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Note adressée à M. le Duc de Richelieu ministre des affaires étrangères de France, par les plénipotentiaires des cours d'Autriche, de la Grande-Bretagne, de Prusse et de Russie réunis en congrès à Aix-la-Chapelle. (†)

Les soussignés, ministres des cabinets d'Autriche de la Grande-Bretagne, de Prusse et de Russie, ont reçu or dre de leurs augustes maîtres d'adresser à Son Exc. M. le duc de Richelieu la communication suivante:

Appelés par l'art. 5 du traité du 20 Novemb. 1815, à examiner, de concert avec S. M. le roi de France, si l'occupation militaire d'une partie du territoire français, arrêtée par le dit traité, pourrait cesser à la fin de la 3o année, ou devait se prolonger jusqu'à la fin de la 5o, L. L. M. M. l'empereur d'Autriche, le roi de Prusse et l'empereur de toutes les Russies se sont rendus à Aix-la-Chapelle et ont chargé leurs ministres de s'y réunir en conférence, avec les plénipotentiaires de S. M. le roi de France et le roi de la Grande-Bretagne, afin de procéder à l'examen de cette question importante.

L'attention des ministres et plénipotentiaires a dû se fixer, avant tout, dans cet examen, sur l'état intérieur de la France; elle a dû porter également sur l'exécution des engagemens contractés par le gouvernement français, envers les puissances co-signataires du traité du 20 Novembre 1815.

L'état intérieur de la France ayant été, depuis longtems, le sujet des méditations suivies des cabinets; et les plénipotentiaires réunis à Aix-la-Chapelle s'étant mutuellement communiqué les opinions qu'ils s'étaient formées à cet égard, les augustes souverains, après les avoir pesées dans leur sagesse, ont reconnu avec satisfaction, que l'ordre de choses heureusement établi en France par la restauration de la monarchie légitime et constitutionnelle, et le succès qui a couronné jusqu'ici les soins paternels de S. M. Très-Chrétienne, justifient pleinement l'espoir d'un affermissement progressif de cet ordre de choses si essentiel pour le repos et la prospérité de la France, et si étroitement lié à tous les grands intérêts de l'Europe.

Quant à l'exécution des engagemens, les communications que, dès l'ouverture des conférences, Mr. le pléni

(†) Nouv. Recueil de traités de M. de MARTENS. T. IV p. 556.

potentiaire de S. M. Très - Chrétienne a adressées à ceux des autres puissances, n'ont laissé aucun doute sur cette question, en prouvant que le gouvernement français à rempli, avec l'exactitude la plus scrupuleuse et la plus honorable, toutes les clauses des traités et conventions du 20 Novembre, et en proposant pour celles de ces claudont l'accomplissement était réservé à des époques plus éloignées, des arrangemens satisfaisans les parties contractantes.

pour toutes Tels étant les résultats de l'examen de ces graves questions, L. M. I. et R. se sont félicitées de n'avoir plus qu'à écouter ces sentimens et ces voeux personnels, qui les por taient à mettre un terme à une mesure que des circonstances funestes et la nécessité de pourvoir à leur propre sûreté et à celle de l'Europe avaient seules pu leur dicter.

Dès lors, les augustes souverains se sont décidés à faire cesser l'occupation militaire du territoire français, et la convention du 9 Octobre a sanctionné cette résolution. Ils regardent cet acte solennel comme le complément de la paix générale,

Considérant maintenant comme le premier de leurs devoirs, celui de conserver à leur peuples les bienfaits que cette paix leur assure, et de maintenir dans leur intégrité les transactions qui l'ont fondée et consolidée, L. M. I. et R. se flattent, que S. M. Très - Chrétienne animée des mêmes sentimens, accueillera, avec l'intérêt qu'elles attache à tout ce qui tend au bien de l'humanité et à la gloire et à la prospérité de son pays, la proposition que L. M. I. et R. lui adressent d'unir dorénavant ses conseils et ses efforts à ceux qu'elles ne cesseront de vouer à l'accomplissement d'une oeuvre aussi salutaire.

Les soussignés, chargés de prier Mr. le duc de Richelieu de porter ce voeu de leurs augustes souverains à la connaissance du roi son maître, invitent en même tems S. Exc. à prendre part à leurs délibérations présentes et futures, consacrées au maintien de la paix, des traités sur lesquels elle répose, des droits et des rapports mutuels établis ou confirmés par ces traités et reconnus par toutes les puissances européennes.

En transmettant à Mr. le duc de Richelieu cette preuve solennelle de la confiance que leurs augustes souverains ont placée dans la sagesse du Roi de France et dans la lovauté de la nation française, les soussignés ont l'ordre d'y

ajouter l'expression de l'attachement inaltérable que L. M. 1. et R. professent envers la personne de S. M. Très - Chrétienne et sa famille, et de la part sincère qu'elles ne cessent de prendre au repos et au bonheur de son royaume.

Ils ont l'honneur d'offrir en même tems à Mr. le duc de Richelieu l'assurance de leur considération toute particulière.

Aix-la-Chapelle, le 4 Novembre 1818.

(suivent les signatures des plénipotentiaires, d'après l'ordre alphabetique des cours.)

Réponse de M. le Duc de Richelieu à la note précédente. (†)

Le soussigné, ministre et secrétaire d'état de S. M. Très - Chrétienne, a reçu la communication que L. Exc. M. M. les ministres des cabinets d'Autriche, de la GrandeBretagne, de Prusse et de Russie, lui ont fait l'honneur de lui adresser le 4 de ce mois, par ordre de leurs augustes souverains. Il s'est empressé d'en donner connaissance au roi son maître. S. M. a reçu avec une véritable satisfaction cette nouvelle preuve de la confiance et de l'amitié des Souverains qui ont pris part aux délibérations d'Aix-laChapelle. La justice qu'ils rendent à ses soins constans pour le bonheur de la France, et sourtout à la loyauté de son peuple, a vivement touché son coeur, En portant ses regards sur le passé, et en reconnaissant qu'à aucune autre époque, aucune autre nation n'aurait pu exécuter, avec une plus scrupuleuse fidélité, des engagemens tels que ceux que la France avait contractés, le roi a senti qu'elle était redevable de ce nouveau genre de gloire à la force des instructions qui la régissent, et il voit avec joie que l'affermissement de ces institutions est regardé par les augustes alliés comme aussi avantageux au repos de l'Europe, qu'essentiel à la prospérité de la France. Considérant que le premier de ses devoirs est de chercher à perpétuer et accroître, par tous les moyens qui sont en son pouvoir, les bienfaits que l'entier rétablissement de la paix générale promet

(†) ibid. p. 658.

à toutes les nations, persuadé que l'union intime des gouvernemens est le gage le plus certain de sa durée, et que la France, qui ne pouvait rester étrangère à un systême dont toute la force naîtra d'une parfaite unanimité de principes et d'action, s'y associera avec cette franchise qui la caractérise, et que son concours ne peut qu'augmenter l'espoir bien fondé des heureux résultats qu'une telle alliance aura pour le bien de l'humanité, S. M. Très-Chrétienne accueille avec empressement la proposition qui lui est faite d'unir ses conseils et ses efforts à ceux de L. M. l'empereur d'Autriche, le roi de la Grande-Bretagne, le roi de Prusse et l'empereur de toutes les Russies, pour accomplir l'oeuvre salutaire qu'ils se proposent. En conséquence, elle a autorisé le soussigné à prendre part à toutes les délibérations de leurs ministres et plénipotentiaires, dans le but de consolider la paix, d'assurer le maintien des traités sur lesquels elle repose, et de garantir les droits et les rapports mutuels établis par les mêmes traités et reconnus par tous les états de l'Europe.

Le soussigné, en priant L. Exc. de vouloir bien transmettre à leurs augustes souverains l'expression des intentions et des sentimens du roi son maître, a l'honneur de leur offrir l'assurance de sa plus haute considération.

Aix-la-Chapelle,

le 12 Novembre 1818,

Richelieu

XVIII.

NOTES VERBALES ET CIRCULAIRES.

NOTES VERBALES.

Note verbale du plénipotentiaire français, en réponse à la note du plénipotentiaire anglais près la commission suisse. (nommée par les Puissances réunies en congrès à

Vienne.+)

Les conditions d'échange que renferme la note remise au plénipotentiaire français, et qui ont pour but de régler entre la France et la Suisse une nouvelle délimitation des pays sur le lac de Genève, ne peuvent pas servir de base à un arrangement qui devait, par l'ordre exprès du roi de France, être soumis à des dispositions d'une toute autre nature que celles des conditions présentées.

Toutes les puissances, mais particulièrement la France et l'Autriche, sont intéressées à voir l'intérieur de la Suisse calme et tranquille. Ces deux puissances ont cru à la possibilité de rétablir en Suisse un ordre de choses plus rapproché de l'ancien état, et de pouvoir réparer en faveur de quelques cantons les torts de la révolution.

Les obstacles cependant qui s'y opposent, et un plus mûr examen de ce qui dans la situation présente des esprits, est utile à la Suisse, prouvent que la première condition pour ramener le repos dans l'intérieur de ce pays, est l'integrité des 19 cantons établie par l'acte de médiation.

(†) voyez, Actes du congrès de Vienne, par M. KLUEBER; T. V P. 224.

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