Page images
PDF
EPUB

wwwm

CHAPITRE XVI.

Arrivée à Marseille. -Achat à Toulon de divers navires. - Leur expédition pour la Mer-Noire:

JE

Jɛ ne pus être rendu à Marseille qu'à la fin de l'année 1783. Peu de jours après, j'allai à Toulon pour y choisir quelques navires dans le nombre de ceux dont le Gouvernement avait ordonné la vente, et qu'il consentait à me céder au prix de l'estimation.

Il m'en fut délivré cinq de différentes grandeurs. Je les fis réparer et armer sur-lechamp. Trois firent route sous le pavillon français pour Constantinople, et y reçurent de M. de Bulhacow, envoyé de l'Impératrice, la permission d'entrer dans la Mer-Noire sous celui de la Russie Les deux autres vinrent l'arborer à Marseille, en vertu des ordres et des patentes adressées à cet effet au consul de Sa Majesté impériale dans ce port.

En signe et hommage de ma reconnais

sance, je donnai à chacun de mes bâtimens le nom d'un ministre de l'Impératrice.

Conformément aux intentions de M. le maréchal de Castries, j'eus toute liberté pour la formation de l'équipage des deux navires que j'armai à Marseille. L'amirauté les y soumit au droit d'ancrage par rapport à leur pavillon étranger.

Ils partirent pour Cherson au mois de janvier 1784, chargés de marchandises de diverses espèces, à l'adresse de l'établissement que j'avais formé dans ce port de la MerNoire.

Ils furent les premiers expédiés de la Méditerranée en droiture pour cette mer, et les premiers qui profitèrent des avantages du traité de commerce conclu à Constantinople entre la Porte et la Russie, le 10 juin 1783 (vieux style), et ratifié le 21 septembre sui

vant.

CHAPITRE XVII.

Traité de commerce entre la Porte et la Russie.

LE traité entre la Porte et la Russie, composé de quatre-vingt-un articles, rendit communs au commerce et à la navigation des Russes dans les États du Grand-Seigneur les priviléges, libertés, immunités et concessions dont y jouissaient les Français et les Anglais, en vertu de leurs capitulations avec la Porte.

L'Impératrice obtint de l'Empire ottoman plusieurs autres concessions et conditions importantes. Elles avaient pour motif le prolongement des frontières des deux Empires, les communications directes et journalières de leurs sujets, les intérêts multipliés d'un commerce naissant, l'extinction d'anciens sujets de mécontentement et de discussion qui avaient plusieurs fois armé les deux puis

sances l'une contre l'autre, la liberté de naviguer dans la Mer-Noire, le passage de cette mer à la Méditerranée, la défense de l'exportation des grains de Constantinople, enfin l'idée supposée avec fondement aux puissances barbaresques de chercher à inquiéter les bâtimens russes.

Le traité statua sur tous ces chefs, et ce fut encore par l'entremise officieuse de M. le comte de Saint-Priest. Il me paraît utile, en raison de la nouveauté et de l'importance de ces dispositions, de les retracer ici sommai

rement.

La Porte permet aux Russes, par ce traité, de commercer et de naviguer librement dans tous ses États sans exception, même sur le Danube et autres fleuves.

Elle consent à ce que les négocians de cette nation vendent leurs denrées à ceux de ses sujets qui se présenteront pour les acheter, sans que ni les uns ni les autres puissent en être empêchés par des compagnies, sociétés ou corporations quelconques, sous prétexte d'avoir un privilége ou une prérogative pour les acheter exclusivement à tous autres.

Il fut convenu que les Russes ne paieraient qu'un seul droit de douane de 3 pour 100, à l'importation comme à l'exportation, con

formément au tarif arrêté d'un commun accord le 5 septembre 1782, et qu'au moyen d'un passe-avant, nommé en turc teskeret, portant que ce droit a été perçu, perçu, les marchandises appartenantes aux Russes, mentionnées dans ce passe-avant, n'en paieraient aucun autre à leur transit et circulation par terre et par mer, dans l'Empire ottoman, y compris Alep et le Caire, et encore la Moldavie et la Valachie, où jusqu'alors on avait exigé divers droits de transit.

Celui de la douane n'est exigible que là où les marchandises sont déchargées pour y être vendues celles qui doivent être réexpédiées ne paient rien.

:

Le commerce russe fut en outre affranchi, par ce traité, des droits de mézeterie et des nouveaux impôts appelés rassabié, reft, bady, jaffacouly.

On déclara que la forme des vaisseaux marchands russes qui passeraient par le canal de Constantinople pour aller de la Mer-Noire à la Méditerranée, ou de la Méditerranée à la Mer-Noire, serait exactement celle des vaisseaux marchands français, anglais et autres nations, depuis la moindre proportion jusqu'à la plus grande; que leur portée serait depuis le plus petit poids jusqu'au plus grand,

« PreviousContinue »