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brillante, qu'il obtint le premier lieu, aux applaudissemens même de ses rivaux. Peu après il fut chargé d'une chaire de Sorbonne, et devint successivement promoteur de l'officialité de Paris, censeur royal, chanoine d'Auxerre, grand-vicaire et chanoine de Laon et prieur de Gabart.

Mgr. Duvoisin était doux, gai, aimable. Il avait la repartie vive. Son penchant le portait à une plaisanterie fine, mais innocente et qui ne blessait jamais. Il ne s'était pas seulement occupé de théologie, il avait cultivé avec avantage les belles-lettres, et il n'était pas entièrement étranger à la littérature profane. Il avait également approfondi les sciences exactes, et il attribuait lui-même la rectitude de son jugement à l'étude des mathématiques. En un mot, profond théologien et catholique zélé, il était en outre savant littérateur, bon mathématicien et judicieux politique. Il joignait à un goût exquis une élocution facile et une dialectique serrée. Sa conversation même était instructive et nourrie du fruit de ses nombreuses lectures. Sans désirs, sans ambition, sa fortune était plus que médiocre, mais il savait s'en contenter et même en faire un noble usage. En décembre 1775, il reçut des éloges et des encouragemens de l'assemblée du Clergé de France, où assistaient 34 évêques, pour avoir pris en main la défense de la religion. En effet, il avait déjà publié, 1° Dissertation critique sur la vision de Constantin; Paris, 1774, in-12. Il y prouve que cette vision, telle qu'elle est rapportée par Eusèbe, est un des faits les mieux attestés de l'Histoire Ecclésiastique. 2° L'Autorité

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des livres du nouveau Testament contre les incrédules ; Paris, 1775, in-12. 3° L'Autorité des livres de Moïse, établie et défendue contre les incrédules; Paris, 1778, in-12. Il y démontre que Moïse est auteur du Pentateuque; qu'il est historien véridique et fidèle; que ce livre n'a point éprouvé d'altération, au moins assez importante, pour qu'on puisse prétendre qu'il ne nous est pas parvenu tel qu'il est sorti de la plume de Moïse, et enfin que Moïse fut législateur inspiré.

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Il publia depuis, 4° Essai polémique sur la Religion naturelle; Paris, 1780, in-12. Ce que l'auteur se prot pose dans cet ouvrage, c'est de rassembler toutes les grandes vérités morales que l'on peut découvrir par les lumières de la raison, et d'en faire voir l'insuffisance pour éclairer complètement l'homme sur ses véritables devoirs. Il montre que les religions ne sont point indifférentes, qu'il doit y en avoir une véritable, et qu'il ne peut y en avoir qu'une qui le soit; d'où résulte l'importance de l'examen pour la découvrir et s'y attacher. 5. De verâ Religione ad usum Theologiæ candidatorum; Paris, 1785, 2 vol. in-12. Ce sont les leçons qu'avait dictées l'abbé Duvoisin dans les écoles de Sorbonne, tandis qu'il y professait.

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Il avait été chargé, par le Clergé de France, de compulser tous les conciles et synodes tenus dans les Gaules, pour en extraire ce qui concernait la discipline de l'Église gallicane. On ignore jusqu'où il avait poussé ce travail qui fut interrompu par la révolution et dont il n'a rien été publié.

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Il habitait Laon lorsqu'il fut déporté en septembre 1792. Il passa en Angleterre, d'où il revint rejoindre Mgr. l'évêque de Laon à Bruxelles; mais l'invasion de la Belgique par les Français le força de quitter cette ville, et il se retira à Brunswick, où il fut obligé d'enseigner pour four-nir à ses besoins.

Ce fut là qu'il composa sa Défense de l'Ordre social, d'abord sous le titre de : 6° Examen des principes de la révolution française; 1795, in-8°. Ensuite de Défense de l'Ordre social contre les principes de la révolution française; 1798, in-8°. Ce livre, fort rare en France, fut imprimé à Londres par les soins de M. l'abbé de la Hogue. Il est remarquable par le talent et la logique pressante qui y règnent. L'auteur y établit les vrais principes du droit civil et religieux qui conviennent à tous les temps et à tous les pays. Il y discute avec autant de sagacité que d'impartialité les principes qui ont servi d'élémens à notre révolution. Il y fait voir qu'il ne pouvait en découler que des notions incomplètes de droit naturel et civil, lesquelles étaient aussi immorales que séditieuses et subversives de tout ordre public; et quoiqu'à l'époque où il écrivait, rien ne promit encore l'heureux changement dont nous avons été les témoins, d'après la lassitude du peuple, les excès où l'on était tombé et la nature des choses, il osa le prédire.

Le duc de Brunswick fut tellement satisfait de cet ouvrage, qu'il écrivit à l'abbé Duvoisin, pour le remercier du bien qu'il procurait à l'Europe, en publiant les principes sur lesquels repose essentiellement toute société, et

il accompagna sa lettre d'une tabatière ornée de son portrait et garnie de diamans.

Il composa également à Brunswick: 7° sa Démonstration Evangélique, qui y fut imprimée deux fois en 1800, in-12, et à Paris, en 1802. On sait qu'il y a une Démonstration Évangélique du savant Huet, évêque d'Avranches. C'est un livre de la plus haute et de la plus profonde érudition. Mgr. Duvoisin a travaillé sur un autre plan: son but est de défendre la religion contre ses agresseurs modernes, et de prémunir les fidèles contre leurs sophismes. Ce sujet étant d'un intérêt général, il fallait, surtout dans un moment où les attaques sont si multipliées, se mettre à la portée des lecteurs de toutes les classes, et le principal était d'être entendu.

Lors du rétablissement du culte catholique en France, l'abbé Duvoisin, qui était encore à Brunswick, fut nommé à l'évêché de Nantes. Il fut sacré à Paris le premier août 1802. Sa conduite sage et conciliante eut bientôt éteint dans son diocèse les divisions, rapproché tous les esprits et lui gagna tous les cœurs.

Dans sa Défense de l'Ordre social, Mgr. Duvoisin avait déjà posé quelques principes sur la tolérance. Il les déve loppa dans un Essai sur la Tolérance, qu'il fit joindre à la 4° édition de sa Démonstration Evangélique; Paris, 1805, in-8°. Il y démontre aux ennemis de la religion, que l'intolérance religieuse, dont l'Eglise catholique fait profession, n'est point incompatible avec la tolérance civile, telle que la prescrit une sage politique. On y trouve tout ce que l'on peut dire de raisonnable sur ce sujet.

Sans s'écarter du principe fondamental: hors de l'Eglise point de salut, pour ôter tous prétextes aux incrédules, il démontre que l'Eglise ne décide point que Dieu livre aux flammes éternelles et à la peine du sens, ceux qui n'ont pas été à portée de connaître la religion catholique, pour cela seul qu'ils ne l'ont pas connue; et il adopte l'opinion la plus douce, relativement aux enfans morts sans baptême et à certains adultes vivant parmi les infidèles et les hérétiques. Il donne moins son opinion que celles de saint Thomas, de Bossuet, de Nicolle, de la Sorbonne dans la censure d'Emile, et de M. de la Luzerne, dans son Instruction pastorale sur la révélation.

Avant de le publier, Mgr. Duvoisin consulta plusieurs évêques et autres personnes connues dans la capitale par leur piété et leurs lumières, et il le fit paraître au moment où le saint Père était à Paris, de ses sous les yeux théologiens et de plusieurs de ses cardinaux. Tous les évêques de France en eurent connaissance, et les papiers publics, qui défendent spécialement les principes religieux, le citèrent avec éloge. Cependant il parut dans la bibliothèque de l'Homme de Goût, 6°, 7o, 9° et 10° cahiers, 1805, une diatribe virulente contre l'Essai sur la Tolérance, sous le titre de Lettres d'un théologien à Mgr. Duvoisin, évêque de Nantes, dans lesquelles on défend la doctrine catholique contre les graves erreurs de ce prélat. Ces lettres furent répandues avec profusion dans le diocèse de Nantes. L'auteur de ces libelles, M. Lucet, y traitait les prétendues erreurs de Mgr. l'évêque de Nantes,

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