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>> officiers se conduisent généralement bien... J'es» père, mon cher maréchal, que nous verrons » bientôt la fin de cette folle entreprise, surtout >> si nous mettons beaucoup de célérité et d'en>> semble dans la marche des troupes. >>

>> Ici l'on adjure les ennemis même du maréchal, d'après cet appel à des auxiliaires aussi estimables, par lequel il pressait de tant de voeux la jonction de leurs troupes aux siennes d'après l'opinion que, le 13 mars, il énonçait encore sur la tentative de Buonaparte, y a-t-il moyen de douter de la fidélité que, ce jour-là, le maréchal gardait encore au roi? A quel propos, s'il eût eu dès-lors la pensée de trahir, eût-il écrit dans des termes si contraires aux intérêts de Buonaparte, si propres à dissuader de prendre aucune confiance dans l'issue de ses efforts? Mais si, avant que les dépêches eussent pu être reçues à quarante ou cinquante lieues de distance, la conduite du maréchal avait dû en démentir le contenu, à quoi bon ce ridicule stratagème?

que,

» Était-elle douteuse la foi du maréchal, alors dans la même journée du 13 mars, à Lonsle-Saulnier, en présence du chef d'escadron de la gendarmerie, il ordonnait à deux gendarmes déguisés d'aller épier la marche de Buonaparte?

» Lorsqu'au même moment, il indiquait une

foule de dispositions à faire des troupes, au marquis de sauran, accouru vers lui, et qui repartait avoir de Monsieur des nouvelles attendues avec une anxiété inexprimable ?

pour

» Avait-il chancelé, alors qu'en toutes rencontres, à tous les instans, il exhortait hautement, autour de lui, officiers et soldats à demeurer fidèles?

Alors qu'il menaçait de faire fusiller la première vedette qui aurait communication avec celles de l'ennemi ?

>> Alors qu'il faisait arrêter un des officiers de sa troupe les plus exaltés, et qu'il ordonnait au lieutenant-général Bourmont de l'envoyer à la citadelle de Besançon?

>> Alors qu'il s'efforçait de composer des masses pour opposer une barrière respectable, écrivant au lieutenant-général Heudelet, toujours le 13 mars: << Il faut éviter de faire de petits détachemens : » réunissez à Châlons toutes les troupes sous vos » ordres. Il serait bien que vous vous y rendissiez » de votre personne, ou qu'au moins vous vous » y fissiez remplacer par un maréchal-de-camp >> ferme et intelligent. Envoyez à Auxonne les

dépôts, magasins et effets inutiles. Je dirige le » 6e. de hussards sur cette place, où il serait éga>>lement à désirer que vous pussiez paraître un >> instant, afin de rassurer les esprits, et de vous

>> convaincre, d'accord avec le général Pellegrin, >>> si tous les moyens de défense sont sagement » combinés. Faites-moi connaître ce que je puis >> tirer d'artillerie et de munitions de cette place, >> afin que rien ne puisse me manquer, lorsque je » serai en mesure de prendre l'offensive.

» Surveillez bien le cours de la Saône jusqu'à » Villefranche; écrivez à M. le comte Germain, préfet, pour l'inviter à me tenir exactement in» formé de tout ce qui peut intéresser le bien » du service du roi, etc., etc. »>

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» C'est donc un point bien avéré, qu'encore au 13 mars, le maréchal Ney, de cœur et d'intention, servait loyalement la cause du roi qu'il avait embrassée avec chaleur; qu'il ne lui était pas venu une minute en l'esprit de seconder le parti de Buonaparte; qu'il l'avait, au contraire, sans cesse contenu, comprimé, affaibli et mis en péril, par tout ce qu'il avait pu imaginer de tactique, de .ressources, de combinaisons.

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que ce que

le

Maintenant, comment s'est-il fait maréchal Ney était si loin de vouloir le 13 mars, il l'ait consenti et exécuté le lendemain 14?

>> Il faut le dire franchement, jamais concours d'événemens plus extraordinaires, plus imprévus, ne se forma pour venir ébranler les résolutions de l'homme le plus fermement attaché à ses devoirs.

Ils ont été bien impérieux, bien irrésistibles, puisqu'ils ont donné tout à coup, aux yeux du maréchal, la teinte de la nécessité et du salut de la patrie, à de fausses et trompeuses apparences.

» On a vu déjà, par sa lettre au maréchal Oudinot, que le maréchal Ney n'apercevait pas sans inquiétude, quoique à soixante lieues de Buonaparte, la rapidité de sa marche : pourtant il n'était pas témoin des causes qui l'accéléraient; il lui était réservé d'en juger malheureusement, à mesure qu'approchait la masse, incessamment grossie, de cet envahisseur.

» Jusque-là le maréchal n'avait entrevu dans la défection partielle de quelques corps, que des principes de désordre, à la vérité dangereux, mais qu'il croyait pouvoir arrêter dans leur cours. Il ignorait encore à quel degré de fermentation toutes les têtes étaient montées; ce qu'avait produit de faux enthousiasme l'entrée, sans coup férir, de Buonaparte dans Lyon.

» Tout à coup, dans la soirée du 13 mars, il apprend, par le préfet de l'Ain, que le bataillon du 76., qui lui servait d'avant-garde à Bourg, avait passé tout entier à l'ennemi ;

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Que les deux autres bataillons du même corps gardaient à vue le général Gautier, leur chef.

» Il apprend que le peuple insurgé de Châlons

sur-Saône s'est emparé d'un train d'artillerie tiré d'Auxonne, sur lequel il comptait, après avoir maltraité les canonniers et les soldats du train.

» Il apprend que la gendarmerie elle-même, ce corps > ordinairement si sûr, fléchit de tous côtés ;

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Qu'à Lyon et en deçà, tout le peuple, les habitans des campagnes surtout, se lèvent en foule, pour être témoins de l'apparition de Buonaparte, comme d'une chose miraculeuse, et pour y applaudir;

› Que l'impulsion est donnée à tous les corps. armés, séduits, électrisés par ces mouvemens populaires, et par l'exemple de leurs camarades qui les premiers se sont rendus.

>> Des détails lui parviennent sur cette inconcevable immobilité des troupes dans Lyon, en présence du prince auguste et du maréchal, si respecté naguère, qui les commandaient.

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Déjà Châlons est occupé par Buonaparte. >> Autun est insurgé.

>> Cet esprit d'insurrection a gagné jusqu'à Dijon. Le 13, on y a pris la cocarde tricolore: des groupes nombreux parcourent la ville en criant, vive l'empereur! La gendarmerie et les troupes refusent de les réprimer.

» Ainsi, à la hauteur de Lons-le-Saulnier, où se

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