comte d'Oxenftiern a fait remettre la ContreNore fuivante à chacun des Membres du Corps Diplomatique.

« Pendant que le Roi, foigneux de maintenir la bonne harmonie avec tous fes voifins, n'a rien négligé pour la cultiver avec la Cour de Ruffie, il n'a pu voir qu'avec étonnement le d'effet que fes fentimens ont produit fur la conduite du Miniftre de cette

peu

quelques moiffance; & le langage qui, depuis

quelques mois, accompagne fes démarches, paroît encore porter l'empreinte du fyftème de divifion que fes Prédéceffe irs fe font tranfmis & qu'ils ont toujours travaillé à étendre. Le Roi cherchoit encore à fe faire illufion fur ces objets. Il fouhaitoit pouvoir douter des efforts que faifoit l'Envoyé de Ruffie, pour ramener la Nation Suédoife aux erreurs qui l'avoient féduite pendant le temps de l'anarchie, & pour répandre de nouveau dans le fein de l'Etat, cet ancien efprit de défunion que le ciel & les foins de Sa Majefté ont fu heureument éreindre; lorfqu'enfin le Comte de Razoumowski vient de lever, par fa note du 18 juin, tous les doutes que le Roi aimoit encore à conferver à cet égard. A la fuite des affurances d'amitié de l'Impératrice pour le Roi, dont cette note eft remplie, le Miniftre n'a pas hésité d'en appeler encore à d'autres s qu'au Roi feul: il s'adreffe à tous ceux qui ont part à l'administration ainfi qu'à la Nation même, pour les affurer des fentimens de fa Souveraine, & de l'intérêt qu'elle prend à leur tranquillité. La Suède ne la devant plus qu'à fä

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