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ses, rejettent ce moyen de connoître par la lumière d'une vérité première, seule existante par elle-même, et ils se tiennent assurés de ce qu'ils croient d'après le témoignage des vérités secondaires qu'ils disent évidentes par ellesmêmes : la fausseté de cette assertion ayant été prouvée, l'on a conclu que ces incrédules ne peuvent avoir une raison suffisante de quoi que ce soit, ni se flatter d'être certains de quelque chose.

Quoique les protestans et autres sectaires admettent les livres sacrés qui contiennent des vérités obligatoires, ils ne sont pas plus instruits que ceux qui les rejettent : Comme eux, il se croient maîtres de la vérité, ils croient, de même qu'eux, pouvoir extraire les vérités de leur propre entendement par leur art de raisonner : ils retranchent de ces livres ce qui ne se lie pas avec leur système, et ce qu'ils ne peuvent comprendre; ils interprètent enfin les vérités restantes chacun à sa manière, et croient ensuite faire à Dieu un sacrifice agréable de leur esprit, en le soumettant à sa révélation. Cette croyance étant vaine, on demande quelle est la marque distinctive de ce qui est vrai et doit`

être cru ?

L'homme ne peut vivre dans un état permanent de doute absolu. Tout homme se sent entraîné vers la vérité par un désir irrésistible de connoître ce qui est vrai; cette tendance est un caractère qui distingue éminemment l'homme de la bête; nous avons donc quelque moyen sûr pour parvenir à cette connoissance. Si ce moyen nous manquoit, il faudroit dire de l'homme qu'il est un être manqué, incomplet, un avorton du hasard, ou de la matière pure; qu'il est, parmi les êtres qui ont tout ce que leur constitution exige, le seul qui n'auroit pas tout ce qu'il devroit avoir.

Il y a donc quelque marque certaine et irréfragable de ce qui est vrai et doit être cru; quelle est cette marque ? La question n'est pas oiseuse; c'est à celui qui rejette l'autorité de la vraie Eglise de Jésus-Christ, à résoudre cette question; s'il ne le peut, il restera prouvé qu'il se laisse conduire par le guide aveugle de l'arbitraire, ou par un point d'honneur imaginaire et toujours variable comme les opinions.

Quoique l'incrédule soit, par son intelligence et sa faculté de raisonner, de beaucoup supérieur aux êtres irraisonnables, il ne peut avoir la certitude des vérités, même de celles

qui lui paroissent évidentes; puisqu'il ne peut en assigner le premier principe, qui en est la vraie cause; omettre ce principe, n'est pas une vétille, une négligence légère et pardonnable importe-t-il peu de savoir si ce qu'on croit est certain? C'est-à-dire, s'il est conforme ou incompatible avec la cause unique de tous les principes? La fausseté de tout système philosophique, qui fait abstraction de la vérité originaire provient de cette coupable omission; nous appelons faux, tout système qui est incompatible avec cette vérité.

L'incrédule à système peut déguiser, masquer la vérité essentielle de manière à la rendre méconnoissable à d'autres, mais jamais à lui-même: lorsqu'il se permet cette liberté, c'est alors surtout qu'il se read coupable.

Les catholiques qui admettent une vérité mère, originaire, simple, éternelle et indépendante, sont donc les seuls qui peuvent jouir de la certitude; eux seuls possèdent la seconde marque de la vérité que Leibnitz désiroit; une marque propre à réunir les esprits, et à les faire vivre paisiblement en bonne société : cette marque est la vraie Eglise de J.-C., une, simple, universelle, apostolique, romaine, toujours visible et jugeant infailliblement en dernier ressort les controverses qui s'élèvent sur les vérités religieuses, morales et sociales; c'est aussi ce qui nous a fait dire que notre intention n'étoit pas de conduire l'incrédule au christianisme, par le seul raisonnement; d'ailleurs, il ne suffit pas pour être chrétien de savoir ce qui est vrai et doit être cru; il faut de plus vouloir y croire,en convenir,et le faire connoître. Le concours de Dieu, qui est la vérité même, est encore nécessaire ici; celui qui croit se suffire et ne veut absolument dépendre que de soi-même dans sa vie privée, ne croira jamais de lui-même, ni sur le témoignage d'un autre, à ce qui lui déplaît et qu'il devroit croire.

Dieu seul domine sur les volontés; lui seul peut faire fléchir même les plus rebelles; mais il n'est pas de la conduite ordinaire de sa providence d'offrir son concours à l'incrédule de mauvaise foi, à celui qui ferme les yeux à la lumière de la vérité, par la crainte de voir trop clair ce qui lui déplaît et qu'il devroit croire : C'est de cette duplicité criminelle qu'il a été dit qu'elle ne sera pas pardonnée ni dans ce siècle, ni dans l'autre. Connoître et vouloir croire ce qui doit être cru, sont néanmoins deux choses indis

pensables, pour bien vivre avec soi-même et avec ses semblables.

Quoique l'hypocrisie soit un fléau des sociétés, les tartufes ne sont pas plus rares parmi les philosophes incrédules qu'ailleurs. L'athée et ses consorts qui jugent que leur entendement est une autorité supérieure à celle de tout autre, devroient toujours vivre de même que la bête, sans jamais éprouver aucun remords de conscience: c'est à eux à faire savoir si cet état est le leur.

On demande maintenant s'il est bien vrai que les catholiques seuls jouissent de la certitude?

R. Il y a des vérités que les non-catholiques admettent comme certaines, sans en avoir la certitude; telles sont les vérités secondaires qu'ils croient faussement être évidentes par elles-mêmes; ils admettent ces vérités parce qu'ils les voient à la lueur d'une lumière du dehors qu'ils croient faussement leur être propre c'est ainsi néanmoins que nous voyons les corps : ils n'ont pas la certitude de ces vérités parce qu'ils en méconnoissent le premier principe, et en détournent leur attention; ils croient se suffire et trouver en eux-mêmes tout ce qu'il leur faut, pour connoître ce qui est vrai et se bien conduire.

Les axiomes mathématiques n'ont pour objet que les qualités des corps qui ne sont relatives qu'entre elles, ce qui ne suffit pas pour faire connoître leurs propriétés et qualités considérées en elles : telles que la forme, l'étendue, le mouvement, la force, etc.; moins encore font-ils connoître les qualités distinctives des êtres en général, les uns esprits et les autres corps.

Le temps viendra, et ce temps n'est pas loin où les incrédules rejetteront avec mépris la qualité de philosophe comme chose de vieille mode; à moins qu'ils n'inventent pour leur propre usage une nouvelle philosophie toujours courante ils opposent déjà aux vrais miracles, les uns, comme autrefois les juifs, des puissances magiques; les autres, des locutions vagues et équivoques de magnétisme animal et de forces vitales nécessairement aveugles d'ellesmêmes, capables néanmoins, selon eux, de produire les prodiges les plus merveilleux; comme seroient la production et le développement d'un germe, d'une fleur, d'un arbre, d'un animal. Qui sait, s'ils ne finiront pas par déclarer maudit, celui qui ne voudra pas croire à leur nouvelle philosophie, et qui osera raisonner sur la vérité simple comme

principe de ce qui est vrai: ils voudroient bien laisser chacun libre de croire et d'écrire selon son bon plaisir; mais cette liberté indéfinie ne pouvant subsister long-temps avec une société nombreuse, stable et permanente, leur dernier acte de domination sera de former un code de vérité que chacun devra professer, sous peine d'encourir leur disgrâce et d'en être puni; il leur suffira, d'après leurs calculs, qu'une partie du peuple adhère à leur doctrine, pour contenir dans le respect ceux en plus grand nombre qui ne voudront jamais y croire.

Lettre pastorale de M. l'archevêque de Paris, sur l'œuvre du petit séminaire de son diocèse, à l'occasion de la rentrée des classes.

« Ce ne sera jamais en vain, N. T.-C. F., que, pleins d'une respectueuse confiance dans la piété profonde du Roi très-chrétien, les évêques auront fait monter vers le trône les cris d'une conscience justement alarmée. Si la voix de leurs gémissemens et de leur douleur, répétée, contre leur attente et contre leur volonté, par des échos trop prompts peut-être à rendre la plainte et les soupirs, semble d'abord se perdre dans l'air comme le son de la cymbale retentissante, l'empire de la vérité qu'elle exprime finit toujours par l'élever au-dessus des reproches de la précipitation ou de l'injustice. C'est une heureuse nécessité qui subsistera autant que la France demeurera chrétienne, que sa monarchie et son épiscopat se comprendront toujours, comme toujours ils se prêteront un mutuel appui. Si quelques dissentimens paroissent les éloigner un moment l'un de l'autre, de courtes explications suffisent pour dissiper bientôt tous les nuages, parce qu'il n'y a pas de mésintelligence possible ou durable, lorsque la confiance est réciproque, lorsque la foi règle le commandement, et que l'amour dicte l'obéissance.

» Après neuf mois d'inquiétudes et de craintes, N. T.-C. F., nous avons la consolation de vous annoncer que nous conserverons ces précieux établissemens, objet pour vous de tant de sacrifices, et pour nous de tant de sollicitudes; ces écoles ecclésiastiques, ces petits séminaires que les temps ont rendus indispensables, et sans lesquels il ne faudroit

plus espérer pour notre patrie de sacerdoce, ni par conséquent plus de religion, ajoutons sans hésiter, plus de paix ni de bonheur. Nous pourrons les cultiver encore avec tranquillité ces champs fertiles et pleins de fleurs que le Seigneur a bénis, comme parle l'Ecriture, d'où s'exhale déjà le parfum des vertus, en attendant les fruits de grâce dont ils doivent enrichir le monde; ces jardins du divin époux de l'Eglise fermés à la séduction des funestes discours et des exemples contagieux, où croissent, sous les yeux du Très-Haut et sous la garde la plus sévère, les ceps choisis et les plants de jeunes oliviers, d'où découleront un jour le vin et l'huile propres à guérir les plaies du genre humain. Ils vont s'ouvrir de nouveau, sous l'autorité des premiers pasteurs et sous la protection royale, ces asiles sacrés, espérance à la fois de l'Eglise et de l'Etat, où nos jeunes Samuels viennent apprendre de bonne heure à connoître les ordres du ciel, qu'ils seront ensuite chargés d'intimer à leurs frères, et à se perfectionner dans l'accomplissement d'une loi dont ils devront commander la pratique même aux plus indociles. Touché de nos larmes et de nos prières, le Seigneur a daigné mettre un terme à la cruelle épreuve sous laquelle nous étions près de succomber, tant le poids en étoit accablant, tant les angoisses en étoient vives. Il n'y a qu'un évêque qui puisse le comprendre, N. T.-C. F., et nous nous garderons bien de soulever seulement à vos yeux le voile qui cache cet abîme d'amertume où la charge pastorale nous fait quelquefois descendre. L'apôtre Saint Paul, après en avoir sondé les profondeurs, ne pouvoit dire autre chose, sinon qu'alors la vie lui étoit devenue ennuyeuse et à charge: Ita ut tæderet nos etiam vivere.

« Oui, N. T.-C. F., c'est véritablement le Seigneur qui nous a consolés, car ne craignez pas que la lassitude ou le découragement nous aient arraché une de ces compositions, qui, sans tranquilliser la conscience, ne sont pas même un sûr garant de la paix avec les hommes; ne croyez pas que, par une de ces contradictions, par une de ces légèretés capables de faire rougir un évêque, dont l'apôtre Saint Paul écartoit avec soin jusqu'au moindre soupçon, contre lesquelles Jésus-Christ lui-même, dans ses premières instructions, voulut prémunir ses disciples, notre bouche ait, en si peu de temps, proféré le oui et le non; que, trahissant enfin nos devoirs, nous soyons devenus infidèles aux prinTome 14 33

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