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que les agitateurs peuvent introduire dans les ames simples qui, faute d'instruction, sont susceptibles de ces funestes impressions? Je ne le crois pas, et je vous signale une voie détournée qui ne manquera pas d'être suivie par ceux auxquels vous fermez les autres. Ne doutez pas que la profession de chanteur sur la voie publique ne soit embrassée par les crieurs, vendeurs et distributeurs, si vous négligez d'en faire mention dans la loi. -M. Persil, rapporteur, a fait observer que l'intention de la commissión avait été de comprendre les chanteurs dans l'art. 1er comme les autres crieurs, et qu'elle avait pensé que cette profession se trouvait désignée par ces mots distributeurs d'écrits. L'amendement a été adopté.

Ces mots : même temporairement, du paragraphe premier indiquent que la pensée du législateur a été d'appliquer indistinctement les dispositions de la loi, non-seulement à ceux qui feront métier de crieur, leur profession habituelle, mais encore à tout individu qui ne s'y livrerait que passagèrement. « L'auteur lui-même, a dit le rapporteur à la Chambre des députés, qui ne se transporterait sur la place publique que pour crier, vendre ou distribuer son propre écrit, devrait se munir d'une autorisation. Le projet l'exige en imposant cette obligation à ceux qui se livreraient temporairement à la profession de crieur : c'était la seule manière d'empêcher d'enfreindre la loi et de remédier aux scandaleux inconvénients qu'avait fait naître la liberté ou plutôt l'abus de laisser tout vendre et tout crier sur la voie publique par toutes sortes de personnes. M. le garde-des-sceaux `a également dit, dans l'exposé des motifs à la Chambre des Pairs: « La nécessité de cette autorisation s'étend à l'exercice même temporaire de cette profession, à laquelle peu de personnes se livrent pendant tout le cours de l'année; il serait trop facile d'éluder la loi s'il suffisait, pour la rendre inapplicable, de changer les instruments que l'on emploie. »

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A côté de ce principe, repris du Code pénal, que nul ne peut exercer, même temporairement, la profession de crieur sans autorisation préalable du pouvoir municipal, la loi nouvelle accorde à ce pouvoir le droit de retirer l'autorisation. «Votre commission, a dit M. Persit, n'a vu aucun motif de repousser cette disposition: elle lui a paru, au contraire, en harmonie avec le principe de la loi. En général, celui qui a le droit d'autoriser, se réserve celui de révoquer son autorisation; autrement le pouvoir municipal conférerait un emploi inamovible, ce que la raison ne peut admettre. Néanmoins quelques esprits, effrayés de cette latitude, ont proposé de lui prescrire des conditions: par exemple, d'exiger qu'il ne pût révoquer l'autorisation donnée à un crieur, que lorsque celui-ci aurait subi une condamnation. Votre commission a dû reconnaître qu'il vaudrait autant rejeter la loi que de lui faire subir cette modification. Toute l'utilité de la loi est dans le droit dé révoquer l'autorisation. En effet, la loi a pour but d'empêcher la vente et la distribution sur la voie publique d'une multitude d'écrits immoraux qu'il y aurait souvent plus de danger à poursuivre qu'à laisser oublier, de pamphlets diffamatoires que les parties intéressées ne veulent pas s'abaisser à dénoncer à la police, de caricatures ignobles qui soulèvent le dégoût: dans tous ces cas, le crieur, une fois autorisé, pourrait défier l'autorité et rester crieur malgré elle, parce qu'il n'y aurait pas contre lui de jugement de condamnation. Il en serait de même quand l'écrit serait légalement couཨཱརཱན། སཾ ནཱམཱུ #?, 8མ་

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pable, et que la justice l'aurait déclaré tel: jamais ou presque jamais le crieur ne serait condamné, parce qu'il faudrait, pour être déclaré complice du délit de l'auteur, qu'il fût démontré que le crieur avait agi sciemment. Or, l'expérience de ces sortes d'affaires nous a prouvé que jamais le jury n'étendait jusque là sa condamnation. >>

Le projet de loi du Gouvernement astreignait les publications de deux feuilles et au-dessous à la formalité du timbre : la Chambre des députés n'a pas voulu confondre une question fiscale avec une question d'ordre public, et nuire à des publications utiles en réprimant des publications dangereuses. Cette partie du projet a été écartée.

11 nous reste à parler des peines portées par le deuxième article de la loi. Le projet du Gouvernement ne portait qu'un emprisonnement de six jours à deux mois: c'est la peine appliquée au même délit par l'art. 290, C. pén. La commission a prévu le cas de récidive, et l'a frappé d'une peine plus forte, celle de deux mois à un an. Le crieur, a dit M. Persil, a été averti par une première condamnation; son obstination le rend plus coupable; et voilà pourquoi il nous a paru mériter une aggravation de peine. » M. OdittonBarrot a fait observer que cette aggravation était trop forte, puisqu'il s'agissait, non d'un délit, mais d'une simple contravention. M. Teste a ajouté que, d'après le droit commun, les peines de la récidive n'ont lieu que lors. que la première peine subie par le prévenu a été de plus d'une année. M. Persit a expliqué les motifs de la commission. « Si elle avait voulu se renfermer dans la règle générale du droit, elle savait très bien qu'il n'y avait pas de récidive, et que par conséquent la peine, quand même les contraventions se seraient multipliées jusqu'à cent fois, ne pourrait varier. Mais elle a examiné l'article de façon à apprécier la moralité de l'action. Elle a pensé que quand un crieur s'était présenté sur la voie publique sans autorisation, et qu'antérieurement il avait été frappé d'une peine quelconque, il était plus repréhensible, puisque ayant été averti par une première punition, il y revenait une seconde fois. Ce raisonnement, en prévoyant les contraventions que les crieurs peuvent commettre, a conduit la commission à cette dernière conclusion que, quand un homme a été condamné deux ou trois fois pour le même fait, il n'y aurait pas justice à lui appliquer une condamnation égale à celui qui s'en serait rendu coupable une seule fois..

M. Auguste Portalis a proposé de donner aux tribunaux correctionnels la faculté d'appliquer l'art. 465, C. P. Cet amendement a été adopté sans opposition. Mais un autre amendement, présenté par M. Auguis, était le renvoi des prévenus devant la Cour d'assises. On disait à l'appui : la loi du 10 décembre 1830 attribue aux Cours d'assises les contraventions commises par les afficheurs; or, ne serait-ce pas une anomalie singulière que d'attribuer maintenant aux tribunaux correctionnels une contravention de la même nature, dont le caractère est absolument identique? M. Laurence a ajouté que la loi du 8 octobre 1830 attribuait à la Cour d'assises tous les délits qui sont commis par un mode quelconque de publication. Cet amendement n'a pas été appuyé.

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. ́9 M. Félix Faure, rapporteur de la commission de la Chambre des pairs, s'est exprimé en ces termes sur ces dispositions pénales : « La Chambre des

députés a augmenté la peine en cas de récidive, mais en même temps elle a autorisé les tribunaux à appliquer l'art. 463, C. P. Votre commission croit ce double amendement digne de votre approbation. Sans doute l'application des peines n'a point pour objet de venger la société : ces vieilles idées ne sont plus de notre siècle. Le ministère public, en France, comprend mieux la hauteur de sa mission : ni la vengeance, ni aucune passion haineuse ne peuvent arriver jusqu'à lui, encore moins jusqu'à la justice. Le but de la peine doit être de corriger, s'il se peut, le délinquant, ou d'empêcher au moins qu'il ne retombe dans la même faute. Mais la peine est utile sur-tout en retenant ceux qui seraient tentés d'imiter le coupable. Pour atteindre ce but, pour que la peine soit efficace, il faut qu'elle soit réelle. Un court séjour dans une prison, bien payé, entouré de tout ce qui peut l'adoucir ou la rendre agréable, ne serait point une peine, mais un encouragement. C'ést donc très sagement qu'en cas de récidive la loi actuelle renferme la menace d'une peine plus forte. Cette disposition, il faut l'espérer, ne sera appliquée que dans des cas fort rares.»

Nous devons encore faire remarquer que, par les dispositions de la loi nouvelle, l'art. 2 de la loi du 10 décembre 1830 est seul abrogé; tous les autres articles de cette loi soat maintenus; « De telle sorte, a dit le rapporteur de la Chambre des députés, qu'à l'avenir, pour avoir le droit de crier, vendre et distribuer un écrit, il faudra commencer par se munir d'une autorisation du pouvoir municipal du lieu où l'on veut exercer, même temporairement, la profession de crieur. Une autorisation délivrée dans une autre municipalité ne suffirait pas. »

Telles sont les observations qui nous ont semblé nécessaires pour expliquer la loi. Il nous paraît que l'analyse fidèle de la discussion que nous venons de présenter suffit complètement pour en faire saisir l'esprit et le véritable sens.

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De ce que les gardes champêtres sont tenus de porter au bras une plaque, comme signe distinctif de leurs fonctions, il ne s'ensuit pas que leurs procès-verbaux doivent, à peine de nullité, énoncer qu'ils étaient revêtus de cette plaque quand ils les ont rédigés.

ARRÊT. (Jacques Roguet.)

LA COUR; Statuant sur le pourvoi en cassation, formé par le procureur du Roi près le tribunal de première instance de Tours, contre le jugement rendu par ce tribunal, jugeant en appel de police correction. nelle, le 14 février 1853, sar l'appel d'un jugement du tribunal de police correctionnelle de Loches, en date des 8 novembre et 20 décembre 1832, ledit appel interjeté par les héritiers Martin, contre Jacques Roguet, prévenu de délit de chasse; Vu le mémoire produit par le procureur du Roi à l'appui du pourvoi, sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen résultant de ce que le jugement attaqué aurait violé l'art. 194 du C. d'inst. crim.,

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en ne condamnant pas aux frais les héritiers Martin, qui avaient succombé dans leur poursuite; -Mais faisant droit sur le moyen résultant de ce que le jugement attaqué aurait commis un excès de pouvoir, en déclarant nul un procès-verbal de garde champêtre parce que ledit procès-verbal n'énonçait pas que ce garde fût revêtu du signe indicatif de ses fonctions, lorsqu'il a ver. balise; Attendu que, si la loi du 6 oct. 1791, dans son article 4, dispose: ⚫ que les gardes champêtres auront, sur le bras, une plaque de métal ou d'é• toffe où seront inscrits ces mots: la loi, le nom de la municipalité, › et celui du garde.., cette loi n'a pas attaché la peine de nullité au défaut de mention, dans les procès-verbaux, que les gardes qui les auraient dressés, étaient revêtus de ces marques distinctives; - Attendu qu'il est de principe que l'officier public n'a besoin d'être revêtu de son costume ou des marques indicatives de ses fonctions, pour procéder régulièrement et légalement, qu'autant qu'il s'agit, soit de contraindre la volonté d'un citoyen, soit de s'introduire dans son domicile, soit enfin, de faire un acte quelconque qui puisse rendre la rébellion inexcusable; mais que, quand il s'agit seulement de constater un fait, il ne faut qu'une chose, c'est que l'officier public ait caractère; — Attendu que le jugement attaqué reconnaît, en fait, que le procès-verbal du garde-champêtre Pinault, en date du 29 septembre 1832, constate le délit de chasse imputé à Jacques Roguet, mais que ce jugement a déclaré nul ledit procès-verbal, et en conséquence a renvoyé le prévenu des fins de la plainte, sur le motif que ce procès-verbal n'énonce pas que le garde qui l'a dressé, fût revêtu de sa plaque de garde, signe distinctif de ses fonctions; Attendu qu'en prononçant ainsi une nullité qui ne résulte ni du texte, ni de l'esprit de l'art.”” 4 de la loi du 6 octobre 1791, le tribunal de première instance de Tours, jugeant en appel de police correctionnelle, a commis un excès de pouvoir et a fait une fausse application de la loi précitée ; - Casse.

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-Du 20 sept. 1833.-Cour de cass.-M. Dehaussy, rapp.
ART. 1285.

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ACCUSATION. — CONDAMNATION ANTERIEURE.

*La chambre des misés en accusation saisie de la connaissance d'un crime, doit, si les charges sont suffisantes, renvoyer l'accusé devant une cour d'assises, alors même qu'il y aurait présomption que cet accusé aurait déjà été condamné aux travaux forcés à perpétuité,

Il n'existe aucun obstacle à ce qu'un condamné pour un crime, soit remis en jugement pour un crime postérieur passible d'une peine inférieure.

ARRÊT. (Guillemette.)

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LA COUR; Sur les moyens de nullité présentés par le procureur général, dans son mémoire ; Attendu qu'en supposant que Jacques-Casimir Guillemette, présentement renvoyé devant la Cour d'assises du département de l'Eure, soit le même, d'après sa propre reconnaissance, et

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la commune renommée de l'arrondissement de Bernay, où les deux instructions ont été faites successivement, que l'individu condamné sous les mêmes nom et prénoms, le 15 mars 1830, aux travaux forcés à perpétuité par la même Cour d'assises, cette identité ne deviendra une vérité légale qu'après qu'elle aura été reconnue et déclarée par la Cour d'assises qui a prononcé cette condamnation dans les formes prescrites par les articles 518,519 et 520 du Code d'instruction criminelle; que cette identité n'ayant pas été légalement constatée, rien ne pouvait, dans toutes les bypothèses, empêcher la continuation des poursuites relativement aux crimes que ledit. Guillemette aurait commis postérieurement à son évasion du bagne, , et par conséquent à sa première condamnation; Que l'article 365 du même Code est sans application à l'espèce, puisqu'il n'est relatif qu'aux crimes ou délits antérieurs à la première condamnation, dont la peine la plus forte absorbe toutes les autres; — Que, pour tout crime ou délit commis postérieurement, il y a lieu nécessairement à poursuites judiciaires, dans l'intérêt de l'accusé, de la vindicte publique et des tiers; De l'accusé parce que s'il n'est pas coupable, son innocence doit être reconnue et déclarée, pour qu'il ne soit pas couvert d'une nouvelle infamie; - De la vindicte publique: pour que la peine soit prononcée en cas de cul pabilité déclarée, dût-elle, dans l'exécution, se confondre avec la pres mière, sauf en matière de crime, l'ignominie, accessoire de l'exposition forcément prononcée, en cas de récidive, ainsi qu'il est prescrit par l'art. 22 du Code pénal, et le recouvrement des frais avancés par l'état ; Des tiers: pour qu'il puisse être statué, en matière de vol, sur les restitutions, et dans tous les cas où il y a partie civile, sur les dommages-intérêts et autres condamnations civiles auxquelles le crime donne lieu; Attendu, qu'en renvoyant Jacques-Casimir Guillemette, ou se disant tel, devant la cour d'assises, la chambre des mises en accusation a voulu laisser, entière et sans préjugé, la question de reconnaissance de l'indentité qui n'était pas de sa compétence; que, dès lors, elle en a observé les règles et n'a violé aucune loi; -- D'après ces motifs, rejette le pourvoi.

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Du 6 septembre 1833. Cour de cass.-M. Brière,

ART. 1286.

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OUTRAGES. INJURES VERBALES.—FONCTIONNAIRE.—COMPÉTENCE. * Lab Quelle est la juridiction qui doit connaître des outrages fails verbalement et publiquement à un fonctionnaire public à raison de ses fonctions?

Cette juridiction est-elle la même, si l'outrage par paroles a été commis, soit envers un fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions, soit envers un juré à raison de sa qualité, soit envers un membre de la Chambre des députés à raison de ses fonctions? (Lois des 8 oct. 1830, 2; 26 maí 1819, 14; 25 mars 1822, 6.)

Première espèce.

Des injures avaient été adressées dans un lieu public, par

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