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Deuxième espèce. - ARRÊT. (Roget.)

LA COUR; - Vu les art. rer. du décret du 8 juin 1806; 12 du décret du 13 août 1811; 410 et 463 du C. P.; 161 et 189 du C. d'inst. cr.; Attendu que lorsqu'une juridiction pénale statue sur une poursuite relative à un crime, délit ou contravention, il entré dans ses attributions essentielles de juger les demandes en restitution ou en dommages-intérêts qui peuvent en être la conséquence; d'où il suit que ladite juridiction peut et doit ordonner la cessation du délit, ou bien la destruction de ce qui peut en résulter; Attendu que, dès lors, l'arrêt attaqué, en constatant et punissant le fait d'un spectacle illégalement ouvert, a dû nécessairement en ordonner la clôture; · Attendu qu'une telle injonction appartenait à l'autorité judiciaire et non pas à l'autorité administrative; Attendu que la procédure a été régulière, et qu'un fait posé comme constant par l'arrêt attaqué, il a été fait une juste application de la loi pénale ;

Rejette.

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Du 24 janv. 1834. — Cour de cass. - M. Mérilhou, rapp.—

M. Crémieux, av.

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L'adjudicataire qui a été trouvé faisant la traite des bois hors des chemins désignés au cahier des charges, ne peut être excusé sous prétexte que ces chemins seraient impraticables. ARRÊT. (Prevaux.)

LA COUR; Vu les art. 39 et 202 C. for,, et l'art. 41 du tit. II de la loi du 16 octobre 1591; Attendu que les procès-verbaux régulière ment dressés par un garde forestier, le 26 juin 1832, constatent que les défendeurs ont été trouvés faisant la traite des bois d'une coupe de la forêt communale d'Apremont, hors des chemins désignés au cahier des charges; - Que ce fait constitue le délit prévu et puni par les art. 39 et 202 C. for.; - Que le mauvais état des chemins désignés à l'adjudicataire ne pouvait autoriser les défendeurs à s'affranchir du cahier des charges et des dispositions de l'art. 39, et à pratiquer de nouveaux chemins dans la forêt communale d'Apremont; Que si les chemins désignés au cahier des charges étaient devenus impraticables sans la faute de l'adjudicataire, il fallait, avant tout, le faire constater, et s'adresser à l'administration forestière pour en obtenir d'autres ; Que l'article 41 du titre II de la loi du 6 octobre 1791, qui autorise les voyageurs à passer sur les propriétés riveraines d'un chemin public, s'il est jugé impraticable par les juges de paix, n'est point applicable aux chemins tracés dans les forêts et pour leur exploitation, lesquels sont d'ailleurs régis par les dispositions spéciales du C. for. ; Dès lors, que le tribunal de Vesoul, en admettant l'exception tirée du mauvais état des chemins et de l'article 41 du titre II de la loi du 6 octobre 1591, a fait une fausse application dudit article, et, par suite, a violé les art. 39 et 202 du Code for. ; - Casse.

—Du 5 décembre 1833. — Cour de cass.

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M. Thil, rapp.

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Art. 1er. Les dispositions de l'art. 291 C. P, sont applicables aux associations de plus de vingt personnes, alors même que ces associations seraient partagées en sections d'un nombre moindre, et qu'elles ne se réuniraient pas tous les jours, ou à des jours marqués. L'autorisation donnée par le gouvernement est toujours révocable.

2. Quiconque fait partie d'une association non autorisée sera puni de deux mois à un an d'emprisonnement et de 50 à 1,000 fr. d'amende. En cas de récidive, les peines pourront être portées au double. Le condamné pourra, dans ce dernier cas, étre placé sous la surveillance de la haute police, pendant un temps qui n'excédera pas le double du maximum de la peine. L'art. 463 C. P., pourra être appliqué dans tous les cas.

3. Seront considérés comme complices et punis comme tels, ceux qui auront prété ou loué sciemment leur maison ou appartement pour une ou plusieurs réunions d'une association non autorisée.

4. Les attentats contre la súreté de l'état, commis par les associations cidessus mentionnées, pourront être déférées à la juridiction de la Chambre des pairs, conformément à l'art. 28 de la Charte constitutionnelle. Les délits politiques commis par lesdites associations seront déférés au jury, conformément à l'art. 69 de la Charte constitutionnelle. Les infractions à la présente loi et à l'art. 291 C. P. seront déférées aux tribunaux corréctionnels.

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5. Les dispositions du Code pénal, auxquelles il n'est pas dérogé par la présente loi, continueront de recevoir leur exécution.

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Observations. L'art. 291 C. P. astreignait à l'autorisation préalable du gouvernement a toute association de plus de vingt personnes, dont le but était de se réunir tous les jours ou à de certains jours marqués, pour s'occuper d'objets religieux, littéraires, politiques et autres. Le but de la loi a été, tout en continuant le principe qui a dicté cet article, de lui donner une force nouvelle, un nouveau complément. C'est ainsi qu'elle étend l'art. 291 aux associations de plus de vingt personnes, alors même que ces associations seraient partagées en sections d'un nombre moindre, et qu'elles ne se réuniraient pas tous les jours ou à des jours marqués. » C'est ainsi qu'elle aggrave les pénalités du Code pénal, et qu'elle les fait peser sur tous les membres de l'association, au lieu d'en limiter l'application aux chefs, directeurs ou administrateurs. Enfin, la juridiction qui connaît des infractions à l'art. 291 n'est plus la même la loi du 8 octobre 1830 avait rangé ces infractions dans la classe des délits politiques, et en avait confié la répression au jury: le législateur les a restituées à la police correctionnelle.

Ces dispositions, modificatives du Code pénal, ont éprouvé une vive contradiction; dans des discussions longues et approfondies, on a contesté d'abord leur nécessité, ensuite leur principe même. Nous allons présenter à nos lecteurs une analyse fidèle et exacte de ces discussions importantes ; toutes les paroles qui peuvent révéler l'esprit qui a présidé à la rédaction de la loi, le sens et les limites de ses dispositions, y seront soigneusement recueillies.

T. V.

9

Nous n'écarterons que les considérations de faits qu'il ne nous appartient point d'apprécier, et qui, si elles peuvent influer sur le vote d'une loi, en contestant son utilité, n'exercent aucune influence sur son application lorsqu'elle existe.

Les premiers orateurs ont attaqué le principe de la loi qui prohibe les associations de plus de vingt personnes sans autorisation. La liberté d'association, a-t-on dit, est un droit naturel dont il importe à la société de protéger le plein exercice. L'homme isolé est trop impuissant; dans les sciences, la littérature, l'économie sociale, de grands résultats ne sauraient être produits que par l'aggrégation des lumières et des forces. Les citoyens ont d'ailleurs besoin de s'associer pour l'usage et la conservation de leurs droits constitutionnels et politiques. On ne peut donc astreindre toute association à une autorisation préalable arbitrairement accordée ou refusée. S'il en est qui excitent de justes inquiétudes, si le Code pénal ne suffit pas pour la répression des actes coupables qui leur seraient imputés, qu'elles soient bien définies, et qu'à elles seules s'applique la loi. On promet une sorte de tolėrance aux simples réunions, aux associations utiles et innocentes; mais où sera la garantie ? Le droit de s'associer, a ajouté M. Auguste Portalis, est aussi sacré que celui de penser, il est aussi intime, il est aussi insaisissable. Jamais, à aucune époque, excepté dans les temps de tyrannie religieuse, on n'a songé à porter atteinte au droit d'association. La manifestation de ce droit a été, sous les gouvernemens mauvais, restreint dans des limites plus ou moins étroites ; mais si on a interdit aux citoyeus la faculté de se réunir, on ne leur a jamais interdit celle de s'associer (1). »

La force de ces objections n'a point été méconnue par les oraleurs qui ont soutenu le projet de loi, Quelques-uns, sans méconnaître le droit d'association, ont pensé qu'il fallait en subordonner l'exercice aux besoins de la société en général. C'est ainsi que M. Jouffroy a réduit la question à une question de fait. Quand un peuple, a dit cet orateur, a poursuivi la liberté pendant quarante ans, ce peuple s'accoutume à prendre la liberté pour la fin de la société ; de même quand après un grand désordre, une réaction se prononce en faveur de l'ordre et qu'on le rétablit, la société s'accoutume à regarder l'ordre comme la fin de la société. Mais la liberté ni l'ordre ne sont la fin de la société : ce sont les deux conditions au moyen desquelles la société va à sa fin matérielle et morale. Ainsi la fin de la société domine l'ordre et la liberté, c'est pourquoi on a toujours le droit d'ordonner, et, si je puis m'exprimer ainsi, de mesurer la liberté et l'ordre dans le plus grand intérêt de la fin de la société. Et, en effet, la quantité de liberté et la quantité d'ordre qui conviennent à une nation, varient avec la civilisation de cette nation. Il y a tel degré de civilisation et de développement d'un peuple, qui comporte un certain degré de liberté que ne permettrait pas un autre degré dé civilisation de ee même peuple. Il n'y a donc rien d'absolu, rien qui ne doive être soumis à la rectification, à l'appréciation du bon sens dans ce qu'on appelle les prin cipes de l'ordre et de la liberté. A quoi donc se réduit la question? Elle consiste tout simplement à savoir s'il convient, dans ce moment, de proclamer la liberté d'association, ou s'il n'est pas plus convenable de soumettre provisoirement le droit d'association à l'autorisation préalable du gouvernement (2).

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(1) Moniteur du 12 mars 1834, premier supplément. (2) Moniteur du 19 mars, supplément,

La même opinion paraît avoir été partagée par M. Guizot. « J'ai dit, en 1830, a déclaré ce ministre, que l'art. 291 ne figurerait pas éternellement dans les lois d'un peuple libre. Pourquoi ne le dirais-je' pas aujourd'hui ? Il viendra, je l'espère, un jour où la France pourra voir l'abolition de cet article comme un nouveau développement de sa liberté. Mais jusque-là il est de la prudence de la Chambre, et de tous les grands pouvoirs publics, de maintenir cet article qui a été maintenu en 1830; il faut même le modifier selon les besoins du tems, pour qu'il soit efficace contre les associations dangereuses aujour d'hui (1). •

M. de Rémusat a été plus loin. Je trouve dans le Code pénal le principe de la loi qui vous est demandée. Le Code pénal ne permet les associations que lorsqu'elles sont autorisées. C'est le principe de la loi actuelle. Elle cherche bien à le rendre plus efficace, à en rendre l'application moins douteuse; mais elle ne pose pas un principe nouveau. Je ne trouve pas que le droit d'association, en France, soit le droit commun. Ainsi, ce n'est point une exception qu'on propose, c'est le droit commun. La liberté d'association a été demandée, elle a été espérée pour un avenir tranquille et paisible; mais elle est restée une théorie soutenue par quelques écrivains, elle n'est point passée dans nos mœurs; ce n'est point une de ces croyances publiques et générales pour lesquelles la révolution s'est faite (2). »

D'autres orateurs ont émis la théorie que l'association était non pas un droit, mais une simple faculté ; que dans l'état social toute faculté naturelle ne recevait que de la loi, et sous les conditions que cet état réclame, le titre et le caractère de droit ; que la faculté d'association, susceptible de puissance pour le bien, l'était au moins autant pour le mal, et que précisément, sons ce dernier rapport, elle devait être astreinte à de certaines conditions; qu'elle devait donc, comme la liberté individuelle elle-même, comme la liberté de la presse, comme la propriété, être soumise à de certaines restrictions légales qui sont exigées par l'intérêt social. Nulle association ne peut arriver à une action extérieure sans tomber immédiatement dans le domaine de la loi. Aussi le législateur n'a-t-il jamais hésité, à des époques différentes, de leur imposer des conditions diverses, qui ont toujours eu pour but de tracer les limites de la sphère dans laquelle elles peuvent se mouvoir.

Tels sont les termes où se résume la discussion générale. Le principe de la loi admis, il restait à statuer sur les amendemens nombreux qui en modifiaient l'application. La loi présentait quatre ordres de questions; 1o. les conditions auxquelles il serait permis de former, non pas des réunions, car la loi ne s'y applique pas, mais des associations; 2o. les dispositions pénales qui pourraient s'appliquer soit aux contraventions, soit aux délits ; 3°. les juridictions auxquelles ils pourraient être déférées; 4o. enfin, la durée de la loi. Serait-elle perpétuelle jusqu'à abrogation, ou temporaire jusqu'à confirmation?

Sur la première question, différens systèmes étaient en présence.

Le système de la loi qui était d'exiger une autorisation préalable, de l'exiger pour toute espèce d'association, sans aucune exception.

Un second système, présenté par M. Bérenger, et auquel se rattachait un amendement de M. Isambert. Il consistait à rejeter l'autorisation préalable,

(1) Moniteur du 13 mars. (2) Moniteur du 14 mars.

et à soumettre seulement l'association à la nécessité d'une déclaration. Ce système, auquel se rattachaient le droit de dissolution et certaines précautions, s'appliquait à toutes les associations.

Un troisième système exigeait une autorisation préalable, comme dans le projet, mais la limitait aux associations politiques seulement. Tel était l'amendement de M. Taillandier.

Enfin, et dans un quatrième système, on supposait l'art. 1er. du projet voté, et on apportait de nombreuses exceptions à la disposition pour les associations relatives aux cultes, pour les sociétés littéraires, pour les associations de charité et de bienfaisance, pour les réunions électorales, etc.

Nous allons suivre rapidement l'exposé de ces différens systèmes. Voici le texte de l'amendement de M. Bérenger:

• Aucune association, quel que soit le nombre de ses membres, ne pourra se former qu'après avoir fait connaître au préfet du département, et à Paris au préfet de police, son but, ses statuts, le nom de ses fondateurs et de ses chefs, le lieu de ses réunions ; et si elle doit avoir des assemblées fixes et périodiques, les époques où elles se tiendront. Le maire de la commune, ou l'un de ses adjoints, ou membre du conseil municipal, délégué par lui, pourra toujours y assister. Il aura le droit de donner aux sociétaires l'ordre de se séparer; cet ordre devra être exécuté sur-le-champ.. Le gouvernement aura toujours aussi le droit d'ordonner, sous sa responsabilité, la dissolution immédiate des associations dont l'existence lui paraîtrait contraire à la tranquillité publique. 11 rendra compte aux Chambres, dans la plus prochaine de leurs sessions, des mesures par lui prises en conformité de la présente disposition.

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M. Bérenger a dit, pour soutenir cet amendement : « Mes principes sur le droit d'association ne sont pas absolus: je ne repousse ni n'admets complétement tout ce qui a été dit de part et d'autre sur la constitutionnalité de ce droit parmi nous. Je sais à cet égard séparer la vérité de l'erreur. Ce qui est vrai, c'est qu'on ne peut admettre l'existence d'une société sans supposer en même temps la faculté à tous les citoyens de s'unir, de grouper leurs intérêts individuels afin d'améliorer leur sort: la société elle-même n'a pas d'autre objet.... Mais là où est l'erreur, c'est que ce droit puisse être abandonné à lui-même ; c'est qu'il soit interdit à la loi civile et politique de lui imposer des conditions, car s'il dégénerait en abus, il se tournerait contre la société, il se nuirait à lui-même. Il est vrai que là se trouve un problème d'une solution difficile; car, en reconnaissant le droit ou autorisant son usage, il faut donner à la paix publique et à la société toutes les garanties qu'elles sont fondées à réclamer. Ce problème, le projet du gouvernement n'a pas cherché à le résoudre. Mon amendement diffère de ce projet en ce qu'au lieu d'imposer aux citoyens qui veulent s'associer l'obligation d'en demander l'autorisation, il leur en confère la faculté au moyen d'une simple déclaration. Laissons à la liberté ce qui ne peut se passer de liberté; reconnaissons au gouvernement, accordons-lui ce qui ne peut lui être légitimement refusé, le droit de surveiller et même de dissoudre, dans le cas où il y aurait danger pour l'ordre public; mais n'allons pas au delà; ni le gouvernement ni l'ordre public ne sont intéressés dans la question (1).

Cet amendement, fortement combattu par M. de Broglie, n'a point été adopté.

(1) Moniteur du 18 mars.

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