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rédiger toutes les notes et offices diplomatiques auxquelles les affaires peuvent donner lieu, les puissances principalement intéressées envoyent souvent plusieurs ministres, en désignant à chacun d'eux le travail dont il doit être plus spécialement chargé, et en l'instruisant de la manière dont il aura à conduire et à terminer les négociations.

Quant à la correspondance des ministres, lorsqu'il y en a plusieurs envoyés par la même puissance et pour les mêmes affaires, voici l'avis de Mr. CALLIÈRES: Il serait bon, dit-il, en ces occasions, de pratiquer ce qui fut établi durant la négociation de Münster, entre le Duc de Longueville qui était chef de l'ambassade et Mrs. d'Avaux et Servien, ses collègues."

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Ces ministres en effet, afin de conserver de l'uniformité dans le récit des faits qui auraient pû être mandés differemment, si chacun d'eux avait écrit à part à la cour, n'envoyaient qu'une seule et même dépêche, et à l'égard de leur sentiment particulier sur chaque affaire dont ils rendaient compte en commun, lorsqu'il y avait divergence d'opinion, ils le marquaient dans leur dépêche en disant: Moi, Duc de Longueville, suis d'un tel avis, et le sentiment de moi d'Avaux, ou de moi, Servien, est tel; et à ce que chacun appuyait ses raisons. La cour se formait une opinion et sa réponse était commune aux trois ministres.

Cette méthode dit encore BIELFELD, est trèsrecommandable en ce qu'elle oblige tous les trois ambassadeurs à agir ouvertement et sans une réserve entre eux, qui ne peut être que préjudiciable aux intérêts du souverain; et que la cour n'est pas dans le

cas de recevoir sur les mêmes affaires des relations différentes qui souvent se croisent, et présentent les mêmes objets sous un point de vue tellement opposé qu'il devient difficile au cabinet de prononcer.

§. 57.

Des rapports ou des dépêches ministérielles (1).

Ce n'est pas assez à l'agent diplomatique que de savoir ménager les intérêts de son souverain dans une cour étrangère, il faut encore savoir rendre un compte exact et fidèle de tout ce qui s'y passe, tant à l'égard de la négociation dont il est chargé, que de toutes les autres affaires qui y surviennent durant le séjour qu'il y fait et qui peuvent être de quelque intérêt pour son gouvernement; c'est dans les rapports ou les dépêches que le ministre envoie à sa cour, qu'il s'acquitte de ce devoir (2).

Pour ce qui touche la négociation elle-même, le ministre ne peut rendre dans ses rapports un compte trop exact de la manière dont il a exécuté les ordres qu'on lui a donnés; des réponses verbales ou par écrit qu'on a faites aux lettres ou notes qu'il a présentées, ou bien aux représentations et propositions qu'il

(1) Voyez, PIÈCES DIPLOMATIQUES.

(2) Les dépêches des ambassadeurs à leur cour, dit Mr. DE FLASSAN, quand ils ont des intérêts majeurs à conduire, sont propres à éclairer sur l'origine d'une contestation politique, ou sur la marche d'une négociation, comme à fournir des données sur le caractère et la conduite des personages influens.

a faites de bouche; de la marche de la négociation; des obstacles qu'elle rencontre; des incidens qu'il peut prévoir; de ce qu'on pourrait lui demander; jusqu'à quel point il a lieu d'espérer que l'on se prêtera à ce qu'il est chargé de demander, afin, qu'instruit à tems des intentions de son maître, il puisse de son côté, user avec avantage des instructions, et ne point être obligé de s'engager sans des pouvoirs

suffisans.

L'attention d'un ministre dans ses dépêches doit principalement se porter sur l'exactitude dans les faits qu'il rapporte. Il ne doit ni en affaiblir ni en charger le coloris par le choix des expressions, ou par la manière dont il les présente; il ne doit point s'arrê~ ter à des détails minutieux; et il suffit qu'il y explique clairement et succintement le fond de sa négociation avec les circonstances essentielles qui l'accompagnent,

C'est encore la manière dont on rend compte d'une affaire qui facilite les moyens de donner des instructions qui y ont rapport; et l'agent diplomatique' travaille aussi bien pour ses intérêts propres que pour ceux de sa cour, si ses rapports sont tels, que les ordres qu'il demande puissent être précis. Il doit en donner l'exemple en écartant les faits et les réflexions inutiles; en présentant toujours le fait principal, et en faisant sentir le but auquel il croit que doivent frapper les instructions dont il a besoin.

Si

par des circonstances particulières ou par quelque incident non-prévu dans ses instructions, il arrive que l'agent diplomatique soit obligé de prendre une résolution quelconque de son propre chef, il faut qu'il en

instruise sa cour immédiatement après, en motivant les démarches qu'il a faites ou les mesures qu'il aprises.

Il est du devoir de l'agent diplomatique de rendre compte sans cesse à son gouvernement du résultat de ses observations, et de lui communiquer ses réflexions sur l'avantage que l'on peut tirer, ou sur les suites fâcheuses que l'on doit craindre des faits dont il rend compte. Il suffit qu'il le soumette au jugement de celui à qui il appartient d'en décider, et il ne remplirait qu'imparfaitement les fonctions de sa charge si dans l'occasion il ne proposait son avis, comme il le ferait si, dans le conseil, il était appellé à juger des relations des agens diplomatiques de son souverain résidant en pays étrangers. Si par l'emploi qui lui est confié il est autorisé à dire son sentiment avec franchise, l'appuyant toutefois par des raisonnemens ou des motifs plausibles, il ne doit cependant pas, s'il ne veut se sendre responsable des suites qui en peuvent résulter, y faire paraître trop de confiance ou dans ses lumières ou dans ses avis.

Indépendamment de ce qui peut avoir rapport à la négociation elle-même, l'agent diplomatique comme il est dit plus haut, doit encore instruire sa cour de toutes les affaires ou événemens qui surviennent durant le séjour qu'il fait dans le pays où il réside, et qui peuvent être de quelqu' intérêt pour son gouvernement, tant pour le présent que pour l'avenir (3).

Il faut même qu'il ne lui laisse point ignorer les

(3) Si les agens diplomatiques au dehors, dit Mr. SCHMALZ, publiciste allemand, dans son Droit des gens, n'écrivaient pas

avis importans qu'il reçoit, par qui, et comment il les a reçus, en distinguant avec soin les nouvelles certaines d'avec celles qui sont douteuses et lorsque celles qui lui paraissent incertaines sont importantes, il doit en référer avec toutes les circonstances, en y joignant ses réflexions, afin que son souverain ou le ministre secrétaire d'état auquel il adresse sa dépêche puissent, en les approfondissant, prévenir les suites fâcheuses qui pourraient en résulter. Par la même raison il doit s'empresser, lorsqu'il en est mieux informé, de corriger ou de rectifier les avis qu'il a communiqués.

Il doit également informer sa cour de tout ce qui se publie au préjudice de son gouvernement ou de son pays; dans l'occasion il faut qu'il rapporte jusqu'aux propos mêmes tenus par des personnes considérables du pays et dont l'opinion peut être de quelque importance ou quelque influence dans les affaires publiques.

C'est une circonstance fâcheuse pour l'agent diplomatique que celle d'être obligé de mander à sa cour des nouvelles désagréables, et de nature à pouvoir altérer l'union et la bonne intelligence qui subsiste entre les deux gouvernemens; c'est cependant un devoir si

seulement pour le ministre secrétaire d'état ayant le département des affaires étrangères, mais qu'ils recueillissent aussi des observations pour les ministres de l'intérieur, des finances, de la justice et de la guerre, et qu'ils fussent à même de juger les effets des diverses institutions qui existent ou qui s'opèrent autour d'eux, combien ne diminueraient-ils point par-là les jalousies de commerce, les restrictions apportées aux mesures utiles et les secours accordés à celles qui ne brillent que d'un faux éclat.

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