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dont il y a été satisfait. L'ingénieur y fait mention de la pose du repère définitif, et, pour en définir la position, le rattache à des points fixes servant de contre-repères. Si les travaux exécutés sont conformes aux dispositions prescrites, l'ingénieur en propose la réception et transmet le procès-verbal de récolement à l'ingénieur en chef, qui le soumet, avec son avis, à l'approbation du préfet. » Une expédition de ce procès-verbal doit toujours rester déposée à la mairie de la situation des lieux.

« Lorsque les travaux ne sont pas entièrement conformes aux dispositions prescrites, l'ingénieur, à la suite du procèsverbal de récolement, discute les différences, et il y joint, au besoin, de nouveaux dessins, pour rendre plus facile la comparaison de l'état de choses qui existe avec celui qui a été prescrit. » Si les différences reconnues sont peu importantes et ne donnent lieu à aucune réclamation, le préfet ou le ministre, ou le pouvoir exécutif, en légitiment l'existence suivant les règles de leur compétence respective exposées plus haut'. S'il s'agit, au contraire, de différences notables et qui seraient de nature à causer des dommages, les préfets, usant du pouvoir de police dont nous les avons déjà montrés investis, mettent immédiatement le permissionnaire en demeure de satisfaire aux prescriptions de l'acte d'autorisation, et, en cas de refus ou de négligence de sa part, ordonnent la mise en chômage de l'usine, et même, s'il y a lieu, la destruction des ouvrages dommageables, sans préjudice, bien entendu, des poursuites pour délit ou contravention devant qui de droit 3.

349. Lorsque, dans le délai fixé pour l'exécution des travaux, ou, s'il n'a été fixé aucun délai, après un terme suffisant, il n'a été donné aucune suite à l'autorisation ou concession

1 V. n. 337 et suiv.

2 V. n. 195, 262.

3 Conseil d'État, 21 février 1850 (Sicard-Duval).

TOME I.

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obtenue, l'administration a la faculté de la regarder comme <«< une lettre morte1.» C'est ainsi qu'il a été jugé que, la pente des cours d'eau n'étant pas susceptible de propriété privée, la concession de l'emploi de cette pente n'est faite par l'administration qu'à la condition d'user de la faculté concédée; qu'il appartient, en conséquence, au ministre des travaux publics d'apprécier, sauf recours au Conseil d'Etat, si, à raison des circonstances, le concessionnaire ne doit être considéré comme déchu de l'autorisation dont il n'a pas usé 2.

pas

Cette doctrine, admise par le Conseil d'Etat, est conforme aux principes qui attribuent à l'administration l'appréciation de tous les droits ayant les eaux, leurs pentes, leurs lits pour objet. Nous croyons même qu'ici ces principes ont été restreints dans leurs effets bien plutôt qu'étendus; selon nous, la décision qui, en pareil cas, aurait été prise par le ministre ne serait pas susceptible de recours par la voie contentieuse.

350. Jusqu'à présent, nous avons supposé que l'administration avait répondu favorablement à la demande en concession d'eau ou en autorisation d'usine hydraulique, et que le pétitionnaire était satisfait des conditions auxquelles se trouvait subordonné l'exercice de la permission accordée. Mais il faut prévoir le cas contraire; car, à la demande d'autorisation, l'autorité peut répondre par un refus; ou, tout en accordant, elle peut imposer au permissionnaire des conditions que celui-ci ne serait pas disposé à accepter, ou qui se raient de nature à porter un préjudice plus ou moins réel à des tiers.

Il s'agit maintenant d'examiner quelles voies de recours

1 Avis du ministre des trav. publ., dans une affaire Magnier voir Lebon, Arrêts du Conseil, vol. de 1852, p. 453.

* Conseil d'Etat, 18 novembre 1852 (Magnier).

devraient être employées par le pétitionnaire et par les tiers qui se prétendraient lésés.

351. Les recours auxquels peuvent donner lieu les décisions en question sont dirigés, soit directement contre l'acte même de l'administration, soit contre les effets qu'entraîne la mise à exécution de cet acte.

Il est possible de cumuler ces deux sortes de recours, ou d'en user successivement. L'insuccès du pourvoi formé contré la décision de l'autorité administrative n'empêche pas la recevabilité de l'action qui serait motivée sur des faits nuisibles, résultant de cette même décision; ce pourvoi et cette action n'ayant ni le même objet, ni le même but, les deux solutions qui les termineraient ne constitueraient pas de chose jugée l'une à l'égard de l'autre.

352. La nature de la décision, acte administratif, exige que le recours qui est dirigé contre elle, offre le même caractère; il doit être adressé aux autorités administratives; et, selon les circonstances qui vont être indiquées, on le forme, soit par la voie purement administrative, soit par la voie contentieuse au Conseil d'État.

353. Parlons d'abord du recours contentieux.

Il faut appliquer aux décisions rendues sur les demandes en autorisation, et cela à raison de leur caractère, la règle générale, qui veut que les actes d'administration publique ne puissent être attaqués par la voie contentieuse que pour contravention aux lois et règlements de la matière 1.

Ici donc, les seuls motifs qui rendraient le recours recevable seraient l'inobservation des formalités substantielles de l'instruction administrative, telles que le défaut de publicité donnée à la demande, l'omission de la première enquête, le refus de recevoir les oppositions des tiers, etc.; ou l'incom

1 Conseil d'Etat, 31 mai 1851 (Fresnel); id., 2 août 1851 (Ville d'Elne); id., 19 avril 1855 (Scharff).

pétence de l'autorité qui aurait rendu la décision; ou encore, la prétention que cette autorité aurait de régler le sort de droits dont l'exercice serait réclamé en dehors des limites du cours d'eau; etc.

On regarderait, au contraire, comme non recevables à se pourvoir au contentieux ceux qui se plaindraient de ce qu'à leur demande l'autorité compétente a répondu par un refus'; ceux qui voudraient faire réformer ou annuler les conditions auxquelles l'autorisation a été subordonnée, comme trop onéreuses ou comme préjudiciables à des droits antérieurs sur les eaux ; les tiers qui prétendraient présenter à nouveau des réclamations contre la demande, alors qu'avant qu'elle ait été accueillie ils ont été invités par une publication régulière à faire valoir, dans le cours de l'instruction, les objections que cette demande pouvait soulever 4.

2

354. Le recours administratif de la part tant du pétitionnaire que des tiers est possible, au contraire, dans tous les cas, soit par la voie d'appel, lorsqu'il s'agit de déférer au chef hiérarchique, c'est-à-dire au ministre des travaux publics, un arrêté pris par le préfet, soit par la voie amiable et gracieuse, lorsqu'on demande la révision de la décision à l'autorité même dont elle émane.

Lorsqu'on se pourvoit administrativement contre les décisions préfectorales définitives, on le fait au moyen de requêtes adressées au ministre des travaux publics, soit directement, soit par l'intermédiaire des préfets eux-mêmes.

1 Conseil d'Etat, 9 février 1850 (Lecul); id., 20 juillet 1854 (Malpertuis). 2 Conseil d'Etat, 31 mai 1851 (Fresnel).

Conseil d'Etat, 6 mai 1818 Hloudèlière); id., 8 juin 1850 (Quénisset); id., 22 mars 1851 (Noé).

* Conseil d'Etat, 21 avril 1848 (Lepetit); id., 11 janvier 1851 (de Capol); id., 1er mars 1851 (Dambrin de Calménil); id., 7 décembre 1854 (Morin-Renaudet).

Article 4, décret du 25 mais 1852.

Dès qu'il y a recours, la circulaire du ministre des travaux publics du 27 juillet 1852 recommande à ceux-ci de surseoir à l'exécution de leurs arrêtés, à moins que quelque circonstance spéciale ou quelque motif d'urgence n'en exige l'exécution immédiate.

355. Quant au recours amiable et gracieux, c'est le seul possible, évidemment, après qu'il est intervenu un arrêté ministériel, ou encore, lorsqu'il a été statué sur la demande en autorisation par un acte d'administration publique, rendu sur un avis du Conseil d'Etat. Pour ce dernier cas, notamment, le recours est introduit dans les formes de l'article 40 du décret du 22 juillet 1806: « Lorsqu'une partie se croira lésée dans ses droits ou sa propriété, par l'effet d'une décision de notre Conseil d'Etat, rendue en matière non contentieuse, elle pourra nous présenter une requête, pour, sur le rapport qui nous en sera fait, être l'affaire renvoyée, s'il y a lieu, soit à une section du Conseil d'Etat, soit à une Commission. »

Pour exercer le recours en la forme indiquée par ce règlement, il n'existe aucun délai. La pétition doit être adressée directement à l'empereur. A sa réception, elle est transmise à une Commission, qui a été formée dans le sein du Conseil d'Etat, par décret du 18 décembre 1852. Là, elle est examinée et reçoit la suite qu'elle comporte.

356. Nous arrivons maintenant aux recours qui, sans être dirigés contre les décisions mêmes, sont motivés sur les effets qu'entraîne la mise à exécution de ces décisions.

En règle générale, les actes administratifs ne régissent que les droits qui, sous le rapport de l'origine, du titre probatif et de l'exercice, ressortissent complétement à l'administration. Quant aux droits de toute autre nature, ils sont réservés tout au moins dans leur principe. C'est ainsi que le Conseil d'Etat décide constamment, en matière de cours d'eau, comme du reste en toute autre matière, que « les actes

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