Page images
PDF
EPUB

SECTION PREMIÈRE.

Des modes d'extinction particuliers à l'action publique.

SOMMAIRE.

328. Division de cette première section.

328. Il existe trois modes d'extinction particuliers à l'action publique. Ces modes sont: 1° la mort du prévenu ou de l'accusé; 2° sa condamnation à une peine plus forte que celle que lui feraient encourir les délits ou les crimes antérieurs à cette condamnation, dans laquelle ils n'étaient pas compris ; 3° l'amnistie.

Nous traiterons de chacun de ces modes d'extinction, dans un paragraphe particulier.

§ I.

De l'extinction de l'action publique par la mort du prévenu ou de l'accusé.

SOMMAIRE.

329. Disposition du § 1er de l'art. 2 du Code d'instruction criminelle, consacrant le principe de l'extinction de l'action publique par la mort du prévenu.

[ocr errors]
[ocr errors]

330. Ce principe consacré à Rome, sauf certaines exceptions. Conséquence de ce même principe, quant à la prohibition des procès à faire au cadavre ou à la mémoire. Dispositions de l'Ordonnance de 1670, sur les dispositions à suivre dans les cas où les procès au cadavre ou à la mémoire pouvaient avoir lieu.

331.Cas dans lesquels l'Ordonnance de 1670 permettait les procès au cadavre, ou à la mémoire.

332. Différences, dans l'ancien droit, entre les procès fails au cadavre, et ceux faits à la mémoire.

333. Motifs qui ont sagement fait supprimer, dans la nouvelle législation, les procès au cadavre ou à la mémoire.

334. Le décès du condamné, postérieurement au jugement prononcé contre lui, anéantit ce jugement en ce qui concerne l'action pu blique, lorsque, au moment du décès, il n'avait pas acquis irrévocablement l'autorité de la chose jugée.

335. Si, dans l'ignorance du décès d'un accusé fugitif, une cour d'assises avait prononcé contre lui un arrêt de condamnation par contumace, elle devrait rapporter cet arrêt, sur la demande des parties intéressées, et sur la preuve du décès de l'accusé, antérieur à l'arrêt. 336. Le principe de l'extinction de l'action publique par la mort du prévenu, s'applique non-seulement en ce qui concerne les peines corporelles, mais encore, en ce qui concerne les amendes. 337. La proposition établie au numéro précédent, est-elle applicable aux amendes prononcées par la loi dans les matières fiscales? 338. Que faut-il décider spécialement à l'égard des amendes en matière de douanes et de contributions indirectes?

339. Jurisprudence des auteurs sur cette dernière question.

340. Jurisprudence de la Cour de cassation sur la même question. Critique de cette jurisprudence, et citation d'arrêts qui peuvent servir à la combattre.

341.Si la condamnation à l'amende avait été prononcée du vivant de l'auteur du crime ou du délit, et que l'auteur de ce crime ou de ce délit fût ensuite décédé sans avoir attaqué le jugement, et après l'expiration des délais fixés pour l'attaquer, le paiement de l'amende pourrait être exigé de ses héritiers.

342. Si, au moment où il est décédé, le condamné avait encore quelque moyen d'attaquer le jugement qui l'a condamné, l'amende ne serait point due par ses héritiers.

343. Les frais déjà faits dans l'intérêt de la vindicte publique, au moment de la mort du prévenu arrivée avant qu'un jugement de condamnation ait été prononcé contre lui, restent à la charge du Trésor public.

344. S'il y avait partie civile en cause et jugement rendu, et que, l'appel étant encore pendant, le condamné vint à décéder, tous les frais seraient à la charge des héritiers du condamné, même

ceux faits par la partie publique, pourvu, toutefois, que le tribunal confirmât le premier jugement.

345. Si, toujours dans l'hypothèse d'une partie civile en cause, le décès du prévenu avait eu lieu avant qu'aucun jugement de condamnation eût été rendu par le tribunal correctionnel ou par le tribunal de simple police, il ne pourrait être prononcé par ces tribunaux sur la question de savoir par qui les frais faits par la partie publique devraient être supportés; mais, les tribunaux civils devant qui la partie civile aurait été renvoyée, devraient comprendre la solution de cette question dans leur jugement sur les dommages-intérêts.

346. Si le décès du condamné n'avait eu lieu qu'après son pourvoi en

cassation, il devrait, à raison des frais compris dans la condamnation, être stalué sur ce pourvoi, lors même que la partie lésée ne serait pas intervenue au procès.

347. La solution établie au numéro précédent, serait, à plus forte raison, applicable si la partie lésée était intervenue au procès.

318. Si le décès du condamné avait lieu après que le jugement est devenu irrévocable, et avant l'exécution de ce jugement, il n'est point douteux que la condamnation aux frais ne dût subsister. 349. Les difficultés élevées dans le cas de la question précédente, comme dans tous les cas où il s'agit de l'exécution quant aux inté rêts civils, d'un jugement rendu par un tribunal criminel, sont de la compétence des tribunaux civils, et non de la compétence des tribunaux criminels.

350. La confiscation d'un objet saisi pour contravention aux lois sur les douanes, ou aux lois sur les contributions indirectes, peut être demandée et poursuivie contre les héritiers du contrevenant, après le décès de celui-ci. Citation, en note, 1° d'un avis du Conseil d'Etat, sur le droit d'enregistrement à payer pour les actes sous seing privé portant transmission d'immeubles, qui sont présentés après l'expiration des délais, par les héritiers des contractants; 2 d'un arrêt décidant que les conclusions prises par la Régie des contributions indirectes, et tendantes à faire prononcer la confiscation d'objets de contravention, ne constituent qu'une vé-· ritable demande en dommages-intérêts.

351. La solution établie au numéro qui précède, doit être appliquée à tous les cas où la confiscation est prononcée en vue de la chose

elle-même, et parce que le délit consiste, en quelque sorte, dans la chose.

352. Elle ne doit pas être appliquée dans les cas où la confiscation n'est qu'une aggravation de la peine personnelle prononcée contre le coupable, et non plus seulement une mesure prise contre la chose.

353. Renvoi pour la proposition établie ailleurs, que la mort de l'auteur principal d'un crime n'éteint l'action publique qu'à son égard, et nullement à l'égard de ses complices.

354. Justification du caractère que nous avons attribué à la mort du prévenu ou de l'accusé, en la plaçant parmi les modes d'extinc tion particuliers à l'action publique.

329. Le principe que l'action publique pour l'application de la peine s'éteint par la mort du prévenu, est consacré textuellement par le premier paragraphe de l'art. 2 du Code d'instruction criminelle.

330. De ce principe, proclamé par la loi romaine (DIG., De publicis judic., 1. 2 (1) et l. 4, COD., si reus vel accusator mortuus fuerit); mais avec certaines exceptions toutefois (1. 20, DIG., De accusat. et inscript.; 1. 1, COD., De bon. eor. qui mortem sibi consciverunt), avant de l'être par nos codes, résulte la conséquence importante qu'on ne peut jamais, aujourd'hui, faire de procès au cadavre d'un défunt, non plus qu'à sa mémoire, ainsi que cela avait lieu, en certains cas, d'après l'Ordonnance de 1670.

Le titre 22 de cette ordonnance renferme les règles qui devaient être suivies dans le cas de procès fait soit au cadavre, soit à la mémoire.

Entre autres dispositions, il ordonnait qu'on nommât un curateur soit au cadavre, si ce cadavre existait, soit à la

(1) Cujas, Observat., lib. 21, cap. 29, prouve que l'expression permittitur, employée par Ulpien dans la 1. 2, doit, dans ce texte, comme dans plusieurs autres, être comprise dans le sens de remittitur, extinguitur. Telle est aussi l'opinion de Pothier, dans ses Pandectes, de Wissenbach et autres.

mémoire du défunt, si le cadavre n'existait plus. S'il se présentait un parent pour remplir ces fonctions, il était préféré (art. 2, tit. 22).

C'était contre ce curateur que le procès était instruit. Son nom était compris dans toute la procédure; mais, la condamnation n'était rendue que contre le cadavre du défunt ou contre sa mémoire (art. 3).

le

331. En règle générale, nous venons de le dire, les procès ne pouvaient être faits au cadavre ou à la mémoire, sous l'Ordonnance de 1670 (art. 1°, tit. 22). Ils ne pouvaient l'être que dans des cas particuliers, spécifiés par même article. Ces cas étaient quelques-uns de ceux de lèse-majesté divine ou humaine (V. le Commentaire de Jousse, sur l'art. 1er de l'ordonnance, et son Traité de la justice criminelle, t. 2, p. 709); ceux de duel et d'homicide de soi-même; mais, dans ce dernier cas, on présumait facilement qu'il y avait eu folie (Jousse, Commentaire sur l'art. 1) enfin, le cas de rébellion contre la justice, avec force ouverte, dans la rencontre de laquelle il (le rebelle) aura été tué, portait l'article premier.

332. Il y avait ces différences entre les procès faits au cadavre, et ceux faits à la mémoire, 1° que les procès au cadavre se faisaient quand il était encore extant (art. 2, tit. 22 de l'ordonnance); si le cadavre n'était plus extant, on faisait le procès à la mémoire ; 2° la condamnation prononcée contre le cadavre, était exécutée (Voir Jousse sur l'art. 3, tit. 22), soit sur le cadavre lui-même, quand il avait pu être conservé, soit, dans le cas contraire, sur une figure factice représentant celle du défunt; au contraire, la condamnation prononcée contre la mémoire, ne se prononçait que AD PERPETUAM REI MEMORIAM, el pour laisser à la postérité, dit Jousse, une note générale et éternelle du crime contre celui qui l'avait commis.

TOME I.

30

« PreviousContinue »