Page images
PDF
EPUB

Traités

de protection.

des clauses de garantie internationales: l'inviolabilité d'un traité; l'accomplissement par un État d'un engagement particulier, tel que le paiement d'une dette, la cession ou l'abandon de territoire, etc.; le maintien d'une puissance dans une situation de ncutralité ; la défense du droit public interne d'une nation; la protection des possessions territoriales ou des droits particuliers d'un pays contre toute agression quelconque, qu'elle provienne du dedans ou du dehors.

La garantie est générale ou spéciale suivant qu'elle embrasse tout ou partie seulement des droits d'une espèce déterminée, des possessions d'un État ou des dispositions contenues dans un traité ; elle est stipulée ou à perpétuité ou pour un temps déterminé ; mais elle ne peut s'étendre qu'aux seuls droits ou aux seules possessions qui existent lors de la conclusion du traité.

L'État garant est tenu uniquement de prêter le secours stipulé, et ne peut, à moins de stipulation formellement contraire ou libelléc de manière à impliquer une garantie absolue, illimitée, être rendu responsable en cas d'insuffisance ou d'inefficacité du secours.

Lorsque la garantie est destinée à assurer la sécurité d'un pays en tout état de choses sans réserve d'aucune sorte, l'engagement souscrit acquiert une portée beaucoup plus grande et devient un véritable traité de sûreté *.

§ 1585. A ce genre de traités, on pourrait rattacher le traité de protection par lequel un État assume l'obligation d'en défendre, d'en protéger un autre plus faible en toute éventualité et contre tous ses ennemis quels qu'ils puissent être. Nous citerons comme exemple les traités qui, en 1815 (1), donnèrent le protectorat des îles Ioniennes à l'Angleterre et celui de la république de Cracovie à l'Autriche, à la Prusse et à la Russie, ainsi que les traités de 1843 (2) et de 1847 (3) qui ont placé Taïti sous le protectorat de la France.

* Twiss, Peace, § 231; Phillimore, Com, vol. II, pte. 5, ch. vII; Vattel, Le Droit, liv. II, §§ 235-239; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 11, § 12; Klüber, Droit, §§ 157-159; Wildman, vol. I, pp. 168, 169; Heffter, § 97; Martens, Précis, § 63; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. ad. xv; Garden, Traité, t. I, pp. 432-434; Horne, p. 122; Halleck, ch. vIII, § 23; Moser, Versuch, t. VIII, p. 855; Flassan, Hist. de la dipl., t. VIII, p. 195; Neyron, Essai hist. et polit.; Lawrence, Elém. by Wheaton, note 162.

(1) De Clercq, t. II, p. 635; Martens, Nouv. recueil., t. II, p. 663; Neumann, t. III, p. 58; Russie, t. II, p. 19; Herstlet, v. I, p. 44; Elliot, v. II, p. 183; Angeberg, Le congrès, p. 1580.

[blocks in formation]

Dans les temps modernes, les traités de protection ne portent plus atteinte à l'indépendance nationale, à l'autonomie de l'État protégé, quoique, dans la plupart des cas, la puissance protectrice exerce le droit de garnison sur le territoire qu'elle a mandat de défendre*.

§ 1586. Nous avons dit que la garantie peut avoir pour objet de créer à une nation une situation exceptionnelle à l'égard de toutes les autres; il en est de même de la neutralité. Lorsque plusieurs puissances se réunissent entre elles pour la reconnaître et la garantir, elles fixent par un traité spécial les droits du neutre et précisent pour elles-mêmes l'obligation qu'elles contractent de respecter et de faire respecter cette neutralité. La protection spéciale qui surgit dans ce cas diffère du protectorat proprement dit; d'une part, en effet, elle n'incombe pas à un seul État, et d'autre part elle impose des obligations, des restrictions ou des abstentions mutuelles à tous les protecteurs, plutôt qu'elle n'établit des charges directes pour l'État neutralisé, lequel conserve l'intégralité de son indépendance souveraine, sauf, en cas de contestation au dehors ou de difficultés internationales, son recours contre les garants de sa neutralité.

Telle est notamment la situation dans laquelle sont aujourd'hui placés la Confédération Helvétique, le royaume de Belgique et le royaume de Grèce, dont la neutralité absolue a été assurée par des traités auxquels ont participé toutes les grandes puissances de l'Europe.

Une dernière espèce de neutralité est celle qui se rattache à l'état de guerre entre différentes nations, et qui trace une ligne de démarcation entre les droits et les obligations des belligérants et ceux des peuples qui ne veulent point prendre part aux hostilités. Les conditions particulières de cette neutralité sont généralement réglées par des accords internationaux, dont la forme et l'étendue varient suivant les circonstances de temps et de lieu, quand elles ne résultent pas d'engagements généraux antérieurs, tels que des traités de limites, de navigation, de commerce, etc., ou de notifications diplomatiques faites au moment où les hostilités vont éclater (1) **.

*Twiss, Peace, § 229; Fiore, t. I, pp. 512, 513; Heffter, § 22, p. 97; Vattel, Le droit, liv. I, § 194; Wheaton, Elém., pte. 1, ch. II, § 13; PradierFodéré, Vattel, t. I, pp. 479, 480.

(1) Voyez Neutralité.

[ocr errors]

Twiss, Peace, § 232; Garden, Traité, t. I, p. 438; Massé, Droit com., t. I. § 180; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, § 7.

Traités de neutralité.

Traités d'alliance.

Cas

de la Sainte Alliance.

1815.

Traités d'amitié.

§ 1587. On appelle traités d'alliance ceux par lesquels deux ou plusieurs nations s'unissent entre elles, soit dans l'intention de se soutenir mutuellement contre un péril qui les menace, soit pour attaquer un ennemi commun. Ces alliances se subdivisent naturel lement en offensives ou en défensives.

Les alliances offensives ont pour objet tantôt de faire la guerre en commun à une nation déterminée; tantôt, sans préciser ni l'ennemi ni l'époque, d'obliger les contractants à participer à toutes. les guerres que l'une ou l'autre pourra entreprendre.

Les alliances défensives sont destinées à protéger la conservation et l'indépendance de ceux qui les contractent.

Le plus souvent les alliances sont à la fois défensives et offensives.

§ 1588. L'exemple le plus remarquable qu'offrent les temps modernes d'une alliance de ce genre est celle qui fut conclue à Paris le 14 septembre 1815 (1) entre les empereurs d'Autriche et de Russie et le roi de Prusse, et à laquelle la plupart des princes souverains de l'Europe accédèrent successivement, sur l'invitation des trois puissances contractantes. Elle avait, comme on sait, pour objet de défendre mutuellement les États intéressés contre toute agression étrangère et de maintenir intact le principe monarchique. Les idées de droit divin et de fraternité chrétienne qui ont présidé à sa formation lui ont fait donner la dénomination de Sainte Alliance, sous laquelle elle est généralement connue. Complété et mieux précisé quant à sa portée pratique par le protocole que signèrent à Aix-la-Chapelle le 15 novembre 1818 (2), les plénipotentiaires de l'Autriche, de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse et de la Russie, le traité de la Sainte Alliance a été, pendant un grand nombre d'années, la base fondamentale du droit public européen et des rapports des souverains avec leurs peuples (3).

§ 1589. Les traités d'amitié diffèrent des traités d'alliance en ce qu'ils ne sont qu'un témoignage de la bonne intelligence qui règne entre deux peuples, et qu'ils ne les obligent pas, comme dans le cas d'alliance, à se prêter mutuellement un appui effectif à un moment donné; il est rare toutefois que les traités d'amitié ne soient pas un acheminement vers des liens plus étroits, et même

(1) Martens, Nouv. recueil, t. II, p. 656; State papers, 1815-1816, p. 211. (2) De Clercq, t. III, p. 175; Neumann, t. III, p. 441; Russie, t. II, p. 351; Martens, Nouv. recueil, t. IV, p. 554; Angeberg, Italie, p. 244; Lesur, 1818, p. 435.

(3) Voir Introduction, p. 74.

qu'ils ne renferment pas à cet égard quelque stipulation secrète*. § 1590. Il y a encore une sorte de traités qui rentre dans les traités d'alliance: ce sont ceux de subsides, par lesquels une puissance, sans prendre directement part à une guerre comme partie principale, s'engage à y concourir indirectement en fournissant à l'un des belligérants soit un subside pécuniaire, soit un secours limité en troupes ou en bâtiments de guerre, moyennant une indemnité en espèces. Les engagements de ce genre, quand il ne s'y rattache pas d'autres obligations plus précises, ne transforment pas nécessairement en allié l'État qui fournit le subside; mais par luimême le subside constitue un acte hostile qui détruit la neutralité et implique virtuellement toutes les conséquences de l'état de guerre **.

Traités de subsides.

Traités d'associations ou

§ 1591. La guerre, le maintien de la paix ou la garantie commune contre des dangers présents et futurs ne sont pas la cause et d'alliances pal'objet uniques des alliances.

Deux ou plusieurs États peuvent encore s'allier en vue d'atteindre en commun un but déterminé d'une nature pacifique : de partager, par exemple, certains avantages commerciaux, financiers, juridiques ou autres; d'établir entre eux des règles uniformes pour l'exploitation d'un service public, tel que celui des postes et des télégraphes; de simplifier la perception des impôts; de confondre leurs lois économiques, leurs systèmes de poids, de mesures et de monnaies, etc. Dans ces divers cas, l'alliance prend, à proprement parler, le caractère d'une véritable association, régie toutefois par des règles différentes de celles du contrat civil de société.

La sphère des traités d'association n'est pas exclusivement politique, comme l'est généralement celle des traités d'alliance, et nous sommes ainsi conduits à placer les premiers dans une classe distincte, qui embrasse notamment les unions formées pour la mise en pratique d'un système commercial et industriel uniforme, fondé

Vattel, Le droit, liv. II, ch. XII, XIII; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. II, SS 13, 14; Twiss, Peace, §§ 214, 215, 228; Martens, Précis, § 298; Heffter, §§ 6, 92; Fiore, pte. 1, liv. III, ch. vi; Klüber, Droit, §§$ 146, note a, 148, 149; Bello, pte. 1, cap. IX, § 2; Pradier-Fodéré, Principes gén., pp. 563, 564; Garden, Traité, t. I, pp. 424 et seq.; Wildman, v. I, pp. 164 et seq.; Halleck, ch. VIII, § 25; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, §7; Ott, Klüber, pp. 188, 189.

Twiss, Peace, § 230; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 11, § 14; Fiore, t. I, p. 563; Martens, Précis, § 302; Rayneval, Inst., liv. III, ch. x, § 6; Garden, t. I, p. 428; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, § 7.

cifiques.

Traités de

sur une législation, des règlements et une administration communes : le Zollverein, ou union douanière allemande, offre l'exemple le plus remarquable d'un semblable traité d'association (1)*.

§ 1592. L'alliance ou l'union peut être resserrée par les liens les confédération. plus étroits, devenir intime entre les parties qui la contractent,

Traités

de limites.

s'étendre non seulement à leurs relations cxtérieures, mais aussi à leurs affaires intérieures, embrasser le domaine tout entier de leurs intérêts moraux et internationaux; elle est alors cimentée par des institutions communes et permanentes, basées sur l'égalité des obligations et des droits entre les contractants et dont l'ensemble constitue le traité d'union fédérale ou confédération. C'est ainsi que sc sont formés la Confédération Helvétique, les États-Unis d'Amérique, la Confédération Argentine, et, il y a quelques années, le Dominion of Canada, qui, à l'exception des territoires bordés par l'Océan Pacifique, réunit en un scul groupe compact presque toutes les possessions anglaises au nord du continent américain (2) **.

§ 1593. La démarcation des frontières qui séparent les États fait l'objet de conventions spéciales communément désignées sous la dénomination de traités de limites. La rédaction de ces arrangements réclame des soins extrêmes et une très grande clarté, afin de prévenir les usurpations de territoire et les conflits entre frontaliers, lesquels soulèvent tant de questions délicates entre les États. voisins. Que de guerres n'ont pas eu d'autre origine qu'une dé marcation mal définie, des termes ambigus employés pour désigner certains lieux et fixer la limite extrême des souverainetés respectives!

Dans les temps modernes le perfectionnement des sciences géographiques et mathématiques a singulièrement contribué à faciliter les délimitations de frontière, et l'on peut citer comme type de traités sur cette matière ceux que les principales puissances d'Europe ont conclus à partir de 1815 à la suite des congrès de Vienne, et plus particulièrement ceux de la France avec les PaysBas en 1820 (3), la Suisse en 1824 (4), cn 1825 (5) et en 1826 (6),

(1) Voir Zollverein, § 79.

Grotius, Le droit, liv. II, ch. XII, § 24; Heffter, §§ 92, 243.

(2) Voir Fédérations, § 50.

** Heffter, § 93; Fiore, t. I, pp. 196 et seq.

(3) De Clercq, t. III, p. 223; Martens, Nouv. suppl., t. I, p. 587.

(4) De Clercq, t. III, p. 332.

(5) De Clercq, t. III, p. 384.
(6) De Clercq, t. III, p. 417.

« PreviousContinue »