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celles consignées en la présente requête. Sans préjudice de tous autres droits, fins de non-recevoir, et exceptions que je me réserve de proposer et faire valoir au besoin, et ainsi que j'aviserai convenable.

» Signé, le maréchal, prince de la Moscowa, ex-pair de France, NEY.

Le maréchal, prince de la Moscowa', aux ambassadeurs des quatre grandes puissances alliées.

«Excellence,

» C'est à la dernière extrémité, au moment où les circonstances critiques où je me vois réduit ne me laissent plus que de trop faibles moyens d'éviter l'éclat et les terribles dangers d'une accusation de crime de haute trahison, que je prends la résolution de vous adresser un recours légitime dont voici l'objet :

>>> Je suis traduit en la chambre des pairs en vertu d'une ordonnance rendue par le Roi, le 11 de ce mois, et à la suite d'un discours adressé à cette chambre par M. le président des ministres de Sa Majesté. Cette dénonciation imposante, et les considérations qui la motivent, sont de nature à me donner de justes craintes.

>> Entre autres motifs de me faire mon procès,

j'ai lu avec étonnement dans ce discours, «< que » c'était même au nom de l'Europe que les minis>> tres venaient conjurer la chambre et la requérir » de me juger. »

» Une telle déclaration, souffrez que je l'observe, est inconciliable avec ce qui s'est passé à ces dernières époques de l'agitation de la France. Je ne conçois pas comment on ferait intervenir les augustes alliés dans cette procédure criminelle, tandis que leur magnanimité s'est généreusement occupée du soin de m'en garantir, et qu'une convention formelle, sacrée, inviolable, existe à ce sujet.

Daignez vous le rappeler, par le traité de Paris du 30 mai 1814, les hautes parties contractantes ávaient formé alliance avec S. M. Louis XVIII. Apprenant à Vienne, le 13 mars dernier, que la cause de la légitimité en France était menacée par le retour de Buonaparte, elles arrêtèrent le pacte solennel de ce jour, 13 mars, avec les ministres au congrès de Sa Majesté Très - Chrétienne. Dans ce pacte, les souverains alliés déclarèrent « qu'ils » étaient prêts à donner au Roi de France et à » la nation française les secours nécessaires pour >> rétablir la tranquillité publique, et à faire cause » commune contre ceux qui entreprendraient de >> la troubler. >>

» Dans celui confirmatif du 25 du même mois de mars, les hautes puissances s'engagèrent solennellement à réunir toutes leurs forces pour maintenir dans toute leur intégrité les conditions du traité de Paris contre les plans de Buonaparte; elles se promirent d'agir en commun. Elles réglèrent les contingens respectifs qu'elles se proposaient de faire marcher contre l'ennemi

commun.

» Enfin, Sa Majesté Très-Chrétienne fut invitée à donner son assentiment aux mesures ci-dessus, dans le cas où elle aurait besoin des troupes auxiliaires qui lui étaient promises, etc.

» Il résulte clairement, de ces diverses stipulations, que toutes les armées de l'Europe indistinctement ont été les auxiliaires du Roi de France, qu'elles ont combattu dans son intérêt direct pour la soumission de tous ses sujets.

>> Bientôt la victoire s'est décidée en faveur des armes anglaises et prussiennes, réunies aux champs de Waterloo, et les a amenées sous les murs de Paris.

» Là restait, pour s'opposer à leurs progrès ultérieurs, un corps d'armée française qui pouvait vendre chèrement sa vie. On négocia, et le 3 juillet fut signée entre les deux parties une convention dont l'article 12 porte :

« Seront pareillement respectées les personnes » et les propriétés particulières; les habitans, et, en » général, tous les individus qui se trouvent dans la » capitale continueront à jouir de leurs droits et li» berté, sans pouvoir être inquiétés ni recherchés en » rien, relativement aux fonctions qu'ils occupent » ou auront occupées, à leur conduite et à leurs » opinions politiques. »

>> Cette convention a été depuis ratifiée par chacun des souverains alliés, comme étant l'ouvrage des deux puissances premières déléguées par le fait. Elle a acquis ainsi toute la force que le droit sacré des nations, le droit naturel et des gens, pouvaient leur imprimer. Elle est devenue l'inaltérable sauve-garde de tous ceux des Français que le malheur des troubles aurait laisser exposés au ressentiment, même légitime, de leur prince.

pu

» Sa Majesté Très-Chrétienne y a positivement accédé elle-même en entrant dans sa capitale : plus d'une fois elle a invoqué l'imposante autorité de ce contrat politique comme d'un acte indivisible dans toutes ses parties.

>>> Maintenant, Excellence, peut-il être douteux que je ne sois fondé, comme l'un des particuliers pour qui on a stipulé, à revendiquer le bénéfice de l'article 12, et la religieuse exécution des garanties qui y sont exprimées ?

» J'ose, en conséquence, requérir expressément de votre ministère et de la puissance auguste au nom de laquelle vous l'exercez, que vous fassiez cesser à mon égard toute procédure criminelle pour raison des fonctions que j'ai remplies au mois de mars 1815, de ma conduite et de mes opinions politiques.

» Mon état d'isolement et d'abandon est une raison de plus pour déterminer Votre Excellence à venir à mon secours, et à me faire jouir, par sa puissante médiation, du droit qui n'est acquis.

» Si je ne m'étais pas aveuglément reposé sur la parole de tant de souverains, j'aurais été en quelque terre inconnue me faire oublier. C'est cette parole auguste et sainte qui a causé ma sécurité: pourrait-elle être trompée? Je ne puis le croire, et j'attends avec confiance de votre loyauté que vous m'accorderez votre prompte intervention. » Signé NEY.>>

Note.

Lord Wellington a dit, dans sa lettre en réponse à la réclamation pour la protection acquise par la capitulation de Paris, que le but de l'article 12 était d'empêcher aucun acte de sévérité sous l'autorité de ceux qui l'avaient fait; mais qu'il n'avait

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