de 1851 a satisfait en principe au vœu générale- nous nous occupons plus spécialement dans cette La disposition nouvelle modifiait complètement la représentation de l'agriculture: les chambres consultatives étaient nommées par les préfets, et le conseil général désigné par le ministre; cette dernière assemblée était formée de cent membres, dont quatre-vingt-six pris dans les chambres consultatives et quatorze en dehors. Ce nouveau système, encore en vigueur, fut stérile. Le conseil général ne se réunit que peu ou point, et les Chambres consultatives n'eurent qu'une insuffisante autorité. Aussi, lorsque les plaintes des populations rurales motivèrent la grande enquête de 1866, les agriculteurs élevèrent la voix pour demander, de nouveau, le pouvoir de choisir eux-mêmes les interprètes de leurs revendications. Leur vou_fut accueilli, en principe, par la commission. Elle ne crut pas nécessaire toutefois de créer les chambres départementales que le législateur de 1851 avait organisées, mais préféra proposer un système de représentation à deux degrés des comices dans les arrondissements et un conseil supérieur à Paris. L'assemblée centrale comprenait un membre par département nommé pour trois ans, indéfiniment rééligible et que devait choisir le conseil général. Quant au Gouvernement, il ne conservait que le droit de désigner le quart du nombre total des membres du conseil. Le ministre compétent s'empressa de donner suite à la question et mit à l'étude une loi sur la représentation agricole. Peu de temps après, deux députés au Corps législatif, M. le marquis d'Andelarre et M. Ernest Picard, déposèrent des propositions qui offraient entre elles une certaine analogie, en prescrivant toutes deux l'institution de comices, de chambres d'agriculture et d'un conseil général. Dans les deux systèmes, l'assemblée centrale était élue par les chambres départementales. Cependant, M. Ernest Picard faisait nommer les chambres agricoles par le suffrage des habitants. M. le marquis d'Andelarre, au contraire, confiait cette élection aux membres des comices qui devaient être eux-mêmes choisis par les agriculteurs : ce dernier projet fut ensuite modifié par l'auteur et quelques-uns de ses collègues, pour laisser aux sociétés agricoles le droit de se constituer librement. La France était à la veille des jours néfastes de 1870. Quelques semaines plus tard, les agriculteurs en deuil, ne songeant qu'aux malheurs de la patrie blessée, quittaient leurs travaux pour courir sur les champs de bataille. Les fils futtèrent en héros, et les pères apportèrent, grâce à leurs anciennes épargnes, une large part à la rançon du pays. Avant même que l'œuvre de réparation fût entièrement accomplie, un décret institua de nouveau, en avril 1872, le conseil supérieur de l'agriculture, du commerce et de l'industrie, en spécifiant qu'il devait être composé des hommes les plus autorisés. Puis MM. de Saint-Victor, de Bouillé avec plusieurs autres de leurs collègues à l'Assemblée nationale demandèrent la remise en vigueur de la loi de 1851, et M. Lespinasse proposa de faire nommer les chambres consultatives par les conseillers municipaux convoqués aux chefs-lieux de canton. Ces deux projets furent pris en considération sur les rapports de M. Robert de Massy, présentés au nom de la commission d'initiative; mais les incessantes préoccupations de l'époque ne permirent pas d'examiner et de résoudre ces questions avec le soin qu'elle exigeaient. M. de la Bouillerie, ministre de l'agriculture et du commerce, dut se borner, par le décret du 5 mai 1873, à constituer trois sections dans le conseil supérieur formé de membres nommés par le pouvoir et de membres de droit. Aucune proposition relative à la représentation agricole ne fut présentée lors de la courte législature de 1876. Après les événements du mois de mai 1877 et les élections de la même année, les ministres républicains remplacèrent les conservateurs au pouvoir; et, de 1878 à 1882, nous n'avons à mentionner de leur part aucun effort pour répondre au vœu des agriculteurs, dont 1883. DÉP., SESSION ORD.- ANNEXES, T. II. (NOUV. SÉRIE. ANNEXES, T. 9.) Un décret du 1 octobre 1879 a réorganisé, il est vrai, le conseil supérieur au moment où des allaient être discutées à la Chambre. Mais questions d'une extrême gravité pour l'agriculcette disposition était précédée d'un rapport qui a plutôt surpris quelsatisfait le monde agricole M. Tirard y déclarait, d'abord, que les délibérations du conseil devaient avoir un caractère d'indépendance absolue; puis, au lieu de mettre en pratique ces excellents principes, il concluait en nommant lui-même les membres de cette assemblée, dont dix étaient choisis dans les rangs de la majorité de la Chambre et du Sénat. même question paraît s'imposer à l'attention des pouvoirs publics. Depuis quinze ans, les agriculteurs ont traversé une série de crises inconnues jag; le mal, longtemps nié, est devenu évident. De tous côtés la vérité apparaît; tandis que la population rurale s'est augmentée, sur mille habitants, de 0,3 en Belgique et de 5,7 en Italie, elle a diminué en France dix fois plus que dans aucun des principaux Etats de l'Europe. La terre, dont les neuf dixièmes sont entre les mains des petits propriétaires, & perdu, successivement, en moyenne, un quart de sa valeur. Bien des exploitations, où de nombreux ouvriers trouvaient feur avenir assuré, ont ralenti leurs travaux, et plusieurs les ont céssés. Le découragement gagne la plupart des rangs de l'armée agricole. Témoins de ces faits, le Gouvernement ainsi que la majorité des Chambres n'en ont pas moins écarté les mesures que réclamaient les défenseurs les plus autorisés de l'agriculture. Les luttes parlementaires engagées depuis six ans pour la cause agricole sont encore présentes à notre mémoire et nous n'insisterons pas sur ces souvenirs. Nous devons rappeler, cependant, en peu de mots le sort fait à l'agriculture lors des dégrèvements sur les traités de commerce et les dégrèvements d'impôts. Dans la première de ces deux discussions, de nombreux orateurs sont venus démontrer qu'il était impossible d'abandonner à la concurrence étrangère bon nombre des produits agricoles, et surtout les laines, les colzas et les lins, sans créer pour l'industrie rurale une situation injuste en face des industries protégées. Malgré l'évidence de ces démonstrations, presque toutes les requêtes des agriculteurs ont été rejetées, au moment même où les autres branches de la fortune publique obtenaient quelques satisfactions bien légitimes et attribuaient ce succès non seu lement à la justice de leur cause, mais, dans une certaine mesure, à l'énergie et à la compé tence des chambres spéciales chargées de leur défense. L'agriculture n'eut pas meilleure part lorsqu'il s'est agi des dégrèvements d'impôts. Et toutefois non seulement elle démontra, par une irréfutable argumentation, le bien fondé de ses demandes d'allégements de charges, mais elle invoqua aussi les engagements formels contractés en sa faveur et dont ses amis avaient pris acte. En vain fut-il prouvé que la contribution foncière était devenue antiproportionnelle au revenu de la terre, les centimes des départements et des communes l'ayant presque doublée partout, pendant qu'un concours de circonstances malheu. reuses diminuait la valeur et le produit du sol; que la propriété rurale était frappée par l'impôt bien plus que les valeurs mobilières; que les populations de nos campagnes étaient surchargées de taxes d'enregistrement trop lourdes; toutes ces assertions évidentes restèrent inutiles. été méconnues, et rien n'a servi de rappeler Les promesses de dégrèvement elles-mêmes ont qu'en échange des droits compensateurs suffisants refusés même aux produits non alimentaires, les organes du ministère et de la majorité s'étaient engagés à voter les réductions d'impôts rendant possible la lutte contre la concurrence d'outre-mer. Pour toute sanction, la Chambre, approuvant l'avis de la commission du budget, déclara qu'il était impossible de prélever sur les trois milliards de recette du Trésor public la somme nécessaire pour accueillir les réclamations des agriculteurs. II Le long récit des efforts tentés dans le but d'obtenir pour l'agriculture la liberté de désigner elle-même ses représentants suffirait, messieurs, à démontrer l'importance de cette revendication. Ces tentatives si souvent renouvelées, toujours favorablement accueillies, puis sans cesse ajournées par des évènements inattendus, prouvent que les agriculteurs ne se lasseront pas d'affirmer leur droit à la représentation légale. Il en fut donc de ces dégrèvements comme des autres demandes dont nous avons parlé. Le Gouvernement, il est vrai, a prétendu s'acquitter d'une partie de ses devoirs envers l'agriculture en abaissant les taxes sur les sucres et les vins, et il s'en est hautement prévalu devant les cultivateurs, à la veille des élections; mais comme de nombreux comices le prévoyaient, ces modifications d'impôts, si utiles qu'elles soient en général, ont peu profité aux agriculteurs depuis ce moment, au contraire, bien des transactions pour la vente de leurs produits ont été rendues moins faciles à la suite d'un excès d'importations et des primes accordées à l'exportation par les lois étrangères. Mais, en ce moment, cette même proposition se présente avec un caractère tout special d'opporSans doute, une caisse des dégrèvements tunité. Si M. Talon démontrait, en 1851, après agricoles fut ensuite fondée, mais elle reste tout MM. Decazes, de Martignac, le maréchal Bugeaud à fait vide à côté de tant d'autres si libéralement dotées. et Tourret, que, de par les lois de l'équité, les Chambres devaient concéder au pays agricole le libre choix de ses mandataires; aujourd'hui, en ce temps de souffrance pour l'agriculture, la Les refus opposés par les Chambres, ou l'inefficacité de leurs concessions sont d'autant plus fâcheux que les allègemnts d'impôts devenaient 73 | souvent de nombreuses preuves, et cette année quel point les débats de cette importante assem- peu après moins faciles, par suite des difficultés budgétaires qu'avaient aggravées les grands tra vaux trop précipités ou impro uctifs des programmes de MM. Ferry et de Freycinet. Quoi qu'il en fût, l'agriculture complait encore sur les ressources que devait produire l'expédient de la conversion du 5 p. 100. Le Gouvernement avait même fait à ce sujet de nouvelles promesses plus formelles encore que les premières (1), et la commission du budget, par l'organe de son rapporteur, M. Ribot, avait déclaré que le secours de la conversion était pour elle l'étoile de l'espérance. Toutefois, quand les engagements souscrits sont venus à échéance, les requêtes des populations rurales ont, une fois de plus, été ajournées et l'étoile s'est éclipsée. Moissonnant les jardins de la rhétorique par lementaire, le président du conseil a couvert l'agriculture de fleurs; puis, recourant à la dangereuse politique des atermoiements, il a réclamé le renvoi de la discussion à l'époque du vote du budget. La remize a été adoptée, malgré l'opposition et les craintes des défenseurs des intérêts agricoles qui auguraient mal de ce retari. Ils ne doutent pas que le jour du débat, le Gouverne ment ne retrouve ses fleurs de rhétorique à l'usage des campagnes; mais ils se demandent où seront alors les ressources d'antan. Ce n'est pas tout. Dans la même séance, le 24 avril de cette année, M. le président du conseil a condamné l'une des premières revendications des sociétés agricoles. It a déclaré qu'il serait fâcheux de prendre sur les fonds de l'Etat les crédits nécessaires pour ramener à sa veritable proportion la contribution foncière doublée par les centimes additionnels. Quant aux droits de mutation, l'interprète du Gouvernement ne s'est pas opposé, en principe, à leur réduction parce que cette mesure grèverait peu le bufget: les ressources dont l'Etat aurait fabord été ainsi privé pouvant être reconstituées, probablement, ensuite, par une augmentation des recettes du même impôt. Mais M Jules Ferry n'a pris, ni fait saver qu'il pren drait sur ce point initiative d'aucune proposi tion, pas plus au sujet des aliègements des taxes qui pèsent sur l'agriculture, que pour la mise à la charge du trésor public de l'entretien de certaines voies vicinales. En outre, à propos de cette dernière question, le ministre a paru indiquer qu'il serait opportun de prélever sur le budget extraordinaire, c'est-à-dire aujourd'hui, sur l'emprunt la dépense que nécessiterait cette disposi sion. Or, d'après ce système, il ne pourrait être accordé aux populations rurales une satisfaction même insuffisante en ce moment, qu'au prix d'une nouvelle dette amortissable contractée chaque année. Telle est Fattitude du pouvoir en présence des plaintes de l'agriculture; de plus la situation, loin de s'améliorer, est aggravée par la politique financière suivie depuis cinq années et qui maintenant met nos budgets en deficit. A me. sure que les dégrèvements agricoles devenatent de plus en plus nécessaires, le Gouvernement et la majorité les rendaient de moins en moins faciles en imprimant aux dépenses ordinaires une telle augmentation qu'elles se sont élevées de 294 millions en trois ans, de 1880 à 1883; płus qu'autrefois en dix ans, de 1830 à 1840, par exemple. En même temps, les budgets extraor dinaires, alimentés par l'emprunt amortissable, accroissaient les difficultés des finances du pays, tandis que les nations voisines réduisaient leurs charges et que l'Angleterre, par exemple, diminuait sa dette d'environ 120 millions en un an. Ainsi, non seulement les principales demandes des agriculteurs ont été écartées jusqu'à ce jour, et l'une de nos plus grandes sociétés d'agricul ture résumait nagnère, avec compétence, le sort de leur industrie en deux mots souffrance, inégalité; mais le succès des mêmes revendications se trouve compromis pour l'avenir par l'héritage de dettes que le Gouvernement actuel prépare à ses successeurs. Il est donc facile de comprendre que le désaccord entre les défenseurs de la cause agricole et les pouvoirs publics devienne de plus en plus accentué. Nous en voyons • L'agriculture de l'ancienne Flandre française. autrefois si vaillante, si prospère, est aujourd'hui dans la détresse Ba ruine est immi nente, si les pouvoirs publics ne viennent pas à son secours dans un délai rapproché. « Naguère, dans nos fertiles campagnes, 16tranger admirait la beauté de nos champs de tabac, de hin, de colza, d'œillette, etc. La culture de la betterave avait apporté un bien être mê rité au sein de nos populations rurales, et le laboureur pouvait espérer au moins, en culti vant cette précieuse racine, obtenir, à la sueur de son front, une rémunération de ses peines, suffisante pour lui permettre de satisfaire à ses engagements, nourrir et élever sa famille, entretenir son bétail pendant l'hiver. « Aujourd'hui, la misère a remplace l'ancienne splendeur. Le droit de cultiver le tabac n'est plus accordé qu'à un nombre fort restreint de planteurs Le colza, le lio, Follette, ne donnent plus qu'an revenu fort précaire. Le prix des céréales est si avili que, sauf dans les années ďabondance devenues de plus en plus rares, la vente du produit ne couvre pas la dépense, et, pour comble de malheur, on nous annonce que cette année, et sans doute à l'avenir, → si les circonstances ne changent pas. - les fabricants de sucre, les distillateurs, menacés d'une ruine certaine, ne pourront plus nous offrir, pour nos betteraves, qu'un prix inférieur à celui qu'elles nous coûtent Cette situation est navrante, et le tableau que nous en faisons ne paraîtra exagéré qu'à cóux qui ne fréqu ntent pas nos campagnes. << Il est donc de la plus impérieuse nécessité, messieurs, que vous preniez immédiatement en norre faveur des résolutions énergiques qui, seules, pourront conjurer les désastres qui menacent notre agriculture déjà si éprouvée !....... Le comice de Béthune s'exprimait de mémé dans une pétition a tressée aussi au Parlement et dont nous citerons les deux passages sui vants : « Vu la situation sans précédent dans laquelle se trouve actuellement l'agriculture française, les soussignés, agriculteurs français, ont l'hon neur de venir demander aux Chamores de la manière la plus pressante.» (Suit l'énumération des requêtes.) Et plus loin, en terminant: voudront bien venir en aide à leur situation cision. » Un grand nombre de comices tiennent en ee moment le même langage; mais, loin de les soutenir dans leur tâche, le Gouvernement s'efforce de leur opposer les avis de sociétés nouvelles qui semblent cultiver, avec l'agricul ture, la politique républicaine, et reçoivent en échange, outre les sympathies officielles, une ample moisson de subsides. Cet ensemble de faits et de circonstances devait, on le comprend, donner à l'agriculture le désir de ne pas attendre plus longtemps pour renouveler l'ancienne revendication d'une représentation légale; aussi les principales associations agricoles ont tenu à reprendre cette question, et la société des agriculteurs de France Ini prête, depuis plusieurs années, un énergique appai par l'organe de ses orateurs les plus auto risés. L'exemple même du peu de suite donné aux vœux de cette association paraft apporter également un témoignage en faveur de l'adoption du projet. Pendant que chacun rend hommage au mêrite des savants agronomes qu'elle compte dans son sein, quand les amis de l'agriculture s'ingdes travaux remarquables de MM. Bertin, le comte de Luçay, Le Trésor de Larocque, Josseau, Bordet, etc., etc., le Gouvernement, arrêté par d'autres préoccupations, semble ignorerà (f) Dans l'exposé des motifs du budget de 1883, le ministre des finances s'exprimait ainsi : « Ce n'est un secret pour personne que les dégrève-pirent ments nécessaires promis par l'ancienne Chambre à l'agriculture sont liés à une grande operation financière en ce moment ajournée. » En résumé messieurs, les défenseurs les pizz autorisés de la cause agricole pensent qu'il es particulièrement utile, en ce temps de crise, ds doter la plus grande de nos industries d'une insti tution dont l'influence incontestable s'est exercée depuis longtemps au profit des autres sources de la fortune publique. Certes, personne ne peut suffise pour faire cesser les souffrances des popu croire que la représentation agricole demandée lations rurales: on ne saurait avoir un espoir quête qui se poursuit depuis si longtemps sur aussi peu fondé mais nous disons que, dans l'en les intérêts du travail, la voix de l'agriculture seule n'a pu se faire entendre par des mandytaires spéciaux légalement chargés de sa dé fense, et qu'il est juste d'accorder auss diverses industries les mêmes armes pour défendre leur cause. Le sort de l'une est lié à celui des ani tres, et fentes se doivent an mutuel appoi III L'utilité d'une représentation légale de l'agrículture nous semble désormais déaróntrée. nous reste à voir par quel mode électoral cette institution doit être établie, afin de répondre, autant que possible, aux prescriptions de l'é quité et aux vœux légitimes des populations agricoles. Un certain nombre de systèmes ont été proposés pour organiser cette importanta institution, comme en témoigne, dans la première partie de ce travail, l'exposé des divers projets da loi soumie, à ce sujet, aux pouvoirs públics dapuis soixante ans. Mais, si leurs auteurs ont tenté, par des méthodes différentes, de formar le corps électoral, base de la nouvelle représentation, tous ont voulu atteindre la même but confier le droit de vote aux véritables intéressés Or, ces derniers ne peuvent être évidemment que les possesseurs et les exploitants donnent l'autorité nécessaire à la défense de le du sol auxquels leurs connaissances spéciales cause dont ils sont les représentants naturels. Mais comment définir a priori les conditions que doivent remplir ces agriculteurs pour predre part au voto ? A quel signe, à quel caractère reconnaître ceux qui peuvent choisir, avec com pétence, les conseillers de la grande industria française ? La question offre certaines dificultés, et, pour l'étudier, même à grands traits, il semble oppor tun de rappeler quelques-unes des solutions ayant réuni le plus de partisans. Nous indiquerons d'abord que l'Assembléa nationale, en 1851, a rejeté le système de Fer tension indéfinie du suffrage, c'est-à-dire Fattribution du vote, indistinctement à tous ceux qui exploitent ou possèdent une fraction quelconque du sol. Cette résolution a été longuement moti vée : il importe, faisait observer le rapporteur de la loi, M. Talon, de ne pas adopter un mode appelant, en dehors des villes, à ce scrutin spëcial, presque tous les électeurs politiques. Sinon, les assemblées en projet ne seraient qu'une seconde édition des conseils généraux ou du Parlement et l'agriculture veut qu'il soit innové. Ne pourrait-on pas craindre, également, faisait remarquer le même interprète de la commission, de créer, ainsi, plus d'une fois, par un appel en masse aux urnes, toute une caté gorie d'électeurs indifférents à ce nouveau de voir et pea empressés de prendre part à des votes sur des questions d'affaires étrangères su】 passions politiques? Une semblable solution IS rait pour résultat de compromettre l'avenis de l'œuvre ? : Lors de l'enquête agricoie de 1866, M. Tiesa rand tenait un semblable langage dans son rapport officiel il redoutait aussi que ce système, au milieu d'ane certaine tiédeur trop facile à prévoir, ne laissat libre carrière à des agisse ments qui nuiraient à là cause de l'agriculture. Parmi les autres modes électoraux, il en est deux, surtout, que nous devons mentionner; ils ont rencontré effet tout récemment, en pré-naux, d'arrondissement et cantonaux, en seraient Dans ces deux systèmes, la création de chambres départementales se trouve écartée, et il n'est plus question que d'assemblées d'arrondis sement. Le premier forme le corps électoral à l'aide de fonctionnaires dépendant du ministère de l'agriculture, des directeurs d'établissements d'enseignement agricole, des propriétaires ou usufruitiers d'exploitations rurales. Or, comme ses auteurs ne peuvent évidemment régler, d'une manière rigoureuse, les conditions déterminant l'exploitation agricole, ils proposent de charger une commission locale du soin de fixer, dans chaque commune, les caractères d'un tel établissement. Mais ils composent ce comité du maire, d'un conseiller municipal désigné par ses collègues et d'un représentant de l'administra. tion. On le voit, de projet abandonnant la préparation des listes aux mains d'un triumvirat com. munal consacrerait un véritable arbitraire, et il semblerait difficile de le mettre en pratique sans provoquer de très nombreuses réclamations. 16 Le second des modes électoraux dont nous venons de parler est plus inadmissible encore; il faut nommer les membres de la chambre cantonale d'agriculture par les conseillers municipaux choisissant un délégué, comme s'il s'agissait d'une élection sénatoriale. Les chambres cantonales désigneraient ensuite trois de leurs membres pour composer l'assemblée d'arrondissement. Cette organisation mettrait évidemment la cause agricole entre les mains de conseils élus plus ou moins intérêts immédiats des popula l'influence de sentiments poet les Hons des campagnes se trouveraient subordonnés aux convenances et aux divisions des partis. Un mode électoral analogue proposé aux Chambres en 1840 avait été déjà repoussé. Examiné de nouveau, lors de la discussion de la loi du 20 mars 1851, ce système ne recut pas un meilleur accneil. Il ne saurait, du reste, obtenir l'assentiment que des esprits redoutant l'union des populations rurales qui peut assurer leur force et reste aujourd'hui low espoir, En voyant combien ees propositions sont défectueuses et répondent peu au but de l'institution, on reconnaît que l'organisation eréée par la loi du 20 mars 1851 c'est-à dire celle qui érige en corps électoral les sociétés agricoles, supporterait bien mieux l'examen. Elle n'écarte tour, en faisant partie d'un comice, aurait le droit d'être inscrit, à ce titre, sur la liste des votants. Elle s'appuie sur des institutions et des hommes qui su rendre des services à l'agriculture of acquérir ainsi des titres à la reconnaissance du pays. Les observations qu'elle sou lève ne sont pas décisives et ne l'atteignent point directement: on objecte que les comices et les sociétés analogues ne sont pas partout régulièrement instituées; les uns, en effet, étendent leur action sur tout un département, les autres sur un seul canton; on ajoute que leurs adhérents payent des cotisations variables. Ces remarques sont fondées en principe; toutefois, les auteurs de cette proposition avaient répondu & l'avance, aux critiques de leurs contradicteurs en complétant leur système par un projet de reconstitution des comices agricoles ayant pour but de réglementer ces associations et d'assurer, en même temps, leur indépendance. D'après ce système, les noms des propriétaires d'exploitations rurales et des agriculteurs faisant valoir ces établissements, seraient inscrits sur les listes électorales et ajoutés par une commission locale à ceux des membres des comices régulièrement constitués. Cette commission serait composée de trois conseillers municipaux choisis par leurs collègues, de trois notables propriétaires agricoles et d'un nombre égal d'exploitants désignés dans la commune par ordre d'importance. Les lauréats des concours régio Il est, sans doute, assez difficile, comme nous l'avons dit plus haut, de définir exactement la signification des mots exploitation rurale, puisque les conditions d'un tel établissement varient de contrée à contrée, Mais les auteurs compétents sont d'accord pour admettre une véritable analogie entre les chefs d'une exploitation rurale et les directeurs patentés d'une maison de commerce ayant droit au vote consulaire. Il s'agit donc, d'une part, des possesseurs les conditions d'une exploitation normale et, d'un fonds rural qui offre, dans la commune, d'autre part, des agriculteurs qui le dirigent sons leur responsabilité professionnelle. On peut, en effet, avoir confiance dans les lumières des commiss.ons spéciales et l'expé. rience des hommes qui les composeraient, pour table caractère. Les décisions prises seraient conserver à la formation de ces listes leur vérid'autant plus légitimes, et les intéressés les acrendues par une réunion où siégeraient les agri cepteraient d'autant mieux qu'elles seraient culteurs les plus autorisés de la commune. Ils auraient toujours, d'ailleurs, le droit d'en appeler à la Chambre représentative dès qu'elle serait réunie et, avant qu'elle soit constituée, à la juridiction ordinaire, sans frais ni forme de procédure. Aussi le mode adopté à ce sujet paraît n'avoir aujourd'hui qu'une importance relative, pourvu qu'à l'exemple du commerce l'agriculture obtienne, dès maintenant, des interprètes qui soient à même de se prononcer, plus tard, avec toute compétence, sur le meilleur système d'admission au vote agricole: nous ne nous attacherons donc pas d'une manière spéciale à la défense de celui que nous proposons en ce moment. Pour ce qui concerne la constitution des chambres représentatives, le projet s'inspire de la loi du 20 mars 1851, en modifiant, toutefois, certaines de ses dispositions. Comme elle, et à l'exemple de MM. de Martignac, Deffitte, de Beaumont, etc., il écarte les assemblées d'arrondissement et les chambres régionales agricoles.. Nous adoptons donc le système des assemblées départementales réunies entre elles par le grand conseil de l'agriculture siégeant à Paris. de nouveau, la disposition constance Vait S'il est vrai que les intérêts agricoles ne sont ac Nous avons pensé, en effet, que le système, élevant jusqu'à 360 et plus le nombre des cham. bres représentatives, amoindrirait l'influence de l'institution en compliquant ses rouages et lui enlèverait une partie de son autorité. D'autre part, la multiplicité de ces assemblées rendrait difficile le rôle du conseil central, qui doit étudier toutes les délibérations et faire un rapport d'ensemble, Quant aux chambres régionales, nous en aurious approuvé l'établissement si notre proposition n'instituait un conseil central siégeant à Paris. D'ailleurs, les centres agricoles à déterminer ne correspondraient avec aucune des circonscriptions administratives; la question préjudicielle relative au budget offrirait donc quelques difficultés et devrait être, au préalable, mise à l'étude par les conseils généraux des diverses régions. constituer le conseil central. Cette dernière assemblée deviendrait ainsi l'émanation des chambres départementales, comme celles-ci seraient elles-mèmes les manda. taires officiels du pays agricole tout entier. Elle resterait la représentation la plus élevée de l'agriculture et pourrait offrix aux pouvoirs publics l'appui précieux des lumières et de l'expérience de ses membres. La question ne présente, du reste, qu'une utilité secondaire, tous les agriculteurs membres d'un comice devant être portés sur la liste des électeurs. Enfin, si l'expérience de l'organisatre-vingt six délégués des chambres représenElle se composerait, non seulement des quation était faite et les chambres d'agriculture tatives, mais aussi d'hommes connus pour leur établies, puis consultées sur les conditions de l'électorat, il deviendrait plus facile d'arrêter, dévouement à la science agricole. L'assemblée chosirait elle même, les uns parmi les économisd'une manière définitixe, comment devrait être tes, les jurisconsultes spéciaux et les agronomes fixée la composition du corps électoral ayant déjà bien mérité du pays. D'autres se raient délégués par des sociétés savantes ou les professeurs d'agriculture. pas toujours identiques dans chaque partie du leur circonscription, sur l'établissement des marchés, des fermes régionales, des fermes-écoles et des stations agronomiques Eles devraient être consultées par les conseils généraux sur la répartition, entre les comices, des a locations départementales. Les attributions des chambres représentatives s'étendraient à tous les points qui touchent à l'agriculture. Elles présenteraient leurs vues et donneraient des avis sur les changements qu'il serait nécessaire d'apporter à la législation rurale, les modifications dans l'assiette des impots directs ou indirects, les tarifs des douanes. Elles délibéreraient de même sur les questions agricoles qui intéresseraient plus spécialement Elles émettraient des veux sur tous les changemeats qu'il serait nécessaire d'apporter à la législation rurale, les modifications dans l'assiette des impôts directs et indirects, les tarifs des douanes. Elles dresseraient des listes préparatoires devant permettre au conseil central de former des états de présentation relatifs au choix des membres des jurys des concours régionaux et internationaux. Elles auraient le devoir de consti tuer, de concert avec les administrations comment et de curage des rivières, etc., etc. pétentes, les syndicats d'irrigation, d'assainisse Les subventions de l'Etat destinées aux en couragements de l'agriculture dans le département seraient réparties sur leurs propositions. Les attributions du conseil contral s'étendraient à toutes les questions agricoles. chambres représentatives. Ea réunissant et résumant les travaux et les délibérations de ces assemblées, il donnerait aux premiers la consécration de sa haute compétence, aux secondes une importance plus een sidérable. plus grande de nos industries, vous permettrez, En instituant une représentation légale de la ment, de s'entourer des avis les plus sûrs et de messieurs, aux Chambres, comme au Gouverneconnaître la pensée des populations rurales avant de prendre, sur leurs demandes, des décisions souveraines. Chaque année s'aggrave la crise dont souffre l'agriculture, et l'examen de ses revendications doit être aujourd'hui l'une des principales préoccupations des pouvoirs publics Nous l'avons constaté, la dépopulation des campagnes, que les Romains considéraient comme un signe précurseur de la décadence des peuples fait d'alarmants progrès. Les travailleurs du sol émigrent dans les villes où ne les attendent, plus d'une fois, que le découragement et la misère. Les nations étrangères encombrent nos marchés de leurs profuits agricoles et ont reçu, en échange, depuis cinq ans, plus de 10 milliards. Pendant ce temps, nos agriculteurs éprouvés ne peuvent donner à leurs terres toutes les améliorations qu'elles réclament, et la moyenne, par hectare, de la production française reste inférieure à celle des principales contrées de l'Europe. Sans doute, un grand nombre d'amis de l'agri culture ont signalé, dans les réunions des comices, les remèdes qu'il faudrait apporter au 1 Art. 8. Une commission d'éligibilité, compo-1-stations agronomiques peuvent être consultés sée de trois conseillers municipaux délégués par sur les questions techniques. leurs collègues, de trois propriétaires et de trois exploitants pris par ordre d'importance, et désignés par le conseil municipal, arrête, dans chaque commune, la liste des électeurs remplis. sant les conditions énoncées par l'article précédent. Les lauréats des concours régionaux, d'arrondissement et cantonaux font partie, de droit, de la commission pendant six ans. La commission d'éligibilité est formée tous les ans, en février, à l'époque de la première session du conseil municipal. Elle est convoquée par le maire et nomme son président. Art. 13. Le vote aura lieu à la mairie ou dans tout autre local indiqué par l'administra- Art. 16. Le président a le droit de convoquer ses collègues en session extraordinaire chaque fois qu'il le juge utile. Dans ce cas, la lettre de convocation indiquera les motifs de la réunion. Avis en sera donné au préfet. Art. 17. Les chambres d'agriculture ne peu vent délibérer valablement qu'en présence de la moitié plus un de leurs membres. Art. 18. Elles présentent leurs vues ou donnent des avis, à la demande soit du Gouvernement, soit du conseil central, sur tous les points qui concernent l'agriculture, et notamment sur les modifications qu'il conviendrait d'apporter à la législation rurale, les changements dans l'assiette des impôts directs ou in. directs, le tarif des douanes, la police des champs et des eaux, les tarifs des chemins de fer pour les transports de l'agriculture, les chemins vicinaux, l'établissement des foires et des marchés, des fermes régionales, des fermes-écoles et des stations agronomiques. Les délibérations intéressant l'agriculture du département sont envoyées au préfet : il doit session, de la suite qui leur a été donnée. être rendu compte, au début de la prochaine Les délibérations offrant un intérêt général sont adressées au ministre compétent et au conseil central d'agriculture. Art. 24. Ellea peuvent se diviser en plusieurs commissions ou sections auxquelles appartient le droit de se réunir hors session, dans un local fourni par les soins du préfet. Le préfet est tenu de fournir aussi à la chambre d'agriculture une salle pour ses séances et des bureaux pour ses commissions. Art. 25.- Les chambres d'agriculture sont reconnues comme établissement d'utilité publique. Elles peuvent, en cette qualité, acquérir, recevoir, aliéner, après autorisation régulière. Lorsqu'elles ont des ressources suffisantes, elles dressent leur budget; dans le cas contraire, le conseil général vote, sur leur demande, les crédits nécessaires à leurs dépenses, qui deviennent obligatoires pour le département. TITRE III DU CONSEIL CENTRAL D'AGRICULTURE ET DE SES ATTRIBUTIONS Art. 26. Il est établi un conseil central d'agriculture siégeant à Paris. Il se compose de cent-vingt membres, savoir : 1 quatre-vingt-six membres elus par les chambres représentatives de chaque département et pris dans le nombre des électeurs agricoles de leur circonscription; 2 douze délégués des sociétés savantes et choisis: quatre par l'Acadé mie des sciences, quatre par la Société nationale d'agriculture et quatre par les professeurs d'agriculture; 3 vingt-deux membres élus en réunion plénière du conseil central, parmi les agronomes, les économistes et les membres des grandes sociétés agricoles. |