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de la catholique Espagne, épuiserait les trésors du nouveau monde, plutôt que de me savoir à court d'argent. Navarre, qui accorde sa protection aux hérétiques, s'apercevra que la maison de Lorraine le déteste. Quant à vous, sire, Votre Majesté n'a pas lieu de craindre mon armée. J'ai en vue la sûreté de votre couronne et la perte de vos ennemis.

Le roi. Courage, monsieur de Guise, montez sur le trône, soyez roi de France; faites, nouveau dictateur, la paix ou la guerre, tandis que, simple sénateur, je dirai placet... Je ne puis endurer tant d'insolence; licenciez vos troupes à l'instant, sous peine de vous voir proclamer par édit traître d'un bout de la France à l'autre.

Guise (à part).—L'alternative est dure. Dissimulons. (Haut). Sire, pour vous prouver ma profonde obéissance, je baise les mains de Votre Majesté et je prends congé de vous; je cours licencier mes soldats.

Le roi.

par le passé.

Adieu donc, mon cousin de Guise; soyons amis comme

(Le duc de Guise sort.)

D'Épernon.

Ne vous fiez pas à lui, sire. Votre Majesté n'a pas vu la pompe de son entrée dans les murs de Paris; tous les bourgeois l'ont accablé de fêtes et de présents; ils ont promis de se mettre sous ses ordres... Ils ont été jusqu'à dire tout haut dans les rues que le duc de Guise avait pris les armes contre son roi afin de le contraindre à exécuter les ordres du saint-siége.

Le roi. Comment! les Parisiens lui ont fait cet accueil! C'est la trahison qu'il médite... Laissez-moi seul. Holà! quelqu'un !

(Entre un page.)

Dressez de suite un projet de renvoi de tous les membres de mon conseil; je le signerai et j'y apposerai mon sceau. Ma tête sera mon conseil... Ils me trahissent, depuis le premier jusqu'au dernier. Mon cousin d'Épernon, c'est d'après vos avis que je me gouvernerai.

D'Épernon. — Sire, pour plus de sécurité, il faudrait vous défaire du duc de Guise; vous n'auriez plus auprès de vous de personnage suspect.

Le roi. Commençons par signer et sceller cette ordonnance; je vous dirai ensuite ce que je compte faire. (Il écrit.) (Au page.) Portez ceci sur-le-champ au conseil.

(Le page sort.)

Mon cousin d'Épernon, quoique je semble faible et indolent, j'ai au dedans de moi tout le feu de la passion et de l'énergie. Je vais me rendre secrètement à Blois, car puisque ma capitale a pris fait et causé pour le duc de Guise, le roi de France n'est plus en sûreté à Paris. Rester ici serait m'exposer à la trahison et à la mort. Mais, j'en atteste ma propre existence, monsieur de Guise périra.

(Ils sortent.)

CORRESPONDANCE

(Suite.)

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Les lettres de MM. Charles W. Baird et Vaurigaud sur le pasteur Jean Courdil (Bull., p. 188) m'ont engagé à vous adresser quelques notes sur le même personnage. Ces notes pourront en faire naître d'autres, et réunies former une biographie complète qui trouvera place dans la nouvelle édition de la France protestante.

Jean Courdil naquit à Nîmes le 19 août 1651, et fut baptisé par le pasteur Rudavel le 28 septembre de la même année. Son grand-père Louis Courdil était ancien du consistoire de Nîmes en 1634 et en 1635. Son père Jacques Courdil, maître maréchal, épousa le 13 février 1643 Marie Savie dont il eut huit enfants.

Jacques, par son mérite personnel, s'était acquis une position honorable et même assez élevée, car ses concitoyens l'élurent quatrième consul de la ville en 1653. Il fut nommé l'année suivante (1654) ancien du consistoire et chargé de la surveillance du quartier du Temple.

Son fils aîné, David Courdil, né le 12 juillet 1644, suivit la carrière pastorale, et se maria en 1667, étant encore étudiant en théologie, avec demoiselle Susanne Roland.

Jean était le quatrième de ses fils. Voici quelques extraits des registres du consistoire sur ce pasteur, alors qu'il était étudiant.

Du mercredy 6 octobre 1666.

<< Les sieurs Courdil, Fayen, Robert, Combes frère de l'apoticaire, et autre Combes fils de Jacques Combes, propozans, après avoir esté ouys dans la compagnye du consistoire, ont esté griefvement censurés et sus

pandus privement de la Sainte-Cène pour avoir esté au cabaret dimanche dernier pendant que la prédication se dizait. »

Dans la séance du 9 février 1678 le consistoire censure Courdil « pour avoir soupé et joué aux cartes. »

Ces fredaines de jeunesse, qui, de nos jours, seraient considérées comme des peccadilles, étaient jugées alors très-sévèrement par le consistoire qui maintenait dans l'église une discipline rigide. Malgré ces censures, Courdil devait être un étudiant d'un certain mérite, et capable même de donner un bon conseil, car le consistoire, dans sa séance du mercredi 7 décembre 1678, l'autorise à assister à ses séances, en le priant de ne pas divulguer ce qui s'y passera.

Chargé de visiter les malades et de leur faire la prière, il s'acquitta de cette tâche avec zèle, de novembre 1678 à mai 1679. Mais ses travaux multipliés, et son prochain départ de Nîmes ne lui permettant plus de vaquer à cette bonne œuvre, il donna sa démission, et le consistoire, dans sa séance du mercredy 17 mai 1679, lui allona pour sa peine 34 livres 7 sols 6 de-. niers.

Le 25 mars 1684 il fut parrain de Jean, fils de son frère Jacques, ouvrier en soie, marié à Judith Granier. Dans l'acte de baptême il est qualifié de ministre. Ce Jacques Courdil ne serait-il pas le Jacques Cordile du Languedoc mis à la chaîne en 1704?

Agréez, mes meilleures salutations,

CHARLES SAGNIER.

SERMONS IMPRIMÉS AU XVIII SIÈCLE.

Mer (Loir-et-Cher), mai 1877.

Monsieur le rédacteur,

L'auteur de l'article fort intéressant consacré au pasteur Mordant a cru pouvoir citer de confiance une phrase du pasteur Olivier Desmont, qui contient cependant une erreur. (Bullet. du Prot., année XXVI, p. 220.)

Cette phrase, la voici: « Depuis la révocation de l'édit de Nantes, les protestants de France n'ont point vu, jusqu'à aujourd'hui, de sermons imprimés qui ayent été prêchés parmi eux. Cette nouveauté doit les réjouir. » La date assignée aux sermons d'Olivier Desmont est 1781. La France protestante parle de 1766; mon exemplaire est de 1771. L'édition de 1781 serait donc au moins la seconde. Quoi qu'il en soit, en 1771 ou en 1781, mais surtout à cette dernière date, Olivier Desmont ne pouvait guère (pour commencer par la fin) ignorer les sermons de Pierredon. Ces sermons, dont je connais deux, peut-ètre les seuls, furent prononcés et imprimés en 1770. Imprimés même plusieurs fois puisque le Sermon sur la brièveté et les misères de la vie humaine`a eù au moins deux éditions, toutes deux de 1770; et le Discours à l'occasion du mariage de Mgr le Dauphin, trois éditions, aussi de 1770.

Ce qu'Olivier Desmont pouvait ignorer, et paraît en effet avoir ignoré,

c'est que le 4 août 1720, il fut prêché à Paris un sermon intitulé : la Dette du ministère, ou Sermon sur Rom. 1, 14-15; que le 13 novembre 1720, et également à Paris, il fut prêché un sermon pour un jour de jeûne intitulé: l'Attention aux verges de Dieu, ou Sermon sur Michée, vi, 9.

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Ces sermons ne furent pas précisément prêchés parmi les protestants de France, mais seulement devant quelques-uns d'eux, à l'ambassade de Hollande, très-probablement. L'exemplaire de ces deux sermons que je possède a malheureusement perdu, ou a été volontairement privé de son titre; dès lors j'ignore le nom de leur auteur que le titre m'aurait peut-être appris. Il ne serait pas impossible, du reste, de le connaître. Ces sermons furent évidemment imprimés pour être répandus parmi les protestants de France, et durent l'être en effet, puisque ceux que j'ai étaient ici, à Mer, ensevelis depuis un nombre indéterminé de lustres au fond d'un vieux fût. Pourquoi ces sermons seraient-ils les seuls de leur espèce?

N'y eût-il rien d'imprimé en fait de sermons de 1720 à 1770 ou 1776, suivant la France protestante? Je ne sais, et je ne serais point étonné, que l'on ne découvrît, un jour ou l'autre, quelque sermonnaire de cette époque (1).

De 1720 nous remontons à 1718, année où fut imprimé un sermon d'Antoine Court. En voici le titre complet : Sermon dans lequel on fait voir la nécessité de l'exercice public de la religion. Sur les paroles de l'apôtre saint Paul aux Hébreux, chap. X, verset 25. (Suit le texte). Prononcés (sic) par Antoine Court au désert. Imprimé, chez D. L., 1718.

Ce sermon, dont M. Ed. Hugues parle (v. Antoine Court, etc., t. I, p. 56, 2e éd.), dut aussi venir entre les mains des fidèles, en tout cas entre les mains de quelques-uns. Il est aujourd'hui (et M. Ed. Hugues en donne la raison) d'une rareté excessive. La dédicace que M. Hugues attribue à Corteiz paraît être de Court lui-même. Cette dédicace (p. 3): Sermon dédié à la veuve Court. Ma chère mère, etc., mériterait même d'être reproduite dans le Bulletin, car elle montre quels étaient les sentiments qui animaient Antoine Court au début, ou à peù près, de sa carrière.

Je ne parle pas des sermons de Brousson que, du reste, M. Puaux mentionne, et qui sont connus, malheureusement bien rares aussi.

Il m'a semblé, Monsieur le rédacteur, qu'il y avait lieu de profiter de la circonstance, non pour corriger une légère erreur, mais pour signaler ces sermons protestants prononcés en France pendant le siècle dernier, et qui doivent être remarqués d'autant plus qu'ils sont plus isolés (2).

Agréez, etc.

PAUL DE FÉLICE.

(1) Pourquoi les protestants de la Rochelle, par exemple, qui purent faire imprimer en 1768 les Pseaumes de David, etc., à l'usage des protestans de France (v. Bovet, Histoire du Psautier, p. 290, no 255), n'auraient-ils pas pu faire imprimer aussi quelques-uns des sermons qui leur étaient prêchés?

(2) Parmi les sermons protestants imprimés (mais non prononcés) en France au XVIIe siècle, et avant la Révolution, il faut citer les suivants, dont voici le titre in extenso: Sermons pour les jeunes dames et les jeunes demoiselles, par M. James Fordyce, docteur en théologie de l'université de Glasgow, et pasteur d'une congrégation de la cité de Londres. Traduit de l'anglais. Paris, Fournier, MDCCLXXXI. Avec approbation et privilége du roi. Le nom du traducteur n'est pas indiqué.

BIBLIOGRAPHIE

LA DISCIPLINE ECCLÉSIASTIQUE DU PAYS DE BÉARN, PUBLIÉE POUR LA PREMIÈRE FOIS PAR CH. L. FROSSARD (1).

Notre collègue, M. Ch. Frossard, auquel on doit d'excellents travaux sur le protestantisme en Flandre, à bien mérité des Églises du Béarn par la publication de leur antique discipline. On sait que la Réforme pénétra de bonne heure dans cette contrée, sous les auspices de Marguerite de Navarre et de son aumônier Gérard Roussel, évêque d'Oléron. Elle y fit de rapides progrès sous Jeanne d'Albret, qui, sans se laisser effrayer par les menaces de l'Espagne et les anathèmes de Rome, substitua en 1563, le culte réformé au culte catholique, mesure plus conforme à l'intérêt du pays qu'à la tolérance. De cette époque date la discipline rédigée par le ministre Raymond Merlin, sous l'inspiration de Calvin lui-même, comme le prouvent les lignes suivantes de Merlin au réformateur genevois:

<«< Incontinent après je solicitay la royne et les ministres de s'assembler en un synode pour adviser quelle devoit estre la réformation en ce pays, afin qu'estant par un synode ratifiée, elle ait authorité, et parce que je n'ignorois pas que la plus grande partie s'en reposeroit sur ce que je leur en dirois, je couchay par escrit une réformation de laquelle je prins l'exemplaire sur l'Eglise de Genève, autant qu'il me fut possible, afin qu'il y eut conformité des églises. Le premier point est des ministres, où je montrois comment et par quel ordre ils devoyent estre esleus et déposés ; quelle discipline il doit y avoir entre eux et quel ordre on doit tenir es colloques et synodes. Le second est des diacres, où je montrois comment ils doivent estre esleus et déposés, quelle est leur charge, et là-dessus je traitois des biens ecclésiastiques, à quoy ils doivent estre appliqués et par qui ils doivent estre maniés. Le troisième est des anciens et surveillants, où je traite comme aux autres de leur élection et quelle est leur charge; et làdessus je traite des consistoires, quel ordre on y doit observer, quelles sont les causes, les procédures et les punitions ecclésiastiques. Le dernier est des escholes et du collége lequel la royne désire d'instituer en ce pays. En ce poinct, je m'en remets du tout au collége de Genève, excepté qu'il faut qu'on entretienne icy des escholiers aux dépens de l'Église (2). » Merlin ajoute que cet escrit, approuvé du synode, signé de la royne, a triomphé des oppositions de ceux « qui rompent les oreilles de Sa Majesté d'une infinité de calomnies, comme si nous voulions nous faire évesques ou papes et abattre l'authorité des magistrats, et autres tels propos. »

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La susceptibilité des magistrats sur ce point devait être désarmée

(1) Librairie Grassart. Brochure in-8°, 70 pages. (2) Bulletin, t, XIV, p. 232-233.

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