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ou les six mois qui précèdent l'échéance de ce terme, ni l'une ni l'autre n'a déclaré vouloir en faire cesser les effets, la convention continuera d'être obligatoire pour toutes deux pendant un nouveau laps de temps plus ou moins prolongé.

§ 1668. L'extension de plein droit de la durée du traité, étant Dénonciation. ainsi explicitement prévue et déterminée, produit ses effets à l'infini sans qu'il y ait à recourir à une entente nouvelle. Par contre, lorsque les circonstances se sont modifiées et que les parties cessent d'être d'accord, celui des contractants dont les intérêts sont en souffrance ou qui veut définitivement rompre ses liens conventionnels est tenu de notifier à l'autre, par écrit ou verbalement, mais d'une manière expresse, son intention de laisser expirer le traité. Cette notification prend le nom de dénonciation. Lorsqu'elle repose sur des raisons sérieuses de convenance, la dénonciation se justifie d'elle-même et ne saurait être considérée comme un procédé blessant ou injurieux pour la partie qui la reçoit.

¡ment.

§ 1669. Un traité éteint ou expiré peut être renouvelé, revivre Renouvelleet redevenir obligatoire dans toutes ses parties du commun accord des contractants, soit tacitement, soit par un engagement exprès.

Le renouvellement tacite ne se laisse toutefois induire que d'actes formels et réciproques caractérisant nettement, d'une manière incontestable, l'intention des parties de revalider leurs engagements antérieurs. Le fait d'une observation partielle du traité par les deux parties ou par l'une d'elles ne suffirait évidemment pas pour en impliquer le renouvellement tacite.

Ainsi que nous le démontrerons en traitant de l'état de guerre, la rupture de la paix annule de plano tous les engagements diplomatiques subsistant entre les États qui assument l'un à l'égard de l'autre le rôle de belligérant. Il est donc d'usage lors de la conclusion de la paix de renouveler et de remettre expressément en vigueur tous les traités antérieurs dont on veut faire revivre les effets. C'est ainsi notamment que jusqu'à la Révolution Française de 1789 les grandes puissances, à la fin des diverses guerres dans lesquelles elles furent engagées depuis le milieu du dix-septième siècle, avaient coutume de renouveler et de confirmer les traités de Westphalie et d'Utrecht, qui avaient réglé les circonscriptions territoriales en vue d'un juste équilibre entre les États européens.

A défaut de renouvellement exprès ou tacite, les traités expirent de plein droit, purement et simplement, avec l'échéance du terme

pour lequel ils ont été conclus, et alors les relations mutuelles des contractants se trouvent respectivement replacées sur le pied où elles étaient avant la signature des engagements qui les ont unis *.

* Vattel, Le droit, liv. II, ch. xIII, § 199; Heffter, § 99; Twiss, Peace, § 234; Wheaton, Elém., pte. 3, ch. II, §11; Klüber, Droit, § 154; Martens, Précis, § 64; Wildman, vol. I, p. 166; Garden, Traité, t. I, pp. 434, 435; Vergé, Précis de Martens, t. I, p. 188; Pradier-Fodéré, Vattel, t. II, p. 192; Dalloz, Répertoire, v. Traité int., art. 1, § 6; Hall, Int. law, p. 296.

LIVRE XIX

DIFFÉRENDS ENTRE LES ÉTATS ET DES MOYENS
DE LES RÉGLER

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§ 1670. Avant de confier la solution d'une question internationale au sort des armes, les Etats sont moralement tenus d'épuiser toutes les voies possibles et honorables pour arriver à un arrangement amiable et pacifique : ce n'est pas seulement pour eux un devoir d'humanité, c'est presque toujours aussi le meilleur moyen de faire prévaloir la raison et la justice. En effet, la nation qui en appelle aux armes sans essayer d'abord de la conciliation, donne l'idée que sa cause n'est pas juste, ou que, si elle est juste, elle ne s'en sert que comme d'un prétexte pour obtenir d'autres résul

tats.

Les voies de conciliation auxquelles les peuples doivent recourir toutes les fois que surgit entre eux un différend constituent, par leur nature même comme par la fin qu'ils se proposent, une des parties les plus importantes du droit international. Relevant avant tout des usages reçus ou des traités conclus entre les nations, elles rentrent directement dans le domaine du droit des gens positif.

Pour recevoir une solution pacifique, les questions qui divisent les nations doivent être examinées avec une entière impartialité et traitées de part et d'autre dans un sage esprit de modération et de prudence. Ce n'est qu'à cette condition que, dans les débats interna

Devoirs de modération.

Modes de solution des

ternationales.

tionaux, on peut se flatter de ne pas franchir la distance qui sépare les bienfaits de la paix des horreurs de la guerre *.

§ 1671. Dans l'état actuel des sociétés et du droit, les nations ne questions in- peuvent trouver sur terre de tribunal suprême devant lequel il leur soit donné de comparaître pour faire vider leurs différends; elles n'ont donc que deux moyens de les aplanir et de les résoudre : les négociations amiables et les voies de fait, des actes plus ou moins violents.

Tentatives amiables.

Dans la première catégorie, on range généralement les arrangements verbaux, transactions écrites, les médiations, les arbitrages et les conférences; dans la seconde, les rétorsions, les représailles, les séquestres et les embargos.

Cette division ne nous semble pas rigoureusement justifiée, car beaucoup de ces groupes ne se distinguent guère les uns des autres; néanmoins, comme elle a reçu une sorte de consécration internationale, nous en tiendrons compte dans l'examen détaillé auquel nous allons nous livrer **.

§ 1672. Par l'arrangement amiable, l'une des parties, pour éviter les discussions ou un conflit plus sérieux, abandonne ses prétentions ou renonce à la chose à laquelle elle croit avoir droit. Les circonstances de chaque différend peuvent seules déterminer dans ce cas s'il est préférable de sacrifier ses droits par un abandon implicite, ou, tout en renonçant à les faire valoir, d'en sauvegarder le principe par un acte bilatéral qui en reconnaisse au moins

l'existence.

Tous les publicistes ne sont pas d'accord sur la signification et la portée véritable de l'arrangement amiable. Les uns l'envisagent comme une renonciation de la part de l'une des parties intéressées, d'autres comme un désistement réciproque de tous les droits douteux ou imaginaires, de toutes les prétentions qui ne sont pas complètement justifiées, quelquefois aussi, comme une solution de fait sur un point accessoire, la question principale ou de droit demeu

Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. VIII; Vattel, Le droit, liv. II, ch. XVIII, §§ 323 et seq., 331 et seq.; Twiss, War, § 8; Burlamaqui, Droit de la nat., t. V, pte. 4; Halleck, ch. XII, § 1; Bello, pte. 1, cap. xI; Phillimore, Com., vol. III, § 2; Wolff, Jus gentium, cap. v; Zouch, Adm jurisdict., pte. 2, lib. I, § 3, p. 54; Bluntschli, Le droit int. codifié, § 481; Rolin Jaequemyns, Revue de droit int., t. I, p. 442.

Vattel, Le droit, liv. II, ch. xvIII, §§ 326 et seq.; Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 1, § 1; Riquelme, lib. I, tit. 1, § 8; Phillimore, Com., vol. I, § 14; vol. III, § 2; Heffter, § 106; Volff, Jus gentium, cap. v; Halleck, ch. XII, § 2; Bello, pte. 1, cap. xI; Martens, Précis, § 175,

rant réservée. Mais, quel que soit le sens qu'on veuille y attacher, l'arrangement amiable n'en est pas moins une preuve évidente de l'esprit de modération et de bonne foi dont sont animés les Etats qui y ont recours, et à ce titre il faut souhaiter d'en voir généraliser l'emploi.

On peut citer comme exemple le traité signé à Washington en 1842 (1) par les Etats-Unis et l'Angleterre au sujet de la prétention soutenue par cette dernière puissance de visiter en mer les navires américains soupçonnés de se livrer à la traite des noirs *.

§ 1673. La transaction implique toujours une renonciation simul- Transaction, tanée et réciproque à tout ou partie des prétentions mises en avant de part et d'autre : c'est une entente sur un terme moyen qui résout la difficulté pendante, tandis que dans l'arrangement amiable, c'est en général l'un des contendants qui facilite l'accord en abandonnant isolément le droit ou l'objet dont la revendication formait la matière du débat.

Pour rendre cette distinction plus saisissable, nous empruntons à Riquelme l'exemple suivant :

« On sait, dit cet auteur, que la dernière guerre entre les EtatsUnis et la République du Mexique eut son origine dans l'incorporation de la province du Texas à la grande fédération de l'Amérique du Nord. Si le Mexique, pour terminer son différend avec ses voisins sans en appeler au sort des armes, avait tout de suite cédé aux Etats-Unis la province contestée, cet accord eût constitué un arrangement amiable; mais si le Mexique s'était borné à abandonner une partie du Texas en conservant le reste à certaines conditions, l'accord qui s'en serait suivi se fût renfermé dans les limites d'une simple transaction. »

A cet exemple, nous ajouterons les traités intervenus en 1842 et en 1846 (2) entre les Etats-Unis et l'Angleterre pour régler les limites du Maine et de l'Orégon, et le traité dit de l'Escurial, conclu en 1790 (3) entre l'Angleterre et l'Espagne **.

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(1) Hertslet, vol. VI, p. 853; Martens-Murhard, t. III, p. 456. Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. vIII; Vattel, Le droit, liv. II, ch. XVIII, § 326; Twiss, War, § 4; Heffter, § 107; Halleck, ch. XII, § 3; Klüber, Droit, § 319; Bluntschli, §§ 481-487; Bello, pte. 1, ch. xI, § 1; Wheaton, Hist., t. II, pp. 326 et seq.; Webster, Dipl., pp. 72 et seq.

(2) Hertslet, v. VIII, p. 930; Martens-Murhard, t. IX, p. 27.

(3) Ch. Calvo, t. III, p. 356; Herstlet, vol. II, p. 256; Cantillo, p. 623; Martens, 1re édit., t. III, p. 184; 2° édit., t. IV, p. 492.

Riquelme, lib. I, tit. 1, cap. vIII; Vattel, Le droit, liv. II, ch. XVIII, $ 327; Twiss, War, § 4; Heffter, § 109; Bello, pte. 1, cap. XI, §1; Klüber,

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