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Comme on le voit, cette classification repose sur le degré d'autorité et de pouvoir accordés à l'agent diplomatique par son gouvernement *.

§ 1327. On appelle corps diplomatique, la réunion des agents diplomatiques de toutes classes, accrédités auprès du même gouvernement. Le corps diplomatique n'est pas une personne juridique, mais la réunion de personnes indépendantes les unes des autres. Il ne se produit guère que dans certaines cérémonies, par exemple pour complimenter le souverain, ou bien lorsqu'il s'agit de formuler des principes communs.

Ainsi le corps diplomatique enfermé dans Paris, pendant le dernier siège, demanda au gouvernement allemand l'autorisation d'expédier une fois par semaine des courriers. Mais, pour des motifs militaires, le comte de Bismark ne consentit qu'à la transmission de dépêches ouvertes. Le corps diplomatique avait également fait entendre des protestations sur le bombardement de Paris non précédé d'avertissement.

Le corps diplomatique est présidé en général par le doyen, celui de ses membres dont les lettres de créance sont les plus anciennes, ou bien, dans les pays catholiques, par le nonce du Pape. Le président n'a d'autres prérogatives que de porter la parole au nom de ses collègues **.

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Corps diplomatique.

Agents diplomatiques

classe:

§ 1328. Aux termes du règlement du 19 mars 1815 (1), les ambassadeurs, les légats et les nonces sont les seuls ministres publics de première qui soient considérés comme revêtus du caractère représentatif, c'est-à-dire qu'ils représentent le souverain, qui les a accrédités

* Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vi; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 6; Bynkershoek, De foro, cap. vi,; Réal, t. V, pp. 21-71; Zouch, De leg., p. 139; Burlamaqui, Droit de la nat., t. V, pte. 4, ch. xv; Martens, Précis, § 191; Phillimore, Com., vol. II, §§ 214 et seq. ; Twiss, Peace, §§ 187, 189; Wicquefort, L'amb., §§ 818, 838; Heffter, §§ 201, 208; Klüber, Droit, §§ 177, 179; Bielfeld, Inst. pol., t. II, pp. 170 et seq.; Martens, Guide, $$ 12, 39; Bello; pte. 3, cap. 1, § 4; Riquelme, lib. II, cap. ad. 1; Garden, Traité, t. II, pp. 5-11; Fiore, t. II, pp. 550 et seq.; Pradier-Fodéré, Principes gén., pp. 367, 537; Merlin, Répert., v. Ministre public, sect. 1; Horne, sec. 1, § 8, p. 91; Halleck, ch. 1x, §§ 2, 3; Wildman, vol. I, p. 89; Polson, pp. 31, 32; Eschbach, Int., pp. 83, 86, 88; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 50, 54; Pinheiro Ferreira, Suppl. au guide dip., pp. 32, 39; Lawrence, Elem., by Wheaton, note 119; Pradier-Fodéré, Vattel, t. III, pp. 239, 240; Laferrière, Cours de droit public, t. I, pp. 314 et seq.; Martens, Nouv. recueil, t. II, p. 449; Dudley-Fiel, Projet de Code, p. 45, § 112. Calvo, Dict. de droit intern. public et privé; Fiore, Droit intern. (Trad. Antoine, t. II, p. 497.

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(1) De Clercq, t. II, p. 455; Martens, Nouv. recueil, t. II, p. 449; Stale papers, v. II, p. 179.

Ambassa

deurs.

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dans sa personne, sa dignité et sa grandeur et qu'ils ont le droit de conférer en tout temps avec lui, sans intermédiaire. En principe, ils ont droit aux mêmes honneurs que ceux qui seraient accordés au pouvoir qui les a accrédités. Toutefois, sur ce dernier point, qui n'est en quelque sorte que de pur cérémonial, il n'existe pas de règle fixe et générale; chaque cour, chaque pays a ses usages, auxquels les agents diplomatiques sont tenus de se conformer, en tant qu'ils n'impliquent ni inégalité ni distinction blessante. De plus, les opinions des publicistes varient sur le caractère des ministres de première classe.

Les ambassadeurs se distinguent en ordinaires et en extraordinaires la première dénomination s'applique à ceux qui sont nommés pour remplir une mission diplomatique permanente, et la seconde à ceux qui sont chargés d'une mission accidentelle et temporaire. On accorde aussi le caractère d'ambassadeur ou d'envoyé extraordinaire à l'agent appelé pour un temps indéterminé à exercer certaines fonctions diplomatiques.

Les nations diplomatiques considèrent généralement comme tels les légats ou les nonces du Pape, investis le plus souvent d'attributions religieuses sui generis *.

§ 1329. Il y a cette distinction à établir entre les légats et les nonces du Pape, que les premiers sont des ambassadeurs extraordinaires, chargés de missions spéciales, plutôt ecclésiastiques que politiques, et qu'ils représentent avant tout le Pape comme chef de l'Eglise catholique romaine, tandis que les seconds sont les ambassadeurs ordinaires ou résidents du Vatican, qu'ils représentent à l'étranger pour la transaction de toutes affaires de quelque nature que ce soit.

§ 1330. Selon les publicistes italiens, Esperson entre autres, le Pape, n'ayant plus de souveraineté temporelle, ne saurait plus entretenir d'agents diplomatiques à l'étranger, ni en recevoir. En recon

*

Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vi, § 71; Vheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 6; Phillimore, Com., vol. II, §§ 214-218; Bynkershoek, De foro, lib. I, cap. XIII; Wicquefort, L'amb., liv. I, §§ 818, 855; Martens, Précis, § 192; Martens, Guide, § 13; Heffter, §§ 208, 220; Garden, Traité, t. II, pp. 7, 8; Klüber, Droit, § 180; Twiss, Peace, § 190; Réal, Science, t. V, pp. 33 et seq.; Bello, pte. 3, cap. 1, § 4; Riquelme, lib. II, cap. ad. 1; Fiore, t. II, p. 554; Merlin, Répert., v. Ministre public, sect. ); Pradier-Fodéré, Principes gén., p. 538; Halleck, ch. Ix, § 4; Horne, sect. 1, § 9, p. 91; Polson, sec. 1, § 2, pp. 31, 32; Ward, Hist., v. II; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 56-61; Pinheiro Ferreira, Supplément au guide, pp. 40-48; Wildman, vol. I, p. 78; Esperson, Droit diplomatique, p. 48.

naissant à la papauté une situation internationale, par la loi de garantie de 1871, le gouvernement italien a maintenu de fait le droit d'ambassade du Saint-Siège. Seulement la situation des agents diplomatiques du Pape s'est modifiée en ce sens qu'ils n'ont plus à traiter d'affaires temporelles. Il en est de même des ambassadeurs ou ministres que les puissances accréditent auprès du Vatican (1). Les légats sont toujours pris parmi les cardinaux, ils ne sont envoyés que dans des pays catholiques qui reconnaissent la suprématie spirituelle du Pape; ils sont dits a latere, parce que le Saint Père est censé les détacher de ses côtés pour les envoyer en mission. Mais il y a aussi des légats dits missi et des légats dits nati Les premiers sont honorés de la légation, sans être cardinaux; les seconds sont des archevêques au siège desquels est attachée la qualité de légat.

Les nonces ne sont jamais des cardinaux et ont des missions permanentes (2).

Agents diplomatiques scconde classe :

§ 1331. Au nombre des agents diplomatiques de seconde classe sont compris les envoyés ordinaires et extraordinaires, les ministres de plénipotentiaires et les internonces du Pape (3). On a établi certaines distinctions entre l'envoyé ordinaire et l'envoyé extraordinaire, ainsi qu'entre celui-ci et le ministre plénipotentiaire; mais ces distinctions sont sans valeur quant à la préséance et n'ont par conséquent aucune importance pratique.

La différence entre les agents de la seconde classe et ceux de la première est assez difficile à préciser. Plusieurs publicistes ont soutenu que les uns ont pour traiter directement avec le souverain un droit formel dont les autres sont privés; mais c'est là une distinction sans portée, surtout depuis que l'organisation des nations. modernes ne s'appuie plus exclusivement sur le principe monarchique, et, partant, met parfois les souverains dans l'impossibilité de diriger personnellement les négociations internationales. Dans tous les cas, elle ne saurait s'appliquer aux ambassadeurs accrédités auprès des gouvernements républicains. La seule distinction rationnelle qu'on pourrait établir entre les deux premières classes d'agents diplomatiques devrait avoir pour base quelque différence

(1) Esperson, Droit diplomatique, p. 36, § 99. (2) Bluntschli, Droit intern. codif., § 172.

(3) On désigne sous le titre d'internonces les ministres de deuxième classe du Pape. Autrefois on donnait également ce titre au ministre d'Autriche à Constantinople. Les internonces du Pape n'ont pas, comme les nonces, droit à la préséance sur leurs collègues.

Envoyés et ministres plénipotentiaires.

Opinion du prince de

sur

la distinction

essentielle dans les attributions. Or là encore, les subtilités imaginées par certains auteurs, qui attribuent aux agents de la première classe une représentation permanente et générale de la personne de leur souverain, tandis que ceux de la seconde n'auraient ce caractère qu'à titre transitoire et pour un objet particulier, se heurtent contre la réalité des choses.

A nos yeux, les agents des deux premières classes sont exactement sur la même ligne au point de vue du caractère comme à celui des attributions, et ne se distinguent entre eux hiérarchiquement que par la différence du titre qui sert à les désigner *.

§ 1332. Notre opinion à ce sujet se trouve entièrement confirmée Bismark et a été développée relativement à ses applications pratiques, par le prince de Bismark, avec toute l'autorité qui, en parcille matière, la première et s'attache à son nom, dans un discours prononcé au Reichstag allemand le 16 novembre 1871 :

des agents de

de la seconde

classe.

<«< Un ambassadeur, dit-il, n'a pas besoin, à cause de son titre, d'un traitement plus élevé ce n'est en somme qu'un titre. Si vous placez à la tête d'une brigade un colonel ou un général, ce sera toujours un brigadier, il devra toujours remplir cet emploi.

<«< Un ambassadeur près d'une grande cour, si l'on fait mesquinement les choses à son égard, n'aura peut-être besoin que de 1,000 à 3,000 thalers de plus qu'un ministre plénipotentiaire. Cette somme suffira pour couvrir les dépenses qui lui sont imposées par l'usage que, dans la plupart des pays, les souverains acceptent, à certaines occasions, les invitations des ambassadeurs, et c'est cette coutume de donner de grandes fêtes qui cause le surcroît de dépenses dont j'ai parlé. L'honneur que la visite du souverain confère à la maison dans laquelle il entre, fait qu'aux yeux des sujets de ce monarque, la situation du représentant correspond mieux à la dignité de l'Etat représenté. Mais il ne s'agit pas de cela dans les augmentations de traitement qui vous sont proposées.

<«< Pourquoi alors, demandera-t-on, donnons-nous le titre d'ambassadeur? C'est plutôt, répondrai-je, à cause de la hiérarchie des agents politiques entre eux. On fait entre les membres du

Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 6; Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vi, § 72; Réal, Science, t. V, pp. 42 et seq.; Martens, Précis, § 193; Martens, Guide, § 14; Phillimore, Com., vol. II, p. 219; Twiss, Peace, § 191; Klüber, Droit, § 181; Garden, Traitė, t. II, p. 8; Riquelme, lib. II, cap. 1; Bello, pte. 3, cap. 1, §4; Heffter, § 208; Fiore, t. II, p. 554; Halleck, ch. 1X, § 5; Horne, sec. 1, § 10, pp. 91, 92; Polson, sec. 5, § 2, p. 32; Hagedorn, Discours sur le rang, § 7.

corps diplomatique une différence, injuste sans doute, mais qui n'en est pas moins généralement admise. Ainsi, il est reçu qu'un ministre des affaires étrangères, s'il se trouve en conférence avec un ministre plénipotentiaire, au moment où on lui annonce un ambassadeur, se croit obligé d'interrompre immédiatement la conférence et de recevoir l'ambassadeur. Un ministre plénipotentiaire aura peut-être attendu une heure dans l'antichambre du ministre des affaires étrangères, au moment où il va être introduit, arrive un ambassadeur, et l'usage de la plupart des cours, autant que je sache, est qu'on fasse entrer ce dernier, le ministre plénipotentiaire devra attendre encore longtemps, ou peut-être même ne pourra-t-il plus être reçu ce jour-là. Il en résulte des mortifications et des froissements qui seront évités par un simple changement de titre. Un ministre plénipotentiaire, s'il a le sentiment de sa dignité, ne supportera pas pareil traitement, et pour ma part, je me suis trouvé en situation d'y résister avec succès, mais non sans amener un froid peu en rapport avec l'importance de la chose. Ces résistances ne peuvent d'ailleurs se produire sans mettre en jeu les personnes d'une manière qui touche presque à la limite de ce qui est permis au représentant officiel d'un grand pays. On peut atteindre le but, en conférant à l'agent le titre d'ambassadeur, qui devient du reste, par les témoignages d'honneur qu'on lui rend, je puis dire, une économie plutôt qu'une cause de dépenses. Les prérogatives qui se rattachent au titre d'ambassadeur peuvent être considérées comme équivalant facilement à quelques milliers de thalers.

<«< J'ai lu quelquefois dans les feuilles publiques (et le précédent orateur y a fait allusion) qu'on signalait le danger du privilège appartenant aux ambassadeurs de conférer directement et sans intermédiaire avec le souverain. Ceci repose sur une erreur. Un ambassadeur n'a pas plus accès près du souverain que tout ministre plénipotentiaire, et il ne peut en aucune façon prétendre au droit de traiter avec le monarque directement, sans l'entremise des ministres de celui-ci..... (1).

Règlement adopté tem.

Berlin.

§ 1333. Conformément à la manière de voir exposée dans ce discours, le prince de Bismark a adopté temporairement la règle que porairement à M. Bancroft, alors ministre plénipotentiaire des Etats-Unis à Berlin, a rapportée en ces termes dans une dépêche du 20 janvier 1872 :

(1) Discours du prince de Bismark, prononcé dans la séance du 16 novembre 1871 au Reichstag allemand; M. Bloch, Dictionnaire général de la politique, édition 1873, t. I, p. 61.

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