Page images
PDF
EPUB

position, de créer des conflits au gouvernement. Donc si aucune accusation de délit de droit commun ne pesait sur le duc de Riperda, l'ambassadeur anglais eût été dans son droit de s'opposer à son enlèvement par la force, comme l'a fait quelques années plus tard son collègue de Stockholm.

Il faudrait entrer dans les détails de ces affaires pour constater exactement la nature des accusations portées contre les personnes incriminées.

Si l'inviolabilité du domicile d'un ministre public ne peut être mise en doute comme principe de droit international aussi longtemps que ce ministre reste dans sa sphère légitimne d'action, et s'il y a des cas d'une gravité exceptionnelle dans lesquels les gouvernements peuvent, en faisant usage de leur droit suprême, mettre un terme à l'existence même d'une ambassade, on comprend facilement comment a dù tomber en désuétude l'antique pratique qui étendait l'inviolabilité diplomatique et l'exterritorialité à tout le quartier où était situé l'hôtel d'un ambassade *.

Exemption des règle

lice.

§ 1526. Ce que nous avons dit de l'exemption de la juridiction civile et de la juridiction criminelle peut s'appliquer également à ments de pol'action de la police. Il va sans dire que celui qui est exempt d'une juridiction supérieure l'est aussi de celle des tribunaux inférieurs.

Un ministre étranger ne saurait toutefois se soustraire dans son hôtel ou au dehors à l'observation des règlements de police municipale qui ont pour but la sûreté et l'ordre publics; il doit veiller à ce que, dans son hôtel, il ne se fasse rien qui puisse y porter atteinte. Il ne doit pas permettre aux gens de sa suite le commerce de marchandises prohibées, ni l'exercice d'un métier qui pourrait porter préjudice aux habitants du pays. Il doit se conformer, en un

* Vattel, Le Droit, liv. IV, ch. Ix, §§ 117, 118; Wheaton, Elėm., pte. 3, ch. 1, § 17; Martens, Précis, § 220; Martens, Guide, §§ 29, 35; Phillimore, Com., vol. II, §§ 204-208; Twiss, Peace, § 201; Bynkershoek, De foro, cap. XVI, XXI; Wicquefort, L'ambassadeur, liv. I, ch. XXVIII; Garden, Traité, t. II, pp. 174-203; Klüber, Droit, §§ 207, 208, Rayneval, Inst., liv. II, ch. XIV, § 6; Felice, Leçons de droit naturel, t. II, lec. 31, p. 423; Bello, pte. 3, cap. 1, § 3; Riquelme, lib. II, cap. ad II; Heffter, § 212; Fiore, t. II, pp. 568 et seq.; Pradier-Fodéré, Principes gén., p. 541; Horne, sect. 3, S$ 30, 31; Halleck, ch. Ix, § 22; Wildman, vol. I, pp. 127-129; Polson, sect. 5, p. 32; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 129-131; Pinheira, Vattel, liv. IV, ch. Ix, §§ 117, 118; Pradier-Fodéré, Vattel, t. III, pp. 315-318; Pinheiro Ferreira, Suppl. au guide dip., pp. 109-115; Merlin, Répertoire, v. Ministre public, sect. 5; Rousset, Recueil, t. IV, p. 69; J. Albistur, El Siglo, de Montévidéo, 1875; De la exterritorialidad; Hall, International law, p. 151; Dudley-Field, Projet de Code, p. 58, § 150.

Du respect dù par les ministres pu

blics aux au

torités loca

les.

Biens-fonds

et propriété

nelle

nistres.

mot, à toutes les ordonnances de police qui ne sont pas incompatibles avec sa dignité et son caractère. Seulement en cas de contravention il n'y a pas lieu de procéder contre lui par voie de poursuites et de contrainte. On respecte, dans ce cas, le principe d'exterritorialité, et l'on procède comme s'il s'agissait de faits relevant de la juridiction civile ou criminelle.

§ 1527. En résumé, les agents diplomatiques, quel que soit leur rang, ont pour premier devoir de respecter le gouvernement et les autorités de la nation chez laquelle ils résident; car en agissant autrement ils violent les principes du droit international et s'exposent à susciter de nombreuses et graves complications *.

§ 1528. Les immeubles qu'un ministre public peut posséprivée person der à l'étranger, ne se rattachant en aucune façon au caractère officiel dont il est revêtu, sont toujours régis par la loi du pays où ils sont situés; ils restent absolument étrangers aussi bien à la fiction de l'exterritorialité qu'au principe de l'immunité personnelle.

Franchises douanières.

Ces biens sont donc, quand il y a lieu, susceptibles d'être vendus par autorité de justice et conformément aux règles ordinaires de procédure; mais, pour éviter que l'indépendance si nécessaire à ces agents soit le moins du monde diminuée, les actions dans le cas que nous venons de rapporter sont censées se poursuivre par défaut. Il en est de même des objets mobiliers, qui n'ont aucune affinité avec le caractère représentatif et qui constituent la propriété privée, individuelle, du ministère public: ils doivent à ce titre demeurer soumis aux lois territoriales **.

§ 1529. Plusieurs gouvernements permettent aux agents diplomatiques étrangers d'introduire en franchise les objets destinés à

* Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vii, § 93; Martens, Guide, § 34; Heffter, SS 206-215; Wheaton, Elem., pte. 3, ch. 1, § 13; Halleck, ch. Ix, § 29; Bello, pte. 3, cap. 11, § 1; Wicquefort, L'ambassadeur, liv. I, § 20; Horne, § 42.

Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vIII, §§ 113-115; Grotius, Le droit, liv. II, ch. XVIII, §9; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 17; Phillimore, Com., vol. II, S$ 180, 181; Martens, Précis, § 217; Martens, Guide, § 31; Bynkershoek, De foro, cap. XIV, XVI, §6; Réal, Science, t. V, ch. 1, sect. 9, nos 4,5; Garden, Traité, t. II, pp. 114 et seq.; Klüber, Droit, § 210; Burlamaqui, Principes, ch. XIII, § 12; Rayneval, Inst., liv. II, ch. XIV, §5; Bello, pte. 3, cap. 1, 3; Riquelme, lib. II, cap. ad II; Heffter, §§ 215, 217; Pradier-Fodéré, Principes généraux, p. 541; Halleck, ch. 1x, §23; Horne, § 28; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 116-118; Pinheiro Ferreira, Suppl. au guide dip., pp. 103, 104; Dalloz, Répertoire, v. Agent dip., nos 110, 113; Merlin, Répertoire, v. Ministre pub., sec. 5; Mirus, Das europ., § 343; Hall, International law, p. 142.

leur usage personnel et à celui de leur famille; d'autres fixent les quantités admissibles en exemption de taxe et ne soumettent que l'excédant aux droits ordinaires d'entrée; quelques-uns enfin, sans accorder directement la franchise, la consacrent indirectement en remboursant sur fonds de chancellerie ou de cabinet le montant des droits acquittés.

Le privilège de franchise diplomatique, n'étant pas rigoureusement indispensable au libre exercice des fonctions d'un ministre public, a été de nos jours renfermé dans des limites assez étroites, par suite des abus qu'il avait fini par engendrer.

C'est ainsi par exemple, qu'à moins d'ordres contraires expédiés par anticipation à la frontière, les bagages de tout agent diplomatique sont devenus passibles des visites de douane et que l'exemption de taxe doit invariablement être sollicitée par des notes écrites spécifiant avec précision la nature, les quantités et la destination des objets qui doivent en bénéficier *.

Impôts directs et indi

§ 1530. Les ministres publics sont partout exemptés du paiement des impôts purement personnels et directs. Par contre, à rects, moins de conventions spéciales fondées sur le principe de la réciprocité, ils restent soumis aux impôts indirects, aux taxes d'octroi et aux autres charges analogues, telles que péages de ponts et de chaussées, frais de poste, etc. Quant à l'impôt foncier, les ministres publics ne peuvent s'en affranchir pour les immeubles qu'ils. possèdent, alors même que ces immeubles sont affectés uniquement à leur logement personnel. Il en serait tout autrement, si l'hôtel de la légation était la propriété de leur gouvernement; car les convenances internationales ne permettent évidemment pas de traiter un gouvernement étranger comme un contribuable ordinaire et, partant, de l'assujettir à des impositions territoriales et directes **.

Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 18; Vattel, Le droit, liv. IV, ch. II, § 105; Phillimore, Com., vol. II, §§ 202, 203; Twiss, Peace, § 293; Martens, Précis, § 227; Martens, Guide, § 35; Heffter, § 217; Klüber, Droit, §§ 205, 206; Garden, Traité, t. II, pp. 172-174; Bello, pte. 3, cap. 1, § 3; Riquelme, lib. II, cap. ad II; Pradier-Fodéré, Principes généraux, p. 541; Halleck, ch. IX, § 24; Horne, sect. 3, § 29, p. 402; Eschbach, Int., pp. 92 et seq.; Merlin, Répertoire, v. Ministre public, sect. 5: Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 141-145; Pinheiro Ferreira, Précis de Martens, §§ 227, 228; Pinheiro Ferreira, Suppl. au guide dip., pp. 104, 109; Albertini, pp. 185, 186; Dudley-Field, Projet de Code, p. 59, §§ 155,156.

Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vII, § 105; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 18; Phillimore, Com., vol. II, §§ 202, 203; Twiss, Peace, § 203; Martens, Précis, §§ 227-229; Martens, Guide, § 35; Heffter, § 217; Klüber,

Liberté

de culte.

Des égards qui sont dus

aux ministres publics dans les Etats où

ils ne sont pas accrédités.

§ 1531. Les ministres publics étant considérés comme vivant dans leur propre pays et étant exempts de la juridiction locale dans la mesure que nous avons indiquée plus haut, doivent forcément jouir, dans l'intérieur de leur maison, du droit de pratiquer leur religion. Ce droit, qui a été reconnu par tous les peuples, ne saurait toutefois s'exercer qu'à la condition d'observer les règlements municipaux et de police concernant le maintien de l'ordre public.

L'influence, chaque jour plus puissante, de l'indépendance religieuse et de la liberté de conscience a étendu ce privilège jusqu'au point d'autoriser l'établissement, comme annexes des hôtels des ambassades étrangères, de chapelles publiques dans lesquelles toutes les personnes professant le même culte, étrangers ou nationaux, sont librement admises à célébrer leurs cérémonies religicuses. Ces chapelles sont toutefois tenues de renfermer l'accomplissement de leur rite dans l'intérieur de leur enceinte et, à moins d'autorisations exceptionnelles, de s'interdire toute procession publique, ainsi que l'usage des cloches. Quant aux baptêmes et aux mariages qu'elles sont appelées à consacrer, il est peu de pays qui ne reconnaissent à ces actes religieux la même valeur que s'ils avaient été accomplis dans les églises paroissiales*.

§ 1532. Les ministres publics n'ont pas droit aux immunités et aux privilèges inhérents à leurs fonctions hors du pays où ils sont accrédités; toutefois, il est d'usage que, lorsqu'ils traversent le territoire des États amis, particulièrement pour se rendre à leur destination, les autorités de ces Etats aient pour eux tous les égards

Droit, § 205; Garden, Traité, t. II, pp. 172 et seq.; Riquelme, lib. II, cap. ad ; Bello, pte. 3, cap. 1, §3; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 141 et seq.; Pradier-Fodéré, Principes, p. 541; Lawrence, Elém. by Wheaton, note 136; Albertini, pp. 184, 185; Hall, Int. law, p. 151; DudleyField, Projet de Code, p. 59, § 156.

* Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 1, § 21; Vattel, Le droit, liv. IV, ch. vii, § 104; Martens, Précis, §§ 222-226; Heffter, § 213; Phillimore, Com., vol. II, §§ 207-210; Twiss, Peace, § 204; Klüber, Droit, §§ 215, 216; Martens, Guide, § 36; Wicquefort, L'ambassadeur, t. I, §280; Garden, Traité, t. II, pp. 202-203; Fiore, t. II, p. 598; Bello, pte. 3, cap. 1, § 3; Bohmer, Jus ecclesiasticum, t. III, pp. 3, 37, 45 et seq.; Réal, Science, t. V, ch. 1, sect. 7, n° 2; Wildman, vol. I, p. 129; Horne, sect. 3, § 32, p. 103; Halleck, ch. IX, § 25; Moser, Versuch, t. IV, p. 155; Moser, Beitrage, t. IV, p. 185; Schmelzing, § 355; Merlin, Répertoire, v. Ministre public, sect. 5; Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 134, 135, 137-139; Pinheiro Ferreira, Précis de Martens, §§ 222-226; Lawrence, Elém. by Wheaton, note 142; Pinheiro Ferreira, Suppl. au guide dip., pp. 115-128; Statutes at large, vol, VIII, pp. 328, 393, 472.

dus à leur caractère officiel. On doit surtout une entière sûreté au ministre voyageant pour les affaires d'une nation. L'insulter est faire injure à son gouvernement et à toute la nation; lui faire violence, c'est blesser le droit de légation qui appartient à tous les souverains.

des ambassafran

çais.

§ 1533. Aussi le roi François Io était-il fondé à se plaindre du Assassinat meurtre de ses deux ambassadeurs, MM. Rincon et Frégosse, qui, deurs en se rendant à Venise et à Constantinople, furent arrêtés sur les bords du Pô et assassinés par ordre du gouverneur du Milanais, qui croyait ainsi favoriser la politique de Charles-Quint. Le roi de France, justement offensé, demanda la réparation de ce forfait, et, ne l'ayant pas obtenue, il déclara la guerre à l'empereur, en invoquant en même temps le concours des autres nations chrétiennes.

Quelques auteurs, et Vattel est du nombre, considèrent ce fait comme un attentat contre le droit des gens; d'autres n'ont voulu y voir qu'une violation de la foi publique, par la raison que les ministres assassinés n'avaient pas encore été reçus officiellement par les gouvernements auprès desquels ils devaient résider. Pour nous, il nous est difficile de voir là autre chose qu'un crime odieux, une conséquence lamentable de cette politique ténébreuse et funeste qui fit répandre tant de sang en Europe au seizième et au dix-septième siècle.

§ 1534. En temps de guerre, comme en cas de danger pour le maintien de l'ordre public, il est de règle de tracer aux ambassadeurs et à leurs agents ou à leurs courriers, l'itinéraire qu'ils doivent suivre. C'est ce qui arriva notamment à l'époque des négociations du congrès de Westphalie, dont les membres s'imposèrent réciproquement pour règle de ne pas permettre aux courriers chargés de leurs dépêches de suivre d'autres routes que celles comprises dans leur propre itinéraire et en dehors desquelles leurs titres de voyage ne devaient plus avoir ni valeur ni efficacité.

Dans tous les cas, le gouvernement, sur le territoire duquel passe un agent étranger, est naturellement en droit de prendre certaines précautions, s'il est autorisé à craindre que cet agent ne mette à profit son séjour, même accidentel, pour compromettre les institutions établies, nuire aux intérêts généraux du pays ou manquer aux devoirs d'une stricte neutralité; il peut même lui refuser le passage ou la permission de séjourner.

Passage des ministres pu

blics et de

leurs agents

par un pays

étranger.

Cas de M. Soulé,

§ 1535. C'est ce qui arriva, en 1854, à M. Soulé, ministre des États-Unis en Espagne, mais Français de naissance. Le gouverne- ministre des ment impérial lui ayant refusé la permission de séjourner à Paris,

Etats-Unis.

1854.

« PreviousContinue »