Page images
PDF
EPUB

Opinions des publicistes:

Ch. de Mar

tens.

F. de Mar

tens.

Fiore.

« Le chef de mission qui arrive le premier à l'office extérieur est admis le premier, qu'il ait le rang d'ambassadeur, de ministre ou de chargé d'affaires. »

Ce règlement n'a, du reste, subsisté que quelques années, et depuis on est revenu à l'ancien système, d'après lequel les ambassadeurs ont le pas, pour les audiences, sur les ministres plénipotentiaires (1). § 1334. Quant au caractère représentatif attribué aux ambassadeurs comme justifiant en fait la distinction nominale, purement théorique, qui empêche de les identifier aux ministres plénipotentiaires, les publicistes ont émis les considérations qui suivent.

Dans son Guide diplomatique, Ch. de Martens maintient au contraire le caractère représentatif des légats, des nonces et des ambassadeurs, dans le sens qu'on a donné à ce terme dans l'origine, c'est-à-dire qu'à l'entendre, ils représentent la personne de leur souverain, étant seuls autorisés à traiter avec le souverain luimême. Mais, ajoute-t-il, cette supposition a plus d'apparence que de réalité, les ministres de première classe ne traitant guère non plus qu'avec le ministre des affaires étrangères, qui assiste même à leurs audiences. Leur privilège se réduit donc à ceci qu'ils ont toujours accès auprès du souverain. Tous leurs autres privilèges appartiennent au cérémonial qui, il est vrai, peut avoir une portée politique. F. de Martens est également d'avis que les privilèges des ambassadeurs ne résident que dans le cérémonial de réception. Au point de vue juridique, ils sont parfaitement égaux. Leur droit de négocier directement avec le souverain n'existe plus dans les pays constitutionnels et quant à celui d'audience, le prince de Bismark a fait observer très justement qu'aucun ambassadeur n'a le droit d'exiger une entrevue personnelle avec le souverain. Enfin il n'est pas exact qu'ils représentent toujours la personne du souverain, car la République française nomme des ambassadeurs.

Fiore partage entièrement, l'opinion que nous avons énoncée plus haut.

(1) Wharton, dans son International law digest, t. III, § 68, réproduit une dépêche adressée par M. Bayard à M. Phelps, le 2 juillet 1885: « J'infère de votre rapport », est-il dit, « que la situation des ministres des Etats-Unis dans l'ordre de préséance, surtout après un changement dans la mission, lorsque le nouveau venu se trouve nécessairement au bas de la liste, aurait pour conséquence des délais dans l'obtention d'audiences auprès du secrétaire des affaires étrangères, pour règlement des affaires courantes. Cela est réglé de la façon la plus convenable à Washington et dans plusieurs autres capitales, par l'adoption du principe detur priori. »

Voici comment s'exprime, à ce sujet, M. Schuyler, dans son ouvrage sur la diplomatie américaine.

<< Dans l'ancien système, les ambassadeurs étaient supposés représentés non seulement le pays, mais aussi la personne du souverain, et on leur rendait, en conséquence, plus d'honneurs qu'aux autres agents diplomatiques. Ils avaient aussi le droit de s'adresser personnellement au souverain ou aux premiers fonctionnaires du pays où ils étaient envoyés, au lieu de passer par la filière ordinaire. Mais aujourd'hui les ambassadeurs n'ont pas de droits représentatifs supérieurs aux ministres, et n'en diffèrent que pour le rang et la préséance. Le souverain d'un pays est tellement confondu avec le gouvernement, qu'il est pratiquement impossible à un ambassadeur de mener quelque affaire autrement qu'avec l'intervention du ministre des affaires étrangères. Les intérêts personnels des souverains sont confiés à quelque agent privé ou à quelque personnage délégué spécialement pour une grande cérémonie. La théorie du droit personnel des ambassadeurs semble tourner dans un cercle vicieux. Les ambassadeurs ont de plus hauts privilèges, parce qu'ils sont supposés représentés personnellement le souverain, et ils ne représentent le souverain que parce qu'ils ont de plus hauts privilèges. >>

Les Etats-Unis, n'ayant pas de souverain, n'accréditent pas d'ambassadeurs, bien que la constitution les y autorise.

Autrefois Venise et les Etats-Généraux de Hollande envoyaient des ambassadeurs, bien qu'il n'y eût pas de souverain à représenter, et de nos jours la République française continue à en accréditer, suivant sa pratique, dans ses diverses formes de gouvernement. La France a même un ambassadeur en Suisse, le seul accrédité auprès de cette république.

§ 1335. Dans la troisième classe des agents diplomatiques sont compris les ministres, les ministres résidents et les ministres chargés d'affaires. Il y a quelques années, on se servait de la qualification de résident pour indiquer les ambassadeurs qui étaient en service permanent. Pour prévenir le retour des susceptibilités éveillées parmi les agents diplomatiques des trois premières catégories, et faciliter la solution de certaines questions internationales, plusieurs cours ont encore quelquefois, notamment celle de Suède en 1784, employé le titre de ministre chargé d'affaires, qui est peu usité aujourd'hui *.

Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vI, §§ 73, 74; Wheaton, Elém., pte. 3,

Schuyler.

Agents diplomatiques de troisième

classe :

Ministres

résidents.

Agents

diplomatiques

classe :

Chargés d'affaires.

§ 1336. La quatrième classe' des agents diplomatiques ne comde quatrième prend que les chargés d'affaires, accrédités auprès des ministres des relations extérieures. Cette classe se subdivise en deux autres : à la première appartiennent les agents, chefs de poste accrédités ad hoc à titre permanent; à la seconde, les secrétaires remplaçant par intérim un ministre absent. Plusieurs Etats, par exemple l'Angleterre et la France, confèrent parfois à leurs premiers secrétaires d'ambassade, quand ils remplissent par intérim les fonctions de chargés d'affaires, le titre et le rang de ministres : ces agents sont alors classés, dans la cour où ils résident et pendant la durée de leur intérim, à la suite des chefs de légation.

Commissaires et agents.

§ 1337. Dans bien des cas, des commissaires spéciaux sont envoyés à l'étranger pour régler certaines affaires particulières de l'Etat ou d'un souverain, telles qu'une délimitation de frontières, la solution amiable d'un litige, l'exécution de quelque article de traité, la négociation d'un emprunt, une liquidation, la conclusion d'arrangements pour le service des postes et des télégraphes, l'administration et la surveillance de domaines privés du souverain situés en pays étrangers, etc.

En général, ces délégués ne sont pas considérés comme faisant partie du corps diplomatique; ils ne communiquent pas directement avec le souverain étranger ni avec ses ministres ; ils ne jouissent pas des immunités attachées aux missions proprement dites, lors même qu'ils sont revêtus du titre de résident ou de conseiller de légation; on leur reconnaît seulement les droits et les facilités qui leur sont nécessaires pour remplir leur mandat spécial.

Toutefois, un ministre peut être investi des fonctions de commissaire sans qu'elles lui enlèvent son caractère diplomatique. Il importe donc au gouvernement qui envoie des agents de ce genre de préciser le caractère officiel dont il entend les revêtir.

ch. 1, § 6; Phillimore, Com., vol. II, § 220; Martens, Précis, § 194; Martens, Guide, § 15; Réal, Science, t. V, p. 49; Twiss, Peace, § 192; Garden, Traité, t. II, p. 9; Horne, sect. 1, § 11, p. 92; Halleck, ch. IX, § 6; Klüber, Droit, § 182; Heffter, § 208; Riquelme, lib. II, cap. ad. 1; Bello, pte. 3, cap. 1, § 4; Moser, Versuch, t. IV, liv. IV, ch. XVII; Bielfeld, Inst. pol., t. II, p. 281; Polson, sec. 5, § 2, p. 32; Fiore, t. II, p. 554.

* Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, §6; Phillimore, Com., vol. II, § 220; Twiss, Peace, § 192; Martens, Précis, § 194; Martens, Guide, § 15; Merlin, Répert., v. Ministre public, sec. 1; Garden, Traité, t. II, p. 9; Klüber, Droit, § 182; Horne, sec. 1, § 11, p. 92; Halleck, ch. 1x, §7; Heffter, § 208; Réal, Science, t. V, p. 52; Riquelme, lib. II, cap. ad. 1; Lawrence, Elém., by Wheaton, note 122.

On ne saurait non plus confondre avec les agents diplomatiques, puisqu'ils sont privés de toute attache officielle gouvernementale, les délégués que des corporations particulières envoient à un congrès ou à une assemblée privée pour y exposer certains droits ou défendre certains intérêts *.

Chargé d'af

faires rou

Porte Otto

§ 1338. On regardait comme une exception à ce que nous venons de dire des simples agents le cas du chargé d'affaires (capoukiaya) main près la que le prince de Roumanie entretenait auprès de la Porte Otto- mane. mane, son suzerain, et qui, aux termes de l'article 9 du traité signé à Paris le 19 août 1858 (1), était autorisé à veiller à Constantinople aux affaires concernant les Principautés Unies de Moldavie et de Valachie. Bien que placé sous la protection du droit des gens, cet agent n'était cependant admis par le gouvernement ottoman ni sur le pied ni avec le caractère public des chargés d'affaires d'un Etat indépendant.

Il en était de même des agents que le prince de Roumanie envoyait ou entretenait auprès de diverses cours étrangères ; ils n'y étaient agréés qu'à titre officieux et n'étaient pas considérés comme faisant partie du corps diplomatique proprement dit. Nous devons faire observer cependant que les puissances envoyaient auprès du prince de la Roumanie des ministres publics accrédités selon toutes les règles du droit des gens (2) **.

[ocr errors]

Vattel, Le droit, liv. IV, § 75; Martens, Guide, § 17; Heffter, §§ 201, 222; Garden, Traité, t. II, p. 13; Klüber, Droit, § 171; Wicquefort, liv. I, sect. 5, pp. 62, 64; Moser, Beitrage, t. IV, p. 530; De la Maillardière, Précis, p. 535; Martens, Précis, §§ 187, 196; Pestel, Commentarii, pte. 1, cap. v, § 66; Horne, sect. 1, § 12; Albertini, Derecho dipl., p. 56. DudleyField, Projel de Code, p. 81, § 186.

(1) De Clercq, t. VII, p. 482; Savoie, t. VII, p. 578; Martens-Samwer, t. III, pte. 2, p. 50; Archives dipl., 1865, t. III, p. 105.

(2) Le traité de Berlin a modifié essentiellement le status international de la Roumanie, qui est désormais affranchie de toute espèce de sujétion à l'égard de la Porte, et admise au rang des États indépendants jouissant de la plénitude de leur souveraineté individuelle et nationale; elle exerce donc tous les droits découlant de cette indépendance, qui a été reconnue par les gouvernements étrangers, et entre autres par la France, l'Angleterre et l'Allemagne suivant note identique en date du 20 février 1880. Aujourd'hui ces gouvernements accréditent auprès du prince de Roumanie des représentants ayant les mêmes attributions que leurs collègues accrédités auprès des autres puissances; et, de son côté, le prince roumain accrédite auprès des gouvernements étrangers des ministres ou des chargés d'affaires, suivant les circonstances, qui sont traités sur un pied d'égalité avec les représentants diplomatiques des autres États.

Ce que nous disons de la Roumanie s'applique pareillement au royaume de Serbie, dont l'indépendance de la Turquie a été aussi sanctionnée par le traité de Berlin.

** Twiss, Peace, § 194; Martens, Guide, §17, note 2; Wheaton, Elém.,

Missions secrètes.

Rang des agents diplomatiques.

§ 1339. Les souverains ou les gouvernements chargent parfois des personnes de confiance de négociations spéciales dont ils veulent que le secret soit gardé, au moins provisoirement; la plupart du temps le caractère officiel de ministre n'est pas attaché à ces sortes de missions, et l'agent qui en est chargé ne le déploie qu'autant que les besoins de son mandat l'exigent. Un des exemples les plus remarquables de mission de ce genre est celui du duc de Riperda, envoyé près la Cour de Vienne par le roi d'Espagne en 1735; il ne se fit connaître publiquement comme ministre que lorsqu'il eut conclu en secret la paix dont la négociation lui avait été confiée *.

§ 1340. Le rang ou la classe à laquelle un agent diplomatique doit appartenir dépend du choix du gouvernement qui le nomme. Cependant la liberté de ce choix se renferme dans certaines limites, par la raison que la classification des agents est en rapport avec les degrés du cérémonial diplomatique, lequel offre de grandes inégalités d'un pays à l'autre, tout État étant maître de déterminer comme il l'entend les prérogatives honorifiques réservées aux agents qu'il reçoit.

Il est généralement admis, d'après le principe de la réciprocité, que les puissances ne s'envoient mutuellement que des ministres de même classe; toutefois, aucune puissance jouissant des honneurs royaux ne reçoit chez elle de ministre de première classe de la part des puissances n'ayant pas droit aux mêmes honneurs. Quoique les têtes couronnées et les États auxquels sont réservés les honneurs royaux revendiquent exclusivement le droit d'entretenir des légations de première classe, il arrive souvent que des souverains d'un rang secondaire s'envoient mutuellement des ambassadeurs, et c'est en général par des ministres de cet ordre que les souverains se font représenter lorsqu'ils ont à traiter entre eux d'affaires purement personnelles. Ces règles souffrent de nombreuses exceptions. Ainsi, comme nous l'avons dit, la République française entretient à Berne un ambassadeur, tandis que la Suisse n'est représentée à Paris que par un ministre plénipotentiaire. La Rus

pte. 3, ch. 1, § 3; Klüber, Droit, § 175, note b; Horne, sect. 1, §5; Vergé, Précis de Martens, t. II, p. 40; Pradier-Fodéré, Vattel, t. III, p. 220; Répertoire, v. Ministre public, sect. 2, § 1, nos 3, 4.

*Martens, Guide, § 11; Martens, Précis, § 249; Heffter, § 222: Klüber, Droit, § 172; Bielfeld, t. II, pp. 176, 181, 278, 284; Moser, Versuch, t. IV, p. 572; De Callières, ch. vi, pp. 112 et seq; Flassan, Hist., t II, pp. 437 et seq; Vergé, Précis de Martens, t. II, p. 176; Pinheiro Ferreira, Précis de Martens, § 249; Horne, sect. 1, § 2; Albertini, Derecho dip., p. 55.

« PreviousContinue »