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Approbation.

Accession.

en renonçant à certaines réserves ou exceptions stipulées conditionnellement.

On peut généralement admettre qu'un tiers veuille intervenir ou soit appelé par les parties contractantes afin de garantir la stricte observation d'un traité. Pour que l'intervention produise cet effet, il faut nécessairement que la garantie soit formulée en termes explicites dans des stipulations ad hoc; car elle comporte des devoirs et une responsabilité placés en dehors de toute présomption légale*.

§ 1625. Une dernière forme d'intervention est celle qui, amenée par des raisons de pure convenance, conduit les parties contractantes, pour donner plus d'éclat et de solennité à leur accord, à réclamer l'approbation d'un État plus puissant ou envers lequel l'une ou l'autre, sinon toutes les deux, sont tenues à des égards particuliers. Il va sans dire que cette approbation, ne revêtant alors que le caractère d'un acte de courtoisie internationale, ne lie le tiers intervenant que moralement et ne lui fait contracter aucun engagement direct envers les parties intéressées.

§ 1626. Un mode d'intervention beaucoup plus directe et plus étendue par les conséquences pratiques qu'elle entraîne est l'accession, en d'autres termes l'acte par lequel un État s'approprie les stipulations arrêtées entre deux ou plusieurs autres États avec ou sans concours direct, et en assume à la fois le bénéfice et les charges. L'accession place le pays qui la donne sur la même ligne que les parties principales qui ont conclu et signé le traité, et lui confère les mêmes droits, comme elle lui impose les mêmes obligations réciproques envers tous les États intéressés. Elle s'applique à toute espèce d'accord international; mais, quoique fort diverse dans la forme sous laquelle elle se produit, elle doit invariablement être libellée par écrit et acceptée en termes exprès soit par toutes les parties contractantes, soit, en leur nom, par celle qui a reçu des pouvoirs spéciaux à cet effet. Il est même des cas dans lesquels l'accession donne lieu à un échange de ratifications, notamment lorsque l'État accédant est appelé à apposer sa signature à la suite de celle des plénipotentiaires qui ont négocié et conclu le traité objet de l'accession.

On peut citer comme exemples les principales stipulations arrêtées en 1815 par le congrès de Vienne; le traité de la Sainte

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Klüber, Droit, § 327; Heffter, § 97; Dalloz, Répertoire v. Traité int., art. 1, § 3.

Alliance; les conventions plus récentes relatives à l'abolition de la traite des noirs, aux soins à donner aux blessés sur les champs de bataille, aux télégraphes internationaux, au système uniforme des monnaies, etc.

Les traités qui embrassent des matières d'intérêt général et commun à plusieurs Etats, et qui sont par cela même susceptibles d'une application plus étendue, renferment d'ordinaire une clause spéciale fixant les conditions dans lesquelles seront provoquées ou reçues les accessions des autres puissances disposées à s'en approprier les avantages*.

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§ 1627. La ratification est l'acte qui donne à un traité sa consécration et transporte du négociateur à l'autorité suprême de chaque Etat le devoir d'en assurer l'exécution; c'est en d'autres termes l'acte par lequel le chef d'un gouvernement approuve et confirme ce qui a été convenu et stipulé en son nom par l'agent diplomatique qu'il avait muni à cet effet de pleins pouvoirs spéciaux.

Le droit de ratifier appartient dans les monarchies au souverain seul ou assisté de délégués de la représentation nationale; et dans les républiques au chef du pouvoir exécutif avec le concours direct ou indirect d'un des grands pouvoirs de l'Etat.

§ 1628. Une ratification, pour être régulière et valable, doit être donnée pleine et entière, c'est-à-dire qu'elle doit ne contenir aucune réserve, porter sur l'ensemble de l'acte auquel elle s'applique, être dressée en autant d'instruments qu'il y a de parties contractantes, enfin être produite et échangée dans les délais convenus. Rigoureusement l'acte de ratification doit aussi reproduire dans leur intégralité, mot à mot, toutes les stipulations qu'il sanctionne; cependant dans la pratique certains Etats, notamment ceux de l'Allemagne, ont adopté une marche différente: ils se bornent à transcrire dans leurs instruments de chancellerie l'intitulé, le préambule, le premier et le dernier article des traités, ainsi que la date de la signature et le nom des plénipotentiaires.

Klüber, Droit, § 161; Heffter, § 97: Martens, Précis, §§ 336, 337; Garden, Traité, t. I, p. 437; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, § 3; Dudley-Field, Projet de Code, p. 86, §§ 198-202.

Forme.

Validité.

Cas de ratification irré

gulière.

§ 1629. Cette dérogation à la règle, quand elle est agréée par la partie co-contractante, n'a pas d'importance majeure, la confrontation des textes originaires suffisant pour dissiper les doutes qui pourraient s'élever sur la teneur des engagements pris; mais il en est tout autrement de l'exemple donné par quelques républiques américaines, les Etats-Unis entre autres, que l'on a vues tantôt produire des ratifications conditionnelles, tantôt exclure de leur sanction une stipulation déterminée, tantôt modifier le libellé ou le sens des articles arrêtés par leurs plénipotentiaires.

Les principes consacrés en cette matière autorisent pleinement l'Etat auquel on soumet de pareils instruments à en décliner l'échange et à ajourner sa ratification.

§ 1630. Comme exemples de ratification irrégulière et incomplète, nous mentionnerons ce qui a eu lieu en 1800 et en 1824 pour les traités que les Etats-Unis avaient conclus avec la France et avec l'Angleterre (1). Dans le premier cas, le cabinet de Washington, d'après un vote du Sénat, produisit un instrument qui supprimait un article de la convention du 30 septembre 1800 et ajoutait un alinéa entièrement nouveau au texte signé par les plénipotentiaires. La République Française fit à ce sujet une réserve de principe; cependant elle consentit à souscrire à cette double modification, qu'elle rappela en termes exprès dans son propre instrument, concernant le droit de visiter les navires suspects de faire la traite. Pour le traité anglo-américain de 1824, il s'agissait également de changements au texte ratifié exigés par un vote formel du Sénat, qui réclamait l'exemption des côtes des Etats-Unis de la surveillance des croiseurs d'une puissance étrangère. M. Canning s'opposa d'abord à la modification proposée et refusa de ratifier le traité; mais plus tard, pour ne pas perdre le bénéfice des autres avantages obtenus par l'Angleterre, il passa outre, et le texte rectifié après coup fut accepté de part et d'autre.

Il faut admettre cependant que par suite d'un vote parlementaire ou d'obscurité de rédaction ou de toute autre circonstance imprévue, un traité ne soit jugé susceptible d'être ratifié ou de devenir définitivement exécutoire qu'à l'aide d'un commentaire interprétatif, de certains changements de pure forme. La seule marche rationnelle à suivre dans ce cas, si l'on ne veut ou ne peut recourir à des articles additionnels ou à des déclarations spéciales annexées au traité, consiste à insérer dans le procès-verbal d'échange des

(1) Voir De Clercq, Traités de la France, t. I, p. 410.

ratifications les réserves et les explications sur lesquelles les deux parties sont finalement tombées d'accord.

§ 1631. Il est de principe que les instruments de ratification soient produits et échangés dans le délai convenu au moment de la signature des traités. Lorsque des circonstances de force majeure imposent des retards sous ce rapport et font dépasser le terme stipulé, les engagments pris ne se trouvent pas annulés de plein droit; ils conservent au contraire toute leur force, toute leur valeur ; seulement, quand on peut préciser les limites de l'ajournement, habituellement, afin d'aller au-devant des difficultés, on a recours soit à un échange de notes ou de déclarations spécifiant les causes du retard la volonté de maintenir l'accord intervenu entre les parties (1), soit à une convention ad hoc prorogeant les délais de ratification (2).

§ 1632. Le moment venu, les instruments se produisent de part et d'autre; ils sont minutieusement collationnés; et s'ils sont reconnus exacts, on procède à leur échange en dressant procès-verbal de l'accomplissement de cette formalité.

L'échange des ratifications n'exige pas, comme la signature des traités, la production de pleins pouvoirs souverains: c'est une de ces missions ordinaires qui peuvent être confiées à n'importe quel délégué du gouvernement intéressé, et qui, lorsqu'elles ne découlent pas d'un mandat spécial et direct, rentrent de plano dans les attributions générales de l'agent diplomatique accrédité dans le pays.

§ 1633. La ratification des traités soulève trois ordres de questions on peut se demander, d'une part, si un accord international régulièrement négocié et signé a besoin d'être ratifié pour former un lien parfait et complet entre les parties contractantes; d'autre part, si la ratification peut être refusée; enfin, à quelle époque elle doit être accomplie. Comme cette dernière question se rattache à celle de la mise en vigueur des traités, qui fait l'objet du § 707, nous n'examinerons ici que les deux autres.

A l'égard de la première, qui appartient avant tout au droit public interne de chaque nation, on peut dire qu'en principe le traité n'est parfait, ne constitue un lien formel entre les États au nom

(1) Voir De Clercq, Recueil des traités de la France, t. I, p. 291, la déclaration franco-espagnole du 15 octobre 1796; et t. VI, p. 1, la déclaration franco-belge du 17 janvier 1850.

(2) Voir ibid., t. VI, p. 239, la convention spéciale signée à Bruxelles le 9 décembre 1852 entre la France et la Belgique.

Délais.

Écha ge.

Principes généraux. Refus de ratification.

desquels il a été conclu qu'après avoir été approuvé, ratifié par les gouvernements intéressés. La dérogation à cette règle générale, absolue, ne se présume jamais et ne peut découler que d'une stipulation expresse, fondée sur une loi spéciale ou sur les termes mêmes du droit constitutionnel de l'une ou de l'autre des parties contractantes. Cela est si vrai que l'on citerait à peine un traité dans lequel ne se trouve pas une clause réser ant formellement l'approbation souveraine et fixant une date pour l'échange des ratifications.

Quant à la seconde question, elle a fait naître de nombreux et importants conflits et provoqué de la part des publicistes des opinions tout à fait divergentes. Les uns ne voient dans la ratification qu'une formalité en quelque sorte secondaire, moralement liée au fait de la signature, et soutiennent que la sanction souveraine ne peut être refusée dès qu'il est établi que le négociateur n'a pas excédé ses pouvoirs ni outrepassé la lettre ou l'esprit des instructions de son gouvernement. Les autres pensent qu'il faut tenir compte d'un ensemble de considérations morales et politiques, du soin avec lequel certains intérêts ont pu être sauvegardés dans le présent ou dans l'avenir, des ordres secrets donnés aux plénipotentiaires, des circonstances nouvelles qui ont pu surgir au cours des négociations; en un mot, ils envisagent la ratification comme facultative et non comme invariablement forcée et obligatoire. Ainsi Grotius et Pufendorf prétendent que le souverain est lié par la signature du traité et tenu de le ratifier toutes les fois que son représentant a négocié selon les termes de ses pleins pouvoirs, et alors même qu'il aurait outre passé ses ordres secrets. Bynkershoek, au contraire, admet le refus de ratification, mais dans le seul cas où le négociateur est évidemment sorti du cercle que lui traçaient ses instructions.

Ce n'est pas là, croyons-nous, placer la question sur son véritable terrain. La mission que les souverains confient à des agents diplomatiques ou autres pour négocier des arrangements internationaux ne saurait tout d'abord s'assimiler à un contrat civil ordinaire, au mandat par exemple, ni être régie par les mêmes lois.

Un mandataire privé peut outrepasser ses pouvoirs, méconnaître les vues et les intentions de son mandat sans compromettre en rien l'État; il en est tout autrement lorsque l'empiètement, l'écart de ses instructions est imputable à un ministre ou à tout autre agent officiel stipulant dans un intérêt public. A ce point de vue, la doctrine de Grotius et de Pufendorf manque de base,

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