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duit quelquefois dans les corps les plus respec

tables.

Le recueil des procès-verbaux des assemblées du clergé offre peut-être les titres les plus honorables qu'un corps puissant et envié puisse présenter à l'estime et à la justice de la postérité. Le respect des traditions anciennes n'excluoit jamais le succès des vues utiles, que l'expérience des siècles et le progrès des lumières peuvent inspirer à une administration sage et éclairée.

Les remontrances que les assemblées du clergé croyoient devoir porter au pied du trône, étoient toujours empreintes de ce sentiment de respect et de soumission profonde, dont la religion, la reconnoissance et la fidélité lui prescrivoient le devoir.

Les réclamations mêmes du clergé contre les atteintes que des corps non moins respectables portoient quelquefois à ses droits ou à ses priviléges, respiroient une noble modération, et étoient exemptes de tout mélange d'amertume.

L'empressement le plus généreux prévenoit souvent les demandes du Gouvernement; et jamais un refus, ou un délai offensant ne venoit dégrader le mérite de ses sacrifices pour le bien de l'Etat.

Les détails trop peu connus de son adminis

tration économique offroient le systême le plus ingénieux et le plus paternel du gouvernement d'une famille (1).

Tels étoient les titres que l'Eglise gallicane présentoit à la confiance du roi et de la nation à l'époque de l'assemblée de 1682. Moins grande peut-être encore dans son plus grand éclat, que lorsqu'on l'a vue dans ces derniers temps dépouillée de ses honneurs, de ses richesses et de ses temples, forcée de transporter dans des contrées

(1) Ce systême, imaginé en 1760 par M. Caulet, évêque de Grenoble, n'avoit eu aucun modèle, et n'a pas malheureusement trouvé d'imitateurs; tous les bénéfices étoient répartis en huit classes, selon le double rapport de leur revenu, et de la nature des services dont ils étoient chargés pour le culte religieux, l'instruction publique, et le soulagement de l'humanité. Les impositions étoient modérées dans la même proportion que les avantages que la religion et l'Etat recueilloient de l'utilité et de l'importance de leurs fonctions. Ainsi, tous les bénéfices simples, tels que les abbayes et les prieurés qui n'étoient chargés d'aucun service public, se trouvoient placés à la première classe, et ils étoient soumis à l'imposition du quart de leur revenu, tandis que tous les autres bénéfices étoient répartis dans les classes suivantes, selon l'importance de leurs revenus et la nature des fonctions que les titulaires avoient à remplir, jusqu'à la huitième classe, qui ne comprenoît que les cures à portion congrue et les hôpitaux. Cette dernière classe ne payoit que le vingtième de son revenu; tel étoit le bienfait de cette administration si sagement combinée, que rien n'étoit plus rare que d'entendre une réclamation contre la répartition qui frappoit sur un si grand nombre de contribuables.

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étrangères ses sacrifices et ses autels teints encore du sang de ses pontifes et de ses prêtres, offrir à l'admiration de l'Europe entière le spectacle des plus touchantes vertus et de la plus noble dignité dans l'excès du malheur.

Louis XIV avoit cru devoir convoquer l'assemblée de 1682 pour s'appuyer de son autorité dans ses démêlés avec le pape INNOCENT XI.

Nous ne nous arrêterons pas long-temps sur l'affaire de la régale, qui fut dans l'origine la cause de ce grand mouvement, et qui par la suite des événemens n'en devint qu'une circonstance accessoire. Mais elle servit d'occasion et de motif pour rappeler et consacrer des maximes d'un bien plus grand intérêt pour la paix de l'Eglise et la tranquillité des empires.

La question de la régale est devenue assez indifférente depuis 1682, et aujourd'hui elle n'a même plus d'objet.

La régale en France étoit un droit par lequel nos rois jouissaient du revenu des archevêchés et des évêchés pendant leur vacance, et même conféroient les bénéfices dépendans de leur collation jusqu'à ce que les nouveaux pourvus eussent prêté leur serment de fidélité, et l'eussent fait enregistrer à la chambre des comptes de Paris.

Le célèbre Pasquier avoue de bonne foi*

que

V. Affaire de la régale.

* Recherches, liv. 111., chap. 27.

c'est un des points de notre histoire qui lui a toujours paru le plus obscur, et que tous les auteurs qui en ont écrit, n'offrent rien de certain, ni de satisfaisant sur l'origine et l'étendue de la régale.

Ce qui est incontestable, c'est qu'on en trouve des traces dès la première et la seconde race de nos rois, et que ceux de la troisième l'exercèrent sans aucune opposition sur une partie des églises de France. Le testament de Philippe-Auguste en fait une mention expresse et les lettres-patentes de saint Louis, à l'époque de son voyage d'Afrique, prouvent qu'il étoit en possession du droit de régale.

Mais il n'est pas moins certain que l'exercice de ce droit ne s'étendoit pas généralement sur toutes les églises du royaume. Plusieurs d'entr'elles en étoient exemptes, soit à titre onéreux, soit en vertu de quelque concession particulière, soit enfin parce que les différentes provinces dont elles faisoient partie, ayant été successivement réunies à la France, elles s'étoient maintenues dans l'exemption dont elles étoient en possession. Ce défaut d'uniformité fit naître une multitude de discussions entre les officiers du roi, toujours empressés de donner la plus grande extension aux prérogatives de la couronne, et les

églises d'un grand nombre de provinces, qui résistoient à des prétentions contraires au droit où elles s'étoient jusqu'alors maintenues.

*

Le second concile général de Lyon, tenu en 1274, par GRÉGOIRE X, fit un décret par lequel *Canon. XII. la régale fut autorisée dans les églises où elle étoit établie par le titre de fondation, ou par une ancienne coutume, avec défense de l'intro. duire dans les églises où elle n'étoit pas encore

reçue.

On voit que cette disposition consacroit la légitimité de la possession de nos rois sur les églises déjà soumises à la régale, et sembloit devoir en garantir celles qui en étoient exemptes.

Les églises de Languedoc, de Guyenne, de Provence et du Dauphiné se maintinrent paisiblement dans leur exemption.

Ce ne fut guères que vers le commencement du dix-septième siècle que la couronne voulut étendre ce droit sur toutes les églises sans aucune exception.

Après plusieurs arrêts dont les remontrances du clergé avoient suspendu l'exécution, Louis XIV rendit la déclaration de février 1673, par laquelle il déclara le droit de régale inalienable et imprescriptible dans tous les archévéchés et évé

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