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CHAPITRE XV.

Résultat des observations et demandes adressées au Gouvernement français.

ES

Les différentes demandes que j'avais faites à notre Gouvernement me furent accordées, à l'exception de celle qui était relative à la quarantaine, pour la durée de laquelle l'on s'en rapporta à la prudence du bureau de santé de Marseille.

Il fut décidé, au sujet du droit de consulat, que je l'acquitterais sur les marchandises de la nature de celles que notre commerce tire du Levant, mais qu'à la fin de l'année j'en présenterais l'état, et que le montant m’en serait remboursé par la chambre de commerce de Marseille (1). Le ministre la pré

(1) Dans la suite elle n'exigea que mes soumissions, et elle me les rendait à la fin de l'année; de sorte que j'ai toujours été affranchi de ce droit. A mon exemple d'autres maisons de Marseille avaient sollicité et obtenu la même exemption.

vint de cet arrangement particulier, adopté en attendant que les circonstances invitassent à en prendre un général pour tous les Russes et tous les Français qui feraient ce

commerce.

L'administration de Toulon eut ordre de me livrer les navires dont je ferais choix, sur le nombre de ceux qui étaient exposés en vente aux enchères, et M. le maréchal de Castries daigna consentir à ce que je payasse le prix qui en serait réglé dans le terme de trois ans, et en munitions navales.

Ce ministre me donna de suite ses ordres pour l'achat de deux chargemens de mâtures et d'un essai en chanvre, et il me fit fournir un crédit sur Amsterdam pour la valeur de

cette commission.

L'article du prêt de 50,000 livres dépendait de M. d'Ormesson, contrôleur-général des finances. M. le maréchal de Castries et M. le comte de Vergennes lui écrivirent pour lui recommander cette demande. Il la présenta avec empressement au dixième comité tenu en présence du Roi, le 4 juillet 1783. Sa Majesté approuva le rapport de ce ministre. Il y rendait compte du résultat de la mission dont le Roi m'avait chargé, de

l'accueil qu'avait obtenu mon projet à Pétersbourg, de la grâce distinguée que fit l'Impératrice à mes Mémoires, en les apostillant de sa main, des avantages que procureraient à notre commerce et à notre marine les relations prêtes à s'ouvrir, par la Mer-Noire, entre les ports russes et les nôtres, et dont il convenait par conséquent de favoriser le début.

Sa Majesté daigna écouter avec bonté la lecture de ce rapport, et examiner avec beaucoup d'attention la carte que j'avais dressée de la navigation intérieure de la Russie et de la Pologne, pour servir de tableau comparatif de la direction actuelle du commerce de ces deux États vers la Baltique, et du cours dont il serait susceptible vers la MerNoire (1).

J'avais présenté, à la même époque, à la compagnie des fermiers-généraux, quelques observations sur l'introduction en France du tabac d'Ukraine par la Mer-Noire; mais ceux de l'Amérique allaient arriver en abondance,

(1) Cette carte, jointe à cet ouvrage, a été refaite par M. Barbié du Bocage, auteur du savant atlas du Voyage du jeune Anacharsis.

et j'entrevis que mes efforts ne pouvaient être agréés qu'autant que la qualité des tabacs que je proposais d'extraire de l'Ukraine satisferait complétement les inspecteurs des fermes par sa supériorité, et que je m'obligerais de livrer ces tabacs dans nos ports à un prix fort inférieur à celui que leur coûtait cette même denrée importée de la Baltique.

Je ne pouvais non plus éprouver un concours réel de la part de la compagnie des vivres de la marine pour les fournitures en bœuf salé d'Ukraine. Elle avait une marche tracée pour ces approvisionnemens, et elle parut ne pouvoir encore s'en écarter.

Ne pouvant donc espérer, avec quelque fondement, de lier des marchés avec ces deux compagnies, malgré le desir que le ministre en avait témoigné aux principaux directeurs, je m'appliquai à connaître de quelle utilité pouvait être la consommation qu'elles faisaient en tabac et en viandes salées. Je reconnus que cette ressource serait d'un grand prix pour mon entreprise, lorsque son activité me permettrait d'en profiter. J'étais trèsempressé de m'éloigner de Paris et de me rendre à Marseille pour y commencer mes expéditions.

Mais avant d'arriver dans cette ville, je

dus m'arrêter à Lyon pour y recueillir des notions sur les produits de ses manufactures, propres pour la Russie et la Pologne, tels que taffetas, satin, damas et autres genres d'étoffes.

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