Page images
PDF
EPUB

nités sont étrangers et à la protection accordée au pavillon et au respect que le pavillon doit obtenir

en mer.

Le premier moyen des assureurs est donc inadmissible.

[ocr errors]

Il n'y a aucune faute reprochable à raison de la nature du chargement.

Les assureurs ont dit: Le capitaine a chargé à bord du navire des marchandises qui sont contrebande de guerre ce fait constitue une faute, et cette faute a occasioné le sinistre ou la prise. Or, les assureurs ne répondent point de la faute, puisque le capitaine est étranger: donc la perte doit demeurer au compte des assurés.

La réponse est qu'aucun des objets chargés n'était contrebande de guerre; que, par suite, il n'existe aucune faute et que la perte est à la charge des assureurs.

Les objets qualifiés contrebande de guerre par les assureurs consistent :

En 13 caissons soufre purifié,

90 caissons soufre en canon,
13 colis cordes de chanvre,
Quelques cordages goudronnés,

Diverses barriques et sacs de biscuits.

Mais il ne suffit pas d'alléguer que ces objets sont contrebande de guerre, il faut encore le prouver. La preuve de la faute doit être fournie par celui qui en excipe (1).

(1) Emerigon, tom. I, pag. 366.

Les assureurs ont voulu induire la preuve, 1o des traités intervenus entre diverses nations; 2° de* l'opinion de quelques publicistes.

Occupons-nous d'abord des traités et remontons à leur origine.

Avant le xvme siècle, l'absence de dispositions uniformes et de nomenclature bien établie sur les objets qui devaient être qualifiés contrebande de guerre avait été sentie : les gouvernemens européens y avaient remédié par des déclarations et des traités qui s'accordaient à déclarer que les objets servant d'instrumens à la guerre pouvaient être saisis sur les navires neutres par les sujets des états belligérans. Ces déclarations et ces traités sont infiniment nombreux : on en trouve l'indication dans l'ouvrage de Grotius intitulé : De jure belli et pacis.

Plus tard, les ordonnances des Rois de France, celle de 1543, art. 42; celle de 1584, art. 69 et celle de 1681, tit. des Prises, art. 11, déterminèrent les objets de contrebande de guerre, et dé signèrent spécialement et exclusivement, comme tels, les armes, poudre, boulets, et autres munitions de guerre.

Tel était et tel est encore aujourd'hui le droit commun des nations sur cette matière.

Cependant l'intérêt et la position de quelques puissances ont fait ajouter, dans des traités particuliers et postérieurs, aux objets d'un rapport direct à la guerre et seuls désignés jusqu'alors comme contrebande, une infinité d'autres objets qui

n'ont qu'un rapport indirect avec les munitions de guerre proprement dites.

Les assureurs invoquent ces derniers traités, parce que quelques-uns mentionnent, comme objets de contrebande, le soufre et les cordages: ils ajoutent que les dispositions de ces traités sont devenues additionnelles au droit commun, qu'elles le constituent, en quelque sorte, et que, dès-lors, tous les objets servant indirectement à la guerre et à son usage médiat sont contrebande de guerre, aussi bien que ceux qui y servent directement et qui y sont d'un usage immédiat.

Mais c'est en ce point précisément point précisément que réside le vice du système des assureurs. Pour s'en convaincre, il suffit de rappeler les traités qu'ils ont invoqués, et de signaler tout ce que leur existence même a d'incompatible avec les conséquences qu'ils en ont tirées.

Dans le but d'établir que les chanvres et les cordages sont contrebande de guerre, suivant le droit commun des nations, les assureurs citent :

Un traité du 10 octobre 1742, entre la France et le Danemarck;

Un traité du 12 ventôsc an v, entre la France et les Etats-Unis;

Un traité du 19 novembre 1794, entre l'Angleterre et les Etats-Unis.

Relativement aux soufres, ils citent:

Le traité de 1769, entre la France et Hambourg

Celui du 20 juin 1766, entre l'Angleterre et la Russie;

Celui du 28 février 1780, entre la France et la Russie.

L'ordonnance de l'impératrice de Russie du 19 mai 1789;

Le traité du 21 fevrier 1797, entre la France et l'Angleterre ;

La convention maritime du 17 juin 1801, entre les mêmes puissances.

[ocr errors]

Et relativement aux comestibles, ils citent la loi du 9 mai 1793 rendue par le gouvernement français par représailles contre les Anglais, et l'opinion des auteurs.

Mais ces traités, ces conventions, ces ordonnances et ces lois ne forment point le droit commun des nations, et loin qu'on puisse en induire que le soufre, le chanvre, les cordages et les comestibles sont contrebande de guerre, toujours d'après le droit commun des nations, il y a lieu d'induire une conséquence toute contraire soit de leur existence, soit de leur contenu.

Une conséquence contraire résulte de leur existence; car, si le droit commun était conforme à ces traités, ils auraient été inutiles.

Une conséquence contraire résulte de leur contenu, puisque ces traités sont particuliers, obligatoires seulement pour les puissances et les sujets des puissances qui les ont souscrits, et par cela même, étrangers aux autres puissances et aux sujels des autres puissances.

Bien plus outre qu'ils ont été dictés sous l'influence de circonstances particulières et que leurs dispositions n'ont pas été adoptées par toutes les nations, ou ont été révoquées par des traités postérieurs, ces traités offrent entr'eux des divergences notables les uns placent le soufre au nombre des objets de contrebande; les autres ne l'y comprennent pas les uns y placent le chanvre, les autres n'en font aucune mention.

Et, dès-lors, si les assureurs invoquent ceux des traités. qui mettent le soufre au nombre des objets de contrebande, les assurés, à leur tour, peuvent invoquer ceux qui ne l'y mettent pas. Il en est de même pour les chanvres et pour les cordages.

D'ailleurs les traités n'étant point uniformes, on ne peut les invoquer dans leur ensemble les assureurs sont donc réduits à les invoquer séparément, et, de plus, à présenter chaque traité ou la réunion de quelques traités pris isolément comme formant le droit commun. Or, il est absurde de soutenir qu'un traité particulier à une nation forme le droit commun des autres nations; car, c'est prétendre, en d'autres termes, que le droit commun à tous les peuples n'est rien autre que le droit particulier à chaque peuple, ou, mieux encore, c'est multiplier le droit commun dans l'exacte proportion du nombre des peuples; et arriver à ce point, c'est nier l'existence d'un droit

commun.

Tel est le résultat du système des assureurs.

En admettant même ce système, il y aurait

« PreviousContinue »