Page images
PDF
EPUB

<< remplacer le ministère public. Pourquoi ce déplacement <«< qui ne fait qu'aggraver la charge de cette fonction? << Pourquoi ne pas demeurer fidèle à la pensée de la loi en <<prenant le remplaçant dans la commune même? Est-il << possible, ensuite, d'établir une compétence qui n'a pas << sa source dans la loi, de faire fonctionner un maire en << dehors des limites de son ressort, de lui faire reconnaître << un caractère, de lui conférer des attributions dans un << lieu où ni ce caractère ni ces attributions n'existent? << Il est vrai que la loi n'a désigné que le commissaire de <«< police, le maire et l'adjoint; mais, lorsqu'elle a prévu << plus loin le remplacement de l'adjoint, dans l'hypothèse << de l'art. 167, à qui s'est adressé le législateur? Est-ce << au maire ou à l'adjoint d'une commune voisine? Non, << c'est au Conseil municipal même, c'est aux officiers de << la commune. Et cette disposition est en parfaite har<«<monie avec toute la législation. L'art. 5 de la loi du << 21 mars 1831 porte qu'en cas d'empêchement du maire «<et des adjoints, le maire est remplacé par le conseiller << municipal le premier dans l'ordre du tableau; et l'art. 14 << de la loi du 18 juillet 1837 ajoute « que le maire peut « déléguer une partie de ses fonctions à un ou à plusieurs « de ses adjoints, et, en l'absence des adjoints, à ceux << des conseillers municipaux qui sont appelés à en faire << les fonctions. » Or, l'art. 167 ne doit-il pas être consi«déré comme le complément de l'art. 144? Ces deux << articles ne s'enchaînent-ils pas l'un et l'autre, l'un pour << régler le remplacement du commissaire de police, l'autre << du maire et de l'adjoint? Et la loi, qui paraît impré<< voyante à première vue, dès que l'on rapproche ces <«< deux articles, ne semble-t-elle pas révéler toute sa << pensée? On oppose encore le deuxième paragraphe de « l'art. 144; mais le droit du procureur général est limité « à la désignation du commissaire de police: pourquoi << l'étendre? Où se trouve l'analogie entre le choix d'un << commissaire de police parmi plusieurs du même canton,

« qui ont en eux-mêmes le même principe de compétence, « et l'appel d'un maire d'une autre commune qui puise << toute sa compétence dans ce seul appel? Est-ce la même «< chose de choisir entre deux fonctionnaires compétents, << ou d'attribuer la compétence à un fonctionnaire à qui la «<loi n'en a donné aucune? La délégation peut-elle avoir << un tel effet? Enfin, lorsqu'il s'agit du remplacement des << officiers municipaux, la loi a jugé avec raison que le << procureur impérial, plus près des lieux, mieux à portée << de connaître les personnes et les localités, devait seul << être appelé à faire les désignations nécessaires au ser<< vice; pourquoi ne pas appliquer cette règle posée par «<l'art. 167 et qui est fondée sur une saine entente de <«< l'administration de la justice? Tous les intérêts ne sont<«<ils pas garantis par l'intervention de ce magistrat? En << suivant cette interprétation, on atteint le même but, et << les textes du Code ne reçoivent aucune atteinte. »

Nous avons dit que ces observations ne nous paraissaient point décisives. Elles sont, en effet, balancées par les motifs développés sous ce numéro et sous le numéro précédent. Reconnaissons, toutefois, qu'elles ont une grande force et peuvent laisser, dans plus d'un esprit éclairé, de l'incertitude sur la solution à adopter.

27. L'art. 144 ne déterminant pas la durée des fonctions du commissaire de police désigné par le procureur général pour remplir les fonctions du ministère public auprès du tribunal de police du juge de paix, il en résulte (1) qu'il est loisible au procureur général de lui retirer sa délégation quand le bien du service l'exige, et de la confier à d'autres commissaires de police.

(1) MM. Mangin, n° 100; Morin, Rép. v° Tribunaux de police, n° 7; F. Hélie, t. 7, § 480, p. 123.

DEUXIÈME PARTIE.

De la manière dont le tribunal du juge de paix est saisi; et quel est l'effet de cette saisine, relativement à l'exercice de l'action publique?

SOMMAIRE.

28. Manières dont le tribunal de police du juge de paix peut être saisi, d'après les art. 145 et 147 du Code d'instruction criminelle. 29. Différence entre le cas où le tribunal du juge de paix est saisi par voie de citation, et le cas où il n'y a eu qu'un simple avertissement donné.

30. Différence entre le cas où le tribunal de police du juge de paix est saisi par une citation donnée à la requête du miuistère public, et le cas où il est saisi par une citation donnée à la requête de la partie civile.

31. Renvoi pour la question de savoir si le ministère public est obligé de prendre des conclusions devant les tribunaux de simple police ou devant les tribunaux correctionnels, lorsque ces tribunaux se trouvent saisis à la requête de la partie civile.

32. Autres manières résultant des art. 129, 230 et 192 du Code d'instruction criminelle, et par lesquelles le tribunal de police du juge de paix peut être saisi. Renvoi pour la solution des questions que font naître ces articles, relativement à l'effet de la saisine, quant à l'action publique.

28. Suivant l'art. 145 du Code d'instruction criminelle, les citations pour contraventions de police sont données devant les juges de paix considérés comme juges de police, à la requête du ministère public ou de la partie civile; et, suivant l'art. 147, les parties peuvent comparaître volontairement, et sur un simple avertissement, sans qu'il soit besoin de citation. Telles sont donc les deux premières manières dont le tribunal de simple police du juge de paix est saisi; mais il existe entre les divers cas que nous venons d'énoncer, plusieurs différences.

29. Une première différence existe entre le cas où il y a eu citation, et le cas où il n'y a eu que simple avertissement. S'il y a eu citation, et que la personne citée ne comparaisse pas devant le juge de paix aux jour et heure indiqués par la citation, elle est jugée par défaut (art. 149); tandis qu'il n'existe aucune disposition semblable pour le cas où il n'y a point eu citation, mais seulement avertissement. Au jour marqué pour la comparution, la personne à qui l'avertissement a été donné, ne peut donc être jugée par défaut, faute par elle de comparaitre (1). Il faut la citer, pour obtenir ensuite jugement contre elle (2). Pour éviter cet inconvénient, rien donc n'empêcherait le ministère public de faire citer le prévenu même après que l'avertissement a été donné, et avant le jour indiqué par l'avertissement (3). « L'avertissement, dit M. F. Hélie (t. 7, § 490, « p. 248), dont nulle forme ne certifie l'existence, n'est pas une base assez sûre pour asseoir un jugement que le « défaut d'opposition peut rendre définitif. »

30. Une seconde différence existe, selon nous, entre le cas où la citation a été donnée à la requête du ministère public, et le cas où elle a été donnée à la requête de la partie civile. Si la citation a été donnée à la requête du ministère public, le juge de paix est saisi de l'action publique, quelles que soient ultérieurement les conclusions du ministère public, comme nous l'avons vu au commencement de cette section, n° 17, en expliquant quel

(1) Nous verrons, ci-après, no 345, qu'il en est autrement pour le cas d'avertissement donné par le maire pour comparaitre devant lui.

(2) MM. Bourguignon, Jurisprudence des Codes criminels, sur les art. 147 et 149 du Code d'instruction criminelle; Carnot, n° 2, sur l'art. 143, sur l'art. 147 et sur l'art. 169; Le Graverend, t. 2, p. 317 et 319; Morin, Rép., vo Tribunaux de police, no 34; F. Hélie, t. 7, § 490, p. 248, et § 492, p. 256, no 2; Trébutien, t. 2, p. 526; Rodière, p. 387. Rej., 20 déc., 1860, Dall., 1861, 5, 512; Cass., 1er juill. 1864, Dall., 1864, 1, 455. (3) Cass., 1er juill. 1864, Dall., 1864, 1, 435.

[ocr errors]

est aujourd'hui le sens de l'adage que tout juge est officier du ministère public, et comme cela résultera encore, sous la 3° partie du § 2, et sous la 7° partie du § 4 ci-après, des solutions que nous adopterons sur les questions de savoir: 1° si, dans le cas de citation directe donnée devant les tribunaux correctionnels à la requête de la partie civile, le tribunal est saisi de l'action publique et peut appliquer la peine, sans que le ministère public ait pris, sur la question publique, aucune conclusion; 2° si le ministère public est libre d'arrêter les suites de l'action publique, après l'avoir intentée. Lorsque la citation a été donnée à la requête du ministère public, le juge de paix doit donc, si la personne citée devant lui est reconnue coupable, appliquer la loi pénale; mais, dans cette même hypothèse de citation donnée à la requête du ministère públic, le juge de paix ne peut connaître de la question des dommagesintérêts et n'est saisi de l'action civile qu'autant que la partie lésée s'est portée partie civile.

Au contraire, si la citation n'a été donnée qu'à la requête de la partie civile, et que l'officier du ministère public ne prenne aucune conclusion sur l'action publique, nous croyons que le juge de paix ne serait point saisi de l'action publique (1), ainsi que nous essaierons de l'établir, contrairement à l'opinion générale, pour un cas analogue, celui de citation donnée devant les tribunaux correctionnels à la requête de la partie civile (Voir ci-après, n° 69-72); et comme le juge de paix, considéré comme juge de police, ne peut connaître de l'action civile qu'accessoirement à l'action publique, il s'ensuit qu'il devra, sur la question des dommages-intérêts, renvoyer les parties devant la juridiction civile.

(1) Contrà, notamment, crim., Cass., 17 août 1809, Dall., 20 édit., vo Compétence crim., no 300, en note; 29 fév. 1828, ibid., no 301; et M. Dalloz lui-même, n° 300.

« PreviousContinue »