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les Bohémiens s'avisèrent de réclamer contre cette

coutume.

On ne voit pas même que Wiclef, quelque téméraire qu'il fût, en ait fait un sujet de reproche contre l'Eglise romaine.

Ce fut un maître d'école de Prague, nommé Pierre Dresde, qui le premier remua cette ques-_ tion. Il fut suivi de Jean Hus au commencement du quinzième siècle.

Encore doit-on remarquer que Jean Hus n'osa pas dire d'abord que la communion sous les deux espèces fût nécessaire; il lui suffisoit qu'on avouât qu'il étoit permis et expédient de la donner; mais il n'en déterminoit pas la nécessité; tant il étoit établi qu'il n'y en avoit aucune.

Ainsi, lorsque les disciples de Calvin dans le seizième siècle adhérèrent par esprit de contradiction au sentiment de Jean Hus sur ce point de discipline, ne purent-ils trouver une plus haute origine que la fin du douzième siècle, pour représenter la soustraction du calice comme une sacrilége innovation de l'Eglise romaine.

Bossuet entre ensuite dans une discussion dogmatique sur tous les caractères du sacrement de l'eucharistie, sur l'objet et la fin que Jésus-Christ s'est proposés dans son institution, et sur les

effets qu'il lui a attachés. Mais le développement de toutes ces questions n'est pas de nature à entrer dans un récit historique.

Aussitôt que cet ouvrage de Bossuet fut devenu public, il excita une grande sensation parmi les protestans eux-mêmes. C'est en parlant du Traité de la communion sous les deux espèces, que Bayle écrivoit; (et son jugement sur une pareille matière ne peut pas être suspect), « Cet ouvrage » m'a paru fort délicat, fort spirituel, et d'une » honnêteté envers nous, qui ne peut être assez » louée; serré, judicieux, et déchargé de tout ce qui ne fait pas à la question ».

Ce n'étoit pas sans raison que cet ouvrage répandoit une espèce d'inquiétude générale parmi les ministres protestans. Ils ne pouvoient guères se dissimuler que le plus grand nombre de leurs prosélytes, surtout dans la classe du peuple, ne tenoit plus à leur religion que par cet acte extérieur de leur lithurgie.

Ce fut dans la vue de prévenir l'impression que pouvoit produire sur la multitude le Traité de la communion sous les deux espèces, que deux ministres protestans entreprirent de le

réfuter.

Tous les deux défendirent leur cause avec talent et habileté. « Leurs réponses, dit Bossuet,

*Avertissement de la

défense de la

la commu

nion sous une

>>> sont toutes deux de bonne main. Toutes deux

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vives, toutes deux savantes. » Laroque, ministre protestant à Rouen, justement estimé dans son parti, et déjà connu par un ouvrage intitulé: Histoire de l'eucharistie, étoit auteur de la première. Le nom de l'auteur de la seconde est resté inconnu.

>>

>>

<< Le premier, ajoute Bossuet, * me traite avec beaucoup plus de civilité en apparence, et Tradition de » l'autre affecte au contraire je ne sais quoi de chagrin et de rigoureux. Mais il n'importe pour >> le fond; car enfin avec des tons différens, ni » l'un ni l'autre ne m'épargnent. Ils ont déterré >> toutes les antiquités, et je puis dire que la ma» tière est épuisée. »

espèce.

Bossuet donna à sa réponse le titre de Défense de la tradition de la communion sous une espèce, et il la fonda entièrement sur leurs propres aveux, et sur les témoignages mêmes qu'ils invoquoient.

Elle est composée de deux parties; l'objet de la première est de prouver que les protestans, étant dans l'impossibilité de déterminer par l'évangile ce qui est essentiel à la communion, ils ne peuvent se déterminer sur cette matière que par l'autorité de l'Eglise et de la tradition.

Il fait voir dans la seconde que la tradition de tous les siècles, dès l'origine du christianisme,

laisse la liberté d'user indifféremment d'une seule

espèce, ou des deux ensemble.

Tel est le plan des deux parties qui composent cet ouvrage de Bossuet, et tel est l'état dans lequel il l'a laissé manuscrit, sans le publier.

Après sa mort, l'abbé Bossuet son neveu, le fit comprendre au nombre des ouvrages de Bossuet qu'il fut autorisé à faire imprimer par un privilége spécial daté de 1708, et il parut pour la première fois dans l'édition de 1743.

Au reste Bossuet pensoit que l'Eglise pourroit sans inconvénient accorder l'usage du calice aux laïques dans les pays, où cet acte de condescendance deviendroit un moyen de faciliter la réunion des protestans. Inflexible sur tout ce qui intéressoit la pureté du dogme, Bossuet étoit toujours disposé à adopter sur la discipline tous les tempéramens que la sagesse, le bien de la paix et l'intérêt de la religion paroissoient demander. Le concile de Trente avoit déjà suffisamment indiqué le véritable esprit de l'Eglise sur cette matière, en autorisant par un décret formel le pape Pie IV à accorder l'usage du calice pour faire cesser le schisme qui désoloit l'Alle

magne.

Appuyé sur une telle autorité, Bossuet écrivoit au Père Mabillon, qui se trouvoit à Rome

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*Lettre de

Bossuet au

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* A ce propos, il me vient dans l'esprit qu'il y Père Mabil- » auroit une chose qui pourroit beaucoup, selon lon. 12 août, toutes les nouvelles que nous recevons, facili

1685.

VII.

Séminaire de Meaux.

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» ter le retour de l'Angleterre et de l'Allemagne. » Ce seroit le rétablissement de la coupe. Elle » fut rendue par le pape Pie IV dans l'Autriche

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» et dans la Bavière. Mais le remède n'eut pas » grand effet, parce que les esprits étoient en» core trop échauffés. La même chose accordée » dans un temps plus favorable, comme celui-ci, » où tout paroît ébranlé, réussiroit mieux. Ne pourriez-vous pas en jeter quelques paroles, et » sonder un peu les sentimens là-dessus. Je crois, » pour moi, que par cette condescendance, où » il n'y a nul inconvénient qu'on ne puisse espé>> rer de vaincre, après un usage de treize cents >> ans, on verroit la ruine entière de l'hérésie. » Déjà la plupart de nos huguenots s'en expli>>quent hautement.... »

Aussitôt que Bossuet eut fait imprimer la relation de sa conférence avec le ministre Claude, et son Traité de la communion sous les deux espèces, il se consacra entièrement à l'administration de son diocèse.

Le séminaire de Meaux fut le premier objet de ses soins et de son intérêt paternel. Il savoit que c'étoit sur ces utiles et estimables institutions,

encore

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