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Nous adopterons la dernière solution de M. Bourguignon, sauf pour le premier des trois cas par lui signalés, et lorsqu'il y a flagrant délit, ainsi que le prévoit aujourd'hui la loi du 20 mai 1863, dont nous parlerons au numéro suivant. Selon nous, si les art. 47, 53 et autres précités du Code d'instruction criminelle tracent la marche qu'il conviendra souvent de suivre, cette marche ne peut être regardée comme obligatoire.

C'est en ce sens qu'est conçue une circulaire adressée par le grand-juge aux procureurs généraux près les cours impériales, sous la date du 23 septembre 1812.

<< Tout ce qui tend à accélérer la marche de la procé« dure criminelle et à diminuer les frais de justice, porte cette circulaire (V. M. Merlin, Répert., t. 11, vo Oppo« sition à une ordonnance, etc...., n° 7, p. 803), doit être l'objet de votre attention particulière. C'est dans ce double but que je vais vous indiquer quelques abus à « prévenir ou à réformer dans le mode d'exécution du Code d'instruction criminelle et du réglement du 18 juin 1811. Lorsqu'une affaire est évidemment de la ❝ compétence du tribunal correctionnel (et il y a beaucoup « de cas où cette compétence n'est pas douteuse), le tribunal peut en être saisi directement soit par la partie civile, s'il y en a une, soit par le procureur du gouverne<ment (art. 182 du Code), sans que le juge d'instruction « soit obligé de procéder à une information préliminaire. « Si le prévenu est arrêté, un simple interrogatoire suffit; tout autre acte de procédure devient inutile et frustratoire. La véritable instruction est celle qui se fait à l'au«dience; et il ne doit pas, ordinairement, s'en faire « d'autre, à moins qu'il n'y ait incertitude soit sur l'existence ou le caractère du délit, soit sur la désignation « des individus qui doivent être cités comme prévenus, ou "comme témoins, ou qu'enfin l'affaire ne soit, à raison de son importance, susceptible de recherches ou de déve«loppements qui exigent une instruction préparatoire.

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<< Ainsi donc, dans la plupart des affaires correction<«<nelles, et à plus forte raison, dans celles de simple police, <«< on peut éviter de parcourir les différents degrés d'ins<«<truction, que le Code a dû indiquer pour des affaires plus <«<importantes. >>

47. Le cas de flagrant délit dont nous avons parlé, au numéro précédent, comme réglé par la loi du 20 mai 1863, a été l'objet de dispositions spéciales ayant pour but d'accélérer, en ce cas, les poursuites. Il résulte notamment de ces dispositions que, dans le cas de flagrant délit, le procureur impérial peut user de la voie de citation directe, tout en ayant cependant le droit de mettre l'inculpé sous mandat de dépôt après l'avoir interrogé.

Cette loi est ainsi conçue :

Art. 1. «Tout inculpé arrêté en état de flagrant délit << pour un fait puni de peines correctionnelles est immé<«<diatement conduit devant le procureur impérial, qui << l'interroge, et, s'il y a lieu, le traduit sur le champ à << l'audience du tribunal. Dans ce cas, le procureur impé<«<rial peut mettre l'inculpé sous mandat de dépôt.

Art. 2. «S'il n'y a point d'audience, le procureur impé<«<rial est tenu de faire citer l'inculpé pour l'audience du << lendemain. Le tribunal est, au besoin, spécialement «< convoqué.

Art. 3. «Les témoins peuvent être verbalement requis << par tout officier de police judiciaire ou agent de la force <«< publique. Ils sont tenus de comparaître sous les peines << portées par l'art. 157 du Code d'instruction criminelle.

Art. 4. «Si l'inculpé le demande, le tribunal lui accorde << un délai de trois jours au moins pour préparer sa défense.

Art. 5. « Si l'affaire n'est pas en état de recevoir juge«ment, le tribunal en ordonne le renvoi, pour plus ample << information, à l'une des plus prochaines audiences, et, << s'il y a lieu, met l'inculpé provisoirement en liberté, avec

<< ou sans caution.

Art. 6. «L'inculpé, s'il est acquitté, est immédiatement, « et nonobstant appel, mis en liberté.

Art. 7. « La présente loi n'est point applicable aux délits de presse, aux délits politiques, ni aux matières « dont la procédure est régie par des lois spéciales. »

48. Le tribunal correctionnel saisi directement par le procureur impérial, pourrait-il, s'il jugeait utile d'ordonner une instruction préalable, renvoyer à cet effet devant le juge d'instruction?

Un arrêt de la Cour royale de Paris avait décidé que le renvoi ne pouvait avoir lieu, dans une espèce où le tribunal avait été saisi par une citation directe donnée à la requête de la partie civile. Cet arrêt a été cassé par arrêt du 18 juin 1824 (Bull. n° 81). La Cour de cassation a déclaré que la Cour de Paris avait donné à l'art. 182 une extension qu'il ne comporte pas pour son exécution dans l'intérêt de la justice, et avait fait, dès lors, une fausse application de cet article.

Depuis, et dans la même année, la question s'est présentée telle que nous l'avons posée, et dans une espèce où la citation directe avait été donnée à la requête du ministère public. La Cour de cassation l'a décidée formellement dans le sens de la négative, par arrêt du 18 novembre (Bull. n° 165), rendu conformément au réquisitoire du procureur général, qui s'était pourvu par ordre du garde des sceaux, dans l'intérêt de la loi.

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<< -5° Le jugement rendu par le tribunal (de Cayenne), « le 2 janvier 1824, par lequel, considérant, entre autres << motifs, que, pour connaître la nature du délit, il faut « qu'il ait été procédé à l'instruction soit par le juge d'ins«truction, soit par le juge de paix, ou devant le tribunal; mais, comme le tribunal ne pourrait pas prononcer, dans « le cas où les faits ne présenteraient qu'une contraven❝tion de police, puisque le renvoi a été demandé par le

<<sieur Anfray à la simple police, ledit tribunal, vu les «< art. 130, 160 et 192 du Code d'instruction criminelle, << a renvoyé l'affaire devant le jugé d'instruction, pour <«< être, sur son rapport, statué par le tribunal, après les << actes d'instruction préalable, ce que de droit sur la com<< pétence et sur la nature du délit, dépens réservés; «6° L'arrêt de la Cour royale de la Guyane française, << séant à Cayenne, du 9 dudit mois de janvier, par lequel << ladite Cour, sans adopter les motifs des premiers juges, <«<a, néanmoins, confirmé le jugement de première instance << par les motifs que l'art. 182 du Code d'instruction cri<< minelle, en donnant au ministère public le droit de saisir <«<directement le tribunal de police correctionnelle, n'a << point interdit à cette autorité judiciaire la faculté de << renvoyer devant qui de droit, pour que l'affaire qui lui <«< est soumise subisse une instruction préliminaire; qu'il <«<est de principe qu'en matière de compétence les tribu<«<naux jouissent de la plus grande latitude et de la plus << grande liberté; que ce principe est consacré de la ma<«<nière la plus implicite par l'art. 182, qui ne contient << aucune disposition impérative pour le tribunal; qu'ainsi << on doit décider que, lorsque le ministère public ou la << partie civile a saisi par action directe le tribunal de police << correctionnelle, le législateur a voulu que le tribunal «< pesât dans sa justice et dans sa sagesse, s'il convenait «de s'attribuer de suite juridiction, ou de renvoyer devant «<le juge chargé de l'instruction; -Vu encore, etc.

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<«<- Attendu que, par la citation donnée à la requête du << procureur du roi près le tribunal de police correction<< nelle séant à Cayenne, au sieur Anfray prévenu d'avoir <«< injurié et outragé le sieur Brun à l'occasion de fonctions << qu'il avait exercées dans le conseil du gouvernement de <«<la Guyane française, le tribunal de Cayenne avait été <«<légalement saisi, conformément à l'art. 182 du Code

« d'instruction criminelle, de la connaissance des faits de la citation, ainsi que des exceptions et incidents qui « pourraient être proposés ou s'élever au cours de l'instance; -Que, sur l'exception d'incompétence proposée par le sieur Anfray, et sur sa demande en renvoi devant les juges de police simple, il était du devoir du tribunal de Cayenne d'examiner et de juger soit d'après la nature des faits de la citation, soit, dans le cas de doute, ⚫ d'après l'audition des témoins qui déjà étaient assignés « devant lui, et les débats, s'il était ou non compétent : « dans le cas de l'affirmative, de statuer sur le fond; et, << dans celui contraire, de renvoyer l'affaire et les parties « devant les juges qui devaient en connaître; — Qu'au << lieu de suivre cette marche, qui était tracée par les * art. 130, 160, 182, 190, 191 et 192 du Code d'instruc<tion criminelle, le tribunal de Cayenne s'est cru obligé « à renvoyer l'affaire devant le juge d'instruction, pour, « sur son rapport, et d'après les actes d'instruction préalables, être par le tribunal statué ainsi qu'il appartiendrait, soit sur la compétence, soit sur la nature du délit; «Que, sur l'appel interjeté, par le procureur général, « de cette décision abusive, la Cour royale de la Guyane française, sans en adopter les motifs erronés, a conclu « de ce que les tribunaux correctionnels ont le droit de se « déclarer incompétents, qu'ils ont celui de suspendre << soit leur décision sur la compétence, soit l'examen du fond, et d'ordonner le renvoi devant le juge d'instruction, et qu'elle a prononcé en conséquence; Que « cette décision n'est pas moins contraire aux dispositions de l'art. 128 du Code d'instruction criminelle, que le jugement dont était appel, puisque, selon cette loi, le tribunal de police correctionnelle, saisi directement par << une citation, soit du ministère public, soit de la partie « civile, ne peut se refuser à prononcer sur le fond de «l'affaire, qu'en déclarant son incompétence; Que « l'arrêt qui consacre ce système, viole expressément les

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