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UN HABITANT. Eh bien, maintenant, supposons le cas où un propriétaire aurait chassé uniquement sur son propre terrain et en temps non prohibé; où, par conséquent, on ne pourrait lui imputer le fait d'une chasse illicite. Supposons qu'on ne lui reproche rien autre chose, que d'avoir porté un fusil de chasse, sans avoir pris un permis préalable. Dans ce cas, le seul fait d'avoir porté une arme de chasse sans permis, ne sera pas joint à un délit de chasse. Il sera unique, entièrement isolé. Supposons encore que l'individu soit cité, à la requête du ministère public, pour ce seul fait; mais, plus d'un mois après le jour où il aura eu lieu. Dans ce cas donc, pourra-t-on opposer utilement la prescription d'un mois établie par la loi d'avril go?

LE JUGE DE PAIX. La question, je l'avoue, m'embarrasserait un peu. Elle est susceptible d'une controverse sérieuse. Cependant, je me déciderais pour l'affirmative; par la raison que dans ce cas il y a toujours un fait de chasse; un fait de chasse qui, par le défaut de permis, devient illégal, illicite; et

donnée le 17 février 1824, conséquemment après l'expiration 'du temps fixé pour la prescription. D'où il suit qu'en déclarant le délit prescrit, et en renvoyant en conséquence les prévenus de toute poursuite, le tribunal de Thionville, et la Cour royale de Metz, se sont exactement conformés à la loi ; -Rejette....." (Sirey, t. 25, 1. 185.)

par conséquent, c'est toujours d'un délit de chasse qu'il s'agit. Dans ce cas particulier, c'est toujours véritablement un délit de chasse qui est le fondement de l'action; et, par conséquent, à cette action, doit s'appliquer la prescription d'un mois, voulue par la loi d'avril 9o. Il y aurait d'autant plus lieu de l'appliquer, que dans le cas que vous venez de supposer, la cause du propriétaire serait des plus favorables.

§. III. Prescription, quant aux Déllts de chasse dans les Bois de l'Etat, de la Couronne, des Communes.

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UN HABITANT. Mais cette prescription d'un mois est-elle généralement applicable à tout délit de chasse, sans exception? non-seulement à ceux commis sur les terres des particuliers, mais encore à ceux commis dans les forêts de l'Etat, de la Couronne, des Communes, des Etablissemens publics?

LE JUGE DE PAIX. Vous faites bien de me proposer cette question; car elle a été long-temps flottante; et la Cour régulatrice elle-même a varié dans son opinion sur ce point. Ainsi, plusieurs fois sous le régime impérial, et encore depuis la restauration, elle décida que l'action pour délits de chasse dans les forêts de l'Etat ne devait être soumise qu'à la prescription de trois mois, conformément à la loi

du 15-29 sept. 1791, sur le régime forestier, art. 8 du tit. 9. (1)

Mais, dans ces dernières années, et notamment depuis 1822, d'après un lumineux réquisitoire d'office, présenté par le vénérable M. Mourre, son procureur général, elle a abandonné cette jurisprudence; en ce qui concerne les forêts de l'Etat.-Elle a jugé, au contraire, que la prescription d'un mois, établie la Loi d'avril 90, par doit être appliquée aux

délits de chasse commis dans les bois et forêts de l'Etat, ainsi qu'à ceux commis dans les bois des particuliers. (2)

Quant aux forêts de la Liste civile ou Dotation de la Couronne, elle a persisté à penser que ces forêts ayant été formellement exceptées, par le dernier article de la Loi d'avril 90, du régime établi par cette loi, et étant restées soumises au régime de l'Ordonnance de 1669, il s'ensuivait que les délits de chasse qui s'y commettent, ne peuvent être cou

(1) Arrêt du 27 juin 1817, portant annullation d'un jugement du tribunal d'Epinal, qui avait appliqué la prescription d'un mois, en faveur des sieurs Evrard et Collin, trouvés chassant dans une forêt nationale, le 18 novemb. 1816.

(2) Voir ce réquisitoire dans les deux collections de MM. Sirey et Dalloz.

verts que par la prescription de trois mois, telle qu'elle était établie par la Loi du 29 sept. 1791. (1)

A l'égard des bois et forêts des Communes, il est sans aucune difficulté, que c'est la prescription d'un mois, établie par la Loi d'avril go, qui leur est applicable; ainsi que la Cour de cassation l'a jugé plusieurs fois; notamment le 28 août 1818, en confirmant un Arrêt de la Cour de Montpellier, concernant le sieur Tourière; en ces termes: « Attendu qu'en jugeant, que l'Arrêt du 19 ventose an 10, en attribuant l'administration des bois com

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(1) Voyez notamment l'arrêt rendu le 30 mai 1822, po → tant annullation de deux, jugemens du tribunal d'appel de police correctionnelle, séant à Troies. Un autre rendu le lendemain 31 mai, confirmátif d'un arrêt de la Cour d'Amiens, coucernant le sieur Hérault. Un autre rendu le 30 août, même année, portant annullation d'un arrêt de la Cour royale d'Orléans, concernant le sieur Touquoi. (V. les deux recueils de MM. Dalloz et Sirey.) Cependant, dans la Gazelle des tribunaux, feuille du 6 juin 1827, n. 54, nous trouvons la mention d'un jugement du tribunal correc tionnel de Corbeil, qui aurait appliqué la prescription d'un mois, au sieur Lecomte, trouvé tendant des collets, et ayant déjà pris un lièvre, dans la forêt de Sénart. « Considérant, est-il dit, que le fait reproché à Lecomte est essentiellement délit de chasse, et n'appartient pas à la classe des délits forestiers; que dès-lors on ne peut faire application à l'espèce, que de la loi du 28 avril 1790, et non de la loi du 15 sept. 1791, ni de l'ordonnance de 1669, etc... »

munaux, et la poursuite des délits cominis dans lesdits bois, aux Agens forestiers, n'a point abrogé les dispositions de la Loi du 30 avril 1790, répressive des délits de chasse commis dans les bois des communes et dans ceux des particuliers; et que, dèslors, la prescription d'un mois, fixée par l'art. 12 de cette dernière loi, était applicable dans l'espèce: la Cour royale de Montpellier n'a point violé la loi de la matière, etc. »

Il est encore sans aucun doute, que la même prescription d'un mois est applicable aux délits de chasse commis dans les bois des Etablissemens publics, tels que Caisse d'amortissement, Légiond'honneur, hospices, etc.

UN HABITANT. Ainsi, Monsieur, il me semble résulter de tout ce que vous venez de nous dire : que, dans l'état actuel de la législation, l'action judiciaire pour délits de chasse dans les bois de l'Etat, des Communes, des Etablissemens publics et des particuliers, doit être formée dans le mois du fait même du délit, à peine de n'être plus recevable. Mais, n'est-il pas quelques exceptions à cette règle générale?

§. IV. Cas exceptionnels. Actes interruptifs.

LE JUGE DE PAIX. L'action judiciaire, prise dans l'acception propre de ce mot, se dit et s'entend d'une demande formée en justice; et elle n'est réputée

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