Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

paroles, comme étant de moindre importance, comprend virtuellement le délit d'outrages par paroles envers un fonctionnaire public, prévu par l'article 6 de la loi du 25 mars 1822; d'où il suit que le cas d'injure verbale relaté dans l'article 14 se trouve placé sous l'exception, en quelque lieu qu'il se reproduise, même sous le nom d'outrage, même dans une loi postérieure ; — Attendu que si, aux termes des dispositions ci-dessus citées, il est incontestable que le délit de diffamation verbale envers le magistrat le plus élevé en dignité, serait justiciable du tribunal de police correctionnelle, il serait absurde de prétendre que le délit d'outrage, moins précis et par conséquent moins grave envers un fonctionnaire du dernier ordre, serait cependant passible de la juridiction de la Cour d'assises; Qu'il ne serait pas moins bizarre d'attribuer à la police correctionnelle la connaissance du délit d'outrage commis par paroles contre un magistrat dans l'exercice de ses fonctions, tandis que le même délit, commis publiquement à l'occasion seulement de ses fonctions, devrait être jugé par la Cour d'assises; Que toute la législation sur la matière proteste contre cette interprétation, puisque le délit d'outrage a été constamment attribué aux tribunaux de police correctionnelle:-1o. En vertu de l'art. 22 du Code pénal, lorsqu'il a été commis envers un magistrat dans l'exercice de ses fonctions, par paroles, tendant à inculper son honneur et sa délicatesse; 2o. En vertu du même article 222, lorsqu'il a été commis de la même manière envers un magistrat à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, mais non publiquement; 3o. En vertu, soit de l'article 223 du Code pénal, soit de l'article 6 de la loi du 25 mars 1822, lorsqu'il a été commis par geste ou de toute autre manière que par paroles; Qu'on ne conçoit pas le motif pour lequel le même délit, commis publiquement par paroles et à l'occasion seulement des fonctions, serait seul renvoyé à la connaissance de la Cour d'assises; — Qu'il est évident que l'article 6 de la loi du 25 mars 1822 n'a pas eu pour objet de créer un délit nouveau, mais seulement d'étendre à un plus grand nombre de personnes, et de géné raliser davantage dans leur définition, soit les articles 13 et suivans de la loi du 17 mai 1819, soit les articles 222 et 223 du Code pénal; — Que c'est ainsi que cet article 6 a été interprété par un arrêt de la Cour de cassation du 28 juillet 8.8; - Que si cet article est venu se confondre, en les généralisant, avec les articles 13 et suivans de la loi du 17 mai 1819, il rentre textuellement dans les dispositions de l'article 44 de la loi du 26 mai, qui ne pouvait pas d'abord le comprendre puisqu'il n'existait pas encore; · Que si au contraire on ne veut voir que le complément des articles 222 et 223 du Code pénal, le délit qu'il prévoit doit être, comme ceux prévus par cet article, renvoyé à la connaissance du tribunal correctionnel; - Requiert qu'il plaise à la Cour de renvoyer Détape et Ansart devant le tribunal de police correctionnelle d'Amiens. Au parquet de la Cour d'Amiens, le 21 février 1834. Signé SouEF, premier avocat général.

ARRÊT.

La Cour; attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que lesdits Détape et Ansart sont suffisamment prévenus: 1o. d'avoir, le 15 juillet 1833, à Herlin-le-Sec (Pas-de-Calais), dans un lieu et une réunion publics, adressé au sieur Boulanger, procureur du roi à Saint

Pol, à raison de ses fonctions et de sa qualité, des expressions outra geantes, et notamment celle de polisson et de lâche; d'avoir ajouté : un procureur du roi comme toi n'est qu'un lâche; » qu'ils lui auraient donné des soufflets s'il ne s'était pas trouvé avec une demoiselle; ce qui constitue le délit d'outrage par paroles à raison des fonctions et de la qualité, prévu par l'article 6 de la loi du 25 mars 1822; 2o. d'avoir, dans les mêmes circonstances, outragé dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire le sieur Lebresne, lieutenant de gendarmerie à Saint-Pol, par paroles tendant à inculper son honneur et sa délicatesse, et le traitant de lâche, bête et cochon, et d'avoir ajouté qu'il se f... de lui comme du procureur du roi; ce qui constitue le délit prévu par l'article 222 du Code pénal, délit connexe au précéder t, en ce qui touche la compétence; Vu les articles 1 et 2 de la loi du 8 octobre 1830, 13 de la loi du 17 mai 1819, et 14 de la loi du 28 mai 1819: Vu aussi l'arrêt de la Cour de cassation du 16 mars 1832, affaire Jean Pierre-Grasset ; · Et attendu que l'article 6 de la loi du 25 mars 1822 n'a eu nullement pour objet de régler la compétence, ni d'effacer de nos lois le délit d'injures verbales et publiques envers des fonctionnaires publics; que loin de là ce délit est virtuellement et nécessairement compris dans les dispositions de cet article, plus générales et plus sévères que celles de la loi du 17 mai 1819; Attendu que l'article 2 de la loi du 8 octobre 1830 se réfère pour le maintien de la juridiction correctionnelle à l'article 14 de la loi du 26 mai 1819, et que ce serait restreindre cette disposition légale que de prétendre qu'une partie de cet article 14 ne doit plus être appliquée, ou, en d'autres termes, que le délit d'injures verbales et publiques envers des fonctionnaires publics, à raison de leurs fonctions ou de leur qualité qu'il comprend, doit être laissé à l'écart; - Attendu qu'il y aurait inconséquence dans le système du législateur s'il avait attribué aux Cours d'assises la connaissance du délit d'injures ou d'outrages par paroles proférées publiquement contre des fonctionnaires publics, à raison de leurs fonctions ou de leur qualité, tandis qu'il aurait maintenu la juridiction correctionnelle, pour le dé lit de diffamation publique envers ces fonctionnaires ; - Attendu que les termes de la loi ne décèlent nullement une pareille iuconséquence; Attendu dès lors que les délits imputés auxdits Détape et Ansart sont de la compétence du tribunal correctionnel; — Renvoie ces deux prévenus devant le tribunal correctionnel d'Amiens, pour y être jugés sur les faits ci-dessus spécifiés.

[ocr errors]

[ocr errors]

Du 22 février 1834. Cour d'Amiens. M. Lanoux, prés.

[blocks in formation]

Observations. Cet arrêt confirme les observations que nous avons émises dans l'art. 1286 de ce journal (suprà, p. 50). La question est d'une haute gravité, et la controverse compte de part et d'autre les autorités les plus imposantes: en faveur de la juridiction du jury, plusieurs arrêts réitérés de la Cour de cassation; en faveur de la juridiction correctionnelle, les décisions simultanées des Cours royales de Paris, d'Orléans, de

Douai et d'Amiens; enfin un arrêt de la Cour de cassation, antérieur, à la vérité, à sa nouvelle jurisprudence, vient attribuer une plus grande force à ce système. Il serait à regretter que l'arrêt que nous venons de rapporter ne fût l'objet d'aucun pourvoi ; dans les circonstances où se présente cette affaire, et aux termes de la loi du 30 juillet 1828, ce pourvoi aurait pour effet de reporter la question à l'examen des chambres réunies de la Cour de cassation, et d'appeler sur sa solution les méditations du législateur lui-même, interprète définitif de la loi.

car,

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small]

En cas de plainte pour abus de blanc seing, la preuve testimoniale est-elle inadmissible, et par conséquent la juridiction correctionnelle incompétente, lorsque l'obligation inscrite au-dessus est supérieure à 150 francs? (407, C. p.)

Le sieur Mongin avait chargé le sieur Fèvre, huissier à Longeau, de procéder à l'arrestation d'un individu qui se trouvait son débiteur. Cet huissier réclama, par une lettre missive, un pouvoir en forme, en alléguant que sans cette pièce il ne pouvait agir. Mongin lui adressa un blanc seing pur et simple; cependant la capture du débiteur ne fut pas opérée, et il paraît que quelque temps après l'huissier aurait inscrit au-dessus de la signature un effet à ordre et à son profit de la somme de 480 fr qu'il négocia à une maison de banque, et dont Mongin a payé le montant au tiers porteur. Poursuites correctionnelles contre Fèvre, sous la prevention d'abus de blanc-seing. Le prévenu a conclu à ce que le tribunal se déclarât incompétent, attendu que le billet excédait 150 fr., et qu'il est de règle qu'on ne peut se procurer, par la voie criminelle, une preuve qui ne serait pas admise pour justifier l'action civile. Le 17 janvier 1834, jugement du tribunal correctionnel de Langres, qui rejette cette fin de non recevoir, attendu qu'il ne s'agit pas de l'abus d'un dépôt, mais bien d'un abus de blanc-seing, objet sans valeur au moment où il est sorti des mains de son auteur, et auquel les règles concernant le dépôt ne sont pas applicables. - Appel.

JUGEMENT.

LE TRIBUNAL; Attendu que tout crime ou délit peut être prouvé par témoins ; Que s'il existe à ce principe général des exceptions dérivant du droit civil, elles doivent être restreintes aux cas déterminés positivement par la loi ; ;Qu'à la vérité, d'après les art. 1341 et 1923, C. civ., la preuve d'une convention ou d'un dépôt ue peut être faite par témoins, lorsqu'il s'agit d'une valeur supérieure à 150 fr., et à moins

qu'il n'y ait un commencement de preuve par écrit; mais que cette règle ne saurait être applicable au délit d'abus de blanc-seing; qu'en effet, la remise d'un blanc-seing n'est qu'un fait matériel qui n'entraîne aucune sorte d'obligation; qu'elle précède nécessairement le délit et en est indépendante; que le blanc-seing est sans valeur aucune en luimême, qu'il n'en acquiert que par l'abus qu'on en fait, c'est à dire par le délit qui donne lieu à la poursuite, et qu'on ne peut admettre que plus l'abus sera considérable, et moins il y aura possibilité d'en administrer la preuve; -Attendu qu'il n'y a entre ce cas et celui de la violation d'un dépôt aucune analogie; qu'en effet, le dépôt suppose une convention préexistante, constituant une question préjudicielle qui ne peut être jugée que conformément aux dispositions de la loi civile; que sa valeur est fixée d'une manière invariable au moment où il s'effectue, et qu'il doit être restitué en nature; qu'au contraire le blanc-seing ne caractérise pas de contrat; qu'il n'a réellement pas de valeur dans l'in stant de sa remise; que son caractère primitif ne saurait être changé par la circonstance que celui qui en abuse y inscrirait frauduleusement une obligation excédant la somme de 150 fr.; qu'enfin, il n'est pas destiné à être rendu en nature;— Attendu, d'un autre côté, que l'abus de blancseing consiste dans une supposition d'acte, une altération de clause, ou enfin dans une frauduleuse addition aux faits que l'acte avait pour objet de constater; qu'ainsi, l'abus de blanc-seing implique nécessairement le dol et la fraude;-Attendu, dès lors, que le fait de la remise d'un blanc-seing, et par suite l'abus qui en aurait été fait, être prouvés par témoins :

Du 1. mars 1834. Ch. cor.

Confirme.

peuvent

Tribunal d'appel de Chaumont.

Observations. Ce jugement confirme d'une manière complète la doctrine que nous avons émise sur ce point dans notre journal (1831, p. 140, et 1833, p. 68). On sait que cette doctrine est contraire à un arrêt de la cour de cassation du 5 mai 1831, dont nous avons critiqué les principes (loc. cit.). Il serait superflu de reproduire nos observations; il nous suffira de rappeler que la Cour de cassation a paru confondre les règles qui régissent le délai de violation de dépôt et celles qui doivent s'appliquer à l'abus de blanc-seing, et que sa jurisprudence aurait pour effet d'assurer une complète impunité aux coupables. On nous annonce qu'un pourvoi a été formé contre le jugement que nous rapportons; nous avons d'autant plus lieu d'espérer que la Cour de cassation reviendra sur sa première jurisprudence, que la question ne lui avait point encore été présentée sous le point de vue nouveau, sous lequel elle a été envisagée par le tribunal de Chaumont.

CONFLIT.

ART. 1300.

RÉGLEMENT DE JUGES. VOL. — RECÉLÉ.

Il n'existe pas de conflit, et par suite il n'y a pas lieu à règlement de juges quand la chambre du conseil a renvoyé un prévenu devant le tribunal correctionnel, sous la prévention de vol simple, et que le tribunal, après l'avoir acquitté sur le chef, reconnaît dans les faits établis par le débat les caractères du crime de recélé et se déclare incompétent.

Le fait de s'être approprié les deniers provenant d'un vol, après avoir été chargé de les rechercher par l'auteur méme du vol, condamné en raison de ce fait à 5 ans de travaux forcés, constitue le crime de recélé et est passible de la même peine.

Wilcam avait été condamné par la cour d'assises de la LoireInférieure à 5 ans de travaux forcés pour vol qualifié. Postérieurement à cette condamnation, il révéla aux sieurs Duvigneau et Emeriau le lieu où il avait enfoui l'argent provenant de ce vol. Ceux-ci firent la recherche, mais au lieu de donner la somme à Wilcam, ils se l'approprièrent. La chambre du conseil du tribunal de Nantes n'a vu dans ce fait qu'un vol simple, et elle a renvoyé les prévenus en police correctionnelle. Mais le tribunal correctionnel, après avoir déclaré que ce chef de prévention n'était pas suffisamment établi, et avoir ordonné la mise en liberté d'Emeriau, a reconnu dans les faits personnels à Duvigneau les caractères de complicité par recélé du vol commis par Wilcam, et elle l'a renvoyé sous mandat de dépôt devant le juge d'instruction. Dans cet état de la procédure, le ministère public a cru apercevoir un conflit de juridiction, et s'est pourvu en règlement de juges.

ARRÊT.

La Cour; —Vu.... statuant sur la demande en règlemens de juges; vu les art. 525 et suiv. C. inst. cr.;-Attendu que si l'ordonnance de la chambre du conseil et le jugement correctionnels susmentionnés, non attaqués en temps de droit, ont acquis l'autorité de la chose jugée, ils ne présentent aucun conflit, puisque le tribunal a statué uniquement sur la prévention dont il était saisi par l'ordonnance de la chambre du conseil; que le fait personnel à Duvigneau seul n'était compris ni dans le réquisitoire du procureur du roi, ni dans le dispositif de l'ordonnance, que dès lors la prévention résulte du jugement correctionnel sans aucune contrariété avec l'ordonnance de la chambre du consel: Déclare qu'il n'y a lieu de statuer par règlement de juges, et que dans l'état, c'est au ministère public de procéder conformément à la loi en exécution de ce chef du jugement relatif à Duvigneau seul; Statuant sur le réquisitoire de l'avocat général pour le procureur général en la Cour; Vu l'art. 542 C. inst. cr, et 408 même Code; - Vu

[ocr errors]
« PreviousContinue »