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ART. 1277.

MENACES VERBALES.-ORDRE DE NE PAS FAIRE.

La menace verbale avec ordre ou sous condition, punie par l'art. 307, C. P.,comprend la menace sous condition de ne pas faire, de s'abstenir, comme celle de faire.

Le tribunal correctionnel d'Auxerre a appliqué, par jugement du 15 octobre 1833, les peines de l'art. 307, C. P., au sieur Joyuon qui, en parlant du Maire de sa commune, lequel avait fait une visite sur ses propriétés, avait dit hautement que s'il recommençait, il lui en arriverait mal et pourrait rédiger son acte de décès avant de sortir de chez lui. Ce propos constituait-il la menace sous condition prévue par l'art. 307? On a dit pour la négative qu'il rentrait dans la classe des injures; qu'il ne pouvait être qualifié de menaces dans le sens de l'art. 223, C. P., puisque ce n'était point en s'adressant au maire lui-même qu'il avait été tenu ; qu'il ne pouvait être qualifié de menace avec ordre ou sous condition, parce que le sens de ces mots de l'art. 307 est déterminé par ceux qui finissent l'art. 305; d'où il suit que la Joi a voulu punir l'ordre de faire et non l'ordre de ne pas faire ou la défense; qu'en effet la menace avec défense de faire est la moins grave de toutes les menaces, puisqu'elle n'entraîne aucun péril prochain et imminent; et que la loi n'ayant pas puni la menace verbale lorsqu'elle est faite sans ordre ni condition (arr. Cass. 9 janvier 1818), à plus forte raisou la menace avec défense de faire doit rester impunie puisqu'elle offre moins de péril encore. Ce système n'a point été accueilli.

ARRET.

LA COUR,—Attendu que la mènace verbale faite sous condition, prévue et punie par l'art. 307, C. P., comprend dans la généralité de ses termes, la menace sous condition de ne pas faire, de s'abstenir, comme celle de faire; et que d'après les faits déclarés constants par le jugement attaqué, la peine a été légalement appliquée ; rejette.

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Le procès-verbal dressé par un maire ou un adjoint de maire, pour constater un délit ou une contravention, est exempt de la formalité de l'enregistrement.

Les procès-verbaux qui sont soumis a cette formalité ne sont pas

nuls, par cela seul qu'ils ne sont pas enregistrés, s'ils intéressent l'ordre et la vindicte publique. (L. 22 frimaire an 7. ) (1)

:

Le nommé Mazantès était traduit devant le tribunal de police du canton de Beaumont, pour vol de haricots en pied et de pommes de terre, commis pendant la nuit le tribunal déclara le procès-verbal qui avait été dressé par l'adjoint de la commune, nul, faute d'enregistrement, et statuant au fond, il renvoya le prévenu de la plainte. Le Procureur général à la cour de cassation a déféré ce jugement à cette cour pour incompétence et pour violation de la loi. L'incompétence était évidente, puisqu'il s'agissait d'un vol de récoltes, commis la nuit (Art. 388, C. P. ); à l'egard de la 2 nullité, le réquisitoire du Procureur général portait ce qui suit:

D

. Ce tribunal a commis une violation des lois de la matière en prononçant la nullité pour défaut d'enregistrement d'un acte qui n'était pas soumis à cette formalité. En effet, la loi du 22 frimaire an 7, dans son art. 70 ($ 3 n° 9) comprend au nombre des actes exempts de la formalité de l'enregistrement : tous les actes et procès-verbaux et jugements concernant la police générale et de sûreté et la vindicte publique. Ce même a:ticle n'établit d'exception à cette règle, que pour les actes et procès-verbaux des Huissiers et Gendarmes.Leprocès-verbal dressé par l'adjoint de la commune de Ganviés n'était donc pas soumis par la loi à l'enregistrement. En supposant même qu'il y fût soumis, le défaut d'enregistrement n'aurait pas été une cause suffisante de nullité, et le tribunal de simple police de Beaumont aurait encore violé la loi du 22 frimaire an 7, en prononçant, pour ce motif, la nullité du procès-verbal. En effet, il résulte du rapprochement des art. 34 et 47 de cette loi, que la nllité des actes pour défaut d'enregistrement n'est prononcée, que dans les seuls cas où il s'agit de jugements à rendre en faveur des particuliers; mais que pour les actes qui intéressent l'ordre et la vindicte publique, la loi a voulu leur conserver toute leur force et ne pas subordonner leur effet aux intérêts pécuniaires du fisc, sauf le recouvrement, de ses droits à la charge de qui il appartient.

ARRÊT.

LA COUR; Vu le réquisitoire ci-dessus, et adoptant les motifs qui y sont exprimés: Casse, dans l'interêt de la loi,

etc.

Du 4 janvier 1834.- Cour de cass.-M. de Ricard, rapp.

(1) Ce principe a souvent été consacré par la jurisprudence à l'égard des procès-verbaux des gendarmes, (voy. arr cass., 5 mars 1819, 18 février 1820, a août 1828, et 23 février et 27 juillet 1827, etc.) M. Mourre soutint même dans le réquisitoire qui précède l'arrêt du 23 février 1827, que la loi du 22 frimaire an 7 n'avait assujetti à l'enregistrement que les actes des gendarmes qui sont de même nature que ceux des huissiers, tels que les exploits ou notifications, mais que les procès-verbaux destinés à constater les délits sont tout-à-fait cxempts de cette formalité : la Cour de cassation ne s'est point expliquée sur cette distinction.

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Il n'est pas exigé, à peine de nullité, que le rapport en matière de douanes et dans le cas de saisie, soit rédigé le jour même de la saisie. Il suffit qu'entre le transport des objets saisis et la rédaction du procès-verbal, il n'y ait eu d'autre intervalle que celui qui a été nécessité par l'impossibilité légale de procéder à la saisie.

ARRÊT. (Dom. Montauban.)

LA COUR ; Vu le mémoire en cassation présenté à la Cour pour l'administration des douanes, contre François et Dominique MontaubanCampet et consorts, défendeurs ; -Vu aussi l'article 11, titre iv, de la loi du 9 floréal an VII, portant que les rapports revêtus des formes prescrites par cette loi, seront crus jusqu'à inscription de faux, et que les tribunaux ne pourront admettre, contre lesdits rapports, d'autres nullités que celles résultant de l'omission des formalités prescrites par les dix articles précédents; Vu également l'article 2, même titre de la même loi; -Attendu que si cet article, en prescrivant à ceux qui procèdent aux saisies, de faire conduire au bureau de la douane et autant que les circonstances pourront le permettre, au burean le plus prochain du lieu de l'arrestation, les objets saisis et les voitures, chevaux et bateaux servant au transport, ajouté, qu'ils y rédigeront de suite leur rapport, cette dernière disposition ne doit pas être entendue dans un sens tellement rigoureux, que le rapport ou le procès. verbal doive, à peine de nullité, être rédigé dans tous les cas le jour même de la saisie! Que pour remplir à cet égard le vœu de la loi, il suffit qu'entre le transport des objets saisis, et la rédaction du procès-verbal, il n'y ait eu d'autre intervalle que celui qui a été nécessité par la fin du jour, et l'impossibilité légale de procéder la nuit à la vérification et description des marchandises, et à l'énonciation des diverses circonstances de la saisie; Que cette distinction, conforme au véritable esprit de la loi, reçoit surtout son application, lorsque le procès-verbal constate que le retard reproché aux saisissants, provient du fait même des prévenus; -- Attendu en fait, qu'un procès-verbal non attaqué par les voies légales, constate que le 14 octobre dernier, heure de midi, trois préposés étant près la frontière d'Espagne, dans l'exercice de leurs fonctions, ont vu venir de ce côté et se dirigeant vers la France, huit individus chargés chacun d'un ballot de laine prohibée ; —Qu'interpellés d'abandonner ces paquets aux saisissants, ils les ont assaillis à coups de pierres ; que l'un d'eux armé d'un fusil, et suivi de quatre individus armés de bâtons, a renouvelé l'attaque de manière que les saisissants n'ont pu se rendre maîtres que d'un seul ballot de laine, et le saisir, Qu'au moment où ils se disposaient à le transporter au plus prochain bureau, ils ont été rencontrés par un nouveau rassemblement, dans lequel étaient trois hommes armés chacun d'un fusil; que ces indi

vidus s'étant joints aux fraudeurs, dont un était aussi porteur de la même arme, ont tous ensemble fait feu à plusieurs reprises sur les préposés qui ont riposté jusqu'à l'épuisement de leurs munitions; -Que dans ce combat le préposé Fourcat étant tombé blessé, les deux autres ont été obligés d'abandonner le ballot, pour emporter leur camarade; que poursuivis encore pendant plus d'une demi-heure ils ne sont parvenus au bureau qu'à six heures du soir; — Qu'ayant fait part de tous ces faits au receveur, qui a fait appeler un médecin, pour constater les blessures de Fourcat, vu l'heure tardive, et le mauvais état où se trouvait le préposé Fourcat, tous ensemble ont renvoyé au lendemain 13, huit heures du matin, la rédaction de leur procès-verbal; —Que d'après un renvoi aussi bien motivé, sans que dans l'intervalle les préposés aient diverti à aucun autre acte, le tribunal correctionnel de Lourdes, par son jugement du 17 novembre 1832, avait condamné solidairement et par défaut, François et Dominique MontaubanCampet, Pierre-Lanne Coatriné, Gabriel Soulé, Jacques Agaux, JeanPoulot, Jacques Lac et Jean-Augé-Abesque, en vertu des articles 51 de la loi du 28 avril 1816, et 37 de celle du 21 avril 1818, à deux cents francs, pour la valeur représentative des six ballots saisis qu'ils ont enlevés, à mille francs d'amende, et chacun d'eux à six mois d'emprisonnement, et déclaré le sixième ballot confisqué avec dépens; Mais que, sur l'appel de ce jugement interjeté par les prévenus, le tribunal correctionnel supérieur de Tarbes, sur le motif que des faits et eirconstances relatés dans le procès-verbal, il ne résulte pas suffisamment qu'il y ait eu, de la part des douaniers, impossibilité absolue de rédiger de suite un procès-verbal qui n'a été rédigé quc le lendemain de la reconnaissance du délit, a déclaré nul le procès-verbal dressé le 15 octobre 1832 par les employés des douanes, à la résidence d'Arrens, comme n'ayant pas été rédigé de suite après la reconnaissance du délit, déchargé les prévenus des condamnations contre eux prononcées, et condamné l'administration aux dépens ; Qu'en jugeant ainsi, ledit tribunal de Tarbes a violé le 1er paragraphe de l'article 11, sur la foi due à un procès-verbal qui constate, que les préposés saisissants, retardés dans leur marche et leurs opérations, par le fait des prévenus, obligės d'emporter leur camarade blessé, arrivés enfin au bureau à l'heure de sa clôture légale, ont été, vu l'heure tardive, et le mauvais état où se trouvait le préposé Fourcat, obligés de renvoyer au lendemain la rédaction de leur procès-verbal; -Dit qu'en jugeant en droit, que par ces mots de l'article 2, titre IV, de la loi du 9 floréal, an VII, il faut entendre, quelles que soient les circonstances, le jour même et l'heure même qui suit la découverte et le transport des objets prohibés, le tribunal correctionnel de Tarbes a fait une fausse application du susdit article 2, dont le vœu, dans le sens de la loi, a été parfaitement rempli, violé formellement le paragraphe 2, de l'article 11 de la susdite loi de floréal an VII, en ce qu'il a admis, contre le rapport des préposés, une nullité, qui ne résulte pas des dispositions de cette loi, et viclé par suite, l'article 51 de la loi du 28 avril 1816, dont il avait à faire l'application :

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Par ces motif, Casse.

de cass. - M. Chan.

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Le crime d'attentat à la pudeur, commis ou tenté avec violence par des père et mère sur leurs enfants, est punissable_de_la_peine des travaux forcés à perpétuité, aux termes de l'art. 332, C. P., et non de la peine des travaux forcés à tems, aux termes de l'art. 331.

ARRÊT. (Epoux Tourniant. )

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LA COUR ;... → Statuant ensuite sur le pourvoi formé d'office à l'audience et dans l'intérêt de la loi, aux termes de l'article 342 du Code d'instruction criminelle, par le ministère public pour fausse application de la loi aux faits déclarés constants par le jury; Vu, à cet égard, les articles 331, 332,353 du Code pénal ;—Attendu qu'il suit de la combinaison de ces articles que toutes les fois que les crimes prévus par les articles 331, et 332 ont été commis par les personnes dont il est question dans l'art. 333, ces personnes, à raison de leur qualité, doivent être condamnées à la peine immédiatement supérieure, c'est-à-dire celle des travaux forcés à temps pour le crime d'attentat à la pudeur consommé ou tenté sans violence sur la personne d'un enfant de l'un et de l'autre sexe, âgé de moins de onze ans, prévu par l'article 331, et des travaux forcés à perpétuité, pour les divers cas prévus par l'article 332; Et attendu, en fait, que les accusés François - Guillaume Tourniant et Caroline Dorne, femme Tourniant, avaient été déclarés par le jury coupables, sans circonstances atténuantes, d'avoir, le premier, à diverses reprises dans le courant de 1833, commis des attentats à la pudeur avec violence sur la personne de Sophie Tourniant, sa fille, et la seconde, de s'être rendue complice desdits attentats, en aidant et assistant, avec connaissance, ledit Tourniant dans les faits qui les ont facilités et consommés ; Que des attentats commis avec violence étaient prévus et punis par le paragraphe 3, article 332 du Code pénal, et passibles, à raison de ce que ceux qui se les étaient permis étaient le père et la mère de la jeune victime, de la peine des travaux forcés à perpétuité, prononcée, dans ce cas, par l'article 332 du Code pénal;-Qu'en prononçant, au lieu de cette peine, celle des travaux forcés à temps portée contre les ascendants dans le cas où les attentals à la pudeur commis par eux envers leurs fils ou petit-fils auraient été consommés ou tentés sans violence, la Cour d'assises du Calvados a faussement appliqué ledit article 331, et violé les dispositions combinées des articles 332 et 333 du Code pénal; Par ces motifs, LA COUR, faisant droit aux conclusions du ministère public, casse et annule, l'intérêt de la loi seulement, et pour insuffisante application de la peine, l'arrêt de la Cour d'assises du département du Calvados du 14 août dernier, qui condamne ledit Tourniant et sa femme à vingt et dix ans de travaux forcés.

Du 13 septembre 1833. net-Saint-Marc, rapp.

Cour de Cass.

M. Meyron

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