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§ 1615. Le concordat passé avec la République de Costa-Rica Costa-Rica. (Amérique centrale), le 30 avril 1852 (1), se distingue de tous les autres actes de même nature par une stipulation qui autorise expressément les évêques aussi bien que le clergé et le peuple à communiquer librement avec le Saint-Siège*.

SECTION II. NÉGOCIATIONS

§ 1616. Le droit de négocier et de conclure des traités et des conventions est un des attributs essentiels de la souveraineté nationale: l'État qui aurait perdu la faculté de souscrire librement avec d'autres pays des engagements conventionnels de quelque nature qu'ils puissent être, cesserait par cela même d'être considéré comme souverain et indépendant.

Il va sans dire que le droit subsiste intact, bien que l'exercice puisse en être paralysé par l'existence d'engagements antérieurs ou par une de ces circonstances de force majeure qui font que l'une des parties contractantes impose à l'autre des obligations qu'il ne lui a pas été loisible de repousser ou de discuter avec maturité **.

§ 1617. Les traités et les conventions internationales sont pour les États ce que les contrats et les engagements privés sont pour les particuliers; une des conditions de leur validité réside dans la capacité personnelle des contractants.

Les États dépendants à quelque titre que ce soit, vassaux, misouverains ou privés d'une portion quelconque de leur souveraineté extérieure, ne sont donc aptes à se lier conventionnellement envers d'autres nations qu'autant qu'ils y sont autorisés par l'État dont ils relèvent; en d'autres termes, ils possèdent le droit de négociation, mais dans des conditions incomplètes et restreintes. Telle est, par

(1) Ann. des Deux Mondes, 1852-1853, p. 921.

A. Theiner, Histoire des deux concordals; Phillimore, Com., v. II, pp. 358-390; Heffter, §§ 40, 41; Fiore, t. II, pp. 16 et seq.; Klüber, Droit, § 31; Bello, pte. 1, cap. IX, §2.

** Vattel, Le droit, liv. II, ch. XII, § 155; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. II, § 1; Martens, Précis, § 119; Phillimore, Com., vol. II, § 44; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. xv; Klüber, Droit, § 141; Bluntschli, §§ 403, 404; Bowyer, ch. xx, p. 226; Halleck, ch. VIII, §§ 8, 9; Bello, pte. 1, cap. IX, § 1; Horne, sec. 1, §5; Polson, sec. 5, p. 33; Vergé, Précis de Martens, t. I, pp. 321, 322; Pradier-Fo déré, Vattel, t. II, pp. 143, 144.

Droit de négocier et de conclure des

traités.

États

indépendants,

Capacité

pour traiter.

exemple, la situation que les actes de 1841 et les firmans postérieurs ont faite au vice-roi d'Egypte et au prince de Moldo-Valachie par rapport au Sultan, leur suzerain.

Le paiement d'un tribut et l'allégeance accidentelle portent bien une certaine atteinte à l'indépendance absolue; toutefois, ils ne sont pas en général, à moins de stipulations contraires, considérés comme détruisant la souveraineté et interdisant l'exercice du droit de négociation.

Quant aux États qui vivent sous le protectorat d'un autre, et quant à ceux qui font partie d'une confédération ou d'une union, leur pouvoir de conclure des traités est plus ou moins étendu et dépend nécessairement pour eux du caractère des lois fondamentales qui les régissent.

Ainsi les membres de l'ancienne Confédération Germanique pouvaient conclure des traités d'alliance et de commerce et les États qui composent l'Empire d'Allemagne ont conservé le droit de conclure des traités sur des matières qui ne sont pas de la compétence de l'Empire, par exemple des traités d'extradition, tandis que les cantons de la Confédération Helvétique, aux termes du pacte de 1848, sont privés de ce droit, qui appartient exclusivement à la diète fédérale. De même la constitution des États-Unis et celle de la République Argentine interdisent aux États qui font partie de la confédération de conclure des traités ou des conventions avec des nations étrangères sans le consentement du congrès fédéral.

Il est donc d'un haut intérêt, pour l'Etat souverain qui traite avec un Etat dépendant ou mi-souverain, de rechercher dans quelle mesure ce dernier peut contracter des obligations internationales et est capable de les remplir *.

§ 1618. Pour constater en qui réside le pouvoir de conclure des traités, il faut recourir à la constitution fondamentale des Etats; car ce droit étant un attribut essentiel de la souveraineté nationale, l'exercice n'en peut être régi que par le droit public interne de chaque pays.

Dans les monarchies, l'exercice en est concentré entre les mains

Vattel, Le droit, liv. II, ch. XII, § 155; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. II, §1; Phillimore, Com., vol. II, § 48; Martens, Précis, §§ 47, 119; Klüber, Droit, § 141; Bluntschli, §§ 403, 404; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. xv; Bello, pte. 1, cap. Ix, § 1; Ortolan, Règles, t. I, p. 84; Halleck, ch. vIII, § 10; Pando, Derecho int., pte. 2, cap. 1, § 2; Heffter, §§ 200 et seq.; Story, Com. on the const., §§ 1347 et seq.;Const., of the U. S., art. 1, sect. 10; Vergé, Précis de Martens, t. I, pp. 155-157; Hall, Int. law, p. 272.

du souverain, sauf des restrictions plus ou moins grandes; dans les républiques, il appartient au chef du pouvoir exécutif, assisté de ses ministres ou des grands corps de l'Etat.

Le président des Etats-Unis, par exemple, ainsi que les présidents des républiques de l'Amérique du Sud, ne peut conclure des traités de paix ou de guerre sans l'avis et le consentement du Sénat, exprimés par une majorité des deux tiers au moins des votes. Toutefois, en temps de guerre, il peut, en sa qualité de chef de l'armée et de la flotte, conclure des armistices avec l'ennemi. Cette exception en ce qui concerne les engagements militaires existe, du reste, dans beaucoup de pays, et l'on peut dire qu'en général les trèves, les capitulations, les échanges de prisonniers, les rançons rentrent dans les attributions des chefs d'armée ou d'escadre, qui, hormis certains cas particuliers, n'ont même pas besoin de les soumettre à la ratification du pouvoir suprême de l'Etat.

En résumé, les représentants ou les détenteurs actuels du pouvoir souverain possèdent seuls la capacité nécessaire pour conclure des traités proprement dits, pourvu, bien entendu, que, pour leurs relations extérieures, ils se renferment dans les limites déterminées par les liens de dépendance internationale ou par les termes de la constitution de l'Etat. Par contre, le prince légitime d'un pays qu'une révolution a dépouillé de sa couronne ne peut valablement contracter au nom de l'Etat tant qu'il n'est pas rentré en possession du pouvoir suprême. A l'époque où un souverain pouvait dire : « L'Etat, c'est moi », il en était sans doute autrement; mais de nos jours la souveraineté est inhérente au fait de l'exercice du pouvoir suprême; la perte de l'un entraîne la perte de l'autre, et c'est la nation qui reconquiert le droit dont son organe naturel a été dépouillé; en un mot l'Etat ne change pas ".

Conclusions et signature

§ 1619. De nos jours, il est rare que les souverains traitent directement entre eux et signent personnellement les accords inter- des traités. nationaux par lesquels ils entendent se lier; le plus habituellement ils confient à leurs ministres et, à défaut de ceux-ci, à des délégués spéciaux appartenant à la carrière diplomatique ou à un service pu

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Vattel, Le droit, liv. II, ch. xII, § 154; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. II, §1; Phillimore, Com., vol. II, § 48; Bello, pte. 1, cap. Ix, §1; Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. xv; Ortolan, Règles, t. I, p. 84; Halleck, ch. vIII, § 11; Klüber, Droit, § 142; Kent, Com., vol. I, §§ 284, 285; Story, Com. on the const. of U. S., § 1502; Vergé, Précis de Martens, t. I, p. 156; PradierFodéré, Vattel, t. II, p. 142; Const. of the U. S., art. 2, sect. 2; Funck Brentano et Sorel, Précis, t. I, ch. vi; Dudley-Field, Projet de Code, p. 83, § 189.

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blic quelconque le soin de les représenter, de négocier et de débattre en leur nom les clauses des traités qu'ils veulent conclure. Cette délégation fait l'objet d'une sorte de procuration appelée pleins pouvoirs de là le nom de plénipotentiaires donné à ceux qui sont munis de ces pouvoirs.

La négociation des traités s'ouvre d'ordinaire par la production et l'échange de pleins pouvoirs donnés respectivement aux agents qui en sont chargés et indiquant l'objet de la négociation; elle se suit verbalement ou par échange de notes écrites; la signature ce l'arrangement sur les termes duquel les plénipotentiaires sont finlement tombés d'accord en marque le terme.

Dans certains cas exceptionnels, et à raison du rang élevé des négociateurs ou de la légitime confiance qu'ils inspirent, la discussion détaillée d'un traité est entamée sur une simple déclaration verbale qu'elle est régulièrement autoriséc de part et d'autre; mais alors les pleins pouvoirs respectifs doivent être poduits au moment de l'apposition des signatures au bas de l'accord

commun.

§ 1620. Les délibérations des négociations sont constatées par des documents officiels; le plus en usage est un procès-verbalde chaque séance, auquel on donne le nom de protocole, et qui rapporte les opinions exposées par chacun des négociateurs dans la séance du jour et formule, s'il y a lieu, les résolutions qui y ont été arrêtées. Le protocole, pour être valable, doit être adopté officielement par les négociateurs : ce qu'ils font en le revêtant de leurs signatures. Cette dernière formalité est surtout de rigueur pour le protocole de clôture des négociations.

Les engagements constatés par les protocoles ne sont considérés que comme des engagements verbaux, n'ayant ni la force ni le aractère que les traités reçoivent de leurs stipulations contractuelles et des ratifications. La nature et la portée des engagements résultant d'un protocole sont déterminés par les termes mêmes du protocole *.

§ 1621. Quelquefois un Etat tiers s'interpose entre deux pays ou se joint à eux soit pour faciliter l'issue de négociations pendantes, soit pour s'associer dans une certaine mesure à l'accord qu'elles ont conclu c'est ce qu'on appelle la tierce intervention, qui est tantôt

Heffter, § 88; Fiore, t. I, p. 451; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. 11, § 2; Phillimore, Com., v. II, § 49; Martens, Précis, §§ 48 et seq.; Ortolan, Règles, t. I, pp. 80 et seq.; Klüber, Droit, § 143; Garden, Traité, t. I, pp. 412 et seq.; Wildman, v. I, p. 170; Bello, pte. 1, cap. IX, § 1.

purement bénévole et officieuse, tantôt formelle et nettement carac

térisée.

§ 1622. L'intervention bénévole se manifeste par des bons offices Bons offices, ou par une véritable médiation.

On entend par bons offices les démarches et les actes au moyen desquels une tierce puissance tâche d'aplanir la voie des négociations ou de renouer les pour parlers interrompus. Ils peuvent être offerts spontanément ou accordés à la suite d'une demande directe, ou résulter d'engagements souscrits à titre éventuel. En général, à moins de stipulation expresse en sens contraire, les bons offices n'engagent pas directement la responsabilité de l'Etat qui les prête. § 1623. Il y a lieu à médiation lorsque la puissance tierce, avec Médiation. le consentement des parties intéressées, participe d'une manière régulière et continue à la négociation engagée. Le médiateur donne son avis sur les propositions faites par l'une ou l'autre des parties, repousse celles qui lui paraissent injustes et suggère, de son côté, celles qu'il croit opportunes.

Le rôle du médiateur cesse avec la conclusion du traité, ou par la rupture des négociations provoquées par l'une ou l'autre des par

ties intéressées.

Le médiateur n'a ni le pouvoir ni l'obligation de garantir l'exécution du traité à la négociation duquel il a pris part.

La médiation doit être amiable et pacifique; autrement elle serait contraire non seulement à la liberté des transactions, mais encore à sa propre raison d'être, puisqu'elle a pour but essentiel et principal de prévenir les mésintelligences ou de ramener la bonne harmonie quand il y a désaccord *.

§ 1624. L'intervention formelle se produit quand un État par acte spécial et explicite donne, soit spontanément, soit sur l'invitation des parties contractantes, son adhésion à un traité conclu sans sa participation.

Les circonstances dans lesquelles se produit cette sorte d'intervention varient à l'infini. Une tierce puissance peut, par exemple, avoir intérêt soit à adhérer à l'ensemble d'un traité renfermant des stipulations qui la concernent ou qui sont de nature à modifier ses. rapports internationaux, soit à n'en accepter que certaines clauses,

*Heffter, § 88; Vattel, Le Droit, liv. II, § 328; Wheaton, Elem., pte. 3, ch. 11, § 18; Martens, Précis, § 176; Klüber, Droit, § 160; Fiore, t. I, pp. 478 et seq.; Bielfeld, Inst. polit., t. II, ch. vIII, § 17; Garden, Traité, t. I, pp. 435, 436; Twiss, Peace, § 16; Bello, pte. 5, cap. XI, § 1; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, § 3.

Adhésion.

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