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1769, Paoli, apprenant que la France préparait une nouvelle expédition, ordonna une levée en masse de tous les hommes valides, depuis seize jusqu'à soixante ans. Son appel fut entendu; mais le comte de Vaux arriva dans l'île, le 30 avril 1769, avec des forces considerables. La nationalité corse allait périr.

Du 30 avril 1769 au 3 mai de la même année, les deux armées ne firent que s'observer, sans tirer un seul coup de fusil. Le 3 mai, le comte de Vaux ouvrit la campagne par une décharge de toute son artillerie, puis le combat s'engagea; mais pendant toute cette journée les deux armées gardèrent sans avantage leurs positions respectives. La journée du lendemain fut favorable aux patriotes corses; mais celle du 5 mai leur fut désavantageuse. Paoli dut se retirer au delà d'un fleuve (le Golo) dont le passage fut héroïquement défendu pendant plusieurs jours. Repoussé ensuite jusqu'à Pontenuovo, il y perdit, le 9 mai 1769, après des efforts inouïs, la bataille de ce nom, qui mit définitivement la Corse sous la domination française.

Paoli soutint pendant quelque temps encore une guerre de partisan dans les montagnes; mais la révolution insulaire avait été frappée à mort à Pontenuovo. Bientôt convaincu lui-même de cette vérité, il renonça à faire couler plus longtemps en vain le sang des siens, et se rendit avec l'élite des patriotes corses à Porto-Vecchio, où ils s'embarquèrent le 12 juin 1768 sur deux navires anglais mis à sa disposition par l'amiral Smittoy.

Quinze mois après l'affaire décisive de Pontenuovo, la femme d'un jeune officier corse, qui avait été secrétaire de Paoli, donnait à Ajaccio, devenue ville française, le jour à un enfant qui devait être empereur de cette France à la domination de laquelle son père avait voulu soustraire son île natale.

Après le départ de Paoli, le comte de Vaux ne rencontra plus aucun obstacle; il ordonna et parvint à faire exécuter le désarmement général des habitants; il réorganisa l'administra

tion de la justice et quitta la Corse avec la plus grande partie des troupes francaises. Il laissa le commandement de Ï'île à M. de Marbœuf.

La Corse fut représentée à l'Assemblée constituante par douze députés. Sur leur demande, cette assemblée décréta que cette île faisait partie intégrante du territoire national, et la divisa en deux départements. (Voyez GOLO [dép. du] et LIAMONE [dép. du].)

Paoli, en quittant la Corse, s'était rendu d'abord à Livourne, puis en Hollande, et de là en Angleterre. Il avait reçu à Londres l'accueil le plus honorable; le gouvernement anglais lui faisait une pension de 1,200 livres sterling, et avait pourvu au sort des membres de sa famille qui l'avaient suivi dans son exil. Alfieri lui avait dédié sa tragédie de Timoléon. Mais il était impossible que les hommes qui alors travaillaient à fonder en France le régime de la liberté, ne comprissent pas aussi ce qu'il y avait de noble et de grand dans la courageuse résistance que cet homme avait opposée aux conquérants de sa patrie. Mirabeau se hâta de déclarer à la tribune de l'Assemblée nationale qu'il était temps de rappeler les patriotes corses, qui expiaient dans l'exil les efforts qu'ils avaient faits pour maintenir l'indépendance de leur patrie; il présenta cette mesure comme une expiation de l'injuste conquête à laquelle il se reprochait d'avoir contribué lui-même dans sa jeunesse. Sa proposition fut décrétée le 30 novembre 1789. Paoli s'empressa de quitter la terre d'exil, et vint à Paris remercier l'Assemblée qui venait de lui ouvrir de nouveau les portes de sa patrie. La Fayette, dont les inspirations furent toujours si malheureuses, le présenta à Louis XVI, qui lui conféra le grade de lieutenant général et le commandement militaire de la Corse. Ses concitoyens le reçurent avec enthousiasme, et l'élurent commandant de la garde nationale, et président de l'administration du département. Ainsi, cet homme qui s'était jusqu'alors fait remarquer par ses sentiments hostiles à la France, se

trouva investi dans cette île, où il avait conservé tant de partisans, d'une autorité presque absolue. Il ne tarda pas à en abuser. Il n'était pas assez dégagé des anciens préjugés nobiliaires, qui, en Corse surtout, ont toujours eu tant de pouvoir, pour adopter franchement les réformes opérées par la révolution. L'égalité républicaine ne pouvait lui convenir; il forma le projet de séparer sa patrie de la France et de la donner à l'Angleterre. La Convention, instruite de sa trahison, le cita à sa barre; il refusa d'obéir, convoqua à Corte une consulte générale de l'île, et, malgré l'opposition des démocrates, s'y fit conférer, par ses anciens partisans, des pouvoirs dictatoriaux. Mis hors la loi par un décret du 26 juin 1793, il fit armer ses partisans, expulsa de l'île ceux des patriotes fidèles à la France que ses persécutions n'avaient pas encore forcés de fuir, et demanda à l'amiral Hood, qui bloquait le port de Toulon, des secours pour l'aider à enlever aux garnisons françaises, qui les occupaient, les places de Bastia, Saint - Florent et Calvi. Les Anglais firent immédiatement passer en Corse cinq régiments, commandés par le général Dundas, qui parvint, après une assez vive résistance, à s'emparer des places les plus importantes de l'île. Paoli convoqua alors une nouvelle assemblée générale des habitants; il y fit adopter une constitution à peu près semblable à celle qui avait été rédigée par l'Assemblée constituante, et par laquelle George III, roi d'Angleterre, était reconnu roi de Corse. Paoli espérait être nommé viceroi; mais le gouvernement anglais ne fit pas la faute qu'avait commise Louis XVI; cette dignité fut conférée à sir Gilbert Elliot. Quant à Paoli, il fut appelé en Angleterre, où il est mort en 1817.

Les Anglais ne furent pas longtemps maîtres de la Corse; la Convention y envoya le représentant Lacombe-SaintMichel. Sa première opération fut de réunir une petite armée, composée de gardes nationales, d'infanterie légère, de gendarmerie, de matelots et des

garnisons qui occupaient le pays. Paoli s'était emparé de Murato. A cette nouvelle, Saint-Michel quitte Calvi, se rend à Saint-Florent, menace Biguglia, Murato, et vient fondre, à la pointe du jour, sur le poste de Farinole, défendu par des pièces de campagne et par un chef décidé à vendre chèrement sa vie. Le combat fut opiniâtre et sanglant. Saint-Michel y fut blessé; mais malgré les efforts des révoltés, il se rendit maître de tous les postes qui fermaient la vallée entre le cap Corse et les villes restées fidèles à la France. Cette victoire intimida les ennemis; mais après la reprise de Toulon, toutes les forces anglaises qui en sortirent se tournèrent vers la Corse. Cependant Saint-Michel, qui n'avait que 1,200 hommes à opposer à 12,000 ennemis, disputa le terrain pied à pied. Enfin, accablé par le nombre, il se retira à Saint-Florent, et y resserra ses lignes. Les Anglais ne furent pas assez hardis pour profiter de la position critique où il se trouvait. Une ruse le tira de ce péril. Il fait venir le capitaine d'un vaisseau ragusain, mouillé à Bastia, et lui remet mystérieusement une lettre pour le consul de France à Gênes, auquel il marque qu'il a pris une nouvelle position, où il a tendu aux Anglais un piége tel, que, s'ils y tombent, il n'en échappera pas un seul. L'avide Ragusain ne manqua pas de vendre sa dépêche à l'amiral anglais, et de six semaines on n'osa attaquer Bastia. Pendant ce temps, Lacombe put se fortifier; mais les Anglais, de leur côté, avaient fait venir des renforts de troupes napolitaines; vingt de leurs vaisseaux de ligne croisaient en outre dans ces parages pour y empêcher l'entrée d'aucun secours. Fiers de leur nombre, les ennemis sommèrent alors Bastia de se rendre. Le général français répondit qu'il était prêt à les recevoir avec des boulets rouges. En effet, la résistance fut énergique. Cependant les assiégés, ne recevant aucun secours, furent enfin obligés de capituler. Calvi se soumit aussi, après avoir été réduite en cendres, et en 1793, les partisans de la

France se virent dans la nécessité de fuir. Mais la situation changea lorsque le héros d'Ajaccio, vainqueur de l'Italie, commença à remplir le monde de sa renommée. Tout annonçait une révolution en faveur de la France, et la prochaine expulsion des Anglais, quand parut sur les côtes de l'île une expédition française. Bonaparte avait envoyé son compatriote, le général Gentili, à Livourne, avec une simple division de gendarmerie. Celui-ci donna au général de brigade Casalta un faible détachement réuni aux réfugiés corses. On trompa la vigilance des croiseurs anglais, et l'on aborda non loin de Bastia, le 20 octobre 1796. Casalta fut rejoint par un nombre considérable de patriotes, et l'on marcha aussitôt sur Bastia. Maître des hauteurs, et secondé par les habitants, il somma les Anglais de se rendre dans une heure. La garnison était de 3,000 hommes; elle avait quelques vaisseaux mouillés dans la rade; tout faisait croire à une vigoureuse résistance. Cependant, tout à coup les Anglais abandonnèrent la citadelle et se jetèrent en désordre sur leurs vaisseaux. Casalta ayant pénétré dans la ville, tomba sur leur arrière-garde, leur fit 8 à 900 prisonniers, et s'empara d'une grande partie de leurs magasins. Le 22, il marcha sur Saint-Florent avec deux pièces de canon. Une journée lui suffit pour forcer les gorges de SanGermano. Deux vaisseaux, embossés sur le chemin qui conduit à Saint-Florent, ne purent retarder sa marche; il entra dans cette ville, et fit prisonnière une partie de la garnison. L'escadre anglaise gagna le large; la garnison de Bonifacio se rendit, et Gentili, qui avait mis à la voile de Livourne avec le reste des réfugiés, parut devant Ajaccio, et fit fuir les Anglais qui restaient dans l'île. Ainsi, peu de jours avaient suffi pour rattacher à la France la patrie de Napoléon.

Les Anglais rentrerent de nouveau en Corse, en 1814, et évacuèrent cette île après quelques mois de séjour.

Aujourd'hui, cette île forme un département, divisé en 5 arrondissements

ou sous-préfectures: Ajaccio, Bastia, Calvi,Corte et Sartène. Elle renferme 60 cantons et 355 communes. Elle constitue la 17 division militaire, forme une académie universitaire, dont le siége est à Ajaccio, et un évêché suffragant de l'archevêché d'Aix; elle possède une cour royale, siégeant à Bastia. Sa population, d'après le dernier recensement, est de 207,887 âmes; son revenu territorial est évalué à 2,635,000 francs, et le total des impôts directs qu'elle paye à la France à 260,044 fr.; sa superficie est de 874,745 hectares.

Le pays est traversé, dans toute sa longueur du nord au sud, par une chaîne granitique, dont les points culminants, le Monte-Rotondo, le Monted'Oro et le Paglia-Orba surpassent de beaucoup les montagnes de la France centrale.

Les principales rivières sont le Golo, le Tavignano, le Fiumerbo, le Porto, le Liamone, le Gravone, la Prunetta, le Talavo et le Valinco.

CORSEUL, village de Bretagne (aujourd'hui département des Côtes-duNord) qui occupe une partie de l'emplacement de l'ancienne capitale des Curiosolites. Les Romains y bâtirent un temple, et changèrent son ancien nom en celui de Fanum Martis; mais ce lieu reprit, vers le cinquième siècle, son nom celtique, dont le nom moderne n'est qu'une légère altération. Corseul est l'une des localités de Bretagne où l'on rencontre le plus de monuments antiques. On y remarque entre autres les ruines du temple de Mars. Les fouilles que l'on y a faites depuis un siècle ont toutes été suivies de découvertes archéologiques fort importantes.

CORSIN (André-Philippe), né en 1773, à Piolène (comtat Venaissin), entra à seize ans, comme simple soldat, dans le régiment du Perche-infanterie. Il fit les campagnes de 1792 à 1795 aux armées du Rhin et de Sambre-etMeuse, fut blessé à Pirmasens et à Fleurus. Il servit ensuite aux armées du Nord, d'Italie, du Rhin, des Côtes de l'ouest et de Hollande. Nommé chef de bataillon d'infanterie en 1806, il

fut appelé à la grande armée; et bientôt, signalé à l'empereur pour une action d'éclat faite sous les murs de Danzig, il fut nommé colonel, et trouva peu après une nouvelle occasion de déployer son courage. Le 23° de ligne s'étant laissé surprendre, les Prussiens étaient maîtres de la côte de sape, et avaient encloué les pièces. Corsin, qui était de tranchée, s'aperçoit du désordre, franchit la contrescarpe avec ses voltigeurs, brave le feu des assiégés, descend dans le fossé, attaque, culbute les bataillons ennemis, et les poursuit jusqu'aux poternes. Ce trait de valeur valut au brave colonel le titre de baron avec une dotation de 4,000 fr. Corsin soutint sa réputation à l'armée d'Espagne. Charge, le 9 mars 1809, d'emporter, à la tête du 4 léger, les redoutes qui couvraient la gauche d'Oporto, il échoua dans trois attaques consécutives. Tous ses officiers et la plus grande partie de ses troupes étaient hors de combat. Lui-même, blessé, se soutenait à peine. Il ne se rebute pas néanmoins, se fait porter à bras par ses sapeurs, ranime de son ardeur ce qui lui reste de soldats, les lance sur les redoutes et les emporte. Il fut nommé général de brigade à la suite de cette sanglante action. Fait prisonnier en Russie, il dut sa liberté aux événements de 1814. Nommé alors commandant d'Antibes, il fit désarmer le détachement de la garde qui tenta de soumettre cette place à Napoléon lors de son retour de l'île d'Elbe. Néanmoins, il marcha ensuite contre les armées qui menacèrent la France. Après la seconde restauration, Corsin commanda deux divisions militaires, et devint, en 1821, grand-officier de la Légion d'honneur.

CORTE, jolie et forte ville de la Corse, chef-lieu de sous-préfecture, place de guerre de quatrième classe, tribunal de première instance. Population, 3,282 habitants. Cette ville, située au centre de l'île, était le lieu où, dans le onzième siècle, se réunissaient les principaux comtes de la Corse. Sous la domination des Pisans, des papes et des Génois, elle

perdit cette prérogative, qui lui fut rendue à l'époque de l'insurrection contre Gênes. On remarque à Corte, dans l'ancien palais où le tribunal tient ses séances, l'appartement de Paoli; et la citadelle, ancien château élevé au commencement du quinzième siècle par Vincentello d'Istria.

CORTOT (Jean-Pierre), statuaire, né à Paris le 20 août 1787, fut élève de Bridan fils, et remporta le premier prix de sculpture en 1809. Ses principaux ouvrages sont une Pandore et un Narcisse, exécutés pendant son séjour en Italie; un modèle d'Ecce Homo et une sainte Catherine pour l'église Saint-Gervais; une Vierge pour la cathédrale d'Arras; une statue de Pierre Corneille pour la ville de Rouen; le bas-relief du monument de Malesherbes; la statue du duc de Montebello; le modèle d'une statue de Charles X; le fronton en pierre de l'église du Calvaire; un bas-relief pour l'arc de triomphe de la place du Carrousel; un groupe de Daphnis et Chloé; un œil-de-boeuf à la cour du Louvre; la Justice, figure colossale, destinée au palais de la Bourse; le modèle d'une sainte Vierge, en argent, pour la ville de Marseille; une statue colossale de Louis XVI, qui devait être élevée sur la place de la Concorde; le groupe de Marie-Antoinette soutenue par la Religion, au monument de la rue d'Anjou; une figure colossale représentant la Ville de Paris, et que l'on destinait à la fontaine projetée à la place de la Bastille; le buste colossal d'Eustache de SaintPierre, pour la ville de Calais. Ses derniers ouvrages sont: le Soldat de Marathon, actuellement aux Tuileries, un des grands, bas-reliefs de l'arc de triomphe de l'Étoile, Napoléon couronné par la Victoire, et le fronton de la chambre des députés qu'on peut regarder comme son chef-d'œuvre et comme l'une des plus belles et des plus harmonieuses compositions de ce genre dont s'honore la sculpture française. Cet artiste dont le talent se distíngue surtout par une pureté de dessin et une simplicité de composition qui rap

pellent les plus beaux ouvrages de l'antiquité, à été élu, en décembre 1826, membre de la quatrième classe de l'Institut, et nommé la même année professeur à l'école des beaux

arts.

CORVÉES. Ces redevances, l'un des priviléges les plus odieux de l'ancien régime, avaient une origine fort ancienne elles dataient de l'époque des premiers affranchissements des serfs. Subrogées à la servitude absolue, elles furent alors la condition de la cession d'une terre, le prix de la liberté des affranchis. Les corvées étaient donc, dans l'origine, des charges moins lourdes pour les fermiers qui y étaient soumis que le prix d'un bail ou celui d'une vente. Mais dans la suite elles devinrent, entre les mains des tyrans féodaux, un châtiment, un épouvantail, une exaction avilissante, et la plupart du temps les seigneurs usurpèrent le droit de les imposer.

Les corvées réelles étaient dues par les fonds, à cause des fonds seule ment, et soumises à la prescription. Mais elles étaient assez rares, et à côté d'elles existaient les corvées personnelles, beaucoup plus communes et plus oppressives: celles-ci étaient dues par les habitants d'une seigneurie, qu'ils possédassent ou non des héritages; elles ne pouvaient être prescriptibles, et leur emploi était souvent facultatif. Dans ce dernier cas, les malheureux cultivateurs étaient dits corvéables à merci. Les abus engendrés par la perception de cet impôt facile devinrent si criants, et le peuple fut tellement pressuré, que les rois durent plusieurs fois essayer de mettre un frein à l'avarice des seigneurs. Louis XII, en 1498; Charles IX, aux états d'Orléans, en 1560; Henri III, aux états de Blois, en 1579, cherchè rent à modifier par leurs ordonnances un droit qui d'ailleurs témoignait de la puissance de la féodalité. Il fut réglé que les corvées seraient limitées à douze par année; qu'elles se feraient entre deux soleils; qu'on n'en pourrait prendre plus de trois par mois, et à diverses semaines; qu'on ne pour

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rait imposer des travaux périlleux ou déshonnêtes. Néanmoins, dans beaucoup de seigneuries, les corvéables étaient tenus de se nourrir, eux et leurs bêtes, pendant le temps de leur service. S'il leur mourait des bœufs, s'il se brisait quelques charrettes, c'étaient des cas fortuits dont la réparation ne pouvait être exigée du seigneur. Il y avait des pays où les malheureux paysans devaient, malgré les ordonnances une journée par semaine. Ainsi, pendant cinquante-deux jours de l'année, ils étaient tout entiers occupés, au profit du château, à labourer, à moissonner, à battre les grains, à faire les vendanges, à charroyer, curer les fossés, reparer les chemins, etc.; puis le travail leur était interdit pendant cinquante-deux dimanches et une cinquantaine de fêtes. Ainsi, en ajoutant les jours de maladie ou d'autres empêchements, il leur restait moins de deux cents jours pour gagner de quoi satisfaire aux autres impôts et pourvoir à la nourriture de leur famille.

Toutes les tentatives des rois et des parlements, toutes les règles fixées par les coutumes, avaient eu si peu de résultats, les plaintes des paysans devinrent si menaçantes, que Louis XIV fut obligé, aux grands jours de Clermont, de fixer une nouvelle limite pour le nombre des corvées seigueuriales.

Les corvées imposées par les seigneurs n'étaient pas les seules qui pesassent sur les paysans. Le roi avait en outre le droit d'en exiger pour son compte ou pour celui de l'État. C'était par ce moyen, c'était en détournant les cultivateurs de leurs travaux, et en employant contre les réfractaires la contrainte par corps, les amendes, les saisies mobilières et les garnisons, que l'on pourvoyait à la confection et à l'entretien des routes, dont les nobles voulaient bien se servir, mais dont ils ne voulaient pas payer les frais. Toutefois, l'origine des corvées royales ne remontait pas au delà du commencement du dix-huitième siècle; mais les pertes réelles, les désordres, les vexa

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