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tués en Asie; dans ceux de Varna et de Gallatz, situés en Europe : elle en a aussi établi dans les villes russes d'Odessa, de Cherson de Théodosie ou Caffa. L'ambassadeur de France à la Porte-Ottomane leur a facilité les moyens de se rendre à leurs résidences. respectives, et d'y être favorablement accueillis.

Avant cette époque, M. Ruffin, chargé des affaires de France, était sorti des SeptTours, et avait obtenu de la Porte, en vertu de notre traité de paix avec elle, le firman du Grand-Seigneur pour le passage à la MerNoire du premier navire de commerce portant pavillon français, qui a demandé à y naviguer.

A l'aspect de ce firman, le cœur de M. Ruffin dut tressaillir de joie ; il n'avait cessé de faire tout ce qui dépendait de lui pour nous voir participer à cette navigation. Cet ancien serviteur de l'État, homme d'un mérite supérieur, dut trouver une récompense digne de lui dans la perspective des avantages que retirerait sa patrie des concessions obte

nues.

Personne n'a été plus à portée que M. Ruffin de les apprécier. Il a résidé dans la Crimée, auprès du khan des Tartares, en qualité de

consul-général de France, et a parcouru, en 1769, avec le fameux khan Krim-Guerai, la nouvelle Servie et la Bessarabie, provinces où les Russes ont fondé Cherson et Odessa.

Qu'il me soit permis d'offrir ici à ce sage, à ce savant, à ce diplomate éclairé, de l'estime duquel je m'honore, l'hommage de ma vive reconnaissance pour les témoignages qu'il n'a cessé de me donner d'un intérêt sincère au succès de mes entreprises dans la MerNoire.

Son portrait est très-fidèlement tracé dans le savant ouvrage publié en 1818 par M. le comte Andréossy, ancien ambassadeur de France à Constantinople. Cet ambassadeur s'exprime de la manière suivante, dans une note, à la page 299 de la table des matières du Voyage à l'embouchure de la Mer

Noire.

« M. Ruffin est le Nestor du Levant. Per» sonne n'a plus médité que ce respectable vieillard, sur la langue des Turcs, sur leurs >> constitutions, leurs mœurs, leurs usages. » Personne n'a mis plus de science, n'a ap

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porté une plus scrupuleuse fidélité à la tra» duction des pièces officielles dans des idiô» mes qui, dérivés de mœurs opposées, ont » si peu d'analogie entre eux. Aussi M. Ruf

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» fin, dans la longue carrière qu'il a parcou» rue, est peut-être le seul chrétien, depuis » l'établissement de l'Empire des Osmanli,

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qui, par sa probité morale, son désintéres» sement, sés lumières, son caractère conciliant, ait conquis. l'estime des Turcs, et se » soit attiré leur confiance et toute l'affection qu'il leur est possible d'accorder à un infi» dèle (un ghiaour).

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L'on a vu que dans le principe, le pavillon russe était le seul auquel la Porte-Ottomane eût permis de naviguer dans la Mer-Noire en passant par le détroit de Constantinople; qu'elle s'était relâchée insensiblement de sa répugnance à accorder cette facilité aux autres nations toutes y participent à présent. Le tableau de celles qui s'y sont introduites en 1817, tracé dans le chapitre sur Odessa, donne à connaître approximativement le nombre de bâtimens de chaque nation qui ont fréquenté la Mer-Noire à cette époque. Il variera probablement tous les ans, en proportion du commerce qu'elles exploiteront respectivement. Les Français, attendu la proximité de leurs ports et leurs relations habituelles avec les Échelles du Levant, paraissent devoir désormais prendre plus de part qu'aucune autre à cette navigation.

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POUR que le commerce et la navigation de la Mer-Noire pussent prendre promptement un grand essor, il fallait que toute l'Europe fût en paix : elle a enfin joui de ce bonheur vers le milieu de 1802.

Chaque nation, chaque particulier chercha immédiatement à réparer ses pertes, suite inévitable d'une guerre aussi longue que dé

sastreuse.

De toutes les spéculations auxquelles se livrèrent les armateurs et les négocians des différens ports de la Méditerranée, aucune ne les a séduits davantage que le commerce de la Mer-Noire, dont la navigation venait d'être ouverte à la plupart des pavillons.

Pendant la guerre, tous les greniers à blé s'étaient vidés; il n'y avait plus, comme autrefois en Italie, des dépôts de cette denrée

en réserve. Loin d'avoir du superflu, ces contrées tiraient des grains de l'étranger. Les ports de la Mer-Noire étant regardés à juste titre comme des marchés féconds en cette denrée, ce fut particulièrement vers ces ports que furent faites de toutes parts, en 1803, des expéditions de navires pour y aller prendre du blé.

Plusieurs de ces bâtimens transportèrent des marchandises et des espèces en plus ou moins grande quantité; mais la majeure partie s'y rendit sur son lest, parce que les affréteurs craignaient de ne pas y trouver un débouché prompt et avantageux des objets qu'ils y enverraient. Ces négocians préférèrent de faire les fonds pour leurs achats par l'intermédiaire des banquiers de Moscou, de Pétersbourg, de Hambourg, de Varsovie, de Vienne, de Brodi et de Constantinople.

Tel fut le mouvement prodigieux qu'imprimèrent à ce commerce sa nouveauté et la concurrence excitée par la rareté des grains comme par l'espoir de grands profits, que, suivant des tableaux authentiques, le nombre des bâtimens de diverses nations, entrés pendant l'année 1803 dans les ports de la MerNoire, s'est élevé à neuf cents, dont cinq cents à Odessa, deux cents à Taganrok, et

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