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« ser les dignités et les richesses, d'au« tres qui ne le sont pas moins, ont « cru que ces choses ne valaient pas « même la peine d'être refusées. » Ceci, ajoute fort bien un biographe, révèle pourquoi M. Cuvier fut baron, pourquoi il eut des cordons, des pensions, et le titre de conseiller d'Etat : mais ceci ne révèle pas pourquoi, sous sa présidence universitaire, l'un des plus grands botanistes de notre époque, M. de Candolle, fut révoqué de sa place de professeur de botanique à l'école de Montpellier.

« Sans juger nous-mêmes M. Cuvier comme homme politique, dit M. J. Reynaud, nous le laisserons juger par ceux qu'il a servis, et sur un seul trait : lors des dernières tentatives faites par la dynastie des Bourbons pour étouffer sous la censure l'essor de la France, M. Cuvier fut nommé censeur : M. Cuvier refusa; mais sa condamnation n'était-elle pas prononcée? Il venait d'être jugé par ceux-là même qui, le tenant depuis si longtemps à leur service, avaient estimé qu'un tel ministère devait lui convenir. Que dira la postérité, en apercevant dans le recueil de nos actes publics, sur un si grand nom, une si grande honte! »>

Tous les travaux de Cuvier appartiennent à trois chefs principaux: la classification, l'anatomie comparée, et la palæontologie; quelque limitée que paraisse cette part, relativement à l'étendue immense de la géologie, Cuvier y a été admirable par la netteté de ses aperçus, par l'habileté avec laquelle il a su s'y concentrer, et par l'éclat des progrès qu'il y a fait faire à la science. Ses principaux ouvrages sont : Tableau élémentaire de l'histoire des animaux, an vI, in-80; Extrait d'un ouvrage sur les espèces de quadrupedes dont on a trouvé les ossements dans l'intérieur de la terre, 1799, in-8°; Leçons d'anatomie comparée, recueillies et publiées sous ses yeux, par MM. Duméril et Duvernoy, 18001805, 5 vol. in-8°: cet ouvrage a été traduit dans toutes les langues de l'Europe; Recherches anatomiques sur les reptiles regardés encore

comme douteux, 1807, in-4°, avec planches. Avec Brongniart, Essai sur la Géographie minéralogique desṛenvirons de Paris, avec des cartes géognostiques et des coupes de terrain, 1811, in-4°; Recherches sur les ossements fossiles des quadrupèdes, où l'on rétablit les caractères de plusieurs espèces d'animaux, que les révolutions du globe paraissent avoir détruites, 1812, 4 vol. in-4°, fig.; depuis, plusieurs fois réimpr.; Mémoires pour servir à l'histoire et à l'anatomie des mollusques, Paris, 1817, in4°; Le règne animal distribué d'après son organisation, 1817, 4 vol. in-8°, réimprimé de 1819 à 1827, en 3 vol. in-8°; Recueil des Éloges historiques lus dans les séances publiques de l'Institut, 1819, Paris, 2 vol. in8°; Histoire des progrès des sciences naturelles, depuis 1789 jusqu'à ce jour, 1826, in-8°; Histoire naturelle des poissons, in-8°, Paris et Strasbourg, t. I à VIII, 1828 à 1831.

Frédéric CUVIER, frère cadet du précédent, membre de l'Institut, inspecteur général des études, naquit à Montbéliard, en 1773, et mourut en 1838. Outre un grand nombre de Mémoires insérés dans divers recueils, il a publié, avec M. GeoffroySaint-Hilaire, l'Histoire naturelle des mammifères, avec fig. coloriées, 70 livraisons in-fol., de 1818 à 1837; Des dents des mammifères considérées comme caractères zoologiques, Paris, 1824, in-8°; Histoire naturelle des cétacés, 1836; Observations sur l'enseignement de l'histoire naturelle dans les colleges, 1838.

CUY, ancienne baronnie de Normandie, auj. du dép. de la Seine-Inférieure.

CYCLES ET ÉPOPÉES AU MOYEN AGE. - « Si l'on parcourt successivement les divers sujets qu'a traités la poésie épique au moyen âge, on rencontre d'abord ceux qu'elle a empruntés à l'antiquité, en changeant le caractère des personnages et leur costume. Plusieurs noms célèbres de l'histoire héroïque de la Grèce sont tombés dans le domaine de la poésie chevaleresque, et ont reçu son em

preinte. Il en a été de même de quelques personnages de l'Ancien Testament, comme les Machabées.

«La portion des traditions de l'antiquité qui a joué le plus grand rôle, et tenu la place la plus considérable dans la littérature épique du moyen âge, c'est tout ce qui se rapporte à la guerre de Troie, et subsidiairement à la guerre de Thèbes, ainsi qu'à l'expédition des Argonautes. La guerre de Troie, surtout, était populaire, et par le vague souvenir qui s'était conservé de la célébrité d'Homère, et par certaines traditions adoptées chez divers peuples germaniques, qui faisaient remonter leur origine aux Troyens. Outre cette refonte de l'antiquité, trois grands cycles composent l'ensemble de la poésie épique du moyen âge: celui d'Alexandre, de Charlemagne, et celui d'Arthur (*). »

Le cycle d'Alexandre, qui se compose de traditions égyptiennes, persanes, arabes, juives et indiennes, a fourni la matière de plusieurs poemes français le plus célèbre est celui auquel paraisssaient avoir travaillé deux auteurs: Lambert Li Corset Alexandre de Paris. En général, ces auteurs suivent les biographies légendaires appelées Gesta; mais ce qui n'est pas dans les Gesta, c'est la peinture des mœurs et des sentiments chevaleresques. Dans le poëme du moyen âge, Alexandre est fait chevalier; il porte l'oriflamme, il a un gonfalonier et douze pairs. « D'autres poëtes français du moyen âge ont raconté la vie légendaire d'Alexandre; elle forme un épisode de sept mille vers dans le Renard contrefait; nous savons aussi qu'il existait en provençal un Alexandre. L'Alexandreis poëme latin de Gauthier de Châtillon, a joui d'une grande réputation au moyen âge; mais il est composé uniquement d'après les sources historiques (**). »

Après Alexandre, c'est Charlemagne qui a eu la gloire épique la plus éten

(*) M. Ampère, Histoire de la formation de la langue française.

(**) Ibid.

due. On peut voir les progrès du développement successif des traditions fabuleuses sur ce grand homme dans diverses chroniques; deux d'entre elles sont particulièrement importantes; nous voulons parler de la chronique du moine de Saint-Gall, et de celle qu'on a mise sous le nom de Turpin. Le chronique du moine de Saint-Gall, écrite deux générations après Charlemagne, offre le premier degré de la légende. Celle qui a été attribuée à Turpin date du onzième siècle, et est bien plus encore que celle du moine de Saint-Gall, remplie d'incidents imaginaires. « Ce ne sont plus seulement des anecdotes, des écrits partiels, mais de grands événements, des expéditions, des conquêtes purement idéales..... Et en même temps que Charlemagne devenait ainsi un héros 'de plus en plus fabuleux, d'autres personnages, ses contemporains, ou venus dans le siècle qui suivit le sien, prenaient place dans les traditions légendaires, et composaient le cortége épique qui devait l'accompagner à travers les âges (*). »

Le premier des poëmes carlovingiens, non pas par la date de sa composition, mais par la date des faits qu'il raconte, est l'histoire de la mère de Charlemagne, de la reine Berthe aux grands pieds, héroïne d'un gracieux poëme, composé à la fin du treizième siècle, et publié dans ces derniers temps par M. Paulin Pâris. Puis viennent les romans, qui racontent les aventures romanesques de la jeunesse de Charlemagne ( époque de sa vie sur laquelle l'histoire garde le plus profond silence), ses exploits presque tous fabuleux contre les Sarrasins, son prétendu voyage à Constantinople et à Jérusalem, et enfin, la défaite de Roncevaux, qui termine l'histoire légendaire de Charlemagne. (V. ROLAND et RONCEVAUX.) Dans ces poëmes, les traces des faits réels se rencontrent çà et là. Le roman d'Ogier le Danois rappelle les expéditions contre les Lombards; celui de Guiteklin (Witi

(*) Ibid.

T. VI. 19° Livraison. (DICT. ENCYCL., ETC.)

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kind), les guerres sanglantes contre les Saxons. Les luttes des princes carlovingiens contre les Sarrasins du midi de la France ont été personnifiées dans le célèbre Guillaume le Pieux, héros d'une collection d'épopées. Enfin, le poëme des quatre fils Aymon paraît offrir quelques vestiges des résistances opposées aux rois francs par divers chefs indépendants, et en particulier par les chefs aquitains. D'autres poëmes forment une peinture curieuse de la féodalité; tels sont le poëme provençal de Gérard de Roussillon et le poeme de Garin le Lohérain.

Un petit chef gallois qui, au sixième siècle, défendit l'indépendance bretonne contre les Saxons, Arthur, a eu une destinée légendaire presque aussi glorieuse que celle de Charlemagne. La mention de la Table Ronde est faite pour la première fois dans la traduction française de la chronique de Monmouth, dans le roman de Brut; à ce cycle se rattachent tous les poemes du Saint-Graal, ceux de Tristan, de Lancelot, etc.

« Il reste un certain nombre de poëmes qui n'appartiennent à aucun de ces grands cycles. Les uns ont pour héros des personnages historiques, comme le roman de Hugues Capet, où figurent, par exception, les bourgeois, et, en particulier, les bouchers de Paris, double allusion aux dédains aristocratiques de la féodalité pour la popularité de la troisième dynastie, et aux luttes des factions dans Paris au quinzième siècle. Godefroi de Bouillon, Robert le Diable et Richard Coeur de Lion, ont eu l'honneur de faire naître des épopées plus ou moins romanesques. Il est, enfin, des poèmes qui sont de véritables romans dans le sens moderne du mot, et dont les personnages sont purement imaginaires, comme Parthonopeus (*). »

Si l'on se demande maintenant ce que la France à emprunté pour ces légendes, soit à l'Orient, soit aux traditions celtiques, germaniques ou

(*) Ibid.

scandinaves, on peut affirmer qu'elle a tiré bien peu de chose de ces sources différentes, et que l'épopée chevaleresque n'a pas eu chez nous une origine étrangère. Il y a, toutefois, une question d'antériorité entre la France du Midi et celle du Nord; cette question a été résolue par M. Fauriel en faveur du Midi; il existe cependant encore quelques doutes pour certains poemes de la langue du Nord, poëmes dont la date et l'origine ne sont pas entièrement fixées. Nous citerons entre autres le roman de Roncevaux, dont l'auteur, Turold, est un poëte normand.

CYSOING. Ce bourg de la Flandre wallonne, aujourd'hui chef-lieu de canton du département du Nord, eut beaucoup à souffrir à l'époque de la bataille de Bouvines, et sous Philippe de Valois, lors du siége de Tournai, par les Anglais. Louis XV était campe à Cysoing, et avait son quartier général dans l'abbaye de ce bourg, lorsqu'il partit pour se rendre dans les plaines de Fontenoy. En mémoire de cet événement, les chanoines de Cysoing firent construire une pyramide qui subsiste encore aujourd'hui.

CZARNOWO (combat de). - Au début de la campagne de Pologne, le 25 décembre 1806, l'empereur ayant quitté Varsovie et fait une reconnaissance sur les bords de la Wrka, ordonna de construire un pont au confluent de cette rivière et de la Narew. Le général Morand, soutenu par la brigade de cavalerie du général Marulaz, et par la division de dragons du général Beaumont, y passa sur-lechamp pour aller attaquer les retranchements des Russes, près du village de Czarnowo. Lorsque la canonnade se fut engagée, le maréchal Davoust fit passer le général Petit avec le douzième régiment de ligne pour enlever les redoutes du pont. La nuit étant survenue, on continua l'attaque à la faveur d'un clair de lune, et à deux heures du matin tous les ordres de l'empereur avaient été remplis. Les batteries du village et celles du pont étaient enlevées ; quinze mille hommes qui les défendaient avaient été mis en

déroute; une centaine de prisonniers et six canons étaient demeurés au pouvoir des Français, qui comptèrent peu de morts, mais deux cents blessés.

CZARZNIKI (combat de ). — Battu, le 20 octobre 1812, au défilé de Bonoria, sur la rive gauche de la Lwina, le général Steinheil, qui commandait l'avant-garde de l'armée russe, avait été contraint de se retirer à Disna; mais, grâce à un renfort de douze mille hommes, que le général en chef Wittgeinstein lui avait envoyé, il avait pu le rejoindre le 25 à Ulai. Apprénant alors que la deuxième division de l'armée française manœuvrait pour se joindre avec la neuvième, qui avait dû quitter Smolensk, à l'effet de mar

cher vers Senno et de couvrir Witepsk, Wittgeinstein se porta lui-même sur Lepel. A son arrivée dans cette ville, il fut informé que le deuxième corps, aux ordres du général Legrand, avait pris position à Smoliani, et que l'avant-garde française était à Czarzniki village à quelques lieues de Lepel. Il la fit attaquer le 31, à sept heures du matin. Après un combat des plus acharnés, car il dura jusqu'à sept heures du soir, la colonne française qui commandait l'avant-garde fut obligée de battre en retraite, et les Russes restèrent maîtres du village, où ils établirent eux-mêmes leurs avantpostes.

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DABO OU DACHSBOURG Duchsburgum, petite ville de la basse Alsace, aujourd'hui du dép. de la Meurthe, à 23 kil. de Strasbourg. Ce lieu, dont la population est de 2,168 hab., a donné son nom à un comté, qui, jusqu'en 1789, fut considéré comme un district particulier de la province. Il avait été réuni à la France en vertu d'un arrêt rendu en 1680, par le conseil supérieur d'Alsace.

DACHSTEIN, Dachtenium, petite ville, autrefois chef-lieu d'un bailliage de la basse Alsace, auj. compris dans le dép. du Bas-Rhin, à 11 kil. de Strasbourg. Cette ville, qui fut prise par les alliés en 1610, et par les Suédois en 1633, fut cédée à la France par le traité de Ryswick.

DACIER (André) naquit à Castres, en 1651, d'un avocat protestant, qui l'envoya à Saumur perfectionner ses études auprès du savant Tanneguy Lefèvre (voyez ce mot), alors occupé de l'éducation de sa fille. Unis, dès lors, par les mêmes goûts et par les mêmes études, les deux élèves le furent, en 1683, par un mariage que Basnage a appelé le mariage du grec et du latin. Deux ans après, M. et madame Dacier abjurèrent la religion protestante. Le duc de Montausier, instruit de leur mérite, les avait depuis plusieurs années inscrits l'un et l'autre sur la liste des savants chargés de traduire et de commenter les classiques pour l'usage du dauphin. Nommé garde des livres du cabinet du Louvre, puis admis à l'Académie des inscriptions en 1695, Dacier fut reçu à l'Académie française vers la fin de la même année. Il termina sa laborieuse carrière le 18 septembre 1722.

On a de lui d'excellents commentaires, et beaucoup de traductions d'auteurs grecs et latins. Mais ces dernières étaient, en général, peu propres à réconcilier ses éternels ennemis, les partisans des modernes, avec cette antiquité pour laquelle il professait un culte enthousiaste. Amoureux des au

D

pable d'y apercevoir un défaut, et, teurs qu'il interprétait, il était incapour dissimuler leurs imperfections, il soutenait les plus étranges paradoxes. D'autres fois, il se laissait aller à des interprétations singulières, que Boileau appelait les révélations de M. Dacier. Un homme d'esprit l'a caractérisé en disant : « Il connaissait tout des anciens, hors la grâce et la finesse.» Un autre disait de lui, « que c'était un gros mulet chargé de tout le bagage de l'antiquité. » Cependant, on estime encore aujourd'hui, et à bon droit, ses éditions de Publius Festus et de Valerius Flaccus (ad us. Delph., in-8°, Paris, 1681, et Amsterdam, 1699); son Commentaire sur Horace (16811689, 10 vol. in-12); ses traductions de Platon (Paris, 1699, 2 vol. in-12) et des Vies des hommes illustres de Plutarque (Paris, 1721, 8 vol. in-4°, réimp. en 10 vol. in-12.) Nous citerons encore celles du Manuel d'Épictète et de la Poétique d'Aristote, etc.

DACIER (Anne Lefèvre, plus connue sous le nom de Madame) naquit à Saumur en 1651. On raconte que brodant un jour à côté de son jeune frère, pendant qu'il recevait de son père, Tanneguy Lefèvre, une leçon de latin ou de grec, elle lui suggéra les réponses qu'il avait à faire, et que, charmé de cette découverte, Tanneguy partagea dès lors ses soins entre ses deux enfants. Il leur donna bientôt après pour compagnon le jeune Dacier, le seul élève qu'il eût voulu conserver. Mademoiselle Lefèvre fit de rapides progrès. En peu de temps, elle put comprendre à la lecture Phèdre et Térence, Anacréon, Callimaque, Homère et les tragiques grecs. Elle vint à Paris, en 1672, après la mort de son père; elle y avait été précédée par une grande réputation, qu'elle ne tarda pas à justifier en publiant son édition de Callimaque (1674.) Elle avait à peine 23 ans lorsque le duc de Montausier la porta au nombre des Interprètes-Dauphin. On vit paraître

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