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Au milieu des guerres si fréquentes de cette époque tourmentée, alors que l'Ajoie fut, nombre de fois, le théâtre d'hostilités sanglantes, il n'est pas étonnant que l'incendie, ou tout autre désastre, fit abandonner Buratte, pour le village voisin, bien plus important, de Bure, qui était chef-lieu d'une mairie.

Cependant si, dès cette époque, Buratte disparaît comme village distinct, son souvenir n'est pas perdu, et nous voyons plusieurs de ses ressortissants, établis à Porrentruy, honorer la localité dont ils ont gardé le nom.

C'est ainsi que, dans un acte du 16 avril 1359 (1) « Cuenin » de Buratte, bourgeois de Porrentruy, du consentement » de Richard, curé de l'église paroissiale de cette ville, >> fonde une chapellenie dans l'église de St-Pierre au dit » lieu, devant le chancel de cette église, sous le crucifix, à >> droite, en entrant dans le chœur. Cette chapellenie est » fondée en l'honneur de St-Nicolas, pour le remède de >> l'âme du fondateur et de son épouse Viette. Elle est dotée » d'une rente annuelle de trois bichots et demi, moitié blé, » moitié avoine, mesure de Porrentruy, assignée à perpé» tuité sur différentes terres au finage de cette ville. Le » fondateur se réserve et à ses héritiers la collature de >> cette chapellenie: il la confie à Horry, fils de Henri de » Beurnevésin, bourgeois de Porrentruy. Il s'engage à » construire l'autel, à l'orner et à faire, à ses frais, toutes » les constructions nécessaires à cette chapellenie, le tout >> avec l'autorisation de l'archevêque diocésain. >>

L'année suivante, le 22 avril 1360 (2). le même Cuenin déclare, par un acte public, ne pas vouloir modifier ses dispositions antérieures, relatives à la fondation de la chapelle de St-Nicolas, chapelle érigée avec le consentement de son frère Richard.

Il est probable que Cuenin de Buratte n'avait pas d'enfants ceux de son frère étaient donc ses héritiers, et

(1) Résumé par Trouillat. Mon. T. IV, p. 677.

(2) Trouillat. Mon. T. IV, page 681.

il voulut que ce fut avec le consentement de Richard, qu'il avait fait cette libéralité en faveur de l'église de StPierre.

Nous retrouvons, en effet, 32 ans plus tard, Jehan dit Juget, de Bure, et son frère Cuenin, tous deux fils de Richard de Buratte, devenus héritiers de leur oncle, qui, le 22 décembre 1392 (1), cèdent à Ruedin le Couturier, de Cornol, pour services à eux rendus, la collature de tous les droits qu'ils possèdent sur la chapelle de St-Nicolas de Buratte, à Porrentruy. Ils vendent de même à Ruedin de Cornol, une maison sise à Porrentruy, provenant aussi de Cuenin de Buratte, et un jardin situé en cette ville, lieu dit << sous les Tillots », etc.

Ce sont les héritiers de Ruedin de Cornol, lequel était devenu un notable bourgeois de Porrentruy, qui continuèrent à doter la chapelle de St-Nicolas de Buratte dit le Vieux, pour la distinguer de celle de St-Nicolas d'Asuel, fondée en 1383, par Jehan Grillon d'Alle, écuyer, demeurant à Porrentruy.

L'autel de St-Nicolas de Buratte, entouré d'un grillage en fer, fut d'abord adossé au pilier de la chaire; plus tard, en 1758, il fut transféré à l'autel du Rosaire, à l'entrée du chœur.

St-Nicolas d'Asuel, par contre, avait son autel, entre les deux premiers piliers, qui soutenaient la muraille de l'église, vers le clocher, à côté de la chapelle de la VieilleImage, qui s'appuyait à la tour (2).

Les deux fils de Richard de Buratte sont connus par d'autres actes, passés antérieurement. Ainsi le 20 février 1370 (3), ils vendent à Henriat de Beurnevésin, bourgeois de Porrentruy, une rente annuelle, d'un quartaut, moitié blé, moitié avoine, assignée sur différents biens à Bure, (1) Trouillat. Mon. T. IV, p. 830.

(2) Voir Vautrey. Le Jura bernois. T. II, p. 227 et suivantes. On y trouve tous les détails, concernant ces chapelles.

(3) Trouillat. Mon. T. IV, p. 719.

notamment sur 1 1/2 journal situé lieu-dit «< Es Combauls », la chapelle de Cuenin de Buratte d'une part, et le Seigneur de Châtel-Vouhay d'autre part.

En 1396 (1), reparaît probablement le même Cuenin dit Brisehuef, fils de Richard de Buratte, qui, d'un commun accord avec son gendre, vend à Vernier de Cornol, bourgeois de Porrentruy, une pièce de terre que tous deux avaient eue, par héritage, à Chevenez.

Il est un autre personnage qui porte honorablement le nom de Buratte. Il s'agit de Nicolas de Buratte, que nous voyons figurer, dans les actes, depuis 1377 jusqu'en 1419, soit pendant près de 42 ans.

Dans les pièces qui sont parvenues jusqu'à nous, il apparaît tantôt comme témoin, tantôt comme notaire. Il est à noter en effet que, à cette époque, la plupart des signataires des actes, soit comme témoins, soit comme notaire, appartiennent au clergé.

Nicolas de Buratte, curé d'Alle, est cité parmi les seize fondateurs de la Confrérie de St-Michel (2), fondée le 11 octobre 1377, dans l'église de St-Pierre, à Porrentruy. Pour assurer le service de la Confrérie, il la dote, pour sa part, d'une rente de 5 sols, assignée sur un journal de terre, un chésal et un jardin à Fahy.

Le 20 juin 1381 (3), Nicolas de Buratte est témoin, avec Hugues, curé de Courgenay, dans un acte de vente, entre Villemin de Grandfontaine, écuyer, sa femme Symonette de Boncourt, et Jehan de Boncourt, dit d'Asuel, écuyer.

Nous le retrouvons plus tard, aussi comme témoin (14 décembre 1394), dans un acte (4) passé à St-Ursanne, au cimetière, près du portail de l'église, entre un bourgeois de la dite ville et Pierre Rabi, chapelain, qui achète, au (1) Trouillat. Mon. T. IV, p. 848. (2) Trouillat. Mon. T. IV, p. 748. (3) Trouillat. Mon. T. IV, p. 768. (4) Trouillat. Mon. T. IV, p. 837.

nom du chapitre, plusieurs pièces de terre, situées sur le territoire de St-Ursanne.

L'acte le plus important, auquel nous trouvons mêlé le nom de Nicolas de Buratte, comme notaire, est celui du rôle de l'église St-Pierre en 1404 (1). Nous en reproduisons la fin, comme échantillon de la phraséologie des tabellions de cette époque, dont le style est particulièrement obscur et entortillé: sous ce rapport, notre personnage n'avait rien à reprocher à ses confrères.

« Et je Nicolax de Burates, prebtre de la diocese de Be>> sançon, notoire publique de l'autoritey Imperiale et re» questé et monicions faites par le dit Mons. le doyen es >> reponses à la lecture du dit Roulle es demandes es >> requestes faites par le dit Mons. le Doyen es dits Curey » es prebtres et es reponses d'icieux et à toutes et singu» lières les chouses dessus escriptes quant lou les disent et >> feroient sans estre present avec les tesmoins dessus » nommes et icelles chauses ay vehus et ouys efin dire et » faire et à ce present publique instrument ay adsigne >> féablement de mon seing publique accoustumé et me >> suis y-cy soubscript de ma propre main pour témoignage » de vérité des choses dessus dictes, sur ce appelé et espe»cialement requis. »

Nicolas de Buratte a longtemps habité le village de Alle dont il était curé. L'acte de 1377 lui donne déjà le titre de curé d'Alle. Nous le retrouvons, le 23 novembre 1419, stipulant comme notaire, dans un acte qui indique nettement le lieu de sa résidence.

C'est un marché (2), par lequel, Riat le pelletier, de Charmoille et sa femme Jehannatte vendent à Gonate, fille de Thiébaud de Pleujouse, « une maison de bois située au haut de la ville de Charmoille...... pour la somme de 17 florins d'or du Rhin.... Acte passé en la ville d'Alle,

(1) Trouillat et Vautrey. T. V., p. 201.

(2) Trouillat et Vautrey. Mon. T. V. p. 751.

dans la maison du notaire ci-dessus. » Et c'est signé : Nicholaux de Burattes, notaire.

Il est probable que notre personnage devait être arrivé à un âge avancé, car, en comparant les deux dates extrêmes, nous voyons qu'il a été curé de la paroisse d'Alle, pendant plus de 42 ans. Nulle part, nous n'avons trouvé une mention au sujet de l'époque de sa mort : nous avons cependant jugé de faire revivre, au moins en partie, cette intéressante figure de la fin du 14e et du commencement du 15° siècle.

A propos de l'hôpital de Porrentruy, il est encore fait mention de Buratte, dans l'acte de fondation (1), (1er novembre 1406). Il s'agit de la donation faite « par la noble Dame Marguerite, femme de feu Monsire Broquart Sporer d'Eptingen, chevalier, des terres et hertaiges biens et choses que ladite Dame avait aux ville, finage et territoire de Bure et de Burates, « ensemble les fons, appartenances et appendices dicelles et diceulx », et 5 émines, moitié blé, moitié avoine, dus par Symonin de Bures.

Ensuite, le silence se fait sur Buratte. « Seule, dit Vautrey (2), la chapelle de St-Nicolas de Buratte conserva, jusqu'en 1793 le nom de cette localité entièrement effacée de notre sol. »>

6. Courtemblin

La tradition veut que Courtemblin ait occupé le finage entre Courgenay, Cornol et Courtemautruy, au voisinage du moulin de la Terre », et plus spécialement, entre ce dernier et le village de Courtemautruy.

Dans le rôle des collongiers de Courtedoux, de 1432 (3), Théobald de Blamont, préposé de l'église collégiale de StUrsanne, fait mention que le Chapitre est obligé de fournir

(1) Trouillat et Vautrey. Mon. T. V. p. 204.

(2) Vautrey. Le Jura bernois. 1863. T. I. p. 65.

(3) Trouillat et Vautrey. Mon. T. V., p. 299.

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