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réuni à vos représentans, je me réjouirai de concourir au grand oeuvre de la prospérité nationale.

Espagnols, votre gloire est la seule que mon coeur ambitionne. Tous les désirs de mon âme sont de voir autour de mon trone les vrais Espagnols unis, paisibles et heureux.

Confiez-vous donc à votre roi qui, dans les circonstances où vous vous trouvez vous parle avec une effusion sincère, et avec le sentiment intime de grands devoirs que la Providence lui impose. Dès aujourd'hui votre bonheur dépendra en grande partie de vous-mêmes. Gardez-vous de vous laisser séduire par les trompeuses apparences d'un bien idéal, qui souvent empêche le bien réel. Evitez l'exaltation des passions, qui si souvent transforme en ennemis des hommes qui devaient vivre en frères, unis par les sentimens, comme ils le sont par le religion, les moeurs et le langage. Repoussez les insinuations perfides que vos ennemis déguisent sous le masque de la flatterie. Marchons franchement et moi le premier, dans la voie constitutionnelle; et en montrant à l'Europe un modèle de sagesse, d'ordre et de modération dans une crise accompagnée de larmes et de malheurs chez tant d'autres nations, faisons admirer et révérer le nom espagnol, en même tems que nous fonderons pour des siècles notre félicité et notre gloire.

Fait au palais de Madrid, le 10 Mars 1820.

FERDINAND.

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Mémoire envoyé par M. Rouillé, ministre au département des affaires étrangères de France, à M. Fox, secrétaire d'état de S. M. Britannique. (1755)

Il n'a pas tenu au roi que les différens concernant l'Amérique n'aient été terminés par les voies de conciliation; et S. M. est à même de le démontrer à l'univers entier, par des preuves authentiques.

Le roi toujours animé du désir le plus sincère de maintenir le repos public et la plus parfaite intelligence avec S. M. britannique, a suivi avec la bonne foi et la confiance la plus entière, la négociation relative à cet objet. Les assurances que le roi de la Grande-Bretagne et ses ministres renouvellaient sans cesse de vive voix et par écrit, étaient si formelles et si précises sur les dispositions pacifiques de S. M. britannique, que le roi se serait reproché le moindre doute sur la droiture des intentions de la cour de Londres. Il n'est guère possible de concevoir comment ces assurances pouvaient se concilier avec les ordres offensifs donnés en novembre 1754, au général Braddock et au mois d'avril 1755, à l'amiral Boscawen.

L'attaque du mois de Juillet dernier et la prise de deux vaisseaux du roi en pleine mer, et sans déclaration de guerre, étaient une insulte publique au pavillon de S. M.; et elle aurait témoigné sur le champ tout le juste ressentiment que lui inspirait une entreprise si irrégulière et si violente, si elle avait pu croire que l'amiral Boscawen n'eût agi que par les ordres de la cour.

Le même motif avait d'abord suspendu le jugement du roi sur les pirateries que les vaisseaux de guerre anglais exercent depuis plusieurs mois, contre la navigation et le

commerce des sujets de Sa Majesté, au mépris du droit des gens, de la foi des traités, des usages établis parmi les nations policées, et des égards qu'elles se doivent reciproque

ment.

Le roi avait lieu d'attendre des sentimens de S. M. britannique, qu'à son retour à Londres elle désavouerait la conduite de son amirauté et de ses officiers de mer, et qu'elle donnerait à S. M. une satisfaction proportionnée à l'injure et au dommage. Mais le roi voyant que le roi d'Angleterre bien loin de punir les brigandages de la marine anglaise, les encourage au contraire en demandant à ses sujets de nouveaux secours contre la France, S. M. manquerait à ce qu'elle doit à sa propre gloire, à la dignité de sa couronne, et à la défense de ses peuples, si elle differait plus longtems d'exiger du roi de la Grande-Bretagne une réparation éclatante de l'outrage fait au pavillon français et des dommages causés aux sujets du roi.

S. M. croit donc devoir s'adresser directement à Sa Maj. britannique, et lui demander la restitution prompte et entière de tous les vaisseaux français tant de guerre que marchands, qui contre toutes les loix et contre toutes les bienséances, ont été pris par la marine anglaise et de tous les officiers, soldats, mâtelots, artillerie, munitions, marchandises, et généralement de tout ce qui appartenait à ces vaisseaux.

Le roi aimera toujours mieux devoir à l'équité du roi d'Angleterre, qu'à tout autre moyen, la satisfaction que S. M. a droit de réclamer; et toutes les Puissances verront sans doute, dans la démarche qu'elle s'est déterminée à faire, une nouvelle preuve bien sensible de cet amour constant pour la paix, qui dirige ses conseils et ses résolutions.

Si S. M. britannique ordonne la restitution des vaisseaux dont il s'agit, le roi sera disposé à entrer en négociation sur les autres satisfactions qui lui sont légitiment dues, et continuera de se prêter, comme il fait précédemment, à un accommodement équitable et solide sur les discussions qui concernent l'Amérique. Mais si contre toute espérance le roi d'Angleterre se réfuse à la réquisition que le roi lui fait, S. M. regardera ce déni de justice comme la déclaration de guerre la plus authentique, et comme un dessein formé par la cour de Londres de troubler le repos de l'Europe,

Mémoire du Comte de Choiseul, sur les rapports de la France et de la Russie en 1760. (†)

Ce qui constitue une alliance, ce sont les traités et les engagemens mutuels; ce qui la rend solide et durable, c'est le rapport des intérêts et la réciprocité des avantages. Dans ce sens, l'on peut dire que la France n'a point d'alliance avec la Russie. Ces deux puissances sont l'une à l'égard de l'autre, comme deux personnes indifférentes entre elles, qui ont un ami commun, et qui agissent de concert pour l'intérêt de cet ami, mais qui n'ont aucune liaison directe sur tout ce qui lui est étranger. Telle est jusqu'à présent la situation politique de la France vis-à-vis de la Russie. La cour de Vienne est le point de ces deux puissances, et l'unique lien de leur amitié. On peut faire à ce sujet deux réflexions: la première, que la cour de Vienne a un intérêt essentiel à maintenir cette position, et à conserver deux puissans alliés toujours prêts à s'armer en sa faveur, sans se concerter entre eux pour leurs avantages réciproques. Aussi, voyons -nous qu'elle met toute son adresse à n'y stipuler que son agrandissement personnel.

La seconde, c'est que la Russie a presque toujours été l'ennemie de nos amis et l'amie de nos ennemis. Cette bizarrerie apparente est cependant très naturelle, et provient nécessairement de la révolution subite qui s'est faite dans notre système politique où nous avons voulu allier les contraires, et de ce que nous n'avons avec elles, qu'une union indirecte et précaire: de là naissent les obscurités et les embarras de nos négociations à Pétersbourg, et l'espèce de défiance qui règne entre deux cours nouvellement unies dont l'amitié n'a aucun point d'appui, et qui sont respectivement dans une situation équivoque.

D'après cette exposition, il paraît qu'il n'y a que deux moyens de se faire un système fixe et décidé vis-à-vis de la Russie: le premier, c'est de regarder cette puissance

(†) Il peut servir, dit Mr. DE FLASSAN, comme un modèle de précision et de discussion lumineuse dans les matières pofitiques et est très propre à servir d'instruction pour ce genre de composition diplomatique.

comme une alliée indirecte et accessoire, de s'en tenir à ce point de vue, de ne point rechercher avec elle une union plus intime, et de n'attendre d'elle que des secours relatifs à l'alliance en général, sans compter qu'elle puisse nous être d'aucune utilité particulière et personnelle. En embrassant ce système d'indifférence, nos négociations à Pétersbourg deviennent fort simples et peu intéressantes. C'est à la cour de Vienne, uniquement interessée à cette alliance, à éclairer la conduite de la Russie; et nos ministres ne sont que les adjoints de ceux de l'impératrice-reine pour le fait de l'alliance.

Le second, c'est de nous attacher cette puissance par des liens directs, et de faire avec elle des traités au lieu d'accéder réciproquement à ceux de la cour de Vienne. Ces traités ne peuvent avoir que deux objets: celui du commerce que nous pouvons faire en Russie, et celui des affaires du continent; car il ne faut pas croire qu'il s'y mêle jamais des objets maritimes, ni des intérêts que nous pourrions avoir à débattre dans les autres parties du monde. Avant de se déterminer pour ce dernier système, et de se lier directement avec la Russie, il convient d'en exposer mûrement les avantages et les inconveniens.

Les avantages ne paraissent pas douteux du coté du commerce. Tous les négocians en tombent d'accord, et l'on sait que les Anglais y font des profits considérables. Ainsi, en partageant ce commerce avec eux, la France ferait certainement un bon marché.

Le côté politique est d'un examen plus étendu et plus difficile. Il se présente d'abord une première objection, savoir: qu'une alliance avec la Russie pourrait nous brouil ler avec la Porte. Nous avons déjà éprouvé que notre position avec la cour de Vienne a beaucoup diminué notre crédit à Constantinople.

Il est vrai que nous ne manquerions pas de stipuler une exception en faveur de la cour de Constantinople; mais alors la Russie demanderait réciproquement une pareille exception en faveur de l'Angleterre, et il faut convenir que nous ne serions guère fondés à la refuser. D'ailleurs, cette exception, en prévenant la rupture entre la Porte et la France, n'empêcherait peut-être pas les Turcs de prendre de l'ombrage de nos liaisons avec la Russie; et pour une alliance nouvelle, douteuse, et dont les avantages

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