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Les risques qui naissent de la prohibition de l'entrée d'une marchandise, au lieu de destination, ont-ils le caractère de RISQUES DE TERRE et non celui de RISQUES DE MER? (Rés. aff. )

Les assureurs sont-ils de droit affranchis de ces risques, lorsqu'ils ne s'y sont pas expressément soumis? (Rés. aff. )

En conséquence, et lorsque la marchandise arrivée au lieu de la destination ne peut y étre introduite, à cause de la prohibition dont elle est frappée par les lois du pays, les assureurs, qui n'ont pas garanti la contrebande, doivent-ils supporter, comme avaries, le surcroit de fret, les dépenses et autres dommages occasionés à la marchandise assurée par la nécessité où a été le capitaine de s'éloigner du port de destination et de transporter la marchandise en d'autres lieux? (Rés. nég. )

Les assureurs sont-ils garans des suites du déroutement forcé par la prohibition d'entrée, au lieu du reste, par cela seul que l'assurance a été prise pour compte d'un individu de la nation dont les produits sont prohibés et sous telle simulation ou dénomination de pour compte que portent les connaissemens ? (Rés. nég.)

(Guerrero contre Assureurs.)

LE 29 janvier 1825, le sieur Guerrero fait assurer, pour compte de qui il appartiendra, la somme de 15,000 fr., sur facultés quelconques, chargées à bord du brick anglo-américain le Diligent, capitaine Tristan Jordan, de sortie de Cadix à Arica ou Quiloa, ou tout autre port de la mer du sud, permis de toucher à Gibraltar.

Ce risque est souscrit par la compagnie d'assurances générales.

Les 20 et 22 mars 1825, le sieur Guerrero fait encore assurer sur facultés du même navire, d'ordre des sieurs J. Martin de Tejada frères, de Cadix, pour compte espagnol, sous telle simulation ou dénomination de pour compte que porteraient les connaissemens, une somme de 68,250 fr., de sortie de Gibraltar jusqu'à Arica, Lima et tous autres endroits de la mer du sud, quitte au lieu de l'entière décharge, permis au capitaine de toucher partout où bon lui semblera, d'y vendre ou échanger le tout ou partie des facultés, pour le produit être porté au lieu du reste.

Ce dernier risque est souscrit par la compagnie d'assurances générales et par divers assureurs particuliers de la place de Marseille.

Le 6 mars 1825, le navire le Diligent part de Gibraltar pour sa destination.

Le 4 juillet suivant, il arrive devant Arica sans avoir éprouvé aucun accident.

Le subrécargue et le second du navire s'embarquent dans le canot et se rendent au port d'Arica, s'informer de l'état du gouvernement de ce

pour

pays.

Le lieutenant John Perceval, commandant la goëlette des Etats-Unis le Dauphin, ancrée dans le port d'Arica, leur apprend que le Pérou n'était plus sous la domination de l'Espagne et qu'un décret du gouvernement prohibait l'introduction de toute denrée ou produit des manufactures espagnoles dans le Pérou, sous peine de confiscation.

Une copie de ce décret est remise par le consul des Etats-Unis au capitaine Jordan, à bord de la goëlette le Dauphin.

Le capitaine écrit au sieur Butter de Tagua, consignataire du chargement à Arica, pour lui demander ses ordres.

Il n'en reçoit aucune réponse.

Il prend alors l'avis du consul des Etats-Unis et du commandant de la goëlette.

On lui conseille de ne pas rester plus long-temps devant Arica et de faire voile pour quelque port du Chili où l'introduction de la cargaison n'était pas prohibée.

Le capitaine Jordan se conforme à ces avis, et, le 8 juillet 1825, il fait voile pour Coquimbo.

Le 1er août, il arrive heureusement devant ce dernier port, après avoir jeté à la mer, par ordre du subrécargue, quelques caisses contenant des armes qui auraient pu compromettre la cargaison.

Il débarque une partie de son chargement à Coquimbo.

Le 14 octobre, il dirige le navire sur Gayaquil; il y arrive le 3 novembre et y débarque les marchandises destinées pour ce port.

Tous ces faits sont consignés dans le consulat fait, le 6 septembre 1826, à Gibraltar, par le capitaine Jordan, à son retour de la mer du sud.

Le 8 août 1825, le subrécargue du navire le Diligent avait écrit de Coquimbo au sieur Guerrero à Marseille, pour instruire les intéressés à l'expédition du déroutement forcé du navire, motivé sur la prohibition de l'entrée du chargement à Arica, et de la confiscation d'une partie de ce chargement à Coquimbo.

Les 22 et 25 avril 1826, le sieur Guerrero, se fondant sur cette lettre, fait abandon à ses assureurs des facultés assurées, pour cause de déroutement forcé du navire, suivi de prise du charge

ment.

Le 8 décembre suivant, il signifie désistement et, commuant son action d'abandon en action d'avarie, il cite les assureurs devant le tribunal de commerce de Marseille, pour voir procéder au réglement et à la répartition des avaries souffertes par les facultés chargées sur le brick le Diligent.

Le sieur Guerrero fait consister ces avaries dans le surcroit de fret et de dépenses occasionés par la nécessité qui avait obligé le capitaine du Diligent à s'éloigner, avec son chargement, du port d'Arica et à débarquer les marchandises dans d'autres lieux où elles n'avaient pu être vendues qu'avec perte.

Il soutient que ces dépenses et ces pertes étant une suite du déroutement forcé du navire, elles sont à la charge des assureurs, aux termes de l'art. 350 du code de commerce; que les assureurs doivent en être tenus avec d'autant plus de raison que, d'après les termes de la première police, l'assurance était prise pour compte de qui il appartiendrait, et que, d'après les dernières polices, l'assurance avait lieu pour compte espagnol, sous telle simulation ou dénomination de pour compte que porteraient les connaissemens, clauses qui ne permettent pas aux assureurs d'exciper de la nationalité du chargement pour se plaindre d'une réticence, sur ce point, et pour rejeter sur l'assuré les pertes ou dommages provenus de la prohibition des marchandises assurées à l'un des lieux de destination indiqués dans les polices.

La défense des assureurs est suffisamment indiquée dans les motifs du jugement.

JUGEMENT.

«Considérant, en droit, que, d'après l'art. 350 du code de commerce, les pertes ou dommages qui arrivent aux objets assurés ne sont à la charge des assureurs qu'autant que ces pertes ou dommages proviennent de fortune de mer;

«Que, d'après l'art. 351, tout changement de route, de voyage ou de vaisseau, et toutes pertes et dommages provenans 'du fait de l'assuré ne sont point à la charge des

assureurs ;

« Considérant qu'un négociant qui fait une expédition doit tout premièrement s'assurer qu'aucune loi de douane ou décret de gouvernement ne s'oppose à l'entrée de cette expédition;

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