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D. N'eft-ce pas ce globe Impérial que l'Electeur Palatin ajoute à fes armoiries?

R. Ouï en qualité de grand Sénéchal de l'Empire, parce qu'en la cérémonie du facre & couronnement de l'Empereur, c'eft lui qui porte ce globe.

D.V

IX. LEÇON.

Ous m'ayez déja fait connoître les figures naturelles & artificielles. Mais il y en a de deux autres efpéces que je ne connois pas encore, les figures chimériques ou monftrueufes, & les figures héraldiques?

R. Il n'eft pas mal-aifé de connoître la plupart des figures chimériques ; puifqu'elles font tirées des fables, comme les centaures, les fyrenes, les griffons, les harpies, les hydres, les aigles à deux têtes, les lions à face humaine, les pégafes ou chevaux aîlés, les cerfs aîlés, les phénix, &c. Les Peintres & les Sculpteurs les repréfentent fi fouvent, que vous devez les reconnoître à la première vûë.

D. Trouve-t-on toutes ces figures en armoiries?

R. Non feulement on les y trouve, mais quelques-unes y font affez fréquentes: comme les griffons, les aigles à deux têtes, les fyrenes, les phénix, aufquels je joindrois volontiers les pélicans qui s'ouvrent le fein, & les falemandres fur le feu car quoiqu'il y ait dés pélicans & des falemandres, ces propriétés qu'on leur attribue font fauffes & chimériques.

D. On pourroit donc dire la même chofe des aigles & des lions d'hermine, de vairs lozangés, échiquetés bandés, fafcés & de tant d'autres manières ?

R. Vous avez raison, puisque dans la nature il n'y en a point de cette forte. D. D'où vient donc cet usage dans le Blafon?

R. Je vous l'ai déja dit, des cottes d'armes, fur lesquelles on portoit anciennement les armoiries, & qui fe faifoient de piéces rapportées de diverfes étoffes ou fourrures ainfi bigarrées.

D. N'y a-t-il que ces fortes de figures faites à plaifir?

R. Il y a encore des Anges, des têtes de Chérubins, des Diables, des Vents représentés par des têtes bouffies & qui foufflent.

D. Et

D. Et des monftres s'en trouve-t-il en armoiries, outres les aigle à deux têtes & les bêtes à quatre pieds qui ont des aîles?

R. Il y a plufieurs autres monftres: la Maison d'Ancezune porte des dragons monftrueux à fafce humaine,avec de longues barbes & des cheveux de ferpens: il y a quatre cens ans que la plupart des cimiers qui fe portoient fur les cafques dans les tournois étoient monftrueux ; parce que l'on affectoit de faire de ces fêtes des masquarades: ainfi vous y verrez des fauvages velus, couverts de mouffe des centaures, des cornes, des trompes d'éléphans, des bois de cerfs avec des fonnettes, des feuilles, des branches d'arbres, des grelots, des hommes fans bras vêtus en harlequins avec des bonnets d'albanois, que l'on nomme à préfent à la dragonne ; des oreilles d'âne, des chevaux marins, des dragons qui vomiffent le feu,& cent autres extravagances.

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D. N'est-ce point de là qu'est venu le proverbe, de blafonner quelqu'un lorfque l'on en fait d'étranges peintures & des portraits défavantageux ?

C

R. Vous l'avez dit commè il eft; c'est l'origine de ce proverbe.

D. Que veulent dirent ces femmes nues en cimier qui ont les cheveux épars, & qui font dans des cuves jufqu'au nombril ?

R. Ce font des mellufines, figures chimériques, empruntées d'un vieux roman, à qui la Maison de Lufignan a donné cours dans le monde.

D. Qui a donné figures?

armoiries

cours à ces

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R. Je vous l'ai déja dit ; ce font des mafquarades de tournois faits en temps de carnaval : les vieux romans & les récits fabuleux des Chevaliers de la Table Ronde, à qui les Romanciers ont attribué des pareilles figures pour ont introduit ces figures dans le blafon. Bara & quelquesautres Blafonneurs qui ont recueilli ces fotifes, les ont autorifées; & il y a environ quatre-vingts ans que ceux qui vouloient fe faire des armoiries, en choififfoient dans ces auteurs reffufcité par ce moyen ces blafons extravagans.

& ont

D. Je connois, ce me femble, fuffifamment ces figures: venons, s'il vous plaît, aux figures héraldiques?

R. Ce font les plus effentielles au blafon, & il y a long-temps qu'on les nomme piéces honorables & féantes partitions.

D. Que veulent dire ces mots ?

R. Il faut vous les expliquer en deux différentes leçons, parce qu'elles demandent plus d'application que les autres figures qui fe connoiffent d'ellesmêmes au lieu que celles-ci font plus propres de l'art héraldique, qui eft le nom que l'on donne à la connoiffance du blafon.

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X. LEÇON.

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D.Xpliquez-moi, je vous prie bien exactement ces piéces honorables & ces féantes partitions? R. Pour le faire avec méthode, il faut reprendre la chofe de plus haut : vous devez vous fouvenir de ce que je vous ai dit en la cinquième leçon, que pour apprendre le blason, il falloit apprendre fix choses.

D. Je m'en fouviens; & pour vous faire voir que je retiens fidélement vos inftructions, vous voulez bien que fans vous donner la peine de me les

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