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racines, et d'y planter avant l'hyver des ormes de la grosseur de ceux qu'on plante ordinairement sur les routes.

Si le terrein à une certaine profondeur et qu'il soit léger, il n'y a pas d'inconvénient de les enfoncer de quinze à dix-huit pouces ; mais s'il a peu de profondeur et que le fond soit composé de matières calcaires, de tuf, de glaise ou de sable, il faut les planter à trois ou quatre pouces au dessus de ces matières, et faire une butte avec la terre des environs, pour que l'arbre se trouve enterré à douze ou quinze pouces au plus. (Je renvoie pour les détails, à mes réflexions sur les plantations particulières). En plantant ces arbres à environ quinze pieds de distance, on peut être certain que leurs racines qui s'étendent prodigieusement à la superficie, et qui fournissent une trèsgrande quantité de drageons, meubleront le terrein; et qu'en très-peu de tems, ces parties se trouveront parfaitement remplies et égaleront en hauteur le reste du faillis.

J'ai eu occasion d'observer, qu'au bas du village de Gondreville sur la route de Paris à Soissons, où finit le buisson de Tillet, il y avait, il y a environ 25 ans, un angle très-rentrant, absolument couvert de ronces et d'épines qui ont été remplacées par quelques ormes plantés à une distance beaucoup plus grande que celle que j'indique, et qu'aujourd'hui non-seulement ces arbres égalent, en hauteur et en grosseur les plus grands chênes du taillis, mais qu'ils ont couvert le terrein d'une infinité de drageons dont la majeure partie forme déjà de beaux arbres. Cette observation fournit un moyen aussi simple que peu dispendieux pour replanter ces parties qui, dans trente ans peuvent nous fournir une grande quantité de bois de charronnage, dont la disette se fait sentir d'une manière effrayante: car on ne peut trop le répéter, les moyens économiques bien raisonnés et qui s'accordent avec la bonne culture des bois, sont les seuls que le gouvernement doive employer pour parvenir plus promptement à une amélioration générale. (J'observe que cet angle rentrant tient immédiatement aux peupliers d'Italie plantés par M. Bezin et dont j'ai parlé; si l'on se souvient de la mauvaise qualité du terrein dont j'ai rendu compte e peut douter du succès dans ceux qui se trouveront meilleurs ).

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RÉFLEXIONS

Sur les Plantations particulières.

LES plantations particulières doivent être régardées comme le complément de nos forèts, elles sont d'autant plus précieuses, qu'elles seules nous fournissent l'orme qui est le principal bois de charonnage; ainsi que la majeure partie des frênes qu'on employe dans cette partie si essentielle du labourage; et que l'élagage de leurs branches, celui des diverses espèces de peupliers et des saules dont les prairies sont toujours bordées, procurent des échalats pour les vignes, les rames néces saires aux légumes des potagers et les treillages les plus ordinaires pour les espaliers; indépendemment d'une très-grande quantité de fagots, si utile aux habitans de la campagne en général, pour cuir le pain et se procurer le feu dont ils ont momentanément besoin dans toutes les saisons, en quittant le travail aux heures des repas.

Cette ressource deviendrait immense, si tous les petits terreins incultes tenant aux propriétés particulières, ainsi que les berges de beaucoup de pièces de terre et les larris, étaient plantés d'espèces analogues à ces divers terreins ( * ).

Mais les dévastations inouies qu'éprouve cette espèce

( * ) J'aurai occasion de traiter cette partie plus à fond dans un mémoire sur les objets les plus essentiels do l'économie politique, que je me propose de publier in

cessamment.

de propriété, par le défaut de police) sont d'autant plus nuisibles à l'état, qu'après des dépenses considérables, il ne reste aux bons citoyens qui ont voulu donner l'exemple, que le regret de l'avoir entrepris, et qu'elles étouffent pour jamais dans les autres le desir de

les imiter.

Ce brigandage qui paraît assez général, est porté dans certains arrondissemens, à un degré dont il est difficile de se faire une idée sans en avoir été le témoin.

Celui de Senlis présente du côté de Crépy, qui en fait partie, beaucoup de ces petits terreins incultes, qui paraissaient condamnés à une perpétuelle stérilité; après en avoir fait sonder plusieurs, et reconnu leur nature, j'ai planté des ormes et des frènes dans ceux qui m'ont paru les meilleurs; et dans les autres, des peupliers d'Italie, et ceux connus sous le nom grisard; ( cette espèce ne me parait être qu'un beau tremble, approchant de celle du peuplier de Hollande, elle a cela d'avantageux, qu'elle croît dans tous les terreins secs ou humides.) Le peuplier d'Italie est le seul qui n'ait pas réussi : mais j'ai eu la douleur de voir détruire chaque année au moins la moitié des autres.

Espérant toujours que les brigands seraient punis, ou qu'ils se lasseraient de détruire, j'ai eu le courage de toujours remplacer; et les premiers plantés qui ont échappé à la destruction, sont de la plus grande beauté.

Beaucoup de propriétaires avaient suivi mon exemple ils ont essuié le même sort; et après quelques remplacemens presqu'aussitôt détruits, ils ont fini par tout abandonner; et il reste à peine aujourd'hui quelques traces de leurs travaux et de leurs dépenses; à l'exception d'un seul dont l'amour du bien public et la grande fortune lui permettent de faire de grands sacrifices.

La partie de l'arrondissement depuis Senlis jusqu'à

Crépy, et beaucoup au-delà, ne présente que de grandes plaines environnées de collines, pour la plus-part incultes et d'un aspect désagréable, et n'offre rien autre chose que des grains éloignée des vignobles, le prix excessif du vin dans les années de disette qui sont très-fréquentes, étant ruineux pour les laboureurs par l'augmentation énorme des frais de culture qu'il occasionne; les bons citoyens instruits désiraient depuis long-tems, qu'on plantât des pommiers; le code rural en donnant la faculté de se clore, me détermina à l'entreprendre, dans l'espérance d'avoir des imitateurs. La difficulté était de trouver des terreins propres à cette nouvelle culture.

En faisant faire des fossés autour de quelques pièces de terre, j'observerai qu'elles avaient beaucoup d'analogie avec celles de la Normandie, qui fournissent le meilleur cidre ; je fis sonder exactement, et cette opération en confirmant mon opinion, me détermina à y planter des pommiers; d'anciens correspondans de commerce m'en envoyèrent six cents des meilleurs cantons de la Normandie. Je faisais un grand sacrifice, car le transport à quatrevingt-dix lieues triplait le prix de l'acquisition des arbres.

Après avoir fait faire des fossés de quatre pieds de largeur sur deux et demi environ de profondeur, d'après la nouvelle loi, j'en fis jetter les déblais du côté des pièces que je voulais planter, et j'espaçai les arbres à dix-huit pieds.

On conçoit aisément, que plantés dans un terrein nouvellement remué, et qui augmentait si considérablement l'épaisseur de l'ancien, ils ont du pousser avec vigueur; j'avais présidé à leur plantation, et il n'en périt aucun. Pour sûreté, je les fis empailler à une certaine hauteur, je fis mettre un tuteur à chacun et recouvrir le tout d'épines.

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Le croira-t-on? A peine les plantations finies, on m'en

enleva plusieurs, sans doute pour les transplanter ailleurs et s'en procurer l'espèce. Pour parer à cet inconvénient, je les fis garder la nuit, jusqu'à ce qu'étant en pleine sêve, il n'y eut plus de motif pour les prendre.

L'hyver suivant, on arracha les épines pour emporter les tuteurs, et on en coupa un grand nombre des plus beaux; comme je les avais planté étant déjà forts, et que j'y avais laissé beaucoup de tête, au bout de trois ans, ils rapportèrent des pommes dont je n'eus pas la satisfaction de voir une seule en maturité : dès la fin de juillet, elles furent abattues à coups de bâton, qui détruisirent l'espérance de l'année suivante, et ce brigandage se renouvelle tous les ans.

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De quatre pièces, dont l'une de douze arpents, l'autre de huit une de sept et enfin une de trois il ne m'en reste que deux, ayant été obligé, faute de trouver des sujets pour remplacer, d'enlever ceux restant sur les deux dernières pièces, pour regarnir les deux autres, desquels on a déjà coupé et emporté le sixième. D'après mon exposé, on se persuade aisément que les arbres doivent être fort rares dans ce canton. Pour obvier autant que possible à l'inconvénient des hannetons ; j'avais planté sur les berges des pièces et les petites parties incultes qui avoisinent mes pommiers, des arbres de différentes espèces, pour faire diversions, ou du moins rendre moins sensible les dégats de ces insectes destructeurs; ils ont été coupés presqu'en totalité, et depuis quatre-vingt onze, je les ai renouvellé à-peu-près six

fois.

Un seul fait suffira pour prouver la protection qu'on accorde aux planteurs.

La loi concernant les biens et usages ruraux est du 2 septembre 1791, elle défend expressément l'entrée des bestiaux dans les enclos ruraux, d'en remplir les fossés,

d'en

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