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avait mis en vigueur en Belgique quelques-unes des règles qui régissaient à cette époque la bienfaisance en France: "Les municipalités, disait l'art. 1er de cet arrêté, sont chargées de l'administration et distribution des secours, tant de ceux accordés par les représentants du peuple que de ceux qui proviennent des revenus des tables des pauvres, hospices et autres établissements de bienfaisance existant dans leur commune. En conséquence, les administrateurs de ces établissements, en continuant de les administrer comme ci-devant, seront entièrement subordonnés à leur municipalité; ils agiront comme étant ses commissaires, sous sa direction et surveillance et lui rendront leurs comptes... „ L'arrêté invitait, en outre, les municipalités et leurs commissaires à appliquer les secours d'après les bases prescrites par la loi des 28 juin-8 juillet 1793, et en résumait en conséquence les principales dispositions (1). Aucun arrêté des représentants du peuple ni aucune loi n'ordonnèrent la publication en Belgique de la loi du 23 messidor an II (2) sur la vente des biens des établissements charitables (3). Le patrimoine de la bienfaisance en Belgique échappa ainsi à la spoliation générale dont avait été victime celui des anciens départements. Il n'en subit pas moins, sous le régime français, de très grandes pertes par suite de la confiscation des biens ecclésiastiques, de la suppression des dimes et des octrois, etc. Les ruines accumulées par la guerre, la dépréciation des assignats contribuèrent encore à augmenter la détresse des établissements hospitaliers." Malgré l'économie la plus sévère, écrivaient le 17 fructidor an IV les administrateurs des hospices de Mons (4), on est forcé de retrancher pour ainsi dire le nécessaire aux enfants; nous ne leur donnons plus de beurre, et ils n'ont plus qu'une seule portion de viande chaque semaine (celle d'une fondation) de sorte qu'ils ne vivent que d'un peu de soupe et de tartines bien maigres.,,

(1) Voir plus haut, no 573.

(2) Voir plus haut, no 577.

(3) En fait, il y eut quelques rares aliénations. Cfr. DE BROUCKERE et TIELEMANS, Répertoire cité, t. VIII, p. 321.

(4) LALLEMAND, ouv. cité, p. 197. - Voir quelques autres témoignages relatifs à la Belgique, ibid., pp. 190, 191, 198, 199, 201, 208, 209, 223, 232, 236, 241, 363, 376, etc.

Aussitôt les lois relatives aux hospices et aux bureaux de bienfaisance votées, le Directoire en ordonna la mise à exécution immédiate dans les départements réunis. Le système de bienfaisance publique qui avait été établi dans le pays sous le régime de la conquête, n'y fonctionna donc pas longtemps.

I. LES HOSPICES CIVILS

581. ORGANISAtion des hospiCES CIVILS. D'après la loi du 16 vendémiaire an V, il devait être créé dans la circonscription de chaque municipalité (1), une commission administrative des hospices civils, composée de cinq membres résidant dans la circonscription. En principe, cette commission devait être nommée par l'administration municipale, Mais dans les communes où il y avait plus d'une administration municipale, c'est-à-dire dans les quatre grandes villes de la Répu blique (2), c'était l'administration départementale qui procédait à cette nomination. Une loi du 16 messidor an VII subordonna d'ailleurs les nominations faites par les municipalités à l'approbation de l'administration du département, et, en cas de conflit, à celle du ministre de l'intérieur. Ce fonctionnaire avait également à approuver les nominations faites directement par les administrations de département pour la composition des commissions des hospices des quatre grandes villes. Les mêmes principes régissaient la destitution des membres des commissions des hospices.

D'après la loi du 16 messidor encore, les commissions d'hospices devaient se renouveler aux mêmes époques et dans la même proportion que les administrations municipales, c'est-à-dire chaque année par moitié ou par la partie la plus approximative de la moitié (3). Ce renouvellement avait lieu dans la première décade après l'installation des administrations centrales, installation qui se faisait le 15 floréal (4).

(1) Voir plus haut, nos 254 et 393. (2) Voir plus haut, no 254.

(3) Voir plus haut, no 257.

(4) Loi du 28 germinal an V.

582. ATTRIBUTIONS DES COMMISSIONS DES HOSPICES CIVILS. "Les commissions, disait l'art. 6 de la loi du 16 messidor an VII, sont exclusivement chargées de la gestion des biens, de l'administration intérieure, de l'administration et du renvoi des indigents.,, Des biens appartenant en propre aux établis sements charitables et des administrateurs autonomes mais contrôlés telle est en deux mots l'essence du système nouveau. Un orateur aux Anciens en faisait ressortir les avantages sur la combinaison que la Révolution avait préférée au début et en vertu de laquelle la mission des administrateurs des pauvres se bornait à la répartition et distribution des fonds alloués par le budget de l'Etat. " Assurez aux hôpitaux, disait cet orateur (1), des revenus fixes; aussitôt tous les avantages d'économie qui se rencontraient dans l'administration disparaîtront. Alors les administrateurs ne s'attacheront plus à économiser, ils ne se feront plus un mérite de pourvoir par une administration sage à de grandes dépenses avec de petits moyens ; ils ne s'occuperont que de tirer avantage du trésor public, afin d'assurer à leurs établissements des secours plus abondants. Alors on tentera inutilement d'intéresser la bienfaisance particulière à accroître les moyens de ces hospices, parce que chacun se dira: je fournis à ces dépenses par mes contributions, puisque c'est le trésor public qui entretient l'établissement.

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583. Gestion des biens. La loi du 16 messidor an VII traçait aux commissions certaines règles précises qu'elles avaient à suivre dans la gestion des propriétés des hospices. Les biens-fonds devaient, au vœu de l'art. 15, être affermés publiquement, aux enchères, pour un terme de trois, six ou neuf années (2). Quant aux maisons non affectées à l'exploitation des biens ruraux, elles pouvaient être affermées par baux à longues années ou à vie, et aux enchères en séance publique, après affiches „.

Les hospices civils constituaient des personnes civiles,

(1) Moniteur du 22 vendémiaire relatant la séance du 16, cité d'après LALLEMAND, ouv. cité, p. 84.

(2) Cfr. le décret des 28 octobre-5 novembre 1790.

capables de posséder des biens immeubles." Les hospices civils, disait l'art. 5 de la loi du 16 vendémiaire an V, sont conservés dans la jouissance de leurs biens et des rentes et des redevances qui leur sont dues par le trésor public ou par des particuliers., La même loi décidait, en outre, que les biens des hospices qui avaient été aliénés en vertu de la loi du 23 messidor an II (1) leur seraient remplacés en biens nationaux du même produit.

La loi du 23 messidor an II n'ayant pas été publiée en Belgique, le patrimoine des pauvres en notre pays avait échappé, comme nous l'avons dit (2), à la spoliation qui avait frappé celui de l'ancienne France. Mais le principe de la sécularisation vit notablement étendre, sous le Directoire, le champ de ses applications en notre pays. Après la suppression des ordres religieux par les lois du 15 fructidor an IV et du 5 frimaire an VI (3), l'administration des établis sements hospitaliers qui en dépendaient et leurs biens pas. sèrent dans les attributions des commissions d'hospices civils.

Les commissions d'hospices ne pouvaient vendre, échanger, ni acquérir d'immeubles sans une loi spéciale (4).

584. Administration intérieure. Admission et renvoi des indigents. Les lois traçaient aux commissions des hospices certaines règles au point de vue de la gestion de leurs biens, et leur imposaient certaines obligations précises dans l'administration intérieure des établissements confiés à leurs soins. "Tout marché pour fournitures d'aliments ou autres objets nécessaires aux hospices civils, disait l'art. 8 de la loi du 16 messidor an VII, sera adjugé au rabais, dans une séance publique de la commission, en présence de la majorité des membres, après affiches mises un mois avant la publication, à peine de nullité. „

(1) Voir plus haut, nos 577 et 580.

(2) Voir plus haut, no 580.

(3) Voir plus haut, no 453.

(4) Cfr. l'arrêté du Directoire du 3 vendémiaire an VII.

La même loi chargeait le Directoire d'introduire dans les hospices des travaux convenables à l'âge et aux infirmités de ceux qui y sont entretenus, (art. 13). Un tiers du produit du travail devait être remis aux hospitalisés, " soit chaque décadi, soit à la sortie, suivant les règlements qui seraient faits par les commissions administratives.

585. Enfants abandonnés. Les lois et les règlements émanés des autorités supérieures se préoccupaient surtout de régler minutieusement les devoirs des hospices à l'égard des enfants abandonnés. “Les enfants abandonnés nouvellement nés, disait l'art. 1er d'une loi du 27 frimaire an V(1), seront reçus gratuitement dans tous les hospices civils. Le trésor national, ajoutait l'art. 2, fournira à la dépense de ceux qui seront portés dans des hospices qui n'ont pas de fonds affectés à cet objet., La mise à la charge de l'État des enfants abandonnés avait déjà été décrétée sous la Constituante par la loi des 29 novembre 10 décembre 1790, et la loi des 28 juin8 juillet 1793 (2) avait ordonné qu'ils seraient désormais exclusivement désignés sous la dénomination d'orphelins. La loi du 27 frimaire an V chargeait le Directoire de faire un règle. ment sur la manière dont les enfants abandonnés devaient être élevés et instruits. Il s'en acquitta par un arrêté du 30 ventose an V qui prescrivait aux commissions d'hospices" de placer les enfants abandonnés chez des nourrices ou autres habitants des campagnes et de pourvoir, en attendant, à tous leurs besoins. Lorsque les orphelins de la patrie avaient atteint l'âge de douze ans révolus, ils devaient être, par les soins des mêmes commissions, mis en apprentissage" chez des cultivateurs, artistes ou manufacturiers, ou embarqués comme mousses, s'ils manifestaient le désir de s'attacher au service maritime.

586. FONCTIONNEMENT DES COMMISSIONS ADMINISTRATIVES. Gratuité. Présidence. Employés. Service hospitalier. Les

(1) Voir aussi l'arrêté d'exécution du Directoire en date du 30 ven. tôse an V, et, dans la Coll. HAYEZ, t. VII, p. 272, un règlement de l'administration de la Dyle.

(2) Voir plus haut, no 573.

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