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ont été enfin retirées, celles qui vous sont communiquées, nous ont été présentées comme un ultimatum, et les considérations les plus urgentes et les plus impérieuses nous ont fait une loi d'y souscrire.

Ces demandes sont certainement la partie la plus onéreuse, la plus dure et la plus pénible des stipulations que nous avons eu à discuter; et il suffit qu'on sache qu'elles ont été proposées à des Français, pour qu'on doive en conclure que la nécessité, et la nécessité la plus indispensable, a pu seule les déterminer à y souscrire. Mais si, à l'exemple du Roi, que nous avons entendu, Messieurs, à l'ouverture de votre session, avec cet accent de franchise et de bonté qui sont les traits les plus saillans de son noble caractère, vous exprimer la profonde douleur dont son cœur est pénétré; si, dis-je, il peut nous être permis de rendre compte devant vous, et à la face de l'Europe, des impressions que nous aurons ressenties, je dirai qu'arrivés à cette période de la négociation la plus épineuse qui ait jamais exercé le zèle et éprouvé le dévouement des serviteurs d'un Roi malheureux, après avoir épuisé tous les moyens de discussion et de résistance que pouvaient suggérer la raison et cette politique prévoyante qui, dans la bonne comme dans la mauvaise fortune, devrait être la règle constante de la conduite des cabinets; voyant, d'une part, dans les dispositions des ministres des Puissances une détermination invariablement arrêtée; voyant, de l'autre, que la crise actuelle mettait incessamment en action sur l'étendue de la France le principe d'une oppression, d'un appauvrissement, d'une irritation, et enfin une suite de dévastations qui semblaient tous les jours s'accroître et prendre de nouvelles forces, nous avons jugé que si nous laissións cette crise se prolonger indéfiniment, il y allait du sort de la France, du sort même de ceux qui nous ont imposé de si grands sacrifices, et peut-être de la destinée de l'ordre social en Europe.

Et c'est à la vue de tant de dangers que, sacrifiant sans

hésiter toutes nos répugnances, nous avons accepté, au nom du Roi, au nom de la patrie, les conditions qui vous sont présentées.

RICHELIEU.

TENEUR DU TRAITÉ.

AU NOM DE LA TRÈS-SAINTE ET INDIVISIBLE TRINITÉ.

LES Puissances alliées ayant, par leurs efforts réunis et par le succès de leurs armes, préservé la France et l'Europe des bouleversemens dont elles étaient menacées par le dernier attentat de Napoléon Buonaparte, et par le système révolu tionnaire reproduit en France pour faire réussir cet attentat;

Partageant aujourd'hui avec Sa Majesté Très-Chrétienne le desir de consolider par le maintien inviolable de l'autorité royale et la remise en vigueur de la charte constitutionnelle, l'ordre de choses heureusement rétabli en France, ainsi que celui de ramener entre la France et ses voisins ces rapports de confiance et de bienveillance réciproques que les funestes effets de la révolution et du système de conquête avaient troublé pendant si long-temps;

Persuadés que ce dernier but ne saurait être atteint que par un arrangement propre à leur assurer de justes indemnités pour le passé et des garanties solides pour l'avenir,

Ont pris en considération, de concert avec S. M. le Roi de France, les moyens de réaliser cet arrangement; et ayant reconnu que l'indemnité due aux Puissances ne pouvait être ni toute territoriale, ni toute pécuniaire, sans porter atteinte à l'un ou à l'autre des intérêts essentiels de la France, et qu'il serait plus convenable de combiner les deux modes, de manière à prévenir ces deux inconvéniens, LL. MM. II. et RR. ont adopté cette base pour leurs transactions actuelles; et se trouvant également d'accord şur celle de la nécessité de conserver pendant un temps

déterminé, dans les provinces frontières de la France, un certain nombre de troupes alliées, elles sont convenues de réunir les différentes dispositions fondées sur ces bases, dans un traité définitif.

Dans ce but, et à cet effet, S. M. le Roi de France et de Navarre, d'une part, et S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème, pour elle et ses alliés, d'autre part, ont nommé leurs plénipotentiaires pour discuter, arrêter et signer ledit traité définitif, savoir :

S. M. le Roi de France et de Navarre,

Le sieur Armand-Emmanuel du Plessis Richelieu, Duc de Richelieu, Chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, et des ordres de Saint-Alexandre Newsky, Saint-Wladimir et Saint-Georges de Russie, Pair de France, premier Gentilhomme de la chambre de SA MAJESTÉ Très-Chrétienne, son Ministre et Secrétaire d'état des affaires étrangères, et Président du Conseil de ses Ministres ;

Et S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème,

Le sieur Clément-Wenceslas-Lothaire Prince de Metternich-Winnebourg-Ochsenhausen, Chevalier de la Toison d'or, Grand'croix de l'ordre royal de Saint-Étienne, Chevalier des ordres de Saint-André, de Saint - Alexandre Newsky et de Sainte-Anne de la première classe, Grandcordon de la Légion d'honneur, Chevalier de l'ordre de l'Éléphant, de l'ordre suprême de l'Annonciade, de l'Aigle noir et de l'Aigle rouge, des Séraphins, de Saint-Joseph de Toscane, de Saint-Hubert, de l'Aigle d'or de Wurtemberg, de la fidélité de Bade, de Saint-Jean-de-Jérusalem, et de plusieurs autres; Chancelier de l'ordre militaire de Marie-Thérèse, Curateur de l'Académie des beaux-arts, Chambellan, Conseiller intime actuel de S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème, son Ministre d'état, des conférences et des affaires étrangères,

Et le sieur Jean-Philippe Baron de Wessenberg, Grand'croix de l'ordre royal de Saint-Étienne, Chevalier Grand'croix de l'ordre militaire et religieux des Saints-Maurice et Lazare, Grand'croix de l'ordre de l'Aigle rouge de Prusse, de celui de la Couronne de Bavière, de Saint-Joseph de Toscane et de la fidélité de Bade, Chambellan et Conseiller intime actuel de S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème ;

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Lesquels, après avoir échangé leurs pleins-pouvoirs trouvés en bonne et due forme, ont signé les articles suivans:

er

ART. 1. Les frontières de la France seront telles qu'elles étaient en 1790, sauf les modifications de part et d'autre qui se trouvent indiquées dans l'article présent.

1. Sur les frontières du nord, la ligne de démarcation restera telle que le traité de Paris l'avait fixée, jusque visà-vis de Quiévrain; de là elle suivra les anciennes limites des provinces belgiques, du ci-devant évêché de Liége et du duché de Bouillon, telles qu'elles étaient en 1790, en laissant les territoires enclavés de Philippeville et Marienbourg, avec les places de ce nom, ainsi que tout le duché de Bouillon, hors des frontières de la France; depuis Villers près d'Orval (sur les confins du département des Ardennes et du grand duché de Luxembourg) jusqu'à Perle, sur la chaussée qui conduit de Thionville à Trèves, la ligne restera telle qu'elle avait été désignée par le traité de Paris. De Perle elle passera par Launsdorf, Wallwich, Schardof, Niederveiling, Pellweiler, tous ces endroits restant avec leurs banlieues à fa France, jusqu'à Houvre, et suivra de là les anciennes limites du pays de Sarrebruck, en laissant Sarre-Louis et le cours de la Sarre, avec les endroits situés à la droite de la ligne cidessus désignée et leurs banlieues, hors des limites françaises. Des limites du pays de Sarrebruck, la ligne de démarcation sera la même qui sépare actuellement de l'Allemagne les départemens de la Moselle et du Bas-Rhin, jusqu'à la Lauter,

qui servira ensuite de frontière jusqu'à son embouchure dans le Rhin. Tout le territoire sur la rive gauche de la Lauter, y compris la place de Landau, fera partie de l'Allemagne ; cependant la ville de Weissembourg, traversée par cette rivière, restera toute entière à la France, avec un rayon sur la rive gauche n'excédant pas mille toises, et qui sera plus particulièrement déterminé par les commissaires que l'on chargera de la dé limitation prochaine.

2.° A partir de l'embouchure de la Lauter, le long des départemens du Bas-Rhin, du Haut-Rhin, du Doubs et du Jura, jusqu'au canton de Vaud, les frontières resteront comme elles ont été fixées par le traité de Paris. Le thalweg du Rhin formera la démarcation entre la France et les États de l'Allemagne; mais la propriété des îles, telle qu'elle sera fixée à la suite d'une nouvelle reconnaissance du cours de ce fleuve, restera immuable, quelques changemens que subisse ce cours par la suite du temps. Des commissaires seront nommés de part et d'autre par les hautes parties contractantes, dans le délai de trois mois, pour procéder à ladite reconnaissance. La moitié du pont entre Strasbourg et Kehl appartiendra à la France, et l'autre moitié au grand duché de Bade.

3.° Pour établir une communication directe entre le canton de Genève et la Suisse, la partie du pays de Gex bornée à l'est par le lac Léman, au midi par le territoire du canton de Genève, au nord par celui du canton de Vaud, à l'ouest par le cours de la Versoix et par une ligne qui renferme les communes de Collex-Bossy et Meyrin, en laissant la commune de Ferney à la France, sera cédée à la confédération helvétique, pour être réunie au canton de Genève. La ligne des douanes françaises sera placée à l'ouest du Jura, de manière que tout le pays de Gex se trouve hors de cette ligne.

4. Des frontières du canton de Genève jusqu'à la Méditerranée, la ligne de démarcation sera celle qui, en 1799, séparait la France de la Savoie et du comté de Nice. Les rapports que le traité de Paris de 1814 avait rétablis entre la

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