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Comité d'Études historiques et scientifiques de l'Afrique Occidentale française (1916-1925)

Après l'année 1915 plusieurs tentatives de groupements intellectuels avaient été faites en Afrique Occidentale Française. La plus sérieuse fut la création de la Société de Géographie de Dakar. Malheureusement la durée de cette société fut à peu près celle de certains insectes de ce pays, qui se cassent les ailes à leur premier vol et que, pour cette raison, on appelle des éphémères.

Quelques réunions eurent lieu, quelques numéros d'un Bulletin furent publiés, puis surgirent les difficultés qui guettent toutes les entreprises coloniales de ce genre: manque de copie, diminution des moyens financiers, départ prématuré de l'animateur, effritement rapide de

REVUE DE L'HIST. DES COLONIES.

l'appui officiel promis... Et presque aussitôt ce fut l'hésitation, la débâcle, l'oubli.

Du temps passa.

Lorsqu'il fut installé à Dakar, le Gouverneur Général Clozel, qui avait le goût des beaux livres, des belles choses, des études désintéressées, sans négliger pour cela les fondations d'utilité immédiate, songea à réaliser un projet en l'air depuis plusieurs années: la constitution d'un groupement intellectuel officiel destiné « à coordonner les recherches entreprises en Afrique Occidentale Française et à en faciliter la publication ». Cet organisme, créé par un arrêté du 15 décembre 1915, reçut le nom de Comité d'Études historiques et scientifiques de

l'A. O. F.

Il est intéressant de noter que, pour assurer au Comité une marche plus rapide, M. Clozel ne le dota que d'un règlement exceptionnellement souple, presque vague; une seule décision possible, celle du Gouverneur Général, Président; un seul moteur, le dévouement des membres résidant à Dakar. C'était un peu mettre à la voile avec la certitude d'avoir toujours vent arrière. Sans doute, cette prévision s'est réalisée jusqu'ici, mais le vent a souvent molli.

La Présidence d'honneur du Comité avait été offerte au Général Galliéni et au Gouverneur Général Roume, deux hommes qui, dans la direction d'une colonie, avaient eu le souci de réserver une place aux manifestations du savoir, à côté des préoccupations du négoce et de la politique.

Les membres, nommés par le Gouverneur Général, sont répartis en trois catégories, purement géographiques, d'après leur résidence, mais aucune hiérarchie n'existe entre eux. Sans doute les membres qui habitent Dakar ou sont de passage dans cette ville forment seuls une Commission Permanente, qui délibère sur les questions con

cernant la vie du Comité, mais cette prérogative n'est pas attachée à la personne; elle disparaît dès qu'on quitte la capitale de l'A. O. F.

A part quelques tentatives brèves -et infructueuses — entreprises dans divers domaines intellectuels, l'activité du Comité a toujours été ramenée, en fait, à un seul objet la publication de travaux concernant l'Afrique Occidentale. De ce côté du moins, grâce à la bienveillance des Gouverneurs Généraux, il a pu arriver à des résultats intéressants, surtout si l'on songe à la médiocrité des moyens dont il disposait.

Les documents publiés sont, en principe:

1° Des articles ou mémoires originaux se rapportant exclusivement à l'Afrique Occidentale;

2o Une bibliographie de tous les travaux historiques et scientifiques concernant l'Afrique Occidentale ;

3° Les actes du Comité.

Ces derniers, limités à peu près aux procès-verbaux de la Commission Permanente, forment chaque année la matière de quelques pages seulement.

La bibliographie des travaux relatifs à l'Afrique Occidentale est surtout faite par les membres de la Commission Permanente. Il est évident qu'elle n'est pas complète, mais malgré les lacunes inévitables dans certains domaines, elle fournit une grosse documentation. C'est ainsi que de 1916 à 1925 inclus, plus de 2.000 travaux ont été signalés et, le plus souvent, analysés.

Quant aux articles ou mémoires originaux publiés, ils se rapportent aux sujets historiques et scientifiques les plus variés, un peu au hasard de la collaboration offerte et des tendances du moment. Il faut signaler toutefois, à côté de cette dispersion des sujets, la présentation, déjà commencée, d'une série d'articles groupés sous le titre

générique d' « État actuel de nos connaissances sur..... » et dans lesquels est résumée toute la documentation relative à la matière traitée. Les sujets déjà présentés sous cette forme se rapportent au sous-sol, au sol, à l'atmosphère, à la préhistoire, au magnétisme, à la cartographie, au coton chez les noirs. Un autre travail, relatif à l'histoire générale de l'Afrique Occidentale, est actuellement en préparation.

La forme sous laquelle sont présentés au public ces différents travaux a varié dans le temps. A l'origine ils étaient groupés en un volume paraissant annuellement, mais, à partir de 1918, l'Annuaire fut remplacé par un Bulletin trimestriel, de 160 à 200 pages par numéro. A côté de ce Bulletin, mais d'une façon irrégulière, sont publiés, sous le patronage du Comité, des mémoires originaux dont le développement est trop important pour qu'ils puissent être insérés dans le Bulletin. Ils en sont en quelque sorte le complément.

Ainsi, au total, les publications du Comité d'Études représentent un ensemble de documentation considérable. Celle-ci est d'ailleurs très complète, puisque les analyses bibliographiques forment avec les articles originaux une chaîne continue. L'ensemble donne, par surcroît, la physionomie très exacte du mouvement intellectuel relatif à l'Afrique Occidentale.

Au moment où le Comité présente la première table décennale de son Bulletin1, il était sans doute tentant d'essayer de montrer cette physionomie. Le présent article a cependant un but beaucoup plus modeste. Il se propose d'indiquer simplement la contribution apportée par le Comité dans le domaine de l'histoire au cours des

1. E. Larose, éditeur, Paris, 1927.

dix premières années de son existence (1916-1925), et, pour cela, de passer rapidement en revue ceux des travaux publiés par ses soins qui se rattachent plus particulièrement à cette discipline.

La Préhistoire.

Bien que la Préhistoire soit surtout du domaine de l'Anthropologie, elle est également de nature à toucher l'historien de l'Afrique Occidentale, au moins lorsqu'il entend s'occuper des sociétés indigènes.

Si l'on considère qu'elle englobe la totalité des temps pour lesquels l'activité humaine antérieure ne se traduit à nos yeux que par quelques vestiges matériels laissés sur le sol, sans qu'aucune tradition soit parvenue jusqu'à nous au sujet de ces derniers, on peut dire que, pour l'Afrique occidentale, la préhistoire est marquée par trois stades différents: paléolithique, néolithique et mégalithique 1.

Je dis stades, plutôt qu'époques, parce que, si, dans l'ensemble, ils marquent bien une succession chronologique de techniques et d'aptitudes, il n'y a aucun synchronisme nécessaire avec des divisions correspondantes en Europe, par exemple. Il n'y a pas davantage synchronisme pour les différentes régions de l'Afrique Occidentale; bien mieux, l'étude de nombreux gisements montre

1. Afin de ne pas alourdir le texte, on se bornera à indiquer ici le nom des auteurs et la place dans le Bulletin des articles, sans mentionner les titres. Pour la Préhistoire, en dehors des auteurs cités plus loin, il convient de rappeler les noms de MM. Boutonnet (1916), Hubert. Laforgue et Vanelsche (1921, p. 371), Laforgue (1924, pp. 223 et 449: 1925, p. 105), Laforgue et Saucin (1923, p. 105), de Zeltner (1924 pp. 447 et 615).

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